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30 mars 2013 6 30 /03 /mars /2013 23:46

 

 

Les champions trotteurs de légende en France

 

10 - Les années 1980 (Lurabo)

 

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Lurabo

 

 

 

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Lurabo

 

 

 

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Lurabo

 

 

 

Lurabo

 

Lurabo pulvérisait dans le Prix de France (1’13’’7) le record déjà fantastique de la jument américaine Classical Way (1’14’’2) et établissait un nouveau record du monde dans l’Elite Rennen de Gelsenkirchen, 1’14’’8 sur 2 500 mètres. Grâce à son fils Abo Volo, il devenait le second gagnant d’un Prix d’Amérique à avoir engendré un autre gagnant de Prix d’Amérique, le premier étant Passeport, père d’Amazone B et de Nébuleuse V.

Lurabo était par sa mère le « neveu » du grand Bellino II et défendait comme lui les couleurs (casaque rouge, écharpe blanche, toque grise) de son éleveur et propriétaire, Monsieur Maurice Macheret.

Son père, Ura, était le meilleur fils, au haras comme en courses, de la merveilleuse Gélinotte. Il avait donc de qui tenir d’autant qu’Ura était aussi le père d’Iris de Vandel, de Noble Atout, de Reine du Corta, et le grand-père d’Ourasi.

 

Son entraîneur Jean-Lou Peupion s’était fait connaître dans sa jeunesse comme lad attitré de la fameuse Une de Mai, avant de devenir l’un des meilleurs de sa profession, puisque outre Lurabo, Major de Brion, Minou du Donjon (cheval aux couleurs de son épouse), Nodesso, Ogorek, Pythagoras, Quarisso, Sébrazac comptaient aussi parmi ses élèves.

 

Cheval tardif, Lurabo avait mis un certain temps avant de rejoindre l’élite de sa génération. Avant lui, on avait eu le temps d’applaudir Lotus du Trèfle (Critérium des Jeunes), Larabello (Critérium des 3 ans), Lançon (Prix de Sélection, Critérium des 4 ans et Critérium Continental), L’Alezan, Lévorino (Prix du Fer d’Or à Helsinki), et un certain Lutin d’Isigny (Prix René Ballière 1982 aux dépens d’Idéal du Gazeau).

Sans parler des champions montés (Lacan, Loustic de la Tour, Le Loir).

Lurabo devait s’épanouir complètement durant l’année 1982, gagnant le Prix Jockey, le Critérium des 5 ans devant Lutin d’Isigny, et en fin d’année la Clôture du (premier) Grand National du Trot et le Prix Marcel Laurent.

Mais Lutin d’Isigny, qu’il avait battu dans le Critérium des 5 ans, prenait sa revanche sur lui dans le Prix de l’Etoile 1982.

Déjà second d’Idéal du Gazeau dans le Prix d’Amérique 1983 (précédant Lutin d’Isigny), il entrait dans la légende durant l’année 1984 en gagnant coup sur coup : le Prix de Bourgogne (décembre 1983), le Prix de Belgique, le Prix d’Amérique (en 1’17’’ devant Jorky), le Prix de France (record 1’13’’7), le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur, le Prix de l’Atlantique à Enghien, le Grand Prix du Sud-Ouest, l’Elite Rennen (record mondial 1’14’’4). Une série victorieuse demeurée unique dans les annales du trotting. Malheureusement, s’étant esquinté les suspenseurs, il tomba boiteux et ne put se montrer à la hauteur de sa réputation dans le Championnat du Monde à New York, où il dut céder le pas à son grand rival Lutin d’Isigny.

Ce magnifique alezan très athlétique courait tout en puissance, prenant le train à sa charge pour imposer son rythme et user ses adversaires ainsi. Mais il était lui-même victime de sa propre force, de sa façon de trotter, et ne devait jamais s'en remettre vraiment, ayant contracté de grosses molettes suite à une entorse mal soignée avec de la cortisone.

Courant diminué et plus ou moins blessé le Prix d’Amérique 1985, après avoir fait illusion un instant pour la victoire, il dut se contenter d’une cinquième place derrière Lutin d’Isigny, Mon Tourbillon, Minou du Donjon, Major de Brion, et ne parvenait pas à se qualifier pour le Prix d’Amérique 1986, que remportait Ourasi, notre nouvelle gloire nationale.

Il se distingua dès lors au haras, en produisant les bons vainqueurs Vaflosa Gédé, Vroum d’Or, et surtout le champion Abo Volo, qui offrait à Albert Viel son premier Prix d’Amérique quelques jours avant sa mort, et permettait à Lurabo de devenir, après Passeport, le deuxième gagnant de Prix d’Amérique, père d’un autre gagnant de Prix d’Amérique.

 

Lurabo était né le 15 avril 1977 chez Maurice Macheret, à Vetraz-Monthoux près d’Annemasse, au-dessus du lac Léman en Haute-Savoie, de l’union d’Ura, grand étalon, et de Quelle Boum C, une sœur du fameux Bellino II.

Lurabo est un magnifique alezan, avec une belle tête, soulignée d’une liste. C’est à sa beauté qu’il doit son nom : (Lurabo étant la contraction de L’Ura Beau), ainsi que deux titres de premier au concours de modèle.

 

Maurice Macheret appartient à ce clan très fermé des petits éleveurs heureux pour avoir fait naître un Bellino II et un peu moins de 10 ans après, un Lurabo.

Comme son glorieux aîné, Lurabo va donc bénéficier de l’air sain de la montagne, des longues promenades sur les versants alpins et se consolider ainsi un physique d’athlète particulièrement puissant, avec René Sala, l’homme qui fut déjà le soigneur du grand Bellino. Il ne semble pas pressé de se faire un nom sur les champs de courses.

A l’âge de 2 ans, il ne court que deux fois à Lyon, sans succès.

A 3 ans, il remporte une petite victoire en nocturne à Vincennes, dans le Prix Draco (2 750 mètres), en 1’21’’6, mené par Jean-René Gougeon, qui accepte de le piloter par amitié envers Maurice Macheret et en souvenir de Bellino II.

 

En 1981, à 4 ans, il préfère s’illustrer dans les prix de série plutôt que de suivre la voie classique. Il gagne ainsi le Prix de Gontaud (groupe B 2750 m) en 1’21’’4, le Prix Aristulus (2 750 m) en 1’20’’8, le Prix Peitho (2 150 m) en 1’20’’7, le 18 mai à Vincennes. Mais il est disqualifié dans le Prix de l’Artois (2 300 m) le 2 juillet.

Il renoue avec la victoire le 20 août dans le Prix de Savoie (2 600 m), un prix de circonstance, évoquant la Savoie en hommage à Bellino II ou à lui-même, qu’il remporte en 1’20’’6, avec autorité devant Lys de Brion, Lornado et Larchamp. Puis dans le Prix de Vimoutiers (2 625 mètres), il porte son record à 1’19’’4, toujours mené par Jean-René Gougeon, pour battre Lorival, Lys de Brion, Lino Mabon…

 

C’est en 1982, à 5 ans, qu’il va s’épanouir pleinement pour gravir les échelons, qui feront de lui le chef de file de sa génération, une génération particulièrement riche en sujets de valeur. Le 28 janvier dans le Prix de Verdun (2 250 m), Lurabo franchit à nouveau en vainqueur le poteau d’arrivée en 1’18’’8 devant Liane, Laeticia.

D’autres succès vont suivre avec le Prix de Vizille (2 250 m) le 25 février, établi en 1’17’’1, devant Lory, le Prix Jean Cabrol (2 250 m) le 22 avril, qu’il remporte en 1’17’’6, de justesse devant L’Agathe, que mène Jean-René Gougeon pour le comte Pierre de Montesson.

Ces trois derniers succès de Lurabo sont aussi à mettre à l’actif de son nouvel entraîneur, le jeune et prometteur Jean-Lou Peupion, qui vient de s’installer à Grosbois, et de « Minou » (Michel-Marcel) Gougeon, le frère  de Jean-René, qui a ainsi pris le relais de son aîné, pour mener à la victoire celui qui sera l’un des chevaux de sa vie après Fandango et Toscan.

Suite à ce nouveau succès de Lurabo, on parle sérieusement de lui faire disputer le classique Critérium des 5 ans, qui représente le couronnement des meilleurs trotteurs de cet âge à l’attelage. Mais le Grand National du Trot, sorte de tour de France des trotteurs, une innovation de l’année 1982, intéresse aussi l’entourage de Lurabo. Pour cela il s’en va tenter sa chance à Toulouse, à l’occasion du Grand Prix de Toulouse (2 700 m), disputé le 19 mai, qu’il remporte en 1’19’’4, devant King Black 1’19’’5.

Ce premier succès de Lurabo dans le Grand National du Trot en appelle un autre cette fois sur l’hippodrome de Lyon-Parilly avec le Grand Prix de Trot de Lyon (2 700 m), le dimanche 6 juin 1982. Lutin d’Isigny et Jézabel d’Ouches sont aussi présents mais avec la lourde tâche de rendre 25 mètres à Lurabo et à King Black, le meneur de ce nouveau challenge, qui a remporté la première étape disputée à Marseille, le Grand Prix de Printemps (2 700 m), sur l’hippodrome du Parc Borely.

King Black, une fois de plus, va contester la victoire à Lurabo, jusqu’au poteau d’arrivée, qu’ils franchissent pratiquement dans la même battue pour faire afficher chacun une réduction kilométrique de 1’18’’2, alors que Lutin d’Isigny est un bon troisième en 1’17’’9.

Ce succès est suivi d’un autre acquis en 1’18’’6 dans le Prix Gudrun (2 150 m) le 23 juillet en nocturne à Vincennes, avant que Lurabo ne s’attaque enfin aux meilleurs de sa génération, à l’occasion du Prix Jockey (2 250 m), une épreuve continentale et une étape importante sur la voie qui mène au classique Critérium des 5 ans. Ils sont huit au départ et L’Alezan, en raison de ses titres, les plus flatteurs, est logiquement le favori. Mais il est tout de suite contré par Lurabo, qui ne lui permet jamais de prendre le commandement des opérations, pour s’imposer très facilement en 1’17’’6. L’Alezan conserve aussi facilement la deuxième place, mais Le Loir, au galop, concède la troisième à Lévorino, devant Lory.

Lurabo a franchi un cap lui ouvrant la voie du Critérium des 5 ans et peut-être aussi celle du Prix d’Amérique.

Les quatre victoires consécutives de Lurabo, dont l’une (la dernière) acquise dans le Prix Jockey, incitent les parieurs à en faire le favori du Critérium des 5 ans, devant Lançon, absent des pistes depuis six semaines, Lutin d’Isigny, régulier mais plus souvent placé que gagnant, et Larabello, doué mais fantasque et imprévisible.

 

Le Critérium des 5 ans (3 000 m) se dispute le samedi 25 août 1982.

Enervé par les présentations et le défilé qui précèdent les courses de cette importance, Larabello part à la faute, puis, une fois remis dans les bonnes allures, se met à tirer comme un fou pour rejoindre Lurabo, qui selon son habitude a pris aussitôt tête et corde afin d’imprimer son rythme. Viennent ensuite Lévorino, Lutin d’Isigny, Lançon, Lindsey, La Bourrasque. L’allure est très rapide et Lévorino cède le premier dans le haut de la montée, tandis que Lurabo, Larabello, Lutin d’Isigny abordent dans cet ordre le dernier tournant. Dans la dernière ligne droite, la supériorité de Lurabo se fait éclatante, alors que Larabello, puis Lançon cèdent à leur tour. Lutin d’Isigny s’accroche, et Lindsey, auteur d’une belle remontée après quelques difficultés pour trouver le passage, vient se mêler à la lutte.

Jusqu’au bout, Lurabo contient aisément l’attaque de Lutin d’Isigny, puis celle de Lindsey, pour remporter, dans le temps excellent de 1’19’’, sa première victoire classique.

Le samedi suivant, Lurabo remet son prestige en jeu à l’occasion du classique Prix de l’Etoile (2 275 m). Mon Tourbillon, le champion de la génération des « 4 ans » est le seul « M » à oser relever le défi de cinq « 5 ans » à départ égal. Mais il part au galop, s’éliminant de lui-même. Lurabo aussi est parti sur une faute, ce qui est malheureusement son point faible. Il a concédé un terrain appréciable à Lutin d’Isigny, son plus dangereux rival, bien décidé à prendre sa revanche. Dès lors, Lurabo entame une poursuite infernale derrière Larabello et Lutin d’Isigny, les plus véloces au départ. L’allure n’est pas trop rapide, ce qui permet à Lurabo de rejoindre les échappés en haut de la montée, à l’endroit précis où justement Larabello commence à céder. Lurabo parvient à la hauteur de Lutin d’Isigny et les deux rivaux se livrent bientôt un duel acharné tout le long de la ligne droite. Et il faut avoir recours à la photo d’arrivée pour les départager. On sait ainsi que Lutin d’Isigny l’a emporté d’extrême justesse devant son grand rival. Tous les deux font afficher une réduction de 1’16’’4.

Le 1er octobre 1982 permet de revoir ensemble Lurabo et Lutin d’Isigny dans le Prix Eunomia (2 150 m), que Lutin d’Isigny remporte à nouveau devant son rival mal parti.

 

Le jeudi 9 décembre 1982 est jour de fête, à Vincennes, où les provinces ont rendez-vous pour célébrer la Clôture du (premier) Grand National du Trot (2 600 m).

C’est l’occasion de revoir ensemble Lurabo et Lutin d’Isigny, et d’assister aussi au couronnement du nouveau roi, King Black, premier vainqueur de ce Grand National du Trot. Ces trois héros du jour ne vont d’ailleurs pas décevoir leurs nombreux admirateurs, en s’octroyant les trois premières places de cette épreuve, qui a été choisie comme support du quarté. A mi-ligne droite, Lurabo impérial se détache de Lutin d’Isigny pour s’envoler vers la gloire. King Black, plus teigneux que jamais, est venu tout à la fin ravir la deuxième place au courageux Lutin d’Isigny. Jarnibleu est un bon quatrième, devant Jeannette d’Udon, excellente elle aussi. Lindsey se classe ensuite devant Jarnaud, Joyau du Marais, Kapulco, Jézabel d’Ouches. Larabello lui a perdu la cinquième place après enquête.

Lurabo a fait afficher 1’18’’3, King Black et Lutin d’Isigny 1’18’’4, Jarnibleu 1’18’’5, Jeannette d’Udon et Lindsey 1’18’’7, Jarnaud 1’18’’8.

 

Lurabo va conclure l’année1982 avec le Prix Marcel Laurent (2 250 m), le lundi 27 décembre, qu’il remporte en 1’17’’5 devant le jeune Mon Tourbillon.

Une deuxième place derrière Katinka dans le Prix de Belgique (2 600 m), dernière répétition avant l’épreuve suprême, le dimanche 16 janvier 1983, va faire de Lurabo l’un des chevaux les plus en vue dans ce Prix d’Amérique 1983, un des plus aptes à faire trembler la couronne d’Idéal du Gazeau, le champion quelque peu vieillissant.

En l’absence de Jorky, de celle  d’Hymour, le tenant du titre, de celle de Jiosco, son dauphin plus surpris que battu dans l’édition 1982, Lurabo et Lutin d’Isigny semblent les plus aptes à fournir l’opposition au favori Idéal du Gazeau dans ce Prix d’Amérique 1983.

Mais on peut parler aussi des chances du jeune Mon Tourbillon seul « 5 ans » français au départ, de celles de Lançon lui aussi retrouvé, ou encore de King Black, le héros du premier Grand National du Trot, qui vient de renouer avec la victoire à Cagnes-sur-Mer, dans le Prix de la Côte d’Azur.

Idéal du Gazeau lui-même, sixième du Prix de Bourgogne, septième du Prix de Belgique, maintenant âgé de 9 ans, n’est pas un favori très convaincant. Serait-ce la fin d’un règne ? Il est vrai qu’avec deux titres de champion du monde et déjà une victoire dans le Prix d’Amérique 1981, il n’a plus grand-chose à prouver, mais peut-être a-t-il décidé de sortir par la grande porte.

Ianthin s’élance en tête, dans un style parfait, comme il aime à le faire. Il est suivi de très près par Lurabo, alors qu’on dénote les fautes au départ d’Ino Ludois, de Kapulco et du cheval suédois Al Joe. Pour passer devant les tribunes, Ianthin et Lurabo mènent devant Igor du Beauvoisin, Idéal du Gazeau, Katinka, Lutin d’Isigny, Kaiser Trot, King Black. Les positions sont sensiblement les mêmes en plaine.

Dans la montée, Lurabo passe seul en tête, légèrement détaché d’Ianthin, que suivent Lutin d’Isigny, Katinka, Idéal du Gazeau, Kaiser Trot et Khali de Vrie. Lurabo commence à imposer une cadence plutôt rapide. Les choses sérieuses ont commencé.

Lurabo mène toujours à vive allure dans le dernier tournant, mais il est surveillé de très près par Lutin d’Isigny, Khali de Vrie, La Bourrasque, Katinka et Lançon, qui progressent dans cet ordre. Idéal du Gazeau commence à se rapprocher à l’extérieur. La foule s’agite, l’encourage. La tension monte dans les tribunes. Lurabo est toujours en tête, bien calé à la lice, à la sortie du dernier virage, et à l’entrée de la ligne d’arrivée. Les clameurs se font entendre. Idéal a rejoint Lurabo en tête. Il le passe, irrésistiblement. Lurabo doit s’incliner. Idéal du Gazeau est toujours le plus fort. Pas si sûr. Lurabo lui résiste, le pousse dans ses derniers retranchements. Idéal cafouille, se trompe quelque peu, esquisse un, deux, trois petits changements de jambes. Mais le poteau est franchi : Idéal a gagné.

Pas encore sûr. La sirène retentit. On annonce une enquête sur les allures du petit cheval noir dans la dernière phase du combat, alors que les jeux sont faits.

L’angoisse se lit sur les visages de certains spectateurs. D’autres vieux teigneux réclament l’élimination d’Idéal du Gazeau. Le cheval de Pierre-Jean Morin n’est-il plus si populaire ? Derrière Idéal du Gazeau premier (pour l’instant), se sont classés Lurabo, brillant deuxième pour son premier Prix d’Amérique, Lutin d’Isigny, troisième irréprochable lui aussi. Puis viennent King Black, le héros du Grand National, Lançon, honorable cinquième, Katinka, Mon Tourbillon, Snack Bar, Kaprius (le vainqueur du « Cornulier »), Keystone Patriot. Iantin, un peu décevant, a faibli sur la fin.

Ino Ludois et Khali de Vrie ont été disqualifiés. Mais on attend la décision des juges en ce qui concerne Idéal du Gazeau. Va-t-il être maintenu ? Sera-t-il lui aussi éliminé ? La décision est difficile à prendre. Tout Vincennes est dans l’expectative.

Finalement, l’arrivée est maintenue ; le dimanche 30 janvier 1983, Idéal du Gazeau a gagné le Prix d’Amérique pour la deuxième fois.

Eugène Lefèvre a expliqué la « faute » de son cheval dans la ligne droite : en voulant allez trop vite, alors qu’il n’était pas encore bien droit, il est parti sur la mauvaise jambe, sans commettre l’erreur répréhensible, car il a pu le remettre à temps dans les bonnes allures. Mais on peut se demander si un cheval moins populaire n’aurait pas été disqualifié en pareil cas.

 

Lurabo fait l’impasse sur le Prix de France (2 100 m), disputé par temps de pluie le dimanche 6 février 1983.

On le revoit au départ du Prix de Paris (3 150 m) le dimanche 13 février, dans lequel il partage la position de favori avec Katinka. Il s’y montre décevant, laissant la victoire à sa rivale, qui s’impose en 1’18’’5, devant Lutin d’Isigny, Lançon, Kaiser Trot…

 

Lurabo tente sa chance huit jours plus tard dans le classique Prix de Sélection (2 275 m), une course-poursuite, dans laquelle les « 5 ans », Mon Tourbillon, Minou du Donjon, et les « 6 ans », Lurabo, Lapito, Lutin d’Isigny et Lançon ont 50 mètres à rendre aux « 4 ans » Nursingo et Nuit d’Azeray. Tâche que Lapito a su mener à bien le 12 février dans le Prix des Centaures (2 275 m), l’équivalent au trot monté de ce Prix de Sélection. Alors que Lurabo, à la faute, est disqualifié, Mon Tourbillon s’impose de justesse en 1’16’’3, devant Lutin d’Isigny (1’16’’4), Minou du Donjon (1’16’’5), Lançon (1’16’’6), Nuit d’Azeray, Nursingo. Lapito, lui aussi fautif, est également éliminé.

 

Cheval compliqué, fautif, Lurabo a bien déçu en fin de meeting. Il est mis au repos quelque temps, avant de reprendre l’entraînement, et de repartir enfin sur de nouvelles bases.

Il fait sa rentrée à Bordeaux, dans le Grand Prix du Sud-Ouest (2 450 m) le 24 avril et se contente d’une honnête quatrième place derrière Ianthin, Idéal du Gazeau et Spice Island.

Lurabo retrouve ses grands rivaux Mon Tourbillon et Lutin d’Isigny le 31 juillet 1983 dans le Prix d’Europe (2 800 m), couronnement du festival d’été à Enghien.

Derrière Lutin d’Isigny 1’18’’9, Ejnar Vogt 1’19’’6, Mon Tourbillon 1’19’’, Lurabo est un honorable quatrième en 1’19’’2, vu qu’il n’a pas couru depuis le 24 avril 1983.

 

Lurabo renoue enfin avec la victoire le dimanche 14 août 1983 à Enghien, dans le Prix de Buenos-Aires (4 000 m), qui le voit rendre 75 mètres aux chevaux du premier poteau pour s’imposer en 1’20’’4 sur 4 075 mètres, devant Le Loir (1’20’’5), Kasai Bill (1’22’’1), Casino Hedevang (1’21’’6), Khali de Vrie (1’20’’7), Kidy (1’21’’8), Jealon, Kapulco…

C’est à Lisieux que Lurabo signe sa deuxième victoire de l’année, dans le Prix Roger Céran-Maillard (2 725 m), qu’il remporte en 1’20’’7, devant Luron de la Tour, Kémilla, La Bourrasque, Kimako, Meutac.

 

Le Prix du Bourbonnais (2 600 m), disputé le samedi 17 décembre 1983, a retenu un plateau de rêve puisque Jorky, Lurabo, Mon Tourbillon, Minou du Donjon, Khali de Vrie, Lançon, King Black, Kaiser Trot et quelques autres sont au départ. Il ne manque que Katinka et Lutin d’Isigny, qui souffre d’une blessure. Il est le grand absent de ce Prix du Bourbonnais, dans lequel Jorky, le plus riche, est le seul à rendre 25 mètres.

Khali de Vrie, déjà lauréate du Prix de Bretagne, profite de sa grande forme pour s’imposer à nouveau devant un inattendu L’Alezan, qui lui conteste la victoire jusqu’au poteau qu’ils franchissent dans la même battue, faisant tous les deux afficher la même réduction kilométrique de 1’18’’5.

Lurabo (1’18’’6) est troisième tout près, devant Minou du Donjon et Mon Tourbillon.

 

Avec Lurabo et Minou du Donjon, Jean-Lou Peupion semble posséder deux bons atouts pour le prochain Prix d’Amérique, comme va le confirmer le Prix de Bourgogne (2 250 mètres) disputé le samedi 31 décembre, le dernier jour de l’année 1983. Ce Prix de Bourgogne, troisième épreuve préparatoire au Prix d’Amérique, a retenu 11 participants, parmi lesquels Lurabo fait figure de favori devant Khali de Vrie, Mon Tourbillon et un L’Alezan tout récemment revenu à son meilleur niveau. Mais on peut aussi se méfier de Katinka et de Lançon. Kagelo, Lapito et Larabello complètent le lot avec La Bourrasque et Madone.

Larabello est le mieux parti pour imposer d’emblée un rythme très rapide. Lurabo le rejoint en plaine pour accélérer dans la montée et prendre résolument le commandement dans le dernier virage. Il entame seul en tête la dernière ligne droite, ralentissant de lui-même, car il doit être surpris de se retrouver tout seul en cet endroit. Mais Michel-Marcel Gougeon lui fait comprendre que la course n’est pas finie, et Lurabo repart aussitôt pour franchir en vainqueur le poteau d’arrivée. Loin derrière, ses rivaux se battent désormais pour les places. Larabello, pour conserver la seconde, résiste héroïquement au retour offensif de Mon Tourbillon, qui est donc un bon troisième devant Khali de Vrie, Lançon, Katinka, L’Alezan, Madone, La Bourrasque et Kagelo. Lapito fautif a été disqualifié.

Sans forcer son talent, Lurabo, irrésistible et impérial, a trotté sur le pied de 1’15’’9.

Ce jour-là, il entre dans une autre dimension et ne va pas tarder d’être qualifié « d’Extra-terrestre ». On parle déjà de lui comme le favori du Prix d’Amérique 1984. Mais il n’a pas fini de nous étonner.

 

Le 15 janvier 1984, jour du Prix de Belgique, est un jour de vérité pour les 20 chevaux au départ de cette grande course, dernière répétition avant le Prix d’Amérique, à l’exception des trotteurs polyvalents, qui visent aussi le « Cornulier ».

En raison de leurs gains élevés, les six plus riches : Jorky, Diamond Exchange, Snack Bar, Lutin d’Isigny, Kaiser Trot et Mon Tourbillon ont 25 mètres à rendre à leurs quatorze adversaires, dont Lurabo, le grandissime favori, qui s’annonce plus fort que jamais, son compagnon d’entraînement Minou du Donjon, lui aussi en grande forme, la belle Katinka. Micado C, le vainqueur du Grand Prix des Nations (2 100 m) à Milan et plus récemment du Prix Gaetano Turilli (2 100 m) à Rome a aussi ses chances, tout comme Khali de Vrie, Larabello et L’Alezan. A noter également, la présence de Speedy Magnus, le vainqueur du Grand Prix de Finlande (éliminatoire et finale sur 1 600 mètres).

Au second poteau, Lutin d’Isigny semble le plus apte à jouer un grand rôle dans cette course. Mais Lurabo est déjà pour tous le cheval à battre ! Il ne doit pas décevoir ses nombreux admirateurs. Jean-Lou Peupion a renforcé son tandem Lurabo – Minou du Donjon, en leur associant un troisième trotteur, d’origine suédoise celui-là, Lass Quick. Le résultat va dépasser ses espérances.

Le beau temps est aussi au rendez-vous en ce dimanche 17 janvier, à huit jours du Prix de Cornulier, et à quinze jours du Prix d’Amérique, le 29 janvier. Après 500 mètres de course, Lurabo est déjà en tête, pour imprimer un train très soutenu. Spice Island est là aussi, suivi de Lançon côté corde, Katinka, Minou du Donjon et Lass Quick.

Larabello, gêné au départ, se rapproche maintenant après avoir perdu beaucoup de terrain. Micado C, Snack Bar et Diamond Exchange sont partis à la faute. Diamond Exchange, retardé, est contraint de trotter tout le parcours cinquante mètres environ derrière les autres. Dans la descente, Mon Tourbillon et Lutin d’Isigny se sont heurtés quelque peu.

Lutin reste sage, mais Mon Tourbillon furieux fait un violent écart sur la droite et finalement éclate, gênant ainsi Snack Bar ayant refait beaucoup de terrain après sa faute. Sa croupière s’étant cassée, il se désunit à nouveau. Jorky est lui aussi malmené à cet instant.

Au poteau du dernier kilomètre, Larabello, qui a besoin d’argent pour être maintenu au départ du Prix d’Amérique, s’efforce d’accompagner Lurabo en tête. Tous deux mènent de front devant Spice Island et Minou du Donjon.

Dans le dernier tournant, Minou du Donjon rejoint Lurabo en tête.

A ce moment-là, Micado C lance une attaque foudroyante tout à l’extérieur.

Un moment, à mi-ligne droite, Minou du Donjon tente de prendre le meilleur sur Lurabo. Mais le fils d’Ura, afin de lui montrer qui est le chef, redémarre de plus bel pour s’envoler impérial et franchir en vainqueur le poteau d’arrivée.

Minou du Donjon se contente donc d’une magnifique deuxième place, et Lass Quick vient parachever le triomphe des « Peupion » en prenant la troisième.

Lurabo a affiché tant de supériorité, tant de désinvolture, qu’il devient à coup sûr le grandissime favori du Prix d’Amérique, le dimanche 29 janvier.

Larabello se classe quatrième devant Lançon, Lutin d’Isigny (le premier du second poteau), L’Alezan, Micado C et Speedy Magnus.

Lurabo fait afficher 1’18’’, Minou du Donjon 1’18’’1, Lass Quick 1’18’’3, Larabello 1’18’’4, Lançon 1’18’’5, Lutin d’Isigny 1’17’’8 (le meilleur temps), L’Alezan 1’18’’7.

On vient déjà d’avoir un avant-goût de ce que sera le prochain Prix d’Amérique.

 

Et puis vient le jour « J », le dimanche 29 janvier 1984, jour de ce 64e Prix d’Amérique, alors que Kaiser Trot, le champion incontestable des trotteurs montés, vient de remporter son troisième Prix de Cornulier le dimanche précédent.

Autre surprise de taille, la présence sur la cendrée de Vincennes d’Idéal du Gazeau revenu spécialement de Suède pour ouvrir le défilé du Prix d’Amérique en compagnie de son fidèle Eugène Lefèvre, « Gégène » pour les intimes ou les inconditionnels d’Idéal.

L’ovation que leur réserve le public de Vincennes donne chaud au cœur, et Lurabo va avoir fort à faire pour battre Idéal à l’applaudimètre.

Idéal du Gazeau, resplendissant comme un astre, sous la conduite d’Eugène Lefèvre, emmène donc derrière lui les 18 concurrents de ce Prix d’Amérique 1984.

Jacques Pauc dans Paris-Turf a choisi Lurabo, Minou du Donjon, puis Lutin d’Isigny, Jorky et Mon Tourbillon comme favoris.

Ces noms déjà illustres reviennent bien sûr dans les pronostics de presque toute la presse hippique. Mais avec Lurabo et Minou du Donjon, Jean-Lou Peupion semble posséder les deux atouts majeurs pour remporter ce Prix d’Amérique. Et cela est presque incroyable pour un jeune entraîneur de 38 ans à peine confirmé.

Derrière ces deux-là, les noms de Lutin d’Isigny (meilleur temps dans le Prix de Belgique), Mon Tourbillon (co-leader de sa génération avec Minou du Donjon), Jorky (le cheval le plus riche et le plus titré du lot) s’imposent d’eux-mêmes.

Le traditionnel défilé nous permet donc d’admirer pour la dernière fois sans doute le populaire Idéal du Gazeau, chaudement applaudi par la foule, tout comme les héros du jour : Lurabo, Minou du Donjon, Mon Tourbillon, Kaiser Trot, triple vainqueur du « Cornulier », Lutin d’Isigny, et enfin Jorky, tous les « chevaux vedettes » de ce Prix d’Amérique.

Après les canters indispensables pour détendre ou échauffer ces magnifiques athlètes que sont les trotteurs, les dix-huit concurrents rejoignent l’aire du départ au signal convenu.

Lurabo, merveilleusement affûté, est le mieux parti aux élastiques, se retrouvant vite en tête pour imposer son rythme. Larabello essaie de lui voler la politesse en partant comme une fusée, mais il se trompe dans ses allures. Diamond Exchange, comme on s’y attendait, part lui aussi à la faute. Il est d’ailleurs imité par Keystone Pursuit, qui gêne Minou du Donjon, le grand malchanceux de ce Prix d’Amérique.

Jorky s’intéresse très tôt au débat, en prenant rapidement une bonne place. On s’aperçoit alors qu’il est dans un grand jour et prêt à jouer son rôle de champion dans ce Prix d’Amérique. Bientôt tous les principaux acteurs se retrouvent en tête pour défendre chèrement leur chance. Lurabo mène, bien calé à la corde, en compagnie de Lutin d’Isigny venu se mêler à la lutte. Jorky trotte à l’extérieur. Kémilla, beaucoup plus inattendue, est là aussi, avec L’Alezan, Spice Island derrière Lurabo et Mon Tourbillon, tous assez près les uns des autres.

A ce moment-là, Larabello surgit dont ne sait où, tel un diable, à une vitesse à peine croyable. Le trotteur américain Diamond Exchange cherche aussi à se rapprocher en forçant l’allure sans pour autant égaler le partenaire de Philippe Allaire. Quant à Snack Bar, il est en plein galop dans la descente. Larabello rejoint par l’aile extérieure le groupe de tête que forment Lurabo, Lutin d’Isigny et Jorky. Léopold Verroken ralentit un peu Jorky dans la montée, juste avant le virage, sans doute pour lui éviter de se retrouver nez au vent. Mais certains ont dit que c’est là qu’il perdit la course.

A cet instant, il y a un remous dans le peloton et Mon Tourbillon gêne Minou du Donjon, qui concède encore du terrain.

En tête, Lurabo ne mollit pas mais au contraire conduit le bal à un rythme d’enfer. Il durcit la course au maximum, ce qui est son rôle, pour lui la meilleure façon de l’emporter.

Lutin d’Isigny est encore là, mais cette fois avec Larabello sur son flanc. Kaiser Trot est maintenant en quatrième épaisseur, à la place de Jorky. Spice Island trotte à la corde en compagnie de Lass Quick. Mon Tourbillon vient de s’échapper du peloton. Kémilla reste en bonne place, juste derrière les premiers qu’elle s’applique à suivre de son mieux.

C’est à l’intersection des pistes que Kaiser Trot commet l’irréparable, la faute que l’on attendait depuis le début. Obligé de s’écarter, il ouvre ainsi la voie à Jorky, qui s’élance à l’attaque de Lurabo d’autant mieux que Larabello commence à céder.

Mon Tourbillon tente de suivre Jorky.

Voyant Jorky se rapprocher dangereusement de lui, Michel Gougeon relance Lurabo, qui repart au quart de tour. En fait, c’est Jorky que « Minou » Gougeon redoute le plus ; l’ayant vu fondre sur lui dans un style impressionnant, il a eu un moment de frayeur (avouera-t-il par la suite). Mais Lurabo a encore des réserves, assez pour résister à toutes les attaques d’un Jorky extraordinaire de courage. Les deux champions nous offrent un magnifique spectacle, un duel au sommet que l’on n’est pas prêt d’oublier.

Pourtant, Jorky ne parvient pas réellement à inquiéter Lurabo, qui franchit en vainqueur le poteau d’arrivée de ce magnifique Prix d’Amérique, en ce dimanche 29 janvier 1984.

A un peu moins d’une longueur de Lurabo, à sa croupe ou sa hanche, Jorky s’octroie une héroïque deuxième place. Et la surprise vient de Kémilla, déjà troisième du « Cornulier » une semaine plus tôt, qui contre Mon Tourbillon pour la troisième place.

Viennent ensuite Lutin d’Isigny ayant faibli sur la fin, Minou du Donjon bien revenu après ses malheurs, Keystone Pursuit, Lançon, L’Alezan, Lass Quick…

Le temps excellent de 1’17’’, que fait afficher Lurabo (deuxième meilleur temps de la course après les 1’16’’9 de Grandpré, égalé par Hymour et Jiosco) en dit long sur la valeur des deux premiers et de ce que fut leur duel, d’autant que Jorky est crédité de 1’17’’1.

Nul doute qu’ils auraient pulvérisé le record si la piste avait été moins collante.

 

Pour Michel-Marcel « Minou » Gougeon, en tant que driver, c’est la deuxième victoire dans le Prix d’Amérique, après celle de Toscan en 1970, comme il devait le rappeler lui-même après la course, tout en avouant qu’il y croyait plus avec Lurabo qu’avec Toscan.

 

Le dimanche 5 février 1984, Lurabo remet courageusement son prestige en jeu dans le Prix de France (2 100 m) avec départ à l’autostart, ce qui ne manque pas d’intéresser les spécialistes comme Micado C, l’un des grands absents du Prix d’Amérique, Diamond Exchange ou Speedy Magnus également écarté du Prix d’Amérique en vue du Prix de France.

Le défilé vaut une incroyable ovation à Lurabo, mais aussi à Jorky, qui ne fut jamais aussi acclamé qu’en ce jour où il se produit à Vincennes pour la dernière fois, ce que tous ignorent à ce moment-là.

Lurabo et Jorky, les deux héros du Prix d’Amérique sont d’ailleurs les favoris de ce Prix de France 1984. Mais on se méfie aussi du trotteur suédois maintenant entraîné en France, Micado C, dernier vainqueur du Grand Prix des Nations à Milan, qui vient de renouer avec la victoire dans le Prix de la Marne (2 250 m), le 2 février, et de Minou du Donjon, le grand malchanceux du Prix d’Amérique, dont on attend la légitime revanche.

Un record à battre, celui de Classical Way établi en 1’14’’2 dans le Prix de France 1981, mais égalé depuis par Ianthin dans le Prix René Ballière 1983. Or, vu ce que Lurabo et Jorky viennent de faire dans le Prix d’Amérique, 1’17’’ et 1’17’’1, sous la pluie et sur une piste devenue collante, il y a fort à parier que ce record sera battu si le temps s’y prête.

Autres chevaux à surveiller, Mon Tourbillon, le tenant du titre, un pur sprinteur, et Lutin d’Isigny, toujours à la recherche d’une victoire.

Les places derrière l’autostart ont avantagé Lurabo, au contraire de Jorky mal placé à l’extérieur et surtout Minou du Donjon obligé de partir en deuxième ligne.

Il y a 15 partants au départ de ce Prix de France 1984, le lot étant complété par Snack Bar, dont on se méfie également, Keystone Pursuit, Kémilla, Ludo du Chignon, Major de Brion, Casino Hedevang, et Khali de Vrie.

Et, en ce dimanche 5 février 1984, le beau temps est revenu sur Vincennes !

Lurabo, nullement éprouvé par sa performance du dimanche précédent, est dans un état resplendissant ; tout est donc propice à un exploit incroyable, celui que le fils d’Ura nous réserve, un exploit qui fera date dans les annales du trotting…

Le célèbre coach-driver américain Billy Haughton fait prendre à Diamond Exchange un départ volant derrière l’autostart. Il va ainsi grandement contribuer à ce record fantastique de 1’13’’7, que signe Lurabo en franchissant le poteau en vainqueur.

Le trotteur américain dévale la descente en moins de 1’12’’ pour prendre aussitôt la tête, suivi de Lutin d’Isigny. Ce départ ultra rapide surprend Lurabo, qui doit changer de jambes 200 mètres après la ligne du départ. Jorky est aussi pris de vitesse et ne peut éviter Ludo du Chignon à la faute devant lui, ce qui provoque l’éclatement du pneu gauche de son sulky.

Lurabo trotte en plaine en sixième position, ce qui incite « Minou » Gougeon à réagir. Diamond Exchange sprinte toujours en tête à une allure folle, comme il est habitué à le faire sur le « mile ». Il est suivi à distance par Lutin d’Isigny, Speedy Magnus, Minou du Donjon et Micado C. Tout doit changer au poteau du dernier kilomètre, où l’on voit Speedy Magnus éclater, Micado C se rapprocher de la tête, et Lurabo enfin se dégager de la corde pour entamer son effort à l’extérieur.

A l’issue d’une folle échappée, qu’Ulf Nordin ne semble pas pouvoir contrôler, le champion de Suède Micado C rejoint maintenant Diamond Exchange en tête. Les Suédois s’extasient. Plus loin à deux longueurs environ, viennent Speedy Magnus, remis au trot le long de la corde, Lutin d’Isigny et Lurabo ensemble, courant de front. On va vivre alors un instant magique. Lurabo part à l’assaut du Prix de France en 37’’5 sur les 500 mètres de la montée. Il arrive ainsi à une vitesse prodigieuse pour dépasser en trombe Diamond Exchange sur ses fins, puis Micado C lui aussi quasiment asphyxié. Lurabo entre dans la Légende du Trot. Ce jour-là il est vraiment le meilleur du monde. Lorsqu’il double Micado C, il affiche une telle facilité qu’on croit que le trotteur suédois s’est arrêté. Il trotte les 500 derniers mètres en 38’’ pour s’en aller tout seul, très loin des autres, cueillir une incroyable victoire, une victoire fantastique.

Le record de Classical Way (1’14’’2) est pulvérisé ! Lurabo remporte ce Prix de France 1984 dans la réduction incroyable de 1’13’’7 !

Minou du Donjon (deuxième) et Mon Tourbillon (troisième) sont les plus aptes à poursuivre Lurabo dans la ligne d’arrivée, s’octroyant ainsi les places d’honneur, loin derrière le vainqueur inapprochable, mais devant l’audacieux Micado C, que suivent les courageux Lutin d’Isigny et Jorky (blessé), devant Snack Bar, Casino Hedevang, l’incompréhensible Diamond Exchange, le suédois Speedy Magnus, et les quatre autres concurrents n’ayant joué aucun rôle dans cette course.

Ludo du Chignon lui a été disqualifié.

Si Lurabo s’octroie ainsi le record fantastique de 1’13’’7, Minou du Donjon est crédité de 1’14’’, Mon Tourbillon 1’14’’1, Micado C 1’14’’5, Lutin d’Isigny 1’14’’5, Jorky 1’14’’6, Snack Bar 1’14’’6.

 

Ce jour-là, Lurabo vient donc d’écrire une page de la Légende du Trot et rejoint Gélinotte, Jamin, Bellino II, Eléazar et Hymour pour avoir réalisé comme eux la même année le doublé Prix d’AmériquePrix de France. Il entre ainsi dans les annales du trotting.

Mais il faut bien sûr associer à son triomphe son pilote renommé Michel-Marcel dit « Minou » Gougeon et son entraîneur Jean-Lou Peupion, dont la réussite est à peine croyable, surtout si l’on considère que le second de ce Prix de France 1984 est aussi un « Peupion », le très beau Minou du Donjon, fils de Quioco et de Géribia, elle-même fille de Kerjacques.

Ce Minou du Donjon est donc très bien né.

Lurabo en démonstration à Argentan

Lurabo en démonstration à Argentan

Jean-Lou Peupion, du temps où il s'occupait d'Une de Mai

Jean-Lou Peupion, du temps où il s'occupait d'Une de Mai

Michel-Marcel dit « Minou » Gougeon a conduit Lurabo à la victoire dans le Prix d’Amérique 1984 et le Prix de France 1984

Michel-Marcel dit « Minou » Gougeon a conduit Lurabo à la victoire dans le Prix d’Amérique 1984 et le Prix de France 1984

Lurabo et Michel-Marcel dit « Minou » Gougeon

Lurabo et Michel-Marcel dit « Minou » Gougeon

Lurabo pendant le défilé du Prix d’Amérique 1984

Lurabo pendant le défilé du Prix d’Amérique 1984

Lurabo le jour de son triomphe dans le Prix d’Amérique 1984

Lurabo le jour de son triomphe dans le Prix d’Amérique 1984

Jorky, la classe à l’état pur, a été le seul à soutenir la comparaison avec Lurabo dans le Prix d’Amérique 1984

Jorky, la classe à l’état pur, a été le seul à soutenir la comparaison avec Lurabo dans le Prix d’Amérique 1984

Lurabo remporte le Prix d'Amérique 1984 devant Jorky

Lutin d’Isigny, le grand rival de Lurabo

Lutin d’Isigny, le grand rival de Lurabo

Lançon et Ali Hawas

Lançon et Ali Hawas

Landoas et Bertrand de Folleville

Landoas et Bertrand de Folleville

Lapito et Joël Hallais

Lapito et Joël Hallais

Larabello et Philippe Allaire

Larabello et Philippe Allaire

Larabello et Philippe Allaire

Larabello et Philippe Allaire

Lévorino

Lévorino

Minou du Donjon et Olle Goop

Minou du Donjon et Olle Goop

Mon Tourbillon et Jean-Pierre Viel

Mon Tourbillon et Jean-Pierre Viel

Lurabo retrouve Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon à Cagnes-sur-Mer, le dimanche 11 mars 1984 pour le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m), dont l’intérêt se trouve un peu diminué par la défection de Micado C quelques jours auparavant.

Ils sont tout de même neuf chevaux à prétendre au titre de « roi de la vitesse » dans ce Critérium édition 1984, malgré l’absence du tenant du titre Spice Island, ayant fait afficher une réduction de 1’14’’5 l’an dernier, donc toute proche du record toujours détenu par Hadol du Vivier en 1’14’’1 depuis sa victoire devant Idéal du Gazeau en 1980.

Ejnar Vogt, Karendada, Keystone Patriot, Monquier, Nevele Fever et Speedy Magnus complètent le lot des neuf participants. En raison de leurs récents exploits et de leur vitesse de base maintenant bien connue, Lurabo et Mon Tourbillon sont les favoris devant Lutin d’Isigny et Ejnar Vogt.

Après le défilé et les hymnes nationaux des divers participants, Keystone Patriot s’est montré le plus rapide au départ derrière l’autostart, pour s’emparer de la tête et de la corde. Mais Karengada elle est partie au galop, imitée d’ailleurs par Mon Tourbillon, le second favori. Ejnar Vogt lui a choisi de s’élancer en retrait et assez lentement. Au passage devant les tribunes, Keystone Patriot emmène Lutin d’Isigny, Lurabo et Monquier.

Dans le tournant dit « du Loup », Lurabo, un peu ralenti par Lutin d’Isigny, commet une petite faute, heureusement vite réprimée par Michel « Minou » Gougeon.

Dans la ligne d’en face, celle du bord de mer, Lurabo s’est assuré un net avantage sur Lutin d’Isigny, Speedy Magnus, Keystone Patriot, Mon Tourbillon bien revenu, Ejnar Vogt et Monquier. Dès la sortie du tournant final, Lurabo impérial fait figure de gagnant, malgré les très belles fins de course de Lutin d’Isigny et de Mon Tourbillon.

Lurabo a déjà lâché tous ses adversaires dans la ligne droite à huit cents mètres du but, créant alors l’un de ces moments magiques dont il nous a maintenant habitués. Sans forcer son talent, il franchit en vainqueur la ligne d’arrivée en égalant le deuxième meilleur temps de l’épreuve, 1’14’’5, déjà réalisé par Spice Island l’an dernier, laissant à Hadol du Vivier son record historique de 1’14’’1.

A distance, Lutin d’Isigny s’octroie en 1’14’’7, une bonne deuxième place devant Mon Tourbillon 1’14’’8, lui aussi excellent, et loin devant Monquier 1’15’’5, Ejnar Vogt 1’15’’5. Comme Jamin, Bellino II et Hymour, Lurabo réalise donc le triplé légendaire : Prix d’AmériquePrix de FranceGrand Critérium de Vitesse la même année. (Eléazar l’a fait aussi mais pas la même année). Lurabo n’a pourtant pas fini de nous étonner.

 

Le samedi 31 mars 1984, toute la France doit gagner le tiercé couru à Enghien dans le Prix de l’Atlantique (2 150 m), puisque Lurabo, Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon, nos trois meilleurs trotteurs du moment sont au départ. La seule question est de savoir qui de Lutin d’Isigny ou de Mon Tourbillon sera deuxième.

Il n’y a d’ailleurs que 13 partants au départ de ce Prix de l’Atlantique choisi comme support du pari tiercé.

Paris-Turf a choisi Lurabo, Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon dans cet ordre à ce Prix de l’Atlantique d’Enghien, ce qui correspond à l’arrivée du récent Critérium de Vitesse.

Lurabo doit cependant justifier sa position de grandissime favori à 3/10.

Or, c’est ce jour-là qu’il devient l’idole des turfistes parisiens, qui l’ont d’abord boudé au moment du défilé où il est à peine plus applaudi que Mon Tourbillon, et violemment sifflé durant les canters lorsqu’il commet une très longue incartade, qui en vérité ne présage rien de bon. C’est pire au départ quand Lurabo, à la faute, est carrément arrêté par son driver.

Il vient alors de perdre une bonne cinquantaine de mètres sur tous ses rivaux.

L’exploit qu’il va réaliser ensuite doit lui valoir une ovation inoubliable de la part de ces mêmes parieurs, qui l’ont tant sifflé et hué un peu avant.

Ils sont donc treize à se ranger derrière les ailes de l’autostart aux environs de 16 heures, alors que toute la France, par le biais de la télévision, ou sur les tribunes d’Enghien a les yeux braqués sur eux, ou plutôt sur Lurabo, facilement reconnaissable à sa morphologie à la fois puissante et harmonieuse, avec sa belle tête à liste blanche et sa crinière taillée, sa robe alezane et les couleurs rouge et blanche de Bellino II.

Son numéro 9 à l’extérieur l’empêche de se rapprocher de l’autostart, qui démarre sèchement. Quand les autres chevaux partent à pleine vitesse dans la ligne d’en face, juste avant le départ, il commence à se braquer ; il va commettre l’irréparable. Il est au galop.

La stupeur s’empare des tribunes, et de tous ceux qui assistent à ce qui ressemble alors à un désastre.

Mais la course a commencé, avec Lutin d’Isigny en tête au côté d’Hickory Almahurst et de Mon Tourbillon. Ils détalent à pleine vitesse, pendant que Lurabo, toujours à la faute, recule, recule, recule encore… Les sifflets retentissent de partout, ainsi que les cris des turfistes, qui crient : « Distancez-le ! Distancez-le ! »

 

Lapito lui aussi fautif est seul à l’accompagner dans cet enfer. Il va perdre cette course sans même avoir couru. Quel gâchis ! Non, ce n’est pas possible, on ne peut pas accepter ça.

Alors, patiemment, maître de lui, « Minou » Gougeon arrête son cheval, le remet au trot et le relance enfin dans la bagarre alors qu’il a bien perdu cinquante mètres sur les chevaux de tête ; et quels chevaux : Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon !

Heureusement, l’allure s’est ralentie au passage devant les tribunes et Lurabo commence déjà à regagner du terrain. Jean-Paul André, le driver de Lutin d’Isigny, et Jean-Pierre Viel, le partenaire de Mon Tourbillon, n’ont pas vu la faute de Lurabo. Ils ne cherchent donc pas à durcir la course, ce qui va permettre au favori de revenir défendre ses chances.

L’allure est assez lente et Lurabo en profite pour se lancer dans une course folle, refaisant une quarantaine de mètres en un temps record et soulevant ainsi l’admiration du public, cette fois tout à fait conquis et rallié à sa cause. C’est l’émerveillement après le tollé général. Lurabo aborde alors le tournant du chemin de fer.

Lutin d’Isigny, Mon Tourbillon, Monquier, suivis de près par Hickory Almahurst, Joli Quito à la corde, Lurabo à l’extérieur, Solo Hagen, Keystone Patriot, Nevele Fever virent tous de front pratiquement. On ne les voit plus un court instant à cause des tribunes de la pelouse centrale, puis ils reparaissent en face. Lutin d’Isigny leur montre le chemin avec tout près de lui, Mon Tourbillon et Hickory Almahurst.

Lurabo va donc devoir les doubler en quatrième épaisseur.

Il est à son maximum, tendu, donnant des coups de tête, car il n’a pas eut un instant de répit depuis qu’il a lancé son attaque au passage des tribunes.

Lutin d’Isigny, pris de vitesse, ne parvient pas à le contrer et Mon Tourbillon, pourtant à son affaire et trottant très librement, n’y réussit pas davantage.

Lurabo arrive ainsi à prendre tête et corde au milieu de la ligne d’en face. Il augmente maintenant son avance pour pouvoir virer en tête, sans être inquiété ni par Mon Tourbillon, très incisif à ce moment-là, ni par Lutin d’Isigny, qui ralentit comme il le fait souvent dans le dernier tournant.

Lurabo et Mon Tourbillon entrent ensemble dans la dernière ligne droite, légèrement détachés du petit groupe qui les suit avec Lutin d’Isigny, s’avouant battu et semblant vraiment abdiquer.

La longue ligne droite d’Enghien paraît encore plus interminable que jamais.

Mon Tourbillon semble plein de ressource. Aussi « Minou » Gougeon doit solliciter sans frapper Lurabo, qui repart aussitôt. Il lui faut maintenant résister à la pointe de vitesse redoutable de Mon Tourbillon, jusqu’alors nullement éprouvé, ayant eu lui une course tout à fait à sa mesure pour ne pas dire tranquille. Un nouveau duel se livre entre ces deux chevaux au style bien différent. On craint que Lurabo paie maintenant ses violents efforts et sa folle remontée. Il est maintenant encouragé par le public tant il le mérite. Le favori logique devient aussi le favori du cœur. Les tribunes s’enflamment comme jamais à Enghien, vibrent sous les cris enthousiastes. Encore cent cinquante mètres, puis cent mètres, cinquante mètres.

Lurabo, Mon Tourbillon, Mon Tourbillon, Lurabo, qui l’emportera ? Lurabo a encore assez de courage et de force pour tenir en respect son jeune adversaire impétueux. Il va pouvoir rallier le poteau en vainqueur, une fois de plus, signant ainsi une autre victoire fantastique, la sixième consécutive.

Mon Tourbillon montre maintenant ses limites, mais… Incroyable ! C’est Lutin d’Isigny, qui revient sur eux pour se mêler à la lutte. Lurabo doit à nouveau puiser dans ses réserves, pour finalement l’emporter de haute lutte. Mon Tourbillon est deuxième à une encolure et Lutin d’Isigny troisième à une tête du cheval d’Albert Viel.

Solo Hagen, un peu plus loin, finit bien pour s’octroyer la quatrième place derrière les trois champions français, qui ressortent grandis de cette course inoubliable.

Lurabo bien sûr étant le plus acclamé des trois. Il vient encore d’accomplir un exploit, certes, mais un exploit, qui va lui coûter cher par la suite.

Les temps affichés sont de 1’16’’6 pour Lurabo, 1’16’’7 pour Mon Tourbillon et Lutin d’Isigny, 1’16’’8 pour Solo Hagen, quatrième devant Nevele Fever (1’17’’).

C’est à cette époque que Lurabo est connu de tous comme « l’Extraterrestre », surnom que ses admirateurs et certains des habitués des champs de courses lui ont déjà donné auparavant.

 

On revoit Lurabo en scène à Toulouse pour le Grand Prix du Sud-Ouest (2 200 mètres), troisième épreuve du Grand Circuit International, le dimanche 29 avril 1984, face à ses deux grands rivaux, Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon. Ejnar Vogt, le trotteur hollandais confié à Ulf Nordin, est aussi de la partie avec deux bons scandinaves, Solo Hagen, mené par Richard William Denéchère, et Mickey Viking, que drive Michel Roussel.

Les provinciaux Jealon, Kimono de Quilou, Marquis de Cozes complètent le lot des 11 partants, avec Kémilla et Marco Bonheur.

C’est la septième édition du Grand Prix du Sud-Ouest, qui a déjà couronné Eléazar (deux fois), Idéal du Gazeau (trois fois) et Ianthin, le tenant du titre, en 1983.

L’épreuve itinérante se disputant tour à tour à Beaumont-de-Lomagne, Bordeaux, Toulouse et Agen. Cette année, à Toulouse donc, Lurabo est le grandissime favori. Il ne doit pas décevoir ses innombrables supporters malgré une petite incartade et un Lutin d’Isigny particulièrement combatif. Il y a tout d’abord un départ catastrophique, qui mériterait d’être repris. L’autostart se traîne tout d’abord, avant d’accélérer brutalement, déséquilibrant certains chevaux comme Ejnar Vogt et Marco Bonheur, qui perdent là le plus clair de leurs chances. Lutin d’Isigny est cependant le mieux parti pour prendre tout de suite la tête et la corde. Kémilla et Mickey Viking ne s’en sont pas trop mal sortis, s’élançant derrière lui, au contraire de Lurabo, Solo Hagen et Mon Tourbillon, qui ont concédé du terrain.

Marco Bonheur lui sur une grosse faute est relégué au dernier rang en compagnie d’Ejnar Vogt. Mickey Viking apprécie mal le premier virage.

Lurabo contourne le peloton afin de se porter en tête au côté de Lutin d’Isigny, son principal adversaire. Ils entrent ainsi ensemble dans la ligne droite, alors que Mickey Viking cette fois commet une grosse faute au tournant des tribunes, gênant Jealon et Solo Hagen.

Dans la ligne d’en face, Lurabo, le grandissime favori, ayant tapé d’un postérieur sur la roue de son sulky, s’enlève à son tour causant une grosse frayeur à ses nombreux supporters. Il perd ainsi trois bonnes longueurs sur son grand rival, Lutin d’Isigny, qui se montre plus déterminé que jamais. Saisissant ainsi l’occasion de prendre sa revanche, il accélère l’allure afin de s’échapper irrésistiblement, d’autant que Mon Tourbillon ne semble pas battu. Jealon et Ejnar Vogt se rapprochent aussi. Mais c’est Lurabo qui crée le suspense en se lançant à la poursuite de Lutin d’Isigny. Il le rejoint dans le milieu du dernier virage, pour aborder avec lui la ligne d’arrivée. Et l’on a droit à un superbe duel entre ces deux champions, qu’encouragent les clameurs d’un public passionné. Mon Tourbillon est encore dans leur sillage, semblant guetter l’instant propice à une attaque.

Lutin d’Isigny est merveilleux de courage et Lurabo doit s’employer, puiser dans ses réserves et sortir le grand jeu pour faire la différence. Il l’emporte finalement sur le pied de 1’16’’3, égalant presque le record qu’avait établi Idéal du Gazeau en 1’16’’2, l’année de sa victoire sur Jorky en 1980. Lutin d’Isigny (1’16’’5) est deuxième tout près. Mon Tourbillon prend la troisième place à distance.

Ce jour-là, Lurabo et Lutin d’Isigny ont tous deux gagné leur billet pour New York et le Championnat du Monde des Trotteurs de Roosevelt Raceway.

 

Mais quelques temps plus tard, des bruits inquiétants circulent à propos de Lurabo. On le dit blessé, sur la touche, incapable de renouer avec la victoire sur un champ de courses, suite à l’incident survenu dans le Grand Prix du Sud-Ouest, durant lequel il heurta la roue de son sulky avec sa jambe postérieure gauche. Pour faire taire ces rumeurs, une seule chose à faire pour le champion de Maurice Macheret : se remettre en piste et nous prouver ce dont il est capable. La démonstration qu’il va nous offrir doit dépasser nos espérances ; mais, hélas, ce que l’on ignore c’est qu’elle sera aussi son « chant du cygne ».

En ce dimanche 8 juillet 1984, les Américains venus tout spécialement en délégation de la société new-yorkaise des courses de Roosevelt Raceway sont présents à Gelsenkirchen et ils ont l’œil sur Lurabo, l’attendant au tournant, car ils n’ont pas trop apprécié son absence à Solvalla dans l’Elitloppet, qui leur sert toujours de référence pour le choix des trotteurs européens les plus aptes à se distinguer dans le Roosevelt International Trot.

Or, quelques jours auparavant, les organisateurs du prochain Championnat du Monde ont déclaré : - Nous sommes d’accord pour inviter Lurabo, à condition qu’il nous prouve qu’il est toujours en état de courir.

En fait, c’est le 8 juillet, en Allemagne, à Gelsenkirchen, que Lurabo a gagné son billet d’avion pour New York !

Mais, avant la course, Jean-Lou Peupion est dans ses petits souliers, car il sait que Lurabo n’est pas au mieux de sa condition. En outre, il n’a jamais voyagé à l’étranger et n’est pas réputé pour courir bien frais. Or, il s’agit bien pour lui d’une course de rentrée puisqu’il n’a pas revu un hippodrome depuis le 29 avril à Toulouse, date de sa victoire dans le Grand Prix du Sud-Ouest.

A l’inverse, dans le clan de Lutin d’Isigny on est très confiant. Lutin, le bel alezan de Maurice Cornière, est en super forme, resplendissant, plus beau et plus fringant que jamais depuis sa victoire spectaculaire à Vincennes devant Mon Tourbillon, prêt à accomplir un nouvel exploit. Or, contrairement à Lurabo, il a déjà gagné à l’étranger et a l’habitude des voyages. Sa victoire éclatante à Copenhague n’est pas passée inaperçue. Il est d’ailleurs le tenant du titre dans cette grande course de Gelsenkirchen.

Ce dimanche 8 juillet 1984, l’Elite Rennen de Gelsenkirchen a donc pris des allures de répétition avant le Championnat du Monde de New York, dont la date a été fixée au 25 août. Comme on pouvait s’en douter, Lutin d’Isigny est le mieux parti derrière l’autostart pour défendre son titre et devancer Kirk, Kombo, Hickory Almahurst, Rex Haleryd et Ustrina. Lurabo, désavantagé par son numéro 8 derrière l’autostart, a concédé du terrain sur ses rivaux. Mais il se rapproche déjà de façon significative dans la ligne d’en face, ayant pris Lutin d’Isigny en point de mire. Au passage devant les tribunes, Lutin d’Isigny et Lurabo emmènent derrière eux Pay Me Quick, Kombo, Rex Haleryd… Lutin d’Isigny accélère l’allure dans la ligne opposée, mais Lurabo se maintient toujours à sa hauteur.

A l’entrée de la ligne droite, Jean-Paul André, le partenaire de Lutin d’Isigny, a dû croire un moment à la victoire. Mais, à mi-ligne droite, Lurabo enclenche la vitesse supérieure pour dépasser son rival, qui lui résiste courageusement jusqu’au bout, jusqu’au poteau de la victoire qu’ils franchissent presque ensemble. Mais il y a une encolure entre eux, Lurabo précédant ainsi son grand rival Lutin d’Isigny. Cependant, ils sont crédités de la même réduction kilométrique, 1’14’’8 ! Incroyable, ils ont établi un nouveau record du monde sur la distance de 2 500 mètres, à mettre à l’actif de Lurabo, puisque c’est lui le gagnant.

A distance, Pay Me Quick, que pilote Stig H. Johansson, s’octroie la troisième place. En contemplant Lurabo, Stig Johansson semble perplexe. Il songe déjà sérieusement à déclarer forfait avec The Onion dans l’aventure new-yorkaise, pour laquelle son cheval a été sélectionné avec Legolas, afin de représenter la Suède dans ce fameux Championnat du Monde dont tout le monde parle.

Mais, ce que tous ignorent, c’est que cette belle victoire de Lurabo sera pour lui la dernière. Après avoir connu le Paradis, il ne va pas tarder à entrer en Enfer.

Le lundi 16 juillet 1984, on apprend par la presse hippique que Lurabo et Lutin d’Isigny sont tous les deux officiellement sélectionnés pour représenter la France dans le Championnat du Monde des Trotteurs à Roosevelt Raceway, qui se disputera en nocturne le samedi 25 août 1984. La revanche dans la Challenge Cup, ayant lieu une semaine plus tard. La Suède sera elle en principe représentée par les trotteurs Legolas et The Onion, bien que Stig Johansson ait songé à déclarer forfait avec The Onion, qui en fait est un pur « miler » et risque de trouver les 2 011 mètres du Roosevelt International un peu longs pour ses aptitudes. Mais il semble que depuis le célèbre professionnel suédois soit revenu sur son jugement.

Lurabo en action

Lurabo en action

Ura, le père de Lurabo

Ura, le père de Lurabo

Lurabo lui choisit de se remettre en scène en Italie, à Montecatini, où il n’a que trois adversaires à battre, Blim et Bertuz au poteau des 2 040 mètres, Demon Renvaech à celui des 2 060 mètres, tandis qu’il sera seul à partir des 2 080 mètres, une distance proche des 2 011 mètres du Roosevelt International.

Ces trois trotteurs italiens sont tellement insignifiants comparés à Lurabo, que l’idée d’une telle confrontation semble ridicule. Et pourtant !

La course baptisée Grand Prix Philip Morris était dotée de 60 millions de lires et disputée en nocturne le samedi 4 août 1984. Test ou exhibition pour Lurabo, on ne sait pas trop, mais la piste de Montecatini, assez semblable à celle de Roosevelt Raceway, doit permettre au fils d’Ura de prendre contact avec ce genre de « tourniquet » formé par un anneau d’environ 800 mètres, ce qui ne convient pas trop à de grands trotteurs du style Bellino II, par exemple. Aussi, n’est-ce pas un piège pour Lurabo ?

On ne sait pas encore comment Lurabo s’est comporté en Italie. Mais la nouvelle a dû tomber comme un coup de tonnerre dans les bureaux de Paris-Turf. Battu ! C’est ainsi que le journaliste hippique Henri Diacono, délégué par Paris-Turf à Montecatini, a titré son article. En fait, en le lisant plus en détail, on apprend que Lurabo n’a pratiquement pas couru. Ses adversaires italiens ne l’ont même pas vu. Il est resté à l’arrière-garde, finissant très loin des autres, braqué, fautif, furieux, alors que les juges aux allures, complètement consternés, n’osaient pas le disqualifier.

Tout a pourtant bien commencé ; le public italien et les tifosi venus nombreux applaudir Lurabo, lui ont réservé un véritable triomphe dès son entrée en scène, l’acclamant comme il ne l’avait pas été en Allemagne après son exploit et son record du monde.

Que c’est-il passé dans la tête de Lurabo ? On ne saura jamais. Toujours est-il qu’il a refusé de partir au signal. Il s’est braqué, a hésité, « compté ses pas » (écrira Henri Diacono), avant de partir au galop. Repris par « Minou » Gougeon, il doublait ainsi son handicap initial. A quatre cents mètres de l’arrivée, alors qu’il s’est laborieusement situé dans le sillage de ses adversaires, il éclate à nouveau, commettant cette longue faute, qui cette fois oblige les commissaires à l’éliminer. Il finit cependant au trot, très loin des autres, alors que Bertuz, le vainqueur en 1’16’’6, a depuis un bon moment bouclé son parcours.

On apprend ainsi qu’il est lui aussi qualifié pour le Championnat du Monde.

Cette défaite de Lurabo, inexplicable à ce moment-là, prend des allures d’affront.

Quant au record de la piste, que les employés de l’hippodrome ont déjà effacé, il faut le réécrire à coup de pinceau.

On ne le sait pas encore, mais c’est soir-là que Lurabo est entré en Enfer.

 

Après cet incroyable échec, Jean-Lou Peupion, le metteur au point du champion, est resté très avare en explication. Quelques jours après, il déclare aux journalistes de Paris-Turf :

- Lurabo n’était pas fâché, seul le départ exécuté après une volte à droite l’a désorienté ; avec une volte à gauche, il aurait gagné !

 

Pourtant, dans la nuit du samedi 25 août 1984, à New York, Lutin d’Isigny est sacré champion du monde !

Lurabo, très malchanceux il est vrai, termine cinquième à une seconde de son grand rival.

 

Lutin d’Isigny s’octroie en prime le record de la course et le record du monde (1’14’’6) sur la distance de 2 011 mètres (un mile et ¼ de mile).

The Onion se classe deuxième en 1’15’’2, Crown Wood troisième en 1’15’’2 également, devant Spunky Byron (1’15’’2 aussi), Lurabo (1’15’’6), Babe Kosmos (1’15’’6) et Legolas. Lurabo lui a fini la course en boitant. Il souffre apparemment de son antérieur droit, s’étant donné un coup au moment de l’incident provoqué par la chute de Bridger, le trotteur canadien. Il semble aussi incommodé par la dureté de la piste.

Il n’est donc pas question pour lui de revanche dans la Challenge Cup (2 413 m) la semaine suivante, ce qui permet à Lutin d’Isigny, décidément fort à l’aise sur cette piste de Roosevelt, de confirmer brillamment sa victoire en s’imposant devant Lançon (une vieille connaissance pour lui), TV Yankee, Babe Kosmos, Spunky Byron… sur le pied de 1’16’’7.

 

Lurabo humilié, meurtri, rentre en France pour soigner ses blessures et aussi son moral, qui en a pris un sérieux coup.

 

Le dimanche 27 janvier 1985, Lutin d’Isigny, en dépit de ses dernières prestations plutôt moyennes, devient le timide favori du Prix d’Amérique, préféré à Lurabo, dont on craint désormais les problèmes de jambes.

Derrière ces deux champions, on retient surtout les noms de Minou du Donjon et de Mon Tourbillon, avant ceux de Major de Brion, Malouin, Landoas et Lapito.

Kaiser Trot, lui, après son retentissant échec du Prix de Cornulier (2 650 m), remporté par Mirande du Cadran devant Orfeu Negro et Lapito, met un terme à sa carrière de courses.

Et l’on arrive à ce dimanche 27 janvier 1985, jour du 61e Prix d’Amérique.

Ce Prix d’Amérique 1985 peut paraître assez ouvert, vu la forme incertaine des deux plus titrés, Lurabo et Lutin d’Isigny.

En vérité, Minou du Donjon, le vainqueur moral du Prix de Belgique, est le favori logique. Lutin d’Isigny, plus dur à la lutte que Mon Tourbillon, peut lui être préféré. La régularité de Major de Brion devrait logiquement lui permettre de s’octroyer une quatrième place, et Lurabo, le tenant du titre, ne peut être totalement écarté vu sa grande classe. Mais pour une victoire, on n’y croit pas trop. Malouin bénéficiera de la grande expérience du maître Jean-René Gougeon, alors que Landoas, mené par le jeune Bertrand de Folleville, peut craindre le manque de métier de son partenaire à ce niveau de la compétition.

 

Ce Prix d’Amérique 1985, qu’Eléazar et Hymour honorent de leur présence en tête du défilé, aura été marqué surtout par trois chevaux : Lurabo, étonnant de courage, qui prit le train à sa charge et tenta ainsi le tout pour le tout ;  Mon Tourbillon à la fin de course étourdissante, qui vint priver Minou du Donjon de la deuxième place ; et enfin, Lutin d’Isigny, qui s’est envolé impérial vers la gloire, justifiant brillamment son titre de champion du monde. Par contre, on pouvait être déçu par l’étrange comportement de Minou du Donjon, qui a couru braqué, la tête de travers, ne se livrant pas vraiment au moment du combat. Major de Brion lui confirmait tout le bien qu’on pensait de lui en concluant quatrième. Lapito, sixième, était aussi à sa place. Landoas, gêné par Lutin d’Isigny, qui ralentissait devant lui dans le dernier virage, a joué de malchance, car il était plein de ressource, et était aussi un vainqueur possible dans ce Prix d’Amérique plutôt ouvert en l’absence du vrai Lurabo.

Le duel magnifique que se livrèrent les deux grands champions, Lurabo et Lutin d’Isigny, jusqu’à cent mètres du but, a enthousiasmé le public, alors que l’étonnante fin de course de Mon Tourbillon a surpris tout le monde.

Lutin d’Isigny lui s’est envolé, pour remporter tout seul, loin des autres, une magnifique victoire, qu’il signe sur le pied de 1’17’’8.

Mon Tourbillon, finissant comme une torpille, est donc deuxième en 1’18’’, Minou du Donjon, toujours fâché, perd sur le fil le premier accessit, pour se retrouver troisième en 1’18’’ également. Major de Brion est un bon quatrième en 1’18’’2, Lurabo un héroïque cinquième en 1’18’’3, Lapito sixième en 1’18’’4, Karengada septième en 1’18’’5.

 

On attend maintenant avec impatience la revanche dans le Prix de France (2 100 m), le dimanche suivant, avec un nouveau duel Lurabo – Lutin d’Isigny, mais un Lurabo à son apogée. C’est alors que Lutin d’Isigny est déclaré forfait sur le champ pour cause de « coup de sang ». Etrange !

Lurabo, tenant du titre, Mon Tourbillon, vainqueur de l’édition 1983, Minou du Donjon, second en 1984, et Major de Brion sont préférés à Ludo du Chignon, Néric Barbès, Luga, Micado C, Game Hogh et Khali de Vrie.

Mon Tourbillon (1’14’’7) profite de l’absence de Lutin d’Isigny, des disqualifications de Lurabo et de Game Hogh, pour remporter son second Prix de France, devant Major de Brion, Néric Barbès, Ludo du Chignon, Khali de Vrie, Micado C, Minou du Donjon, encore décevant, et Luga.

Souffrant toujours de sa jambe droite, Lurabo a été disqualifié après une grosse faute survenue au moment où il doublait tout le peloton à une allure dingue dans la montée, causant une très grosse impression, la plus belle image que l’on retiendra de cette course.

 

Lurabo se remet courageusement en piste dans le Prix de Paris (3 157 m) une semaine plus tard, pour partager la position de favori avec Landoas, devant Major de Brion, Minou du Donjon et Néric Barbès, Malouin, Lapito.

Ils sont 17 au départ et cette course sert de support au pari tiercé.

Mais le calvaire de Lurabo se poursuit ; après avoir fait illusion une fois de plus, il cède brusquement, sous l’impulsion de Khali de Vrie, et Malouin en profite pour réussir ses adieux : il s’impose en 1’18’’3, devant Landoas, un peu malchanceux, et Khali de Vrie.

Dès lors, Lurabo disparaît à nouveau de la scène pour une durée indéterminée.

Enfin, on apprend qu’il fera la monte au haras des Cruchettes pour la saison 1986. Mais son retour est prévu à Vincennes l’hiver prochain, dans les épreuves préparatoires, en vue de se qualifier pour le Prix d’Amérique 1986.

 

Alors qu’Ogorek enlève le Prix de Bretagne (2 800 m), première épreuve préparatoire au Prix d’Amérique, devant Ourasi, plus surpris que battu, il est vrai, on a des nouvelles plutôt encourageantes de Lurabo.

Le grand champion revient paraît-il à son meilleur niveau. Il travaille régulièrement à Grosbois, de façon satisfaisante. Sa rentrée à Vincennes étant prévue en décembre dans le Prix de Bourgogne.

Maurice Macheret a fait le déplacement depuis la Savoie pour voir progresser son cheval. Mené par son fidèle soigneur, le sympathique Göran Hjerreholt, un jeune Suédois très jovial, il doit parcourir environ 2 500 mètres en compagnie d’Ogorek, que mène Jean-Lou Peupion lui-même. Lurabo suit sans difficulté Ogorek, qui tire beaucoup. Comme à ses plus beaux jours, Lurabo allie magnifiquement la puissance et la légèreté, un vrai régal pour les yeux. Les derniers mille mètres sont couverts en 1’20’’. Les deux trotteurs concluent côte à côte. Tout va donc pour le mieux. Il ne manque à Lurabo qu’une petite somme (30 000 F) pour compléter les gains que lui valut sa cinquième place du Prix d’Amérique 1985. On est en droit d’espérer qu’il la gagnera facilement…

 

Hélas ! Comme Jorky avant lui, Lurabo est maintenant marqué par le mauvais sort. Souffrant toujours de sa jambe, il ne parviendra pas à se qualifier pour ce Prix d’Amérique 1986 ; son heure ayant passé, la page est tournée, car sans doute il était maintenant temps de se consacrer à un autre champion, plus jeune et plus solide celui-là, Ourasi !

 

Le dimanche 26 janvier 1986, à 15 heures 45, le défilé du Prix d’Amérique nous présente les dix-huit concurrents à la victoire : mais pas de Lurabo !

Il se retire donc de la compétition, par la petite porte, riche toutefois de 5 855 260 F, ce qui est assez peu pour un crack de cette envergure.

C’est au haras qu’il se distingue dès lors, en produisant notamment les bons vainqueurs que sont Vaflosa Gédé, Vroum d’Or, et surtout Abo Volo, qui offrira à Albert Viel son premier Prix d’Amérique quelques jours avant sa mort, et permettra à Lurabo de devenir, après Passeport, le deuxième gagnant de Prix d’Amérique, père d’un autre gagnant de Prix d’Amérique.

Lurabo est mort dès suites d’une occlusion intestinale, le dimanche 13 juin 1993.

Lurabo au haras des Cruchètes

Lurabo au haras des Cruchètes

Lurabo

Lurabo

Vroum d'Or

Vroum d'Or

Abo Volo

Abo Volo

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30 mars 2013 6 30 /03 /mars /2013 12:57

Les champions trotteurs de légende en France

 

09 - Les années 1980 (Kaiser Trot)

 

 

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Kaiser Trot

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Kaiser Trot

 

Kaiser-Trot-fin.-0002.jpgKaiser Trot

 

Kaiser-Trot-numerisation0021.jpgKaiser Trot, par Canino et Espina, un champion classique au trot monté, vainqueur du Prix du Président de la République, du Prix des Elites, de l’international Prix de Cornulier à trois reprises, qui a montré aussi des dispositions à l’attelage : victoire à Caen dans le Prix des Ducs de Normandie

 

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Lévorino et Kaiser Trot

 

 

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Joël Hallais

 

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Philippe Bekaert

 

 

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Michel Lenoir

 

 

 

Kaiser Trot

 

Comme seuls Souarus, Gardon et Bellino II avant lui, Kaiser Trot devait gagner à trois reprises le Prix de Cornulier.

Pour cela, il avait suivi la voie classique des trotteurs montés, réussissant à quatre ans un fameux doublé, Prix du Président de la RépubliquePrix des Elites. Car si « Kaiser » fut un empereur du Trot, son empire se limita surtout au trot monté, malgré de réelles dispositions pour l’attelage, comme le confirment sa troisième place derrière Kisin et Katinka dans le Critérium des 5 ans, sa deuxième place derrière Kisin dans le Prix du Bourbonnais 1981, et finalement sa victoire à Caen dans le Prix des Ducs de Normandie 1982.

Ce fut sa seule victoire dans la spécialité, car il se révéla souvent fautif au sulky, comme dans le Prix d’Amérique 1982, où il vint prendre le meilleur sur le grand favori Idéal du Gazeau et faire illusion pour la victoire, avant de brusquement éclater des quatre fers sans crier garde, et de façon plutôt incompréhensible.

Etait-ce sa jambe plus courte que les autres, qui le déséquilibrait ?

 

Comme son successeur Oligo, Kaiser Trot était entraîné par Joël Hallais, mais comme Lapito, appartenait à M. Alfred Lefèvre, casaque jaune bande noire, toque noire.

Avec Oligo, il permit à Philippe Bekaert en tant que jockey, et à Joël Hallais en tant qu’entraîneur, de gagner cinq fois le Prix de Cornulier.

Il était petit, surtout pour un trotteur monté, bai, mais avec une liste en tête bien marquée.

Il gagna son premier Prix de Cornulier à cinq ans, mais fut battu à cet âge par Klon Klon dans le classique Prix de Normandie, l’équivalent au monté du Critérium des 5 ans.

L’un de ses atouts majeurs fut sa longévité ; il a régné sur sa spécialité de 1980 à 1984, ce qui est rare chez un trotteur monté, car généralement ceux qui se distinguent sous la monte d’un jockey vieillissent plus vite que les trotteurs attelés.

Il se fit connaître en février 1980, gagnant le Prix Louis Le Bourg, confirmant dans le Prix Lavater, avant son triomphe dans le Prix du Président de la République 1980, l’équivalent au monté du Critérium des 4 ans. Il était alors monté par Michel Lenoir.

Confié à Philippe Bekaert, ils remportèrent ensemble avec désinvolture le classique Prix des Elites, puis le Prix de Cornulier 1981, en 1’21’’, devant Kronos du Vivier et Istraeki, récidivèrent dans le Prix de Cornulier 1982, en 1’22’’7, devant Loustic de la Tour et Janda du Cadran, subirent un échec retentissant dans l’édition 1983 de ce grand international que remporta Kaprius, cette année-là, avant de s’imposer à nouveau le 23 janvier 1984, dans la réduction de 1’20’’3, devant Luga et Kémilla.

Mais ils devaient échouer à nouveau l’année des 9 ans de Kaiser Trot, en janvier 1985.

Kaiser Trot laisse cependant le souvenir de l’un des plus grands champions du trot monté, dans la lignée de Souarus, Fandango, Gardon, Bellino II (qui lui fit aussi bien à l’attelé), et également comme le cheval le plus titré de la génération des « K », celle des Kapulco, Katinka, Képi Vert, Khali de Vrie, King Black, Kisin, qui eux se distinguèrent à l’attelage.

 

« A l’intersection des pistes, Kisin cède à son tour, tandis que Kaiser Trot prend nettement le meilleur sur Idéal du Gazeau, légèrement détaché de Jiosco, Ino Ludois et Gator Bowl. Dès lors, Idéal du Gazeau paraît battu ; Kaiser Trot va beaucoup plus vite que lui et semble voler vers la victoire. Aussitôt on songe à l’exploit qu’il va réaliser : le doublé légendaire, Prix de CornulierPrix d’Amérique.

Mais ce n’est qu’une brève illusion : Kaiser Trot éclate brusquement, sans prévenir et de façon incompréhensible. » (Extraits du compte-rendu du Prix d’Amérique 1982).

 

La fin du mois de mai 1982 permettait à Kaiser Trot, champion incontesté des trotteurs montés, de remporter son unique victoire à l’attelage dans l’important Prix des Ducs de Normandie (2 450 mètres), sur l’hippodrome de la Prairie à Caen, où l’on vit Ino Ludois perdre toutes ses chances au départ, Larabello heurter un piquet et Katinka victime d’un accrochage alors qu’elle faisait illusion pour la victoire. Kaiser Trot, le roi du monté, devait en profiter pour s’imposer avec autorité, dans un style qui en disait long sur ses possibilités dans cette spécialité. L’Alezan était un brillant second devant Képi du Tanu et Kaki du Viaduc.

Kaiser Trot succédait ainsi à Jiosco (1981) et à Ianthin (1980).

 

Les admirateurs de Jorky purent l’applaudir une dernière fois à Argentan, où il se produisit en démonstration avec Kaiser Trot, triple vainqueur du Prix de Cornulier ; c’était sans doute l’une de leurs dernières apparitions en public.

Kaiser Trot réapparut en 1986 sur la piste d’Argentan, cette fois en compagnie de Lurabo et de Lutin d’Isigny, lors d’une exhibition en hommage à ces trois champions.

 

Après son échec dans le Prix de Cornulier 1985, Kaiser Trot entra définitivement au haras, riche de 4 163 700 F.

 

 

 

Kapulco-0001.jpgKapulco

 

 

Kapulco-0002.jpgKapulco

 

Katinka-0007.jpgKatinka

 

Kepi-Vert-0002.jpgKépi Vert

 

Khali-de-Vrie-0001.jpgKhali de Vrie

 

King-Black-numerisation0002.jpgKing Black

 

Kisin-0007.jpgKisin

 

 

 

Kaiser Trot

Kaiser Trot

Souarus, Gardon, Bellino II, Kaiser Trot : ils ont gagné trois fois le Prix de Cornulier !

Souarus, Gardon, Bellino II, Kaiser Trot : ils ont gagné trois fois le Prix de Cornulier !

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21 mars 2013 4 21 /03 /mars /2013 10:40

 

 

Les champions trotteurs de légende en France

 

08 - Les années 1980 (Jorky)

 

 

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      Jorky, par Kerjacques et Vanina B, premier vainqueur des quatre grands Critériums, champion classique, de classe internationale, victorieux en France, aux Etats-Unis, en Italie, en Suède, en Allemagne, aux Pays-Bas, au Danemark…

 

 

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       La tête expressive de Jorky

 

 

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      Le beau Jorky et son incroyable pedigree

 

 

 

 

 

Jorky

 

Jorky lui est une exception, à la fois un prince né dans la pourpre, car fils du roi Kerjacques et de la reine Vanina B, et aussi le fruit d’un miracle, un miracle de la nature.

Il a été le premier à remporter les trois grands Critériums, tout en réalisant par la suite un palmarès international exceptionnel, avec des victoires aux Etats-Unis (Challenge Cup deux fois), en Suède (Elitloppet), en Italie (Grand Prix des Nations), en Allemagne (Elite Rennen, Prix des Meilleurs trois fois, Grand Prix de Recklinghausen, Grand Prix de Dinslaken), en Hollande (Grand Prix des Pays-Bas deux fois), au Danemark (Coupe de Copenhague)…

Premier trotteur à avoir remporté tour à tour le Critérium des 3 ans, le Critérium des 4 ans et le Critérium des 5 ans, il est le seul à ce jour à y avoir ajouté le Critérium Continental, ainsi que le Prix de l’Etoile. Il fut élu Trotteur de l’Année en France pour l’année 1980.

Mais Idéal du Gazeau et Lurabo lui barrèrent le chemin de la victoire pour ses deux seules participations au Prix d’Amérique.

 

Jorky est né le 4 juin 1975 chez Bernard Billard, déjà propriétaire de sa mère Vanina B, de sa grand-mère La Coulonces, au Haras La Coulonces, et sera, comme Eléazar, autre fils illustre de Kerjacques, entraîné et mené en course par Léopold Verroken.

Etant né tard dans son année, il débute tard aussi et ne court pas à deux ans.

Dès le débourrage, le poulain s’est révélé très bon malgré son tempérament turbulent.

Lorsqu’il était foal, il s’était abîmé une vertèbre en jouant, incident qui s’avéra heureusement sans gravité par la suite. En grandissant il se montre dominateur et peu facile.

Il débute à Vincennes le 3 avril 1978 dans le Prix Enif (2 750 m), et ne passe pas inaperçu en raison de ses origines prestigieuses ; tout le monde a les yeux braqués sur ce petit cheval bai, joueur et indocile, qui court la langue attachée, semblant se moquer de ceux auxquels il suscite tant d’intérêt, en leur tirant la langue. Son papier « par Kerjacques et Vanina B » n’est pas passé inaperçu, ce qui va suivre ne le sera pas non plus.

Beau et bien fait, (il fut premier au concours de modèle), avec une petite tête fine, intelligente et des yeux vifs, il a quelque chose de peu commune : une personnalité.

 

Ce jour-là, Serge Chavatte, l’un des collaborateurs de Léopold Verroken, est au sulky de Jorky. Après un tour de piste, Jorky vient prendre la tête, perd ses adversaires dans le virage, mais au moment de passer devant le poteau d’arrivée pour la deuxième fois, Serge Chavatte arrête son cheval, comme si la course était finie. Le peloton revient sur Jorky et le dépasse sans égard. S’apercevant de son erreur, Serge Chavatte relance son partenaire, qui malgré ses qualités indéniables ne peut faire mieux que septième. Son pilote écope d’une amende pour s’être trompé d’un tour. Il faut que Léopold Verroken prenne enfin les rênes pour que Jorky franchisse victorieux la ligne d’arrivée, au Croisé-Laroche, dans le Prix Tienneval (2 600 m) disputé le 21 mai 1978, en 1’22’’2. Il récidive aussitôt le 3 juin dans le bien nommé Prix Eléazar (2 575 m), une course évoquant le nom du brillant champion d’Alec Weissweiller, ce qui ne peut que porter chance à Léopold Verroken et à Jorky, son successeur en quelque sorte, qui battent en 1’25’’6, Joker du Pont et Jade de Quercy.

Jorky remporte sa première victoire à Vincennes le 23 août dans le Prix de Corbeil (groupe B, 2 600 m), en 1’22’’5, devant Jean Mesnil et Jatcheng. Suit le Prix d’Issigeac (2 250 m), qu’il gagne en 1’19’’6, en dominant facilement Jamborée, l’un des meilleurs de la génération. Jorky a bien plus de mal à venir à bout d’un autre des tous bons « J » Jordaens, un fils d’Ura, lors du Prix Victor Régis (2 600 m), dans lequel ils font afficher tous les deux 1’20’’8.

Malgré une courte défaite, Jorky est le favori du classique Critérium des 3 ans (2 600 mètres), épreuve reine de la génération des 3 ans attelés, qu’il remporte en 1’20’’2, très loin devant Jean, son dauphin d’alors, que suivent Jaquelle, Jalinotte, Joujou Tourterelle, Jalys du Roncey, le lauréat du Critérium des Jeunes

La mort de Joyeux de Gournay, premier leader des « J » attelés, les déclins de Jigliana et de Jalys du Roncey laissent à Jorky le rôle incontesté de chef de file de la génération.

 

Jorky débute sa quatrième année par une victoire dans le Prix de Tonnac-Villeneuve, disputé le 21 janvier 1979 sur la distance de 2 600 mètres, mais de justesse devant Jean, qui prend d’ailleurs sa revanche sur son rival dans le Prix Jules Thibault (2 250 m), le fils de Vanina B ne parvenant pas à lui rendre 25 mètres. En terminant troisième derrière le bon Jacky Poprune, Jorky porte tout de même son record à 1’18’’8.

Mais dans le Prix Ephrem Houël (2 600 m), Jorky et Jean sont tous les deux pénalisés de 25 mètres, ce qui est aussi le cas de Jeune Orange, pouliche plus confirmée au trot monté. Jorky justifie sa position de favori en s’imposant sur le pied de 1’20’’3, devant Jean, Joachim, Jalys de Roncey, Jordaens…

Le printemps arrive avec une épreuve importante, le Prix Phaëton (2 250 m), course européenne, qui prépare au classique Critérium des 4 ans, le 21 mai 1979 à Vincennes. Le trotteur suédois Active Bowler justifie le caractère européen de l’épreuve.

Jean pour sa part a préféré se couvrir de gloire à Milan en remportant le Grand Prix d’Europe, épreuve qui a déjà valu à Hadol du Vivier un magnifique exploit deux ans plus tôt.

Jordaens semble s’envoler vers une victoire facile. Mais il s’enlève sans crier garde dans la dernière ligne droite, tandis que dans un sprint époustouflant, qui soulève l’admiration, Jorky, enfin libéré d’un piège, vient battre d’une bonne longueur Jacky Poprune, qui précède Jamborée. Jorky signe cette nouvelle victoire sur le pied de 1’20’’.

 

Il retrouve Jean pour partager avec lui la position de favori du classique Critérium des 4 ans (2 800 m), leur principal objectif de l’année, qui se dispute à Vincennes le 5 juin 1979. Ce jour-là, Jorky se montre impérial pour dominer tous ses contemporains avec une supériorité écrasante. Il franchit la ligne d’arrivée sur le pied de 1’20’’5, loin devant l’inattendu Jacob du Chignon (95/1), que suivent Jamborée, Jasmin Viking… Il ne lui reste plus qu’à remporter aussi brillamment le Critérium des 5 ans, pour que Jorky soit ainsi le premier trotteur de l’histoire à inscrire à son palmarès les trois grands Critériums, ce que Toscan, un autre grand « Kerjacques », n’avait pu faire.

 

Malchanceux à Enghien, Jorky et Javaza trouvent une belle revanche dans l’important Critérium Continental (2 100 m, départ à l’autostart), en prenant les deux premières places. Dans la ligne droite, Jorky se détache irrésistiblement de Javaza pour l’emporter de loin, dans un style impressionnant, tout en portant son record à 1’18’’2.

 

Il est battu lors de sa dernière sortie de l’année, dans le Prix Marcel Laurent (2 250 m), le 22 décembre 1979. Il est vrai que le gagnant n’est autre qu’Idéal du Gazeau lui-même, qui s’impose en 1’16’’9, devant le trotteur cagnais Icarios, impossible à confondre avec sa robe d’une étrange couleur sable. Jorky, à court de condition, se classe troisième devant Iris de Gournay, Ianthin, Idylle du Corta, Jordaens, Idylle Charmeuse, Istraeki… C’est la première fois qu’il est confronté à ses aînés, ce qui est plutôt encourageant.

 

Avec 934 000 francs de gains, Jorky est le troisième au classement des sommes gagnées en France pour l’année 1979 par les meilleurs trotteurs à l’attelage, derrière Idéal du Gazeau avec 1 275 000 francs et High Echelon, 1 021 000 francs. Mais parmi sa génération, il est toutefois dépassé par Jeune Orange, qui a gagné pas moins de 1 078 000 francs au monté et 46 000 francs à l’attelage, totalisant ainsi une somme de 1 124 000 francs de gains pour l’année 1979 contre 934 000 francs pour Jorky ; lequel Jorky a d’ailleurs un peu déçu en fin d’année, mais contrairement à Jeune Orange, qui ne va pas tarder à atteindre ses limites, il n’en est qu’au début de sa formidable ascension.

 

C’est d’ailleurs par une brillante victoire que Jorky commence sa carrière de « 5 ans », le dimanche 6 janvier 1980 dans l’important Prix de Croix (2 800 m), qu’il remporte en 1’20’’7, devant Jaquelle venue à la fin régler Jordaens.

Malgré cette brillante démonstration, Jorky, jugé encore un peu tendre, est écarté du Prix d’Amérique, dans lequel la génération des « J » n’est d’ailleurs pas représentée.

Léopold Verroken, le partenaire de Jorky, a un autre fils de Kerjacques à mener dans la grande épreuve, le fameux Eléazar, qui pour ses adieux au public décide de partir par la grande porte, en réalisant le magnifique doublé victorieux, Prix d’AmériquePrix de France !

 

Effaçant un récent échec, Jorky triomphe de belle manière, en 1’19’’9, devant Igor du Beauvoisin, Fleur de Prère, Gars de Fontaine, dans le Prix du Plateau de Gravelle (2 600 mètres), un petit international disputé le 7 février à Vincennes.

Les deux premiers sont des fils de Kerjacques, étalon qui sera particulièrement à l’honneur durant ce meeting d’hiver avec les victoires de Gamélia (Prix de Cornulier), et d’Eléazar (Prix d’Amérique et Prix de France).

Igor du Beauvoisin renoue d’ailleurs avec la victoire dès la semaine suivante avec le Prix du Bois de Vincennes (2 250 m), qu’il remporte devant Jacob du Chignon.

 

Le lundi 18 février, Jorky accomplit un exploit lors du Prix de Sélection (2 275 m), le dernier classique du meeting d’hiver, qui permet de le revoir à départ égal face à Idéal du Gazeau. Comme Ianthin, Igor du Beauvoisin et cinq autres chevaux, ils ont la lourde tâche de rendre 50 mètres aux « 4 ans » : Kapulco, Képi Vert et Kaïd du Bignon.

On attend une réhabilitation de la part d’Idéal du Gazeau, qui n’a pas couru depuis son échec retentissant du Prix d’Amérique. Mais c’est Jorky, qui échoue d’un rien face à Képi Vert. Kaïd du Bignon est un courageux troisième. En trottant sur le pied de 1’16’’, Jorky a presque égalé le record de Bellino II (1’15’’9 sans autostart).

 

Jiosco, un magnifique alezan avec liste en tête, portant les couleurs de l’écurie Levesque, est quelques jours plus tard le héros du Prix Ovide Moulinet (2 250 m), qu’il gagne en 1’17’’4 devant Jaquelle, Jonc d’Anson, Jacob du Chignon…

Jiosco poursuit une belle ascension qui tôt ou tard va le placer sur la route de Jorky. En attendant, il va conquérir auprès des turfistes une incroyable popularité. Pour les connaisseurs, il est déjà le plus beau cheval de Vincennes.

 

Mais l’écurie Levesque a un autre champion, Hadol du Vivier, qui se couvre de gloire à Cagnes-sur-Mer en battant Idéal du Gazeau dans le temps record de 1’14’’1, à l’occasion du Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m).

Or, c’est précisément Hadol du Vivier, que Jorky affronte lors de sa sortie suivante, à Enghien, le 14 avril 1980, à l’occasion du Prix de l’Atlantique (2 150 m), un international très prisé avec départ à l’autostart.

Hadol du Vivier, grandi de son exploit cagnais, est le favori devant Jorky et Gadamès. Mais cette fille de Kerjacques se montre fautive au départ, alors que Jorky domine Hadol du Vivier pour remporter sa plus belle victoire d’alors en 1’17’’3. Hadol du Vivier, lui-même deuxième en 1’17’’4, précède de loin Fleur de Prère (1’18’’), Iris de Gournay (1’18’’), Granit, Jean, Infant d’Autize, Idylle Charmeuse, Gadamès…

 

Jorky fait désormais partie des trois meilleurs trotteurs du moment, puisque Eléazar, qu’il remplace brillamment, vient de prendre sa retraite. N’a-t-il pas triomphé d’Hadol du Vivier, pourtant vainqueur d’Idéal du Gazeau à Cagnes-sur-Mer ? Or, c’est ce même Idéal du Gazeau que Jorky a déjà devancé dans le Prix de Sélection.

 

Après ce brillant succès, le déjà fameux fils de Kerjacques et de Vanina B s’attaque au Grand Prix du Sud-Ouest (2 200 m), disputé le 27 avril à Toulouse, face aux meilleurs trotteurs du moment : Hadol du Vivier, Idéal du Gazeau, Hillion Brillouard…

Jorky prend un départ de choix et mène presque de bout en bout, toujours conduit par son mentor Léopold Verroken, qui espère bien remporter son troisième Grand Prix du Sud-Ouest, ayant déjà gagné les deux premiers avec Eléazar.

Après s’être assuré le meilleur sur Hillion Brillouard dans le dernier virage, Jorky semble avoir course gagnée. C’est alors que surgit Idéal du Gazeau, qui surprend son rival dans un sprint impressionnant pour le coiffer au poteau, en faisant afficher un temps de 1’16’’2. Jorky pour sa part est crédité de 1’16’’3, Hillion Brillouard est troisième en 1’16’’5. Hadol du Vivier, ombre de lui-même, a complètement cédé.

 

Battu de si peu à Toulouse, le champion de Bernard Billard tente de prendre sa revanche sur Idéal du Gazeau dans le Grand Prix de Bavière (2 100 m), disputé à Munich le 15 mai 1980. Cette sixième épreuve du Grand Circuit International marque un tournant important dans la carrière de Jorky car c’est sa première tentative hors de nos frontières.

Spécialiste de la course en tête, Express Gaxe se montre une fois de plus étonnamment rapide au départ de l’autostart pour se porter tout de suite à la corde et remporter de bout en bout une belle victoire, mais avec seulement une tête d’avance sur Jorky, qui est crédité de la même réduction (1’17’’4). Idéal du Gazeau se classe troisième à un peu plus d’une encolure du fils de Kerjacques, alors que tous les autres, dont Hillion Brillouard, finissent loin.

 

Pour son retour à Vincennes dans le Prix René Ballière (2 100 m) avec départ à l’autostart, disputé le 19 juin 1980, Jorky, bien que trottant 1’15’’8, égalant l’ancien record de la piste que détenait depuis peu Hillion Brillouard, ne peut rien contre un Idéal du Gazeau écrasant de supériorité, qui triomphe loin de son rival en un fantastique 1’15’’3.

 

Mais la performance de Jorky est suffisamment bonne pour qu’il puisse tenter l’aventure en Hollande le dimanche 29 juin 1980 à l’occasion du Grand Prix des Pays-Bas (2 600 mètres), la plus prestigieuse des épreuves de trot néerlandaises, disputée à La Haye, qu’il remporte en 1’16’’4, de très belle manière. C’est sa première victoire en terre étrangère. Mustard, à une longueur et un sulky, se classe deuxième devant Charme Asserdal, Ianthin, Express Gaxe, sur lequel Jorky prend ainsi une éclatante revanche.

 

C’est à Enghien que Jorky se fait applaudir pour son retour en terre natale. Il s’agit pour lui de remporter l’important Prix d’Europe (2 775 m), qui clôture le meeting d’été d’Enghien en beauté. Sa tâche n’est pas aisée car il doit rendre 25 mètres à de très bons chevaux comme Ino Ludois, et 50 mètres à Jonc d’Anson et quelques autres. Ino Ludois, au second poteau, un très bel alezan, fils de Quioco, avec liste en tête, se recommande de ses victoires dans les Prix Narquois (2 800 m), de Châteaudun (2 600 m), d’Etampes (2 100 m). Mais au premier poteau de départ de ce Prix d’Europe, il y a aussi Jonc d’Anson, un cheval en pleine ascension, dont la qualité va être confirmée. Un match à trois donc, sur trois échelons de départ.

Lorsque Léopold Verroken lance Jorky en pleine piste, celui-ci, sur une pointe de vitesse ahurissante, vient battre tous ses adversaires, remportant ainsi en 1’18’’9 une victoire mémorable. Jonc d’Anson domine James Pile pour la deuxième place, alors qu’Ino Ludois, quatrième, précède Granit, Infant d’Autize, Iris de Gournay, Gary Mab…

 

Trois jours plus tard, se court à Vincennes l’important Prix Jockey (2 250 m), une course continentale qui tient lieu de test avant le classique Critérium des 5 ans.

Jorky, qui a préféré se couvrir de gloire à Enghien, est absent, mais la course vaut le déplacement car elle a retenu de talentueux et prometteurs « 5 ans », dont le fameux Jiosco. Toujours associé à la célèbre casaque jaune à croix de Lorraine noire de l’écurie Levesque, le magnifique alezan va une fois de plus justifier la confiance de ses nombreux admirateurs. En avant-goût de l’inévitable match au sommet avec Jorky dans le Critérium des 5 ans, ils assistent à un nouvel exploit de Jiosco, exploit qui faisant suite à celui de Jorky dans le Prix d’Europe doit tenir les passionnés du trot et habitués de Vincennes en haleine jusqu’au jour du couronnement suprême pour les meilleurs « 5 ans ». Qui de Jorky ou de Jiosco va l’emporter ? La question captive le monde du turf. En attendant, Jiosco rallie victorieusement le poteau en 1’18’’1, précédant Jeff, Jarnac de Pirjou, Jacob du Chignon, Joyeux Chambon, Jaquelle, Javaza et Jalinotte.

 

Après cette brillante démonstration, Jiosco s’annonce comme le plus redoutable adversaire de Jorky, le plus apte à mettre sa couronne en péril lors du Critérium des 5 ans (3 000 m), disputé le samedi 30 août 1980. Un jour qui s’avère « historique » car si Jorky s’impose, il réalise un exploit unique dans les annales du trotting : remporter le Critérium des 5 ans, après avoir déjà gagné le Critérium des 3 ans et le Critérium des 4 ans.

Jorky et Jiosco trouvent cependant en Jeff un talentueux challenger, ne comptant pas moins de six victoires depuis le début de l’année 1980.

Au signal, Jorky et Jiosco s’élancent tous deux côte à côte dans un style impeccable, qui force l’admiration. Et puis soudain, à 300 mètres du départ, Jiosco se braque, se met à la faute pour se retrouver bon dernier. Javaza en tête imprime à la course une allure soutenue jusqu’au dernier tournant. Là, Jorky irrésistible se débarrasse de Javaza et effectue un spectaculaire « cavalier seul » dans la ligne droite sous les rugissements de la foule en délire. Ecrasant de supériorité, il franchit victorieusement le poteau sur le pied de 1’18’’5. A distance, Javaza contient aisément l’attaque de l’inattendue Jézabel d’Ouches.

Ainsi Jorky entre dans l’histoire, remportant le Critérium des 5 ans après avoir déjà gagné les Critériums des 3 et 4 ans et le Critérium Continental, exploit unique dans les annales du trotting. Mais il réalise une autre prouesse, celle de battre le record de l’épreuve établi un an plus tôt par Idéal du Gazeau en 1’18’’6. Or, Idéal du Gazeau avait pris le record à Vanina B, la mère de Jorky, qui remporte ce Critérium des 5 ans, dix ans après sa mère et vingt et un ans après son père Kerjacques.

Ceux qui espéraient un duel Jorky – Jiosco restent sur leur faim, le match tellement attendu est remis à plus tard, suite à l’inexplicable comportement de Jiosco, qui après un très beau passage n’a pratiquement jamais trotté.

A une semaine de là, Jorky remet son prestige en jeu dans le classique Prix de l’Etoile, mais il n’a pas besoin de forcer son talent pour battre en 1’17’’7 Javaza et Jézabel d’Ouches.

 

En mai, Jorky a disputé à Munich le fameux Grand Prix de Bavière pour s’octroyer une probante deuxième place derrière le suédois Express Gaxe, sur lequel il prenait une sérieuse revanche en Hollande. Le dimanche 5 octobre, une autre grande épreuve bavaroise rappelle Jorky à Munich ; il s’agit du Prix des Meilleurs (2 600 m), doté de 200 000 DM. Cette très belle course a souvent été l’apanage des trotteurs français et Jorky ne doit pas faire exception à la règle. Outre Jorky, la France a également délégué Hillion Brillouard, Igor du Beauvoisin et le tenant du titre, Ejakval, qui tente le doublé, que seul Hairos II a pu réaliser. Aussi est-ce Jorky le favori, devant Mustard et Madison Avenue.

Seule à partir au premier poteau, la pouliche Sabinette s’élance devant Super Mon, Keystone Patrol, Igor du Beauvoisin, Jorky et Ex Lee, alors qu’Hillion Brillouard rate son départ. Au passage devant les tribunes, Sabinette emmène Super Mon, Jorky, qui s’annonce. A l’entrée du dernier virage, Jorky dépasse Sabinette pour s’échapper irrésistiblement vers une victoire époustouflante, qu’il signe en 1’17’’8, battant de plus d’une seconde tous ses adversaires, qu’il vient vraiment de ridiculiser. C’est finalement Mustard, qui arrive deuxième devant Ejakval, Madison Avenue, Igor du Beauvoisin…

Jorky remporte ainsi sa cinquième victoire consécutive et la huitième de l’année 1980. Quant à Léopold Verroken, c’est la quatrième fois qu’il gagne le Prix des Meilleurs, l’ayant déjà remporté avec Tony M (1970), Arménie (1973) et Eléazar (1976).

 

Le dimanche 19 octobre 1980, Jorky peut se permettre un petit déplacement de formalité en terre picarde, à Amiens, pour le Prix du Président Emile Fossé (2 400 m), avec départ à l’autostart, qu’il remporte avec aisance, en 1’17’’6, très loin devant Istraeki, Jacob du Chignon, Javaza, Infant d’Autize…

 

Il reste à Jorky le Grand Prix des Nations (2 100 m), disputé à Milan, la dernière épreuve du Grand Circuit Européen et la mieux dotée des courses internationales en Italie après le Grand Prix de la Loterie de Naples.

Parvenu sans encombre dans la Péninsule, Jorky fait figure d’épouvantail pour les tifosi, qui n’hésitent pas à en faire leur favori.

Au passage des tribunes, Jorky tel un fantôme émerge du brouillard, fréquent sur la région milanaise à cette époque de l’année, pour triompher en solitaire, en 1’16’’4, loin devant Crown’s Pride, Chorus Master et Mustard, qui se classent dans cet ordre.

Ce nouveau succès de Jorky lui permet de ravir à Hillion Brillouard la troisième place au classement du Grand Circuit International 1980, derrière son compatriote Idéal du Gazeau et le suédois Express Gaxe.

 

Quelques temps après, Jorky est à Vincennes pour disputer le Prix Marcel Laurent (2 250 mètres), une course qui s’annonce passionnante, car il a seul la tâche redoutable de rendre 50 mètres à Larabello, le récent vainqueur du Critérium des 3 ans, et 25 mètres à tous ses autres adversaires, dont le fameux suédois Mustard, qu’il a déjà eu l’occasion de battre sur plusieurs pistes étrangères, notamment à Milan. Mais le match poursuite tourne court, Larabello seul à partir au premier poteau, s’élance au galop et est arrêté peu après, tandis qu’au second poteau, Mustard, selon sa mauvaise habitude, rate complètement son départ, laissant s’échapper toutes ses chances. Dans ces conditions, il ne reste plus à Jorky qu’à combler rapidement son handicap de 25 mètres sur les autres concurrents pour signer en 1’17’’6 sa huitième victoire consécutive et la onzième de l’année. Il mérite donc pleinement le titre de « Trotteur de l’Année 1980 » en France, d’autant qu’il détient aussi le record des gains pour l’année 1980 dans notre pays (toutes catégories comprises).

Ainsi, avec 1 532 000 francs, Jorky précède Kaiser Trot, le roi du monté, (1 484 000 francs), Ianthin (1 025 000 francs), Eléazar (920 000 francs), Jeune Orange (726 000 francs), L’Alezan (718 000 francs), Ino Ludois (710 000 francs), Jolenka (637 000 francs), Kali Baba (630 000 francs), Jeff (623 000 francs), Idéal du Gazeau (602 000 francs)… Entre autres, Jorky porte ses gains à 3 764 937 francs.


 

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Kerjacques, le père de Jorky

 

 

 

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Vanina B, la mère de Jorky

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Eléazar remporte le Prix d’Amérique 1980

 

 

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Gamélia, gagnante du Prix de Cornulier 1980

 

 

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Jorky bat Hadol du Vivier dans le Prix de l’Atlantique 1980

 

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Jorky et Léopold Verroken

 

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Jorky vainqueur du Grand Prix des Pays-Bas 1980 à La Haye

 

 

 

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Jeune Orange

 

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Jiosco

 

 

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Jamborée

 

 

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Jacob du Chignon

 

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Javaza et Iris de Vandel

 

 

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Jet d’Emeraude

 

 

 

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Jézabel d’Ouches. (Photo de Francis Annocque)

 

 

 

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Jiosco et Idéal du Gazeau. (Photo de Francis Annocque)

 

 

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Jonc d’Anson. (Photo de Francis Annocque)

 

 

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Jordaens. (Photo de Francis Annocque)

 

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Jarnibleu. (Photo de Francis Annocque)

Jorky et Ianthin, qui reste sur sa victoire dans le Prix de Bourgogne, se retrouvent face à face à l’occasion du Prix de Belgique (2 600 m), dernier test avant le Prix d’Amérique, disputé le dimanche 11 janvier 1981.

Cette première rencontre entre Jorky et Ianthin à Vincennes, marque aussi la rentrée d’Hadol du Vivier, absent des pistes depuis de longs mois, et présente pour la première fois sur le plateau de Gravelle deux trotteurs américains, le mâle Club Special et surtout la fameuse pouliche nommée Classical Way.

Sa venue à Vincennes, parée de son titre de championne du monde conquis aux dépens d’Idéal du Gazeau, auréolée de ses deux victoires sur notre champion le plus populaire et de ses succès californiens dans l’American Trotting Classic d’Hollywood Park, qui lui valurent le titre de « Trotteur de l’Année 1980 » aux USA, fait figure d’évènement. C’est donc à un Prix de Belgique particulièrement sélectif que l’on va assister.

En raison de leurs gains élevés, Jorky et Hadol du Vivier ont 25 mètres à rendre à tous leurs adversaires, dont Ianthin, qui tente un exploit unique, celui de remporter les quatre épreuves préparatoires au Prix d’Amérique, ayant déjà gagné les trois premières (Prix de Bretagne, Prix du Bourbonnais, Prix de Bourgogne).

Classical Way, que le public a en point de mire, rate son départ, comme d’ailleurs Ino Ludois, mais elle place ensuite un rush suicidaire pour se porter en tête avant même d’avoir atteint le tournant de Joinville. Très vite, Ianthin toujours aux aguets vient se placer dans son sillage, pour la relayer dans la montée où la jument se retrouve sans ressource. Et c’est finalement, Ianthin qui rallie victorieusement le poteau pour la dixième fois consécutive en France, mais Jorky dans une fin de course étourdissante vient finir à une encolure du vainqueur, réalisant la réduction de 1’17’’2 pour 2 625 mètres, rejoignant ainsi l’exploit de Grandpré, qui a trotté les 2 600 mètres du Prix d’Amérique 1978 en 1’16’’9. Ianthin pour sa part est crédité de 1’17’’8, son record sur la distance. Igor du Beauvoisin est un inattendu troisième en 1’18’’1, Ilienne remarquable quatrième en 1’18’’5.

En raison de cette performance étonnante, Jorky devient le « favori officiel » du prochain Prix d’Amérique. On le préfère en effet à Idéal du Gazeau, qui n’est pas reparu en piste depuis sa quatrième place du Prix de Bourgogne, mais aussi à Ianthin et Classical Way, les deux autres chevaux les plus en vue pour compléter ce tiercé royal.

 

Le dimanche 25 janvier 1981, Jorky est donc pour des millions de turfistes le héros du jour, le favori du 60e Prix d’Amérique, malgré la présence au départ d’autres champions, comme Idéal du Gazeau, son grand rival, Ianthin, Classical Way, Grandpré, vainqueur de cette épreuve en 1978 et toujours détenteur du record, High Echelon, qui a triomphé l’année suivante. On émet de vifs regrets pour le hongre Iris de Vandel, le banni, qui aurait eu sa place parmi cette brochette de vedettes, mais curieusement les absences d’Hadol du Vivier, d’Igor du Beauvoisin, de Jiosco et de Képi Vert passent sous silence.

 

A 16 heures 30, c’est le départ, un départ excellent pour Idéal du Gazeau, qui entre le premier sur la piste après la volte. Ianthin est également très vite et très bien parti, mais Jorky se trouve enfermé derrière trois rangées de chevaux. Classical Way cherche en vain l’autostart. Ino Ludois et Mustard ratent également leur départ.

Le cas de Classical Way semble le plus critique : elle perd près de trois secondes au départ, soit une cinquantaine de mètres.

Au passage devant les tribunes, c’est Ianthin qui se montre le plus allant, le plus résolu pour mener la course devant High Echelon superbe d’allure et Idéal du Gazeau, qu’Eugène Lefèvre maintient à pleins bras. Jorky est enfermé au sein du peloton, environ en dixième position. Classical Way quant à elle est bonne dernière et encore décollée.

Ianthin aborde en tête le tournant de Joinville où Club Special déchaîné dépasse Grandpré en véritable bolide, puis se rabat brusquement sur son adversaire, qui ne peut éviter la faute. Gêné à son tour, Ianthin, qui a déjà commis une petite faute peu avant le passage des tribunes, monte sur les rênes de l’américain, cogne son sulky et se désunit complètement, entraînant High Echelon dans sa faute. Alors c’est la panique, sauf pour Idéal du Gazeau, qui en profite pour prendre le large. Mais derrière lui ça va très mal.

Coup de théâtre ! Ianthin est disqualifié, Jonc d’Anson et Jacob du Chignon sont également à la faute. Le peloton se tasse. Jorky se retrouve pratiquement arrêté et perd ainsi une trentaine de mètres sur son grand rival Idéal du Gazeau, qui désormais ne sera plus rejoint.

Dans la montée, Idéal du Gazeau, hors d’atteinte, en profite pour accélérer la cadence. La partie est gagnée pour lui, il s’envole vers la gloire.

Le peloton se regroupe. Jorky, Classical Way et Ino Ludois trouvent enfin le passage. Classical Way prend un instant l’avantage sur Jorky, mais celui-ci se défend comme un diable ; il passe Kampion Creiomin, puis Illera et se lance ventre à terre à la poursuite d’Idéal du Gazeau, entraînant Classical Way dans son sillage.

On assiste alors à une remontée fantastique de Jorky, à un véritable exploit. Jamais sans doute, il n’a été aussi vite. Pendant quelques instants, un silence interrompt les hurlements de la foule enthousiaste, qui encourageait Idéal du Gazeau. C’est que Jorky semble sur le point de rejoindre le petit cheval noir. Mais ce n’est qu’une illusion, Jorky est parti de trop loin et Idéal du Gazeau l’emporte brillamment tandis que les tribunes résonnent de partout sous les clameurs enfiévrées de ses innombrables supporters.

A distance, Classical Way s’octroie une magnifique troisième place et plus loin encore c’est Istraeki qui termine bon quatrième devant Illera.

 

Dans le Prix de France (2 100 m), c’est Classical Way et non Jorky, qui s’octroie une éclatante revanche ; réalisant un véritable exploit, elle abaisse le record de la piste de Vincennes à 1’14’’2. L’ancien record de la piste était en 1’15’’3 l’apanage d’Idéal du Gazeau. La malchance s’est encore acharnée sur Jorky, obligé de renoncer à la victoire après avoir été mis hors de course par un concurrent.

Heureusement, il lui reste le Prix de Paris (3 150 m) disputé le dimanche suivant. Ce Prix de Paris a retenu la participation de quinze trotteurs de qualité.

En tant que second du Prix d’Amérique, Jorky est le seul à rendre 25 mètres, ce qui ne l’empêche pas d’être le grandissime favori. Pour mieux justifier cette position, il est d’ailleurs débarrassé d’Idéal du Gazeau et de Classical Way, qui tous deux s’en sont allés goûter un repos bien mérité, après leurs exploits du Prix d’Amérique et du Prix de France.

Ianthin et Istraeki deviennent a priori les principaux adversaires de Jorky, mais il peut aussi redouter Igor du Beauvoisin, excellent dans le Prix de Belgique.

Après le défilé, les chevaux se rangent à leurs lignes de départ, tandis que les jumelles des innombrables spectateurs se braquent sur Jorky, seul à partir 25 mètres derrière les autres.

Il prend d’ailleurs un excellent départ et, tout impatient de justifier la confiance de ses innombrables supporters, refait son handicap en un temps éclair !

Dès le premier tournant, Jorky prend la tête et, à environ 300 mètres du but, porte le « coup de grâce » dans un sprint irrésistible. Ianthin lâche prise.

C’est Istraeki qui vient prendre le meilleur sur Igor du Beauvoisin, et l’on note le rush final de Grande Source longtemps attardée.

La fin de course est splendide ; nettement détaché, Jorky franchit victorieusement le poteau d’arrivée dans un style éblouissant, qui cause une très grosse impression.

Istraeki est encore un superbe second, tandis qu’Igor du Beauvoisin et Grande Source terminent dans la même battue. La photo les départage au profit de la jument.

 

Jorky signe cette nouvelle victoire, sa première de l’année, sur le pied de 1’18’’7, le deuxième meilleur temps de la course après les 1’18’’3 réalisés par Bellino II en 1975, alors qu’il rendait 50 mètres à Cette Histoire et Casdar.

La supériorité de Jorky est indéniable, car Istraeki est crédité de 1’19’’5, Grande Source et Igor du Beauvoisin de 1’19’’6, High Echelon de 1’19’’8 et Ianthin de 1’19’’9.

 

Le hasard est parfois bien étrange, car au lendemain de cette superbe victoire de Jorky, le monde hippique est bouleversé par la nouvelle de la mort de son illustre père, Kerjacques, celui que l’on nomme à juste titre « l’étalon du siècle ». Kerjacques s’est éteint au matin du lundi 9 février 1981, au haras national d’Angers où il fonctionnait comme étalon depuis 1960. Il était âgé de 27 ans.

 

Sans doute, Jorky est-il encore sous le coup de l’émotion que lui cause la mort de son célèbre père, lorsqu’il court le classique Prix de Sélection, avec 50 mètres de handicap, car il cause une vive déception, se montrant fautif, et terminant cinquième, mais en bolide.

 

Cette contre-performance inattendue de Jorky lui vaut une mise au repos et il laisse ainsi passer deux engagements. Il choisit de faire sa rentrée en Allemagne, dans le Grand Prix de Recklinghausen, disputé le dimanche 5 avril, qu’il remporte dans un sprint décisif, en 1’14’’8, son nouveau record. Keystone Patrol, deuxième, est pour sa part crédité de 1’15’’2.

 

Le dimanche 31 mai 1981 est un jour exceptionnel pour le trotting européen et les amateurs qui ont fait le déplacement à Stockholm vont être servis, car sur l’hippodrome de Solvalla, dans la banlieue de la capitale suédoise, se court l’Elitloppet, le Grand Prix de l’Elite Internationale (1 609 m) 800 000 KRS d’allocation, soit 832 500 francs. L’Elitlopp ou Elitloppet est considéré à juste titre comme l’épreuve la plus dure d’Europe. Elle se dispute en au moins deux épreuves de qualification, une finale et une consolation pour les non qualifiés. Le départ est donné à l’autostart et la distance, le « mile » (1 609 m), permet toujours d’enregistrer des temps record sur cette piste particulièrement rapide.

Des champions comme Eléazar, Hadol du Vivier, Idéal du Gazeau y ont tous établi leur meilleure réduction kilométrique et le palmarès de cette épreuve prestigieuse s’orne de noms illustres dans l’histoire du trot.

Cette année encore, le vainqueur sera un champion d’exception, la France, les Etats-Unis, l’Italie, l’Allemagne, la Finlande et les Pays Scandinaves ayant délégué quelques-uns de leurs phénomènes, ceux qui paraissent « les mieux affûtés », la victoire en finale, dans une telle compétition, tenant toujours de l’exploit.

Deux épreuves de qualification sont prévues avec chacune huit partants.

La France est très bien représentée par trois sujets de grande valeur, le tenant du titre Idéal du Gazeau, vainqueur du Prix d’Amérique et leader actuel du Grand Circuit International, Jorky, son éternel rival, second du Prix d’Amérique et vainqueur du Prix de Paris, Jet d’Emeraude, le troisième français, loin de valoir ses deux compatriotes, se recommande pourtant de deux excellentes performances en Allemagne, troisième de Jorky dans le Grand Prix de Recklinghausen et deuxième d’Ianthin dans le Grand Prix de Bavière.

Jorky s’est vu assigner le n° 6 derrière l’autostart dans la première épreuve. Il est ainsi confronté à Burgomeister, le favori de cette course, le grand champion de l’écurie Haughton. Un seul point noir en ce qui concerne le champion américain que mène Billy Haughton, il s’est esquinté un genou dans un choc lors de son embarquement à New York et un vétérinaire a dû faire le déplacement pour le soigner à la hâte durant le transport. Le genou fut maintenu dans de la glace, juste avant d’être pansé pour la course. La question est de savoir si le pansement va tenir suffisamment longtemps. Burgomeister est le vainqueur tragique de l’Hambletonian 1980 ; il était alors drivé par Billy Haughton, car son jeune propriétaire, Peter Haughton, le fils de Billy, venait de se tuer en voiture sans pouvoir réaliser son rêve.

Le départ ayant été repris, Ex Lee est le plus rapide au second essai, bientôt rejoint par Speedy Min, dans une superbe action, pour entrer en tête dans la ligne d’arrivée, alors que Burgomeister passe à l’offensive ; plaçant un démarrage foudroyant, il dépasse tous ses adversaires pour s’envoler vers le poteau. Jorky réagit à son tour, et revient en flèche sur Burgomeister. Mais celui-ci conserve à temps un net avantage.

Arrivent ensuite Speedy Min, Valuable Donut et Ex Lee.

Une grande clameur secoue bientôt les tribunes lorsque les temps de la course sont affichés. En effet, pour sa première tentative en Europe, Burgomeister réalise un exploit ; en trottant sur le pied de 1’13’’, il bat non seulement l’ancien record de la piste établi en 1’13’’2 par Pershing et Hadol du Vivier, mais par la même occasion le record du trot sur le continent, qui était en 1’13’’1 l’apanage d’Hadol du Vivier depuis 1978. Or Jorky a réalisé 1’13’’1 !

 

Idéal du Gazeau, l’autre favori, remporte le second heat et porte son record à 1’13’’5.

La finale s’annonce particulièrement alléchante, on attend beaucoup du duel Burgomeister – Idéal du Gazeau, les deux vainqueurs des éliminatoires, mais dans l’ensemble l’américain est préféré au français ; son record de 1’13’’ a vraiment impressionné le public.

Burgomeister est donc le favori, devant Idéal du Gazeau et Jorky.

Speedy Min démarre en trombe, mais Valuable Donut lui prend l’avantage en face et imprime une cadence très rapide, alors que Jorky, Super Mon, Burgomeister et Idéal du Gazeau se rapprochent progressivement avant le dernier virage.

Là Jorky, dans un bel élan, rejoint Speedy Min. Super Mon et Pamir Brodde se rapprochent également pour se mêler au débat. Mais Burgomeister, dont la douleur au genou s’est réveillée, éclate subitement, perdant toutes ses chances. Il finit la course en boitant, gênant Idéal du Gazeau, en l’obligeant à se déporter tout à l’extérieur ; irrémédiablement, les deux favoris sont battus.

La victoire va se jouer sur une pointe acérée entre Jorky, Speedy Min, Super Mon et Pamir Brodde, alors que Valuable Donut doit s’incliner avec les honneurs.

Surprenant d’aisance, Jorky place son finish mortel pour rallier victorieusement le poteau d’arrivée sous les acclamations de la foule enthousiaste. Le fils de Kerjacques s’est montré vraiment impressionnant de supériorité, signant cette victoire dans la réduction de 1’13’’2.

A distance, Speedy Min s’octroie en 1’13’’5 une probante deuxième place devant Pamir Brodde (1’13’’6), Super Mon (1’13’’6), Crown’s Pride (1’13’’8), Idéal du Gazeau seulement sixième en 1’14’’3, Valuable Donut et le malchanceux Burgomeister.

 

Ainsi, Jorky succède à Idéal du Gazeau dans cette épreuve prestigieuse, mais les deux champions ont tous les deux rendez-vous au Danemark pour une éventuelle revanche.

Quant à Léopold Verroken, c’est la troisième fois qu’il remporte l’Elitloppet de  Stockholm, l’ayant déjà gagné en 1976 avec Dimitria et en 1977 avec Eléazar.

 

Le lundi 8 juin 1981, Idéal du Gazeau et Jorky se retrouvent dans la capitale danoise pour disputer sur l’hippodrome de Charlottenlund la Coupe de Copenhague (2 011 m), septième épreuve du Grand Circuit International.

De la part d’Idéal du Gazeau on attend une revanche ou du moins une réhabilitation.

Le plateau de vedettes est encore exceptionnel puisque l’on retrouve la plupart des participants de l’Elitloppet : Burgomeister, Speedy Min, Pamir Brodde, Crown’s Pride…

En raison de sa blessure au genou, Burgomeister est un partant douteux.

Or, il est finalement déclaré forfait en dernière minute. Décidément, ce Burgomeister est un cheval marqué par le Destin.

L’année dernière, Idéal du Gazeau était aussi le vainqueur de la Coupe de Copenhague, une très belle épreuve dotée de 500 000 KRD d’allocation, qui compte déjà à son palmarès les victoires de Wiretapper (1976), Keystone Pioneer (1977), Pershing (1978), Charme Asserdal (1979), Idéal du Gazeau (1980).

L’étonnant Speedy Min déboule encore le plus vite derrière l’autostart, mais Jorky, dans une forme éblouissante, ne laisse à personne le soin de mener la course, prenant tête et corde pour imposer un rythme endiablé, jusque dans la ligne d’en face. Là, Idéal du Gazeau ne s’avoue pas encore battu, prend un léger avantage sur Speedy Min, puis se poste en embuscade dans le dos de son rival français. Jorky entame la ligne d’arrivée en tête devant Idéal du Gazeau, qui attaque, mais son rival se montre intraitable. Jusqu’au bout, Jorky va le tenir en respect pour s’octroyer une très nette victoire sous les ovations du public déchaîné. Jorky triomphe de belle manière sur le pied de 1’16’’3. Idéal du Gazeau est bon deuxième en 1’16’’4, Speedy Min excellent troisième en 1’16’’5.

 

Jorky prouve une fois de plus qu’il est bien le meilleur ; il ne doit pas en rester là. Alors qu’on apprend que Classical Way, après un « mariage » avec l’illustre Nevele Pride, abandonne définitivement la compétition, Jorky lui se retrouve en point de mire à Vincennes où se dispute l’important Prix René Ballière (2 100 m) avec départ à l’autostart.

Cette grande épreuve disputée le jeudi 18 juin 1981 est attendue avec impatience par les habitués de Vincennes et les amateurs de trot. On espère en effet assister à deux duels exceptionnels dans la même course, le premier entre Idéal du Gazeau et Jorky pour la victoire, le deuxième entre Ino Ludois et Jiosco pour la troisième place.

Malheureusement, Idéal du Gazeau, qui vient de subir deux cuisantes défaites contre Jorky, est déclaré forfait et Jiosco, restant sur trois victoires consécutives, préfère en rester là pour le moment. (Ianthin lui s’est gravement blessé à l’herbage, en revenant de Munich).

Par conséquent, Ino Ludois devient le principal challenger de Jorky. Il se recommande surtout de sa victoire sur Iris de Vandel en nocturne. En forme optimale (comme toujours à cette époque de l’année), Ino Ludois va remarquablement tenir son rôle dans ce Prix René Ballière, bien qu’ayant tiré le plus mauvais numéro derrière l’autostart, le 9, tout à l’extérieur.

Jorky profite de sa position privilégiée pour prendre aussitôt la tête et la corde et ne plus la quitter jusqu’au poteau d’arrivée, mais Ino Ludois, auteur d’une spectaculaire remontée, le rejoint pour aborder avec lui le dernier tournant. Ensemble, ils creusent le trou à l’entrée de la ligne droite. Irish Glory, tout à fait étonnant à ce niveau, se retrouve en troisième position.

A mi-ligne droite, Jorky mollit et Ino Ludois se montre de plus en plus menaçant.

Léopold Verroken a besoin de solliciter son partenaire, qui résiste de justesse à l’assaut final très incisif d’Ino Ludois. Sur une pointe de vitesse efficace, Illera s’octroie une probante troisième place devant l’inattendu Irish Glory.

Jorky, qui a donné chaud à ses partisans, est crédité de la même réduction kilométrique qu’Ino Ludois, une réduction excellente d’ailleurs de 1’15’’9.

 

A quelques jours de là, Jorky, qui est d’ores et déjà le premier trotteur français engagé dans le futur Championnat du Monde à New York, a encore quelques démonstrations élogieuses à effectuer en Europe, avant son départ pour l’Amérique.

D’abord, il s’en va en Hollande, à La Haye, sur l’hippodrome de Duindigt, pour disputer le Grand Prix des Pays-Bas (2 600 m), qu’il a déjà remporté l’an dernier. Parti grandissime favori, il va fort brillamment justifier la confiance de ses partisans en triomphant sans la moindre inquiétude, en 1’18’’4. Keystone Patriot a le temps d’ajuster Mustard pour la deuxième place, tandis que Keystone Patrol se classe quatrième devant Speedy Min, qui déçoit. Le terrain alourdi par la pluie incessante n’a pas permis à Jorky d’établir un record, mais il signe ainsi sa quatrième victoire consécutive et paraît fin prêt pour faire aussi bien de l’autre côté de l’Atlantique.

 

Le dimanche 12 juillet 1981 se dispute la neuvième épreuve du Grand Circuit International, l’Elite Rennen (2 500 m) de Gelsenkirchen avec 200 000 DM d’allocation.

Jorky, en forme éblouissante, ne peut manquer ce déplacement et une fois de plus il va être le grandissime favori. Cette épreuve prestigieuse compte déjà à son palmarès les noms de quelques trotteurs illustres, comme Gélinotte (1956), Icare IV (1958), Hairos II (1959), Une de Mai (1971), Dart Hanover (1973), Equiléo (1974), Bellino II (1975), Eléazar (1976), Pershing (1977 et 1979), Hadol du Vivier (1978) et Idéal du Gazeau (1980).

Jorky se doit d’y ajouter le sien.

Keystone Patriot est le plus rapide au départ derrière l’autostart, mais se voit aussitôt rejoint par Keystone Patrol, Khali de Vrie, Jorky, Speedy Min, Jeff et Mustard, tandis que Jet d’Emeraude se désunit, perdant toutes ses chances.

Dans un élan déterminé, Jorky prend très tôt le commandement pour finalement s’imposer sur le pied de 1’17’’1 ; avec un total de 15 points, il rejoint Idéal du Gazeau à la tête du Grand Circuit International, prouvant par la même occasion qu’il est vu sa forme actuelle le meilleur trotteur d’Europe après ses cinq succès consécutifs remportés à Stockholm, Copenhague, Vincennes, La Haye et Gelsenkirchen.

Son prochain objectif va être le Championnat du Monde des trotteurs, pour lequel il retrouve son grand rival Idéal du Gazeau, l’entourage de celui-ci s’étant finalement décidé à engager son champion dans la grande aventure, le samedi 25 juillet 1981, jour de la 23e édition du Roosevelt International Trot (200 000 dollars d’allocation, 2 011 mètres).

Jorky et Idéal du Gazeau, les deux meilleurs trotteurs d’Europe, qui se partagent la première place du Grand Circuit International, y représentent la France. D’autres trotteurs européens ont été invités : le suédois Pamir Brodde, les italiens Ceox et Gibson.

Les autres trotteurs étrangers engagés dans ce Championnat du Monde sont le canadien Horton et l’australien Tartan Lawn. Mais il arrive trop tard, ce qui permet l’invitation pour la première fois d’un trotteur argentin, Arin Baritono. Après le forfait de Gibson, il y a donc huit chevaux au départ de ce Roosevelt International Trot 1981.

Arrivé précédé de l’excellente réputation que lui valent ses récents exploits, Jorky est le grand favori de la course avec une cote de 2/1, devant l’américain Motor Mouth à 3/1, Idéal du Gazeau (5/1) et Kading.

Jorky débute sur l’anneau new-yorkais, mais ce n’est pas la seule raison de sa défaite. Tout le monde connaît Jorky, du moins tous les habitués des courses connaissent son tempérament particulièrement « chaud ». Ce soir-là, une fois de plus il est au comble de l’énervement, de l’excitation ; pire encore, entassé dans un hangar avec d’autres chevaux mâles et femelles, il vire à l’étalon, ne tenant plus en place. Il était prêt à mordre un rival éventuel pour s’offrir une belle pouliche. Dans les quelques heures qui vont précéder la grande course, il va gaspiller tout son influx nerveux. Durant le magnifique défilé, il ne tient pas en place et doit être maintenu à l’écart des autres concurrents. Pendant le canter, Léopold Verroken le sent mou, Jorky a déjà perdu la course en perdant toute son énergie à jouer les séducteurs.

Comme on s’y attendait, il se laisse prendre de vitesse au départ par l’américain Motor Mouth, qui s’installe à la corde, alors qu’Idéal du Gazeau s’empresse de refermer le piège sur son rival français, le maintenant dans la « boîte » ; dès lors, il n’a plus qu’à contrôler les opérations. Mais il vire mal sur cette piste et Jorky revient sur lui ; dans une fin de course impressionnante, il termine à une encolure d’Idéal du Gazeau, mais dans la même réduction kilométrique de 1’15’’7, le troisième meilleur temps de l’épreuve.

 

Or, Roosevelt Raceway invite comme chaque année les cinq premiers du Championnat du Monde à disputer la revanche, la Challenge Cup (100 000 dollars d’allocation, 2 413 mètres de distance), le samedi suivant.

A l’avance les journaux annoncent un nouveau duel Idéal du Gazeau – Jorky, les deux trotteurs, qui en l’absence de Classical Way, Burgomeister et Final Score, dominent le trotting mondial avec une supériorité éclatante.

Il y a encore huit chevaux au départ de la Challenge Cup, les cinq premiers du Roosevelt International : Idéal du Gazeau, Jorky, Pamir Brodde, Motor Mouth et Ceox, et trois autres trotteurs américains, Able Mission, troisième de l’American Trotting Championship, Super Marty, leader des trotteurs californiens, et Wonder Child.

De l’avis général, aucun des trois nouveaux venus ne semble capable d’inquiéter Idéal du Gazeau et Jorky, seul Able Mission, avec une course plus heureuse que dans le Championnat Américain, peut espérer une troisième place.

Enfin, il est admis que Jorky, s’il reste sage avant la course, peut très bien prendre sa revanche sur « Idéal » et inscrire son nom au palmarès de cette belle épreuve.

 

Pamir Brodde profite de sa position privilégiée pour prendre rapidement la tête et la corde jusqu’au dernier passage devant les tribunes, où le train s’accélère encore sous l’impulsion d’Idéal du Gazeau, qui déborde le trotteur suédois, quand Jorky à son tour se lance dans la bataille ; un duel palpitant commence entre les deux champions français.

Dans le dernier tournant, Jorky attaque Idéal du Gazeau et prend sur lui un léger avantage, tandis que Pamir Brodde sur ses fins cède complètement.

Sous l’attaque de Jorky, Idéal du Gazeau, qui n’aime pas être « chatouillé » (on le sait) commet une légère faute, mais Eugène Lefèvre le reprend aussitôt.

Dans les tribunes, la tension monte, les clameurs résonnent de partout. C’est que la lutte que se livrent les deux trotteurs français est splendide.

Derrière Idéal et Jorky, les autres sont archi-battus.

Durant toute la ligne droite, Jorky tente de décramponner Idéal du Gazeau.

Qui l’emportera ? La lutte est indécise, le suspense tient le public en émoi, chacun retient son souffle : Idéal – Jorky ? Jorky – Idéal ? Jorky ? Idéal ? Le poteau est franchi !

Qui a gagné ?... Soudain c’est l’explosion dans les tribunes lorsque le résultat est affiché : dead-heat ! Les deux champions ont franchi la ligne d’arrivée dans la même battue.

La photo-finish ne peut les départager. C’est un véritable exploit que viennent d’accomplir Idéal du Gazeau et Jorky, qui après 2 413 mètres de course terminent tous les deux premiers ex aequo ! Un dead-heat historique à New York.

Une fois de plus la Marseillaise retentit, tandis que Jorky et Idéal du Gazeau effectuent leur tour d’honneur sous les ovations du public littéralement déchaîné ; et c’est sous les cris de « Vive la France ! » qu’Idéal du Gazeau et Jorky quittent la piste de leurs exploits, tandis que les 20 000 spectateurs continuent d’applaudir.

Les Français présents ce soir-là sur l’hippodrome de Roosevelt vivent un moment inoubliable. Grâce à deux chevaux merveilleux, Idéal du Gazeau et Jorky, ils ressentent en effet l’immense plaisir d’être Français !

Enfin, signalons qu’Idéal du Gazeau et Jorky ont tous les deux triomphé sur le pied de 1’16’’9, le deuxième meilleur temps de la course.

Le trotteur californien Super Marty est troisième à quatre longueurs des deux français, Able Mission est quatrième à sept longueurs.

 

Après cette étonnante démonstration, on en est convaincu : Idéal du Gazeau et Jorky sont bien les deux meilleurs trotteurs du monde ! N’ont-ils pas dominé avec le même brio le Prix d’Amérique, le Roosevelt International et la Challenge Cup ? Ne sont-ils pas actuellement les deux leaders du Grand Circuit International Européen avec une égalité de 15 points ?

 

Jorky et Léopold Verroken

Jorky et Léopold Verroken

Jorky remporte la finale de l'Elitloppet 1981 en temps record

Jorky remporte la finale de l'Elitloppet 1981 en temps record

Jorky bat Idéal du Gazeau dans la Coupe de Copenhague 1981

Jorky bat Idéal du Gazeau dans la Coupe de Copenhague 1981

Jorky résiste de peu à Ino Ludois dans le Prix René Ballière 1981.  (Photo de Francis Annocque)

Jorky résiste de peu à Ino Ludois dans le Prix René Ballière 1981. (Photo de Francis Annocque)

Jorky et Idéal du Gazeau : match nul à New York !

Jorky et Idéal du Gazeau : match nul à New York !

Jorky éprouve maintenant le besoin de se faire applaudir sur son sol natal, après une courte période de repos bien mérité. Il a choisi pour sa rentrée française, la capitale champenoise dans laquelle se dispute le Grand Prix de la Ville de Reims (2 250 m), le dimanche 20 septembre 1981. Or, le même jour, Idéal du Gazeau, à des centaines de kilomètres, participe au Grand Prix d’Aby à Göteborg en Suède.

Les deux champions du trot français attaquent ainsi sur deux fronts.

En compagnie d’Igor du Beauvoisin, d’Ispahan et de Jacob du Chignon, lauréat de cette épreuve l’an dernier, Jorky va tenter de rendre 50 mètres aux chevaux du premier poteau, et 25 mètres à ceux du second. Mais c’est très détaché, qu’il franchit victorieusement le poteau d’arrivée, pulvérisant ainsi le record de la piste établi un an plus tôt par Jacob du Chignon en 1’18’’5. Jorky lui réalise tout simplement 1’17’’1 !

Igor du Beauvoisin, à plus d’une seconde de Jorky, est un facile second, mais Koelpinia parvient courageusement à conserver la troisième place devant le remarquable Ispahan.

 

Jorky a laissé passer une occasion, celle d’améliorer son score au classement du Grand Circuit, mais il ne doit pas manquer le rendez-vous du dimanche 4 octobre à Munich, où l’absence d’Idéal du Gazeau doit lui permettre de réitérer sa victoire de l’an dernier dans le Prix des Meilleurs (2 625 mètres, 200 000 DM).

Jorky, bien entendu, est le grandissime favori, mais on lui oppose le suédois Mustard et le finlandais Keystone Patriot, qui vient de tenir tête à Idéal du Gazeau dans le Grand Prix de Finlande.

Au signal, Keystone Patriot, Super Male, Jorky et Mustard s’élancent le plus vite derrière l’autostart, tandis qu’Igor du Beauvoisin au galop est éliminé d’office.

L’ordre ne change guère durant un tour, au bout duquel Jorky, le grand favori, passe déjà à l’attaque, rejoint le leader Keystone Patriot, lui fausse compagnie, creuse le trou, et s’envole vers une éclatante victoire, tout en affichant une supériorité écrasante sur tous ses adversaires, dont Istraeki, qui poursuit son rush intrépide pour s’octroyer une probante deuxième place devant les finlandais Super Male et Keystone Patriot, qui commençait à trouver la distance un peu longue pour ses aptitudes.

Jorky signe cette nouvelle victoire ridicule de facilité sur le pied de 1’18’’4.

 

Jorky semble bouder le titre de « champion d’Europe », malgré ses immenses moyens, mais il n’hésite pas à remettre son prestige en jeu à Amiens où il s’attaque pour la première fois au fameux Iris de Vandel, l’une des idoles des turfistes parisiens, que son état de hongre empêche de courir les plus grandes épreuves internationales de Vincennes comme le Prix d’Amérique, qui se dispute en hiver, la saison préférée de ce grand champion, celle qui le rend quasi-invincible. La rencontre Jorky – Iris de Vandel, faisant figure d’événement, a lieu en nocturne sur le bel hippodrome du Petit-Saint-Jean à Amiens, le samedi 31 octobre 1981, à l’occasion du Prix du Président Emile Fossé (2 400 mètres).

Malgré un détestable petit crachin, la foule est venue nombreuse pour admirer les deux champions. Il faut dire qu’autour de Jorky et d’Iris de Vandel, la société picarde a su réunir un plateau de choix avec notamment Istraeki, Khali de Vrie, Kaprius, Infant d’Autize, Jackson, Idylle du Corta, Jiquier, qui ont également effectué le déplacement.

Jorky est bien sûr le grand favori, mais on lui oppose assez sérieusement Iris de Vandel. Après le défilé, le départ est donné à l’autostart et, d’entrée de jeu, les ténors montrent au public leurs bonnes résolutions : Iris de Vandel, Jorky, Istraeki et Khali de Vrie mènent tous les quatre détachés du reste du peloton.

Mais c’est Iris de Vandel qui se montre le plus véloce ; il a pris un départ fantastique derrière l’autostart et il impose aussitôt un train d’enfer. Attendant son heure, Jorky suit en bonne position. Iris de Vandel va très vite et l’ordre ne change pas durant le premier tour.

A la sortie du virage, Jorky a rejoint Iris de Vandel, la bagarre a commencé. Sous les acclamations du public enthousiaste, le rythme s’accélère, le suspense s’intensifie.

A l’entrée de la ligne droite, Jorky prend le meilleur et augmente encore son avance. On croit alors qu’il a gagné et l’on attend son envolée, mais Iris de Vandel, extraordinaire de courage, revient sur le fils de Kerjacques à mi-ligne droite. Jusqu’au poteau d’arrivée, les deux champions vont lutter ainsi « à couteaux tirés ». Iris de Vandel s’accroche, Jorky se déchaîne, puisant dans ses ressources, donnant le maximum. Alors là seulement, Iris de Vandel doit s’incliner, Jorky fait la différence pour s’imposer avec une longueur d’avance.

Les deux champions ont droit à une véritable ovation.

A distance, Istraeki s’octroie sans problème la troisième place devant Khali de Vrie, Infant d’Autize, Jiquier, Kaprius…

Jorky signe son nouveau succès sur le pied de 1’17’’, Iris de Vandel est pour sa part crédité de 1’17’’2, Istraeki de 1’17’’5, Khali de Vrie de 1’17’’8 et Infant d’Autize de 1’18’’.

 

Le dimanche 22 novembre 1981, à Milan, se dispute le Grand Prix des Nations (2 100 mètres, 150 millions de lires), la dernière épreuve du Grand Circuit International Européen.

Idéal du Gazeau et Jorky se retrouvent pour la première fois depuis leur exploit new-yorkais et affrontent pour la première fois aussi le nouveau crack de la Péninsule, l’italo-américain Gator Bowl, un fils de Super Bowl, dont la renommée va grandissante.

Ce nouveau phénomène italien, d’origine américaine, a de quoi impressionner Idéal du Gazeau et Jorky. Les Italiens affirment d’ailleurs qu’il est capable de les battre à la régulière. En fait, les trois champions vont assurer le spectacle et tenir toutes les promesses, en s’octroyant de façon magistrale les trois premières places, Idéal du Gazeau l’emportant d’extrême justesse sur Jorky, lui-même gardant un minime avantage sur Gator Bowl.

Ils sont d’ailleurs tous les trois chronométrés dans la même réduction de 1’15’’4 !

 

Mais Jorky ne peut rester sur une défaite même honorable, aussi n’hésite-t-il pas à s’aligner au départ du Prix de Bretagne (2 800 m), le samedi 28 novembre 1981.

Il s’agit de la première épreuve préparatoire au Prix d’Amérique, dans laquelle il va devoir rendre 25 mètres à tous ses adversaires, ce qui ne l’empêche pas d’être une fois de plus le grandissime favori. Il va justifier pleinement la confiance de ses nombreux supporters.

Au moment propice, Léopold Verroken donne le signal à son partenaire et Jorky aussitôt place un démarrage foudroyant auquel seule Jézabel d’Ouches va pouvoir répondre en s’accrochant courageusement, tandis qu’Idylle Charmeuse semble clouée sur place.

Dans la ligne d’arrivée, la supériorité de Jorky se fait éclatante ; lâchant Jézabel d’Ouches sur une nouvelle accélération, il franchit détaché le poteau de la victoire.

Jézabel d’Ouches conserve courageusement la seconde place devant Iris de Gournay très menaçant. En pleine piste, Illera revient finir très vite pour s’octroyer la quatrième place devant Istraeki, Igor du Beauvoisin, Idylle Charmeuse, Irish Glory, Idylle du Corta…

Dans son envolée, Jorky, qui remporte ainsi sa douzième victoire de l’année, a fait afficher une réduction de 1’19’’ pour les 2 825 mètres de son parcours, un temps remarquable sur un terrain rendu très collant par la pluie. De belle manière, Jorky pose déjà des jalons en vue du Prix d’Amérique.

Sa prochaine sortie est annoncée pour le 19 décembre dans le Prix du Bourbonnais, deuxième étape sur la voie de la plus belle course du monde.

Le samedi 28 novembre est un grand jour pour Léopold Verroken car quelques minutes après Jorky, il conduit à la victoire son autre « chef-d’œuvre », l’étonnant Kisin, qui affiche lui aussi une supériorité écrasante sur ses principaux adversaires : Khali de Vrie, Katinka, Kivien, Kaprius, King Black, Kapulco, dans le Prix Doynel de Saint-Quentin (2 800 m).

Or, le samedi 19 décembre, Léopold Verroken présente ce même Kisin au départ du Prix du Bourbonnais (2 600 m). L’absence de Jorky provoque une vive déception parmi ses admirateurs, des bruits inquiétants circulent à son sujet : - Il souffre d’un mal mystérieux, sa participation au Prix d’Amérique est compromise.

Tout cela n’a rien de rassurant, mais Kisin supplée magnifiquement son illustre compagnon d’entraînement en s’octroyant une belle victoire devant un remarquable Kaiser Trot, qui précède Katinka, Lançon, Hêtre Vert, Infante d’Aunou, Ino Ludois, Istraeki…

 

Jorky est engagé dans le Prix de Belgique (2 600 m), disputé le dimanche 17 janvier à quinze jours du Prix d’Amérique. Malheureusement, il ne répond pas présent à l’appel, les rumeurs circulant à son sujet sont fondées, Jorky (hélas) souffre d’une para-phlébite provoquant des troubles circulatoires et l’inflammation d’une veine de l’antérieur gauche près du tendon. Dans ces conditions, il aurait été dans l’impossibilité de se livrer complètement en course. Sa participation au Prix d’Amérique devient improbable.

 

On pourrait penser qu’il laisse la voie libre à son grand rival, Idéal du Gazeau. Mais l’histoire prend parfois des tournures inattendues…

On se souvient qu’en 1979, dans le Prix d’Amérique, Léopold Verroken, avec Eléazar a ouvert la corde à High Echelon, que drivait Jean-Pierre Dubois. Or, Jean-Pierre Dubois, qui a une dette en quelque sorte envers Léopold Verroken, va se charger de battre Idéal du Gazeau, et de remporter les trois courses que Jorky semblait en mesure de gagner : le Prix d’Amérique, le Prix de France, et le Grand Critérium de Vitesse, non pas avec High Echelon, mais avec un autre « fantôme » surgi du passé, Hymour, un descendant de Jamin, comme lui issu du haras des Rouges Terres, et un ancien challenger d’Hadol du Vivier.

 

Jorky à Amiens, la nuit où il battit Iris de Vandel dans le Prix du Président Emile Fossé 1981.  (Photo de Francis Annocque)

Jorky à Amiens, la nuit où il battit Iris de Vandel dans le Prix du Président Emile Fossé 1981. (Photo de Francis Annocque)

Jorky remporte le Prix de Bretagne 1981 en rendant 25 mètres à tous ses adversaires.  (Photo de Francis Annocque)

Jorky remporte le Prix de Bretagne 1981 en rendant 25 mètres à tous ses adversaires. (Photo de Francis Annocque)

Jorky

Jorky

Idéal du Gazeau

Idéal du Gazeau

Kisin

Kisin

Hymour

Hymour

Hymour remporte le Prix d’Amérique 1982 devant Jiosco et Idéal du Gazeau

Hymour remporte le Prix d’Amérique 1982 devant Jiosco et Idéal du Gazeau

Hymour remporte le Prix de France 1982 devant Idéal du Gazeau, Jarnibleu et Jiosco

Hymour remporte le Prix de France 1982 devant Idéal du Gazeau, Jarnibleu et Jiosco

Jorky, hors course durant tout l’hiver, puis le printemps durant lequel il fonctionne comme étalon, attend l’été pour effectuer une petite rentrée victorieuse dans le nord de la France, à La Capelle, près de Lille, dans le Prix de la Grande Thiérache (2 700 m), qu’il remporte en 1’18’’6 devant un autre « ressuscité », Kapulco, ancien chef de file de sa génération au sulky. Ce retour prometteur permet à Jorky de partir favori du Prix d’Europe (2 800 m), clou du festival d’été à Enghien (qu’il a déjà remporté en 1980), bien que devant rendre 25 mètres à un certain King Black alors en état de grâce.

Encore à court de condition et malgré une fin de course époustouflante, Jorky doit se contenter d’une probante deuxième place à une encolure de King Black, juste devant Ianthin. La performance de Jorky, visiblement en forme ascendante, est jugée suffisamment bonne pour qu’il accompagne à nouveau Idéal du Gazeau dans la grande aventure new-yorkaise où ils ont tous deux des titres à défendre.

Mystic Park, le jeune phénomène américain, vainqueur impressionnant de l’American Championship en temps record face à ses aînés à seulement 3 ans, mais victime par la suite d’inflammations aux pieds, est finalement écarté du Championnat du Monde, disputé dans le Roosevelt International Trot (2 011 m) à la fin du mois d’août.

Iris de Vandel, auteur de plusieurs victoires et bonnes performances aux Etats-Unis et au Canada, mais ayant déçu sur l’anneau de Roosevelt, doit lui aussi renoncer à ce titre flatteur de « champion du monde » qu’on rêvait de lui faire conquérir.

Une incartade de Spice Island empêche Jorky de s’imposer, ce qui permet à Idéal du Gazeau de renouveler en 1’17’’6 sa victoire de l’an dernier, malgré Zebu, Nino Blazing, Jorky, bien revenu, qui se classent dans cet ordre, alors que Ghendero, Erin’s Jet et Spice Island, fautifs, ont perdu toutes chances.

Idéal du Gazeau a gagné si facilement le Roosevelt International qu’il semble imbattable dans la revanche, la Challenge Gold Cup (2 413 m), disputée une semaine plus tard, mais il joue de malchance, ce dont profite Jorky pour forcer l’allure dans le dernier tournant, obligeant Spice Island à rétrograder.

Gêné à nouveau, Idéal du Gazeau est à la faute, tandis que Jorky impérial triomphe pour la seconde fois dans cette course, sur le pied de 1’17’’1. Nino Blazing se classe deuxième devant Spice Island, Idéal du Gazeau, seulement quatrième mais avec des excuses…

Ainsi, comme en 1981, Idéal du Gazeau et Jorky sont les grandes vedettes de Roosevelt Raceway pour avoir remporté les deux grandes épreuves estivales ouvertes aux étrangers, faisant retentir par deux fois la Marseillaise.

Jorky est aussi le héros de la capitale bavaroise en remportant pour la troisième fois consécutive le Prix des Meilleurs (2 600 m), s’imposant avec une supériorité incroyable sur tous ses adversaires dont Istraeki, qui termine deuxième à cinq ou six longueurs, lui-même très détaché de E. O. Brunn, Keystone Patriot, Ino Ludois…

Jorky signe cette nouvelle victoire sur le pied de 1’17’’2, améliorant ainsi son propre record dans cette course. La société bavaroise crée en son honneur le Prix Jorky, qui lui rend hommage sur ce même hippodrome de Munich.

Mais après une troisième victoire consécutive à Amiens dans le Prix du Président Emile Fossé (2 400 m), où il a raison d’une courageuse Katinka, Jorky va connaître de nouveaux problèmes à sa jambe antérieure gauche, l’empêchant encore une fois de participer au prochain meeting d’hiver de Vincennes et donc au Prix d’Amérique 1983.

Durant cette année 1983, Jorky se fait de plus en plus rare en compétition, s’illustrant surtout en Allemagne, notamment dans le Grand Prix de Dinslaken (2 550 m), le 11 septembre 1983, qu’il remporte en 1’20’’8, devant Khali de Vrie, Snack Bar, E. O. Brunn, Spice Island, Kombo…

Le dimanche 2 octobre 1983 est aussi un grand jour pour Jorky puisqu’il tente d’inscrire pour la quatrième fois son nom au palmarès du Prix des Meilleurs (2 150 m) disputé à Munich, qu’il a déjà remporté trois années consécutives (1980, 1981, 1982).

Mais encore à court de condition, il manque de souffle pour rejoindre la très bonne pouliche allemande Babesia, avantagée de 25 mètres.

Derrière le suédois E. O. Brunn, il doit se contenter d’une honnête troisième place, bien que trottant aussi vite (1’17’’2) que lors de sa victoire en 1982.

Jorky fait un peu mieux le dimanche 16 octobre 1983, à Kuurne en Belgique, dans le Grand Prix Fernand Talpe (2 300 m). Malgré un retour impressionnant, il ne peut tout à fait rendre son handicap de 20 mètres au « nouveau belge » Képi du Tanu, que mène Paul Maertens, en présence de la ravissante Miss Belgique.

Mais les Belges sont contents ; ils ont pu admirer l’un des plus grands trotteurs de Vincennes dans ses œuvres, tout en chantant la Brabançonne, malgré les origines françaises de leur nouveau champion.

 

Certes, on n’a pas vraiment revu le grand Jorky, impérial et combatif, que l’on a connu et aimé. Il n’est plus le « meilleur ».

Une fois pourtant, une dernière fois, il redevient le grand Jorky, pour sa deuxième et dernière tentative dans le Prix d’Amérique, le 29 janvier 1984, où on le voit donner une formidable réplique à Lurabo, le grand favori jugé imbattable ; en revenant l’attaquer dans la dernière ligne droite, Jorky l’oblige à lutter, à sortir le grand jeu. D’ailleurs, malgré la pluie battante, ils ont fait afficher le deuxième meilleur temps de la course (1’17’’).

Aussi l’ovation que le public réserve à Jorky durant le défilé du Prix de France laisse un souvenir inoubliable. Il est pratiquement autant applaudi et acclamé que Lurabo, lequel Lurabo doit réaliser un exploit dans ce Prix de France (2 100 m), en abaissant le record déjà impressionnant de Classical Way (1’14’’2) à 1’13’’7.

Jorky lui, blessé, finit la course en boitant. Il va à nouveau disparaître des pistes pour rentrer au haras cette fois définitivement.

Peut-être pas ? Léopold Verroken se propose de le remettre à l’entraînement pour le festival hivernal 1985. Va-t-on assister à une réédition des adieux d’Eléazar avec un doublé Prix d’AmériquePrix de France, cette fois à l’actif de Jorky maintenant âgé de 10 ans ?

Hélas ! Le mauvais temps, la neige rendent la piste d’entraînement de Bernay-en-Brie impraticable et Jorky, toujours marqué par le Destin, doit renoncer à ce formidable rêve.

 

C’est au haras qu’il s’illustre désormais, produisant Riche, Rocky d’Arc, Romane Sautonne, Sa Force, Sérénissimo, Star d’Azeray, Tiarko, Timorky, Urane Sautonne, Useria, Vita Nuova, Bridge, de bons chevaux, mais pas de champions à son image.

Il va mourir encore jeune, sans « épouser » Classical Way avec laquelle on espérait le « mariage du siècle », qui aurait allié au sang de Kerjacques, étalon du siècle en France, celui de Star’s Pride, étalon du siècle aux Etats-Unis.

La mère de Classical Way, Kerry Way étant en effet une fille de Star’s Pride.

 

Jorky a gagné 8 778 800 francs en course et établi un record de 1’13’’1.

 

Il s’est éteint, à l’âge de 14 ans, d’une rupture d’estomac, dans la nuit du 28 au 29 mars 1989. Mais pour ceux qui l’ont aimé et admiré il est toujours bien vivant.

Plus que Tony M, Dimitria ou même Eléazar, il est le plus beau chef-d’œuvre de Léopold Verroken, et aussi le joyau de l’élevage de Bernard Billard. Or, Jorky était aussi un caprice, un miracle de la nature, qui selon les lois de la génétique n’aurait jamais dû exister, car il y avait une incompatibilité sanguine entre Kerjacques et Vanina B.

Il a donc accompli son premier exploit dès sa naissance en défiant les lois de la nature ; ainsi la naissance de Jorky est aussi une victoire, une victoire contre les lois naturelles !

 

Cette génération des « J » fut aussi celle de Jeune Orange, championne classique sous la selle, qui se classa deuxième d’High Echelon dans le Prix des Centaures 1979 et deuxième de Gamélia dans le Prix de Cornulier 1980.

Elle avait aussi gagné le Prix d’Essai 1978, le Prix des Elites 1978, le Prix du Président de la République 1979, et à l’attelage le Prix Henri Cravoisier 1978, à Enghien.

 

Le beau Jiosco lui fut deuxième d’Hymour (battu d’un nez) dans le Prix d’Amérique 1982 couru en temps record, deuxième d’Idéal du Gazeau (en lui rendant 25 mètres) dans le Prix de Paris 1982, mais gagna le Prix des Ducs de Normandie 1981 à Caen, le Prix d’Eté 1981, le Prix Thiéry de Cabanes 1981, le Prix Jockey 1980, le Prix Ovide Moulinet 1980…

Il devait terminer sa carrière par une deuxième place derrière Igor du Beauvoisin, mais devant Hymour, dans le Grand Prix Fernand Talpe 1982 à Kuurne en Belgique.

Ce magnifique alezan arborant liste en tête, très signé par son père Quioco, ne fit pas la carrière qu’il aurait méritée en raison de problèmes de dos.

Même les plus beaux athlètes peuvent être fragiles.

 

Jarnibleu lui sait fait connaître en gagnant le Prix de Belgique 1982, dans lequel on attendait plutôt Kisin, le suppléant de Jorky. Il fut aussi troisième du Prix de France, derrière Hymour et Idéal du Gazeau, mais devant Jiosco, et quatrième du Prix de Paris, derrière Idéal du Gazeau, Jiosco et Katinka, en cette même année 1982. Auparavant, il avait gagné le Prix du Cotentin à Graignes et le Prix Robert Auvray à Argentan, mais on l’avait vu à trois reprises dominé par Joachim, ce qui n’en faisait pas un cheval de Prix d’Amérique a priori.

 

Idéal du Gazeau, Jorky et Gator Bowl à l’arrivée du Grand Prix des Nations 1981, à Milan San Siro

Idéal du Gazeau, Jorky et Gator Bowl à l’arrivée du Grand Prix des Nations 1981, à Milan San Siro

Jorky

Jorky

Jorky et Léopold Verroken, avec la casaque de Bernard Billard

Jorky et Léopold Verroken, avec la casaque de Bernard Billard

Timorky, fils de Jorky et de Fétuque.  (Photo de Francis Annocque)

Timorky, fils de Jorky et de Fétuque. (Photo de Francis Annocque)

Urane Sautonne, fils de Jorky et de Noria Sautonne.  (Photo de Francis Annocque)

Urane Sautonne, fils de Jorky et de Noria Sautonne. (Photo de Francis Annocque)

Bridge, fils de Jorky et de Ricaine.  (Photo de Francis Annocque)

Bridge, fils de Jorky et de Ricaine. (Photo de Francis Annocque)

Keystone Patrol

Keystone Patrol

Burgomeister

Burgomeister

Final Score

Final Score

Kading

Kading

Jiosco et Pierre Levesque

Jiosco et Pierre Levesque

Jiosco au haras

Jiosco au haras

Fleuron Perrine

Fleuron Perrine

Fleuron Perrine a renouvelé l’exploit de Jorky en gagnant comme lui les trois grands Critériums (3 ans, 4 ans, 5 ans), mais il n’a pas gagné le Critérium Continental et ne s’est pas non plus imposé à l’étranger, contrairement à Jorky, qui a gagné partout.

Jorky remporte l'Elitloppet 1981

Jorky remporte l'Elitloppet 1981

Dead-heat à New York 1981 (Idéal du Gazeau et Jorky)

Grand Prix des Nations à Milan (1980) Jorky

Copenhagen Cup 1981 Jorky bat Idéal du Gazaeau

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21 mars 2013 4 21 /03 /mars /2013 10:12

Les champions trotteurs de légende en France

 

07 - Les années 1980 (Idéal du Gazeau (suite)

 

Il y a encore dix-huit partants au départ du Prix d’Amérique édition 1982.

Idéal du Gazeau, cette fois débarrassé de Jorky, qui souffre d’une para-phlébite, se retrouve une nouvelle fois grandissime favori (5/10, soit 21/2//1). Mais, contre toute attente, il est sérieusement battu par Hymour et Jiosco, qui finissent pratiquement sur la même ligne, l’un est en pleine piste, l’autre à la corde, tout en égalant le record de 1’16’’9 établi par Grandpré en 1978. Courageusement, Idéal du Gazeau conserve de peu la troisième place devant l’excellent Lançon. Illera est bonne cinquième, comme l’an dernier, puis viennent Kisin, Istraeki, Kivien, Igor du Beauvoisin, Hêtre Vert, Gator Bowl, Ino Ludois…

Après tirage de la photo-finish, Hymour est déclaré vainqueur.

Le grand vaincu du jour, c’est bien sûr Idéal du Gazeau, mais il n’a pourtant pas démérité, ayant dû subir tous les assauts de ses plus dangereux adversaires.

 

Hymour devait confirmer en gagnant aussi le Prix de France (2 100 m, départ donné à l’autostart), mais cette fois de manière indiscutable, devant Idéal du Gazeau, Jarnibleu et Jiosco.

 

Idéal du Gazeau s’imposera enfin dans le Prix de Paris (3 150 m), en 1’18’’7, mais Jiosco, qui lui rendait 25 mètres, est un étonnant second, en 1’18’’2. C’est Katinka qui termine troisième devant Jarnibleu.

 

On retrouve Hymour, Idéal du Gazeau et Jiosco, les trois grands des Prix d’Amérique, de France et de Paris, le 14 mars 1982, à Cagnes-sur-Mer, pour le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m), seconde épreuve du Grand Circuit International, dont Idéal du Gazeau est le tenant du titre.

Avec trois champions de cette trempe au départ, on peut penser que le record d’Hadol du Vivier (1’14’’1) va tomber. Mais cette course d’habitude prestigieuse ne répond pas à nos attentes. D’abord, elle n’a retenu que six partants, dont un, Kiki de Feugères, fait figure de « Petit Poucet ». Idéal du Gazeau, dans un mauvais jour, doit se contenter d’une heureuse troisième place après la disqualification de Jiosco, derrière Hymour et Super Male.

 

Idéal du Gazeau se rachète le 18 avril 1982 à Beaumont-de-Lomagne, à l’occasion du cinquième Grand Prix du Sud-Ouest (2 400 m), quatrième épreuve du Grand Circuit International, qu’il remporte en 1’17’’2, loin devant Ianthin (auteur d’une belle rentrée après une longue absence), Khali de Vrie et Larabello, tout en battant le record qu’avait établi Eléazar en 1978.

 

Ianthin, le tenant du titre, et Idéal du Gazeau étaient présents au départ du Grand Prix de Bavière (2 100 m), disputé à Munich le 16 mai 1982. Khali de Vrie et Lançon ont également effectué le déplacement en terre bavaroise, où l’on retrouve aussi l’italo-américain Gator Bowl, mais beaucoup moins performant qu’en 1981. A l’issue d’un démarrage foudroyant, Idéal du Gazeau s’impose dans le temps record de 1’15’’5, loin devant Khali de Vrie, Super Male et Ianthin, bien revenu après avoir été très gêné par Gator Bowl, en difficulté.

A cette occasion, le champion de Pierre-Jean Morin réussit un autre exploit en devenant le trotteur le plus riche de tous les temps, et le premier à franchir le cap d’un milliard de centimes !

 

Poursuivant son périple, Idéal du Gazeau se rend à Solvalla (Stockholm) le 31 mai 1982 afin d’y disputer l’Elitloppet (1 609 m), septième épreuve du Grand Circuit International qu’il a déjà remporté en 1980, mais qui l’an dernier a été l’apanage de Jorky, le grand absent. On peut cependant compter sur Ianthin pour le remplacer en donnant à Idéal une formidable réplique. Il n’en sera rien, malheureusement, Ianthin ayant mal digéré sa course de Munich. Il ne parvient pas à se qualifier pour la finale et échoue également dans l’épreuve de consolation.

Dans la première épreuve éliminatoire, on voit le champion suédois Dartster F partir comme une flèche pour égaler en 1’13’’ le record d’Europe. Idéal du Gazeau lui se qualifie en prenant une probante seconde place. Dans la finale, Dartster F veut imposer la même tactique, qui lui a déjà réussi en éliminatoire, mais Idéal du Gazeau accélère au bon moment, pour le déborder de façon irrésistible, et finalement s’imposer en 1’13’’2, son nouveau record personnel. Dartster F est un bon second devant Nino Blazing et Snack Bar, un trotteur américain qu’Iris de Vandel vient de battre chez lui, aux Etats-Unis.

 

La grande course de Solvalla est toujours suivie par la Coupe de Copenhague (2 011 m), comptant elle aussi pour le Grand Circuit, et Idéal du Gazeau, revenu en grande forme veut renouveler sa victoire de 1980, tout en effaçant son échec de l’an dernier face à Jorky. Idéal du Gazeau laisse d’abord mener ses rivaux, puis prend le commandement après un tour. Il attend le dernier tournant pour placer un démarrage foudroyant et finalement s’imposer en 1’14’’, établissant ainsi le record de la course, le record de la piste, le record du Danemark et le record du monde sur la distance ! Loin derrière, Snack Bar se classe second devant US Thor Viking, Pluvier Lee, Pamir Brodde, Kimberland …

 

Idéal du Gazeau retrouve Vincennes le 17 juin 1982 pour le Prix René Ballière (Championnat Européen (2 100 m), mais il joue de malchance et concède la victoire au jeune Lutin d’Isigny, alors plus souvent placé que gagnant, qui porte son record à 1’15’’9. Idéal échouera aussi à Gelsenkirchen dans l’Elite Rennen (2 500 m), sans doute à cause de la pluie qui a rendu la piste très boueuse. Ianthin faisait figure de gagnant, lorsqu’il a été dépassé tout à la fin par Keystone Patrol, qui s’imposait en 1’17’’, et Zorrino venu cueillir la deuxième place.

 

Idéal du Gazeau et Jorky se retrouvent à New York pour le Championnat du Monde 1982, dans lequel l’on ne donne pas cher de leurs chances face au jeune Mystic Park, un phénomène de 3 ans, qui vient de réussir un exploit en se qualifiant dans un temps record face à ses aînés dans l’American Championship. Mais il tombe boiteux peu après cette course, et son entourage doit le déclarer forfait pour le grand rendez-vous. Idéal du Gazeau en profite, comme il profite aussi des malheurs de Jorky durant la course, pour s’offrir un nouveau titre de « champion du monde ». Alors que dans la Challenge Cup, c’est au tour de Jorky de tirer profit de la malchance d’Idéal du Gazeau en s’octroyant une nouvelle couronne dans cette épreuve, qu’il a déjà gagnée l’an dernier mais en partageant la victoire avec son rival.

 

Idéal du Gazeau remporte un deuxième Prix d’Amérique le dimanche 30 janvier 1983, cette fois en 1’18’’7, devant Lurabo (futur vainqueur du Prix d’Amérique 1984) et Lutin d’Isigny (futur vainqueur du Prix d’Amérique 1985). Il restera le seul trotteur dans l’histoire à pouvoir s’octroyer un troisième titre de « champion du monde » à New York, peu de temps avant son départ pour la Suède où il fonctionnera désormais comme étalon et ce jusqu’à sa mort. Cette année-là il gagne aussi la Challenge Cup, qui sera sa dernière victoire. Mais il reviendra en France pour ouvrir le défilé du Prix d’Amérique 1984, que l’imbattable Lurabo remportera devant un étonnant Jorky, à nouveau retrouvé après une longue absence.

 

Parmi les enfants suédois célèbres d’Idéal du Gazeau, il faut citer His Majesty, un mâle, qui sera champion du monde à New York, comme son héroïque papa, et aussi une fille, la jument Lovely Godiva, gagnante du Prix de France 1997 et seconde de Moni Maker dans le Prix d’Amérique 1999.

 

Idéal du Gazeau est mort le 26 février 1998, terrassé par une crise cardiaque.

 

 

Jiosco domine Ideal du Gazeau

Jiosco domine Idéal du Gazeau dans le Prix d’Amérique 1982

 

Hymour, Jiosco, Ideal du Gazeau numerisation0019-copie-1

Hymour, Jiosco et Idéal du Gazeau à l’arrivée du Prix d’Amérique 1982

 

Dartster F [1]

Le jeune champion suédois Dartster F, redoutable dans l’Elitloppet 1982

 

 

Ideal du Gazeau numerisation0020

Idéal du Gazeau bat Dartster F dans la finale de l’Elitloppet 1982

 

 

 

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Snack Bar à Vincennes

 

 

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Le jeune phénomène Mystic Park s’annonçait imbattable dans le Championnat du Monde 1982 à New York, après son exploit face à ses aînés dans le Championnat Américain, mais il dut déclarer forfait à cause d’une inflammation des sabots, qui le rendit boiteux.

 

 

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Idéal du Gazeau remportera à New York deux autres titres de « Champion du Monde »        

 

 

Ideal-du-Gazeau--Lurabo---Lutin-d-Isigny--Prix-d-Amerique-.JPGIdéal du Gazeau gagne le Prix d’Amérique 1983, devant Lurabo et Lutin d’Isigny

 

 

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Idéal du Gazeau signera sa dernière victoire dans la Challenge Cup 1983 à  New York

 

 

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His Majesty sera le plus célèbre des fils d’Idéal du Gazeau, en gagnant comme son papa, le Championnat du Monde de New York, mais ce sera la dernière édition !

 

 

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Lovely Godiva sera la plus célèbre des filles d’Idéal du Gazeau en gagnant le Prix de France 1997 et en se classant deuxième de Moni Maker dans le Prix d’Amérique 1999.

 

 

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Idéal du Gazeau l’album souvenir

 

 

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Idéal du Gazeau, Jorky, Kaiser Trot, Lurabo, Lutin d’Isigny et Ourasi ou le plaisir des courses au trot dans les années 1980.

 

 

 

Iris de Vandel prit une revanche sur le sort, qui le condamnait à jouer les seconds rôles en France parce qu’il était hongre, en devenant l’un des plus rapides et des plus performants trotteurs d’âge au Canada et aux Etats-Unis. Il devait remporter la Titan Cup de Meadowlands à deux reprises, en 1982 et 1983, et établir un record de 1’11’’7 sur le mile, devenant ainsi le plus rapide de tous les trotteurs français. Le jour où Idéal du Gazeau fut battu par Hymour et Jiosco dans le Prix d’Amérique, il s’imposa pour ses adieux en France dans le Prix du Calvados, au trot monté, bien que rendant 25 mètres au jeune Loustic de la Tour, qui venait de se classer second de Kaiser Trot dans le Prix de Cornulier, une semaine plus tôt. Il revint aussi en France pour gagner à Cagnes-sur-Mer, le Grand Prix de la Ville de Nice (2 875 m), en rendant jusqu’à 75 mètres aux chevaux du premier poteau, et en ridiculisant à départ égal un certain Hymour, tombeur d’un certain Idéal du Gazeau.

 

Quant à Ianthin, il remporta le Grand Circuit International 1983, ainsi que le titre de champion d’Europe qui s’y rattache. Il devait signer sa plus belle victoire dans l’Elitloppet de Solvalla, en 1983 ; après avoir gagné son épreuve de qualification, il s’imposa en finale devant Spice Island et Snack Bar, en 1’13’’2. Il gagna aussi le Prix René Ballière devant Lutin d’Isigny et Idéal du Gazeau, en égalant le record de Classical Way (1’14’’2), et le Grand Prix du Sud-Ouest à Bordeaux devant Idéal du Gazeau, Spice Island et Lurabo. Il se classa aussi troisième du Prix de France du jeune Mon Tourbillon, et troisième du Championnat du Monde 1983, à New York, remporté par Idéal du Gazeau devant Legolas.

 

Bien qu’ayant été le trotteur français le plus rapide de Vincennes dans la spécialité, Istraeki, champion classique au trot monté, n’avait encore jamais gagné une seule course à l’attelé. Ce fut chose faite grâce au Prix d’Eté 1982, qu’il remporta en 1’18’’3, devant Lutin d’Isigny, Ino Ludois, Jiosco, Ianthin, Kisin, King Black, Katinka, Khali de Vrie…

 

Idéal du Gazeau n’alla pas courir le Grand Prix des Pays-Bas disputé à La Haye à la fin du mois de juin 1982, ce qui permit au beau Ino Ludois de succéder à Jorky au palmarès de cette épreuve, tout en remportant en 1’19’’2 sa première victoire en terre étrangère, malgré un départ catastrophique. Khali de Vrie se classait deuxième devant Kimberland, tandis que Kaho des Castelets s’éliminait de lui-même sur une grosse faute

 

 

Hymour 00

Hymour

 
Hymour--Jiosco--Ideal-du-Gazeau-numerisation0019.jpgHymour remporte le Prix d'Amérique 1982, en temps record, devant Jiosco et Idéal du Gazeau

Hymour remporte le Prix d'Amérique 1982 en temps record devant Jiosco, Idéal du Gazeau, Lançon...

Idéal du Gazeau

Idéal du Gazeau

Idéal du Gazeau remporte l'Elitloppet 1982

Idéal du Gazeau remporte le Roosevelt International Trot 1982

Idéal du Gazeau remporte le Roosevelt International Trot 1983

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17 mars 2013 7 17 /03 /mars /2013 09:07

Les champions trotteurs de légende en France

 

07 - Les années 1980 (Idéal du Gazeau)

 

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      Idéal du Gazeau, par Alexis III et Venise du Gazeau, champion très populaire, de classe internationale, deux fois vainqueur du Prix d’Amérique, de l’Elitloppet, trois fois champion du monde, trois fois lauréat du Grand Circuit International, vainqueur classique, notamment de quatre Critériums.

 

 

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Idéal du Gazeau sur la piste de Roosevelt Raceway, à New York, où il gagna trois fois le titre de « champion du monde ».

 

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Eugène Lefèvre « Gégène » et Idéal du Gazeau « Petit Bonhomme », tout un symbole

 

 

 

 

Idéal du Gazeau

 

 

 

Idéal du Gazeau, deux fois vainqueur du Prix d’Amérique et de l’Elitloppet, était lui le seul trotteur à inscrire trois fois son nom au palmarès du Roosevelt International Trot (l’officieux Championnat du Monde), qui souriait également à Lutin d’Isigny à deux reprises.

Idéal du Gazeau était né en 1974, en Vendée, chez Henri et Guy Fradin de l’union d’un certain Alexis III, un des meilleurs trotteurs de sa génération, et de Venise du Gazeau, une poulinière jusqu’alors jugée modeste. Eugène Lefèvre, qui cherchait justement un fils d’Alexis III, dont il s’était occupé, fut séduit par la beauté du poulain, malgré sa petite taille (1,57 m au garrot). Après une longue délibération, il l’acheta 20 000 francs pour le compte de Pierre-Jean Morin, déjà propriétaire du bon Feu Vert, à condition de prendre aussi une pouliche et de verser 5 000 francs lors de la qualification du poulain.

 

Il fut deuxième d’High Echelon dans le Prix d’Amérique 1979, alors qu’il n’avait que cinq ans ; c’était d’autant plus méritoire car il n’aurait sans doute pas été battu si Eléazar n’avait ouvert la corde au cheval que menait Jean-Pierre Dubois.

Ce merveilleux petit cheval noir, tout en muscles et arborant fièrement la liste en tête, portant calotte et guêtre bleue ciel, a fait le bonheur d’une petite association de propriétaires normands à Saint-Jean-le-Thomas, près du Mont-Saint-Michel. Il a été le premier trotteur à franchir le cap d’un milliard de centimes de gains.

 

Son palmarès est éblouissant si on énumère toutes ses victoires ; en 1976 : Prix des Géraniums (Saint-Malo), Prix des Lilas (Vincennes) ; en 1977 : Prix Maurice de Gheest (Vincennes), Critérium des Jeunes (Vincennes), Prix Capucine (Vincennes), Prix Victor Régis (Vincennes), Prix Jacques de Vaulogé (Vincennes) ; en 1978 : Prix Charles Tiercelin (Vincennes), Prix de Tonnac-Villeneuve (Vincennes), Prix Ephrem Houël (Vincennes), Critérium des 4 ans (Vincennes), Prix de Milan (Enghien), Critérium Continental (Vincennes), Prix du Fer d’Or (Helsinki), Prix Octave Douesnel (Vincennes), Prix Ariste Hémard (Vincennes) ; en 1979 : Prix de Croix (Vincennes), Prix Roederer (Vincennes), Prix Jockey (Vincennes), Critérium des 5 ans (Vincennes), Prix de l’Etoile (Vincennes), Prix Marcel Laurent (Vincennes) ; en 1980 : Prix de Belgique (Vincennes), Grand Prix de la Côte d’Azur (Turin), deuxième batterie éliminatoire du Grand Prix de la Loterie Nationale (Naples), Grand Prix du Sud-Ouest (Toulouse), finale du Grand Prix de l’Elite Internationale (Elitloppet) de Solvalla (Stockholm), Coupe de Copenhague (Copenhague), Prix René Ballière (Vincennes), Course des Elites (Elite Rennen) (Gelsenkirchen), première épreuve du Campionato Europeo (Cesena), finale du Campionato Europeo (Cesena) ; en 1981 : Prix d’Amérique (Vincennes), Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (Cagnes-sur-Mer), Grand Prix de la Côte d’Azur (Turin), Prix de l’Atlantique (Enghien), Grand Prix du Sud-Ouest (Agen), deuxième éliminatoire du Grand Prix de l’Elite Internationale (Elitloppet) de Solvalla (Stockholm), Roosevelt International Trot (New York), Challenge Cup (New York), Prix d’Europe (Enghien), Grand Prix d’Aby (Göteborg), première éliminatoire du Grand Prix de Finlande (Helsinki), finale du Grand Prix de Finlande (Helsinki), première éliminatoire du Prix des Géants (Hilversum), finale du Prix des Géants (Hilversum), Grand Prix des Nations (Milan) ; en 1982 : Prix de Paris (Vincennes), Grand Prix du Sud-Ouest (Beaumont-de-Lomagne), Grand Prix de Bavière (Munich), finale du Grand Prix de l’Elite Internationale (Elitloppet) de Solvalla (Stockholm), Coupe de Copenhague (Copenhague), Roosevelt International Trot (New York), Grand Prix d’Aby (Göteborg), première éliminatoire du Grand Prix de Finlande (Helsinki), deuxième éliminatoire du Prix des Géants (Hilversum), Grand Prix des Nations (Milan) ; en 1983 : Prix d’Amérique (Vincennes), Roosevelt International Trot (New York), Challenge Cup (New York).

 

Victorieux pour ses débuts à Saint-Malo dans le Prix des Géraniums, Idéal du Gazau est sévèrement rétrogradé à la deuxième place lors de sa sortie suivante à Graignes dans le Prix de Vimoutiers. Eugène Lefèvre (« Gégène » pour les intimes), son partenaire sympathique, n’a pas digéré cette injustice, aussi peut-il se féliciter du triomphe qu’Idéal remporte pour sa première apparition à Vincennes dans le Prix des Lilas.

Ce jour-là, le jeune champion bat quatorze adversaires dont un certain Ission, qui après avoir perdu son driver en route poursuit la course au grand galop. La chose incroyable, c’est qu’Idéal du Gazeau dans un trot impeccable le précède jusqu’à l’arrivée. Ce jour-là en effet on vient de découvrir un très grand champion. Depuis, l’ascension se poursuit. « Idéal » entre dans sa troisième année, gravissant tous les échelons (Prix Maurice de Gheest, Critérium des Jeunes, Prix Capucine, Victor Régis, Jacques de Vaulogé) toutes ces courses qui mènent à l’épreuve suprême, le Critérium des 3 ans. Ce jour-là, le jeune champion rencontre une première défaillance et doit s’incliner à la troisième place derrière Ivory Queen et Italia du Pont, qui sont alors les deux meilleures pouliches de la génération.

 

Mais durant l’année 1978, celle de ses 4 ans, Idéal du Gazeau n’aurait connu que la victoire en onze sorties si Ianthin (bénéficiant de 25 mètres d’avance) ne lui avait pris un minime avantage dans le Prix Jules Thibault, et si High Echelon, le futur vainqueur du Prix d’Amérique n’avait imposé sa loi dans le Prix de l’Etoile.

 

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Ianthin, un digne challenger pour Idéal du Gazeau, qui réussira à le battre quelques fois.

 

 

High Echelon bat Ideal du Gazeau dans le Prix de l'Etoile 1

High Echelon bat Idéal du Gazeau dans le Prix de l’Etoile 1978

 

 

 

 

High Echelon, complètement transformé, réalise d’ailleurs un fameux triplé : Prix Jockey, Critérium des 5 ans, Prix de l’Etoile.

 

Idéal du Gazeau réussit néanmoins une magnifique quatrième année ; ayant porté son record à 1’16’’6 dans le Prix de l’Etoile, il devient le « 4 ans » le plus rapide de Vincennes.

 

Il s’octroie trois victoires prestigieuses : le Critérium des 4 ans, devant Ianthin, Idéal du Maine, Indiscret d’Ax, Isoris, Italia du Pont, le Critérium Continental, devant Italia du Pont, Infant d’Autize, Ibilie, Iris de Gournay, et pour sa première tentative hors de nos frontières, le dimanche 24 septembre 1978, le Prix du Fer d’Or à Helsinki, en battant le russe Notsheg, le suédois Spinoon, le danois Adam Paradiso, le finlandais Leo Esosty, l’américain Star Reward…

 

En 1979, Idéal du Gazeau doit s’incliner à deux reprises devant ce diable d’High Echelon, dans le Prix d’Amérique et dans le Prix de Sélection. Mais ses autres sorties sont autant de victoires : Prix de Croix, Prix Roederer, Prix Jockey, Critérium des 5 ans, Prix de l’Etoile (le même triplé qu’High Echelon) et pour finir en beauté, le Prix Marcel Laurent, dans lequel il rencontre et bat pour la première fois son futur grand rival Jorky.

 

Idéal du Gazeau, le fils d’Alexis III et de Venise du Gazeau, est le plus gros gagnant de 1979 en France avec ses 1 275 000 F de gains, ce qui lui vaut d’être élu « Trotteur de l’Année » par le comité des journalistes hippiques. Son total de gains s’élève déjà à plus de 3 200 000 francs.

 

 

High Echelon remporte le Prix d'Amerique 1979 devant Ideal

High Echelon remporte le Prix d’Amérique 1979 devant Idéal du Gazeau, Fakir du Vivier, Fadet, Grandpré…

 

 

Il entame son année 1980 de façon magistrale, enlevant le Prix de Belgique (2 600 m), bien qu’ayant comme Eléazar et Hadol du Vivier, la lourde tâche de rendre 25 mètres à des chevaux de la trempe de Grandpré, Ejakval, Ianthin, Gadamès, Hillion Brillouard. Mais ce jour-là, Idéal du Gazeau fait preuve d’une incroyable supériorité, tournant autour de ses adversaires pour remporter une victoire fantastique, la plus belle de sa carrière, en 1’17’’9, battant de loin Ejakval, Ianthin, Gazon, Fleur de Prère, Grandpré, Fadet, Eléazar…

 

Ce succès retentissant fait du champion de Pierre-Jean Morin le grandissime favori du Prix d’Amérique 1980. Mais une course n’est jamais gagnée d’avance et la nouvelle idole de Vincennes va cruellement décevoir ses innombrables supporters le jour de la grande épreuve.

 

Décevant, Idéal du Gazeau va l’être également lors de sa sortie suivante dans le Prix de Sélection, où Képi Vert (avantagé de 50 mètres), Jorky (parti au même poteau que lui) et Kaïd du Bignon (lui aussi avantagé de 50 mètres) le devancent à l’arrivée.

 

Idéal du Gazeau est encore dominé mais par Hadol du Vivier cette fois dans le Grand Critérium de Vitesse à Cagnes-sur-Mer. Cependant, il n’a nullement démérité puisqu’il abaisse son record à 1’14’’2 !

 

Or, le dimanche 23 mars, le champion de Pierre -Jean Morin renoue enfin avec la victoire, se faisant applaudir pour la première fois en Italie, à l’occasion du Grand Prix de la Côte d’Azur (1 600 m) de Turin, qu’il remporte aux dépens de trois bons chevaux : Song and Dance Man, The Last Hurrah et Speed Expert.

 

Malheureusement, il tombe malade et ne peut récidiver à Naples dans la finale du Grand Prix de la Loterie où il est relayé par un Hillion Brillouard inattendu.

 

Son retour en France se solde par une victoire dans le Grand Prix du Sud-Ouest à Toulouse où il bat en 1’16’’2 l’étonnant Jorky (1’16’’3), Hillion Brillouard (1’16’’5), Gars de Fontaine (1’16’’6)…

 

Désormais, Idéal du Gazeau va se consacrer aux différentes épreuves du Grand Circuit International. Il part pour Munich courir le Grand Prix de Bavière (2 100 m). Mais, bien que trottant en 1’17’’4, il doit se contenter de la troisième place derrière le champion suédois Express Gaxe et le talentueux Jorky.

 

Les Français peuvent d’ailleurs être inquiets lorsqu’en Suède, à Stockholm, Express Gaxe enlève en 1’15’’3 la première batterie de qualification de l’Elitloppet (1 609 m), devant le danois My Nevele, Madrigal, Hillion Brillouard, Gadamès, alors qu’Idéal du Gazeau, dans la seconde batterie, est battu par la toujours redoutable Charme Asserdal (en 1’15’’ 3 également).

 

Mais le fils d’Alexis III ne s’avoue pas vaincu : il lui reste la finale qu’il remporte avec autorité, sur le pied de 1’13’’8, devant My Nevele, Express Gaxe (perdant à la fin la seconde place), Madison Avenue, Charme Asserdal, Madrigal, Hillion Brillouard…

 

Idéal du Gazeau récidive au Danemark, le 8 juin, dans la Coupe de Copenhague (2 011 mètres), battant en 1’14’’6 les mêmes My Nevele, Express Gaxe, Madison Avenue, et aussi Tarok, le champion du pays, tandis que Jorky et Mustard se montrent bien décevants en se faisant disqualifier !

 

Le champion de Pierre-Jean Morin traverse alors une période de forme optimale. Il revient en France, à Vincennes, pour accomplir un nouvel exploit, qui va ravir ses nombreux admirateurs. A l’occasion du Prix René Ballière (2 100 m), Idéal du Gazeau ne laisse aucune chance à son meilleur challenger Jorky, qu’il bat de plusieurs longueurs. Ayant trotté en 1’15’’3, il s’approprie le record général de la piste de Vincennes détenu depuis quelques mois seulement par Hillion Brillouard en 1’15’8’’. Or, en prenant la deuxième place, Jorky réalise précisément une réduction de 1’15’’8.

 

Le champion de Monsieur Pierre-Jean Morin peut reprendre la suite du Grand Circuit International dans lequel il a encore de nombreuses occasions de se faire applaudir. C’est le cas à Gelsenkirchen, lors de l’Elite Rennen (2 500 m), qu’il remporte comme en se jouant devant Mustard, Express Gaxe, Ianthin, Charme Asserdal, Madison Avenue…

 

Mustard, âgé seulement de 4 ans, a déjà été second de Jorky dans le Grand Prix des Pays-Bas quelques jours auparavant. Il s’est rendu célèbre à 3 ans, en 1979, trottant les 1 640 mètres de la piste de Solvalla en 1’15’’5, à l’occasion de sa dixième victoire, devenant ainsi le « 3 ans » le plus rapide d’Europe.

 

 

Express Gaxe [1]

Express Gaxe s’est fait connaître des Français en remportant le Grand Prix de Bavière 1980 de Munich, devant nos deux vedettes, Jorky et Idéal du Gazeau.

 

 

Ideal du Gazeau, vainqueur à Solvalla Elitlopp 1980

Idéal du Gazeau prend sa revanche sur Express Gaxe, en remportant la finale de l’Elitloppet 1980 à Solvalla

 

 

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My Nevele, un fils de Nevele Pride, devenu champion du Danemark avec Tarok, s’est montré le plus redoutable des adversaires d’Idéal du Gazeau en Scandinavie durant l’année 1980

 

Mustard [1]

Mustard, qui a été le « 3 ans » le plus rapide d’Europe en 1979, compte aussi parmi les victimes d’Idéal du Gazeau en 1980

 

 

 

Arrive le mois d’août, ce qui signifie pour les trotteurs du plus haut niveau, le Championnat du Monde disputé alors sur l’hippodrome new-yorkais de Roosevelt Raceway.

La société des courses de Roosevelt y invite Idéal du Gazeau, le suédois Express Gaxe, la finlandaise Charme Asserdal et le danois Tarok.

Mais l’entourage des trois champions nordiques, écœuré par la supériorité d’Idéal du Gazeau, se récuse ; et finalement la participation européenne se limite à deux français, Idéal du Gazeau et Hillion Brillouard, qui s’est si bien distingué à New York l’an passé, et à un italien, Doringo. Ces trois chevaux vont retrouver à New York leurs adversaires du Roosevelt International 1980, c’est-à-dire l’inusable jument néo-zélandaise Petite Evander, R. B. Jet, représentant le Canada, Cold Comfort, le champion du monde 1978, et une certaine Classical Way, qu’on se doit de présenter plus en détail.

 

Cette pouliche américaine, seulement âgée de 4 ans, est d’illustre origine puisque fille de Speedy Scot et de Kerry Way, tous deux vainqueurs du fameux Hambletonian.

La mère de Classical Way, Kerry Way est d’autre part une fille du légendaire Star’s Spride, « l’étalon du siècle » aux USA.

Quant à son père Speedy Scot, il fut champion du monde en 1964, après avoir déjà remporté la Triple Couronne (Yonkers Trot, Hambletonian, Kentucky Futurity), ce qui lui valut aussi le titre de « Harness Horse of the Year ». Il s’agit donc d’un trotteur de légende.

Classical Way pour sa part remporta à 3 ans le Kentucky Futurity, le Grand Circuit à Blue Bonnet (Canada), les Arden Downs Stake (pour pouliches), les Holly Lane Farm Stake

Une semaine plus tôt, elle venait de remporter l’American Trotting Championship devant Crown’s Star, Motor Mouth, Pagan Princess, Redoutable, Arbor Screen Star…

 

La fille de Speedy Scot est donc invitée à disputer le Championnat du Monde avec Cold Comfort, pour lequel la société de Roosevelt Raceway accorde une chance de reprendre son titre, ce qu’il n’avait pu faire en 1979 suite à une blessure.

 

Au signal, l’italien Doringo prend le train à sa charge, mais est bientôt victime d’un incident ; l’un de ses harnais se brise, le déséquilibrant, ce qui le pousse à la faute et oblige son driver à l’arrêter. Petite Evander se retrouve en tête pour mener à une cadence plutôt lente. Classical Way attend son heure. Idéal du Gazeau apprécie mal les tournants, de même qu’Hillion Brillouard, qui vire trop au large, si bien qu’aucun d’eux ne peut répondre au rush final de Classical Way, qui en 1’17’’, rallie victorieusement le poteau d’arrivée. Idéal du Gazeau, qui réagit trop tard, doit se contenter de partager la deuxième place avec Petite Evander, la vieille jument néo-zélandaise, déjà deuxième en 1978 dans cette même épreuve. Cold Comfort se classe quatrième devant le canadien R. B. Jet et Hillion Brillouard.

 

Une semaine plus tard, la fille de Speedy Scot remet son prestige en jeu à l’occasion de la Challenge Cup, la revanche du Championnat du Monde courue sur 2 413 mètres.

Hillion Brillouard, le lauréat de cette épreuve en 1979, prend un départ de choix pour mener devant Idéal du Gazeau. A l’entrée du dernier tournant, Idéal du Gazeau, sur une pointe de vitesse foudroyante, se débarrasse de son compatriote. Mais dans son envolée, une guêtre de genou lui tombe dans les jambes. Surpris, il se met au galop. Eugène Lefèvre, son driver, tente de l’arrêter, tandis qu’Hillion Brillouard pour l’éviter est brisé dans son action. Classical Way, plus heureuse, passe à l’extérieur et n’a plus qu’à contrôler les assauts de ses plus dangereux adversaires, en l’occurrence, les deux américains, Crown’s Star et Cold Comfort, qui ont profité des malheurs des deux français pour se porter en tête. En 1’17’’15, elle s’octroie une nouvelle victoire devant Crown’s Star, tandis que Cold Comfort doit résister au retour courageux d’Hillion Brillouard, que suivent Petite Evander, Idéal du Gazeau, le grand malchanceux, Motor Mouth et Doringo.

 

Classical Way s’est donc attribué de belle manière le fameux triptyque new-yorkais de Roosevelt (American Championship, Roosevelt International Trot et Challenge Cup). Il ne lui reste plus qu’à faire aussi bien en France.

 

Mais Marcel Hernot, le fidèle soigneur du crack et Eugène Lefèvre, le populaire « Gégène » oublient leur déconvenue ; ils regagnent l’Europe, plus précisément l’Italie, où une belle épreuve, le Campionato Europeo attend leur champion, Idéal du Gazeau, « Petit Bonhomme » pour les intimes. Le Campionato Europeo de Cesena (1 640 m) se dispute à la manière de l’Hambletonian américain, c’est-à-dire en deux manches (« heat »). La finale se joue entre les deux gagnants de chaque heat (ce qui n’est pas le cas dans l’Hambletonian, tous les chevaux participant à chaque épreuve). Mais si le même cheval gagne les deux heats, il est déclaré automatiquement vainqueur du Campionato Europeo.

 

Idéal du Gazeau survole la première épreuve, mais dans la deuxième manche, il joue de malchance et doit se contenter de la quatrième place, derrière Our Dream of Mite, Express Gaxe et Song and Dance Man. Une finale doit donc se jouer entre Idéal du Gazeau et le jeune champion Our Dream of Mite.

Malgré les manœuvres peu sportives du driver italien, le fils d’Alexis III triomphe en 1’16’’5, réalisant un autre exploit puisqu’il est le premier trotteur français à remporter le Campionato Europeo de Cesena depuis la fameuse Uranie en 1927. Eugène Lefèvre, quant à lui, est le premier driver français à inscrire son nom au palmarès de la grande épreuve.

 

Après ce nouveau succès, notre brave « Petit Bonhomme » et son symptique « Gégène » peuvent aller glaner un repos bien mérité dans leur fief de Saint-Jean-Le-Thomas. Idéal du Gazeau clôture en effet par cette victoire son total de 30 points dans le Grand Circuit International, assuré d’obtenir le titre de champion d’Europe 1980, son suivant immédiat, le suédois Express Gaxe, n’étant qu’à 19 points alors qu’il ne reste plus que deux épreuves.

 

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Doublemint remporte le Championnat du Monde (Roosevelt International Trot) 1979

 

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Hillion Brillouard, vainqueur de la Challenge Cup 1979, est invité à défendre son titre

 

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Classical Way, la fille de Speedy Scot et de Kerry Way, réalise un étonnant triptyque (American Championship, Roosevelt International Trot, Challenge Cup) : 20/20 à New York !

 

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Idéal du Gazeau prend sa revanche sur le sort à Cesena, remportant le Campionato Europeo 53 ans après Uranie !

 

 

 

Pour sa rentrée hivernale dans le Prix de Bourgogne, Idéal du Gazeau apprend à ses dépens que ses contemporains Ianthin, Istraeki et Ino Ludois n’ont pas perdu leur temps en son absence, puisqu’ils le devancent à l’arrivée. Bien sûr, Idéal est astreint à leur rendre 25 mètres, toujours la rançon de la gloire !

Il fait l’impasse sur le Prix de Belgique, que remporte Ianthin, mais cette fois de justesse devant le redoutable Jorky, qui lui rendait 25 mètres. C’est sans doute ce qui a permis à Ianthin de réaliser un exploit unique dans les annales du trotting français, celui de remporter pour la première fois les quatre épreuves préparatoires au Prix d’Amérique : (Prix de Bretagne, du Bourbonnais, de Bourgogne et de Belgique).

 

Idéal du Gazeau avait subi un échec retentissant dans l’édition 1980 du grand international de Vincennes. Il lui faut donc effacer cette défaite affligeante. Sa classe indiscutable doit lui permettre de se réhabiliter, mais est-il revenu au mieux de sa forme ? Un doute plane autour du fils d’Alexis III maintenant paré d’un titre de champion d’Europe. A priori, il semble difficile de battre l’étonnant Jorky, élu « Trotteur de l’Année 1980 » et dont la forme récente paraît excellente. Jorky est donc le favori logique devant Idéal du Gazeau « le favori du cœur », Ianthin et Classical Way, la championne du monde, dont la présence à Vincennes pour les grands internationaux de l’hiver fait figure d’évènement. On est convaincu de sa grande classe, mais on craint ses départs. En effet, malgré de longues séances de répétitions, la championne américaine, conditionnée par l’autostart, ne s’est pas encore familiarisée avec le départ aux élastiques.

 

Le dimanche 25 janvier 1981 est le jour très attendu du 60e Prix d’Amérique.

Le défilé permet comme chaque année d’admirer les dix-huit compétiteurs, dont Ianthin, Classical Way, Jorky et Idéal du Gazeau, les quatre favoris, très acclamés par le public venu innombrable de tous les coins de France, mais aussi de Suède, d’Italie, d’Allemagne, de Hollande, de Belgique, de Finlande, de Norvège, du Danemark, de Suisse, du Canada et des Etats-Unis, pour observer et applaudir tous ces champions sur l’une des plus belles pistes du monde. Sans oublier Grandpré et High Echelon, deux anciens vainqueurs du Prix d’Amérique, eux aussi très ovationnés par les connaisseurs ou les nostalgiques, car leur forme récente est plutôt douteuse, et leurs chances aussi par conséquent. Hillion Brillouard et Mustard ont aussi leurs supporters. (Mais on a découvert dans le Prix Marcel Laurent, brillamment remporté par Jorky, que Mustard, le jeune champion suédois, ne savait pas partir au signal sur la piste de Vincennes).

Idéal du Gazeau porte le numéro 18 du plus riche de la course, Jorky le 17, Classical Way le 14 et Ianthin le 11.

Au signal, Idéal du Gazeau prend un départ de choix, se retrouvant en tête, alors que Jorky reste derrière une rangée de chevaux.

Le cas de Classical Way est encore plus critique, cherchant désespérément l’autostart, la jument américaine perd une trentaine de mètres, esquisse un temps de galop, avant de repartir enfin dans les bonnes allures alors que le peloton est déjà loin.

Ianthin, qui a pris un bon départ à l’image d’Idéal du Gazeau, souffle le commandement à celui-ci mais commet une faute à la sortie du premier tournant. Vite remis au trot par Paul Delanoë, il reprend l’avantage au passage devant les tribunes, mais se laisse accompagner par un High Echelon superbe d’allure. Idéal du Gazeau est troisième tout près.

 

L’affaire semble compromise pour Jorky, qui se retrouve enfermé en dixième position au sein d’un peloton compact. Classical Way ferme la marche, bien que refaisant déjà un terrain considérable. Club Special, l’autre américain de la course, passe à l’action dans le bas de la descente ; fonçant en bolide, puis se rabattant brusquement sur Grandpré, qui gêné commet une grosse faute.

Poursuivant sa progression, Club Special prend la tête et la corde en plaine devant Ianthin, qui à son tour joue de malchance, marche sur les rênes du cheval américain, heurte son sulky et éclate des quatre membres, imité dans sa faute par High Echelon.

Stupeur générale dans les tribunes, Ianthin, l’un des grands favoris, est disqualifié !

Dans le peloton c’est la pagaille : Jonc d’Anson et Jacob du Chignon à la faute à leur tour provoquent le ralentissement de Jorky. Celui-ci perd encore un terrain considérable sur Idéal du Gazeau, son principal adversaire.

 

Arrive la montée, Idéal du Gazeau se retrouve aux avant-postes un instant accompagné par Club Special, que suivent Gadamès, Illera, Kampion Creiomin. Club Special sur ses fins cède bientôt, tandis qu’Idéal du Gazeau s’envole irrésistiblement vers la victoire !

Jorky trouve enfin le passage ; s’élançant à la poursuite du petit cheval noir, il tente l’exploit, déborde successivement Kampion Kreiomin et Illera.

Classical Way, que l’on a oubliée, arrive à son tour avec ses battues aériennes et rasantes. Un autre cheval se dégage du peloton, c’est Istraeki lancé à corps perdu dans la bataille.

Mais celle-ci semble déjà gagnée pour Idéal du Gazeau, bien que Jorky crée le suspense en effectuant un spectaculaire rapproché. Pourtant Idéal du Gazeau franchit le poteau d’arrivée en superbe vainqueur, sans être véritablement inquiété par la fin de course extraordinaire de Jorky. Un peu plus loin, Classical Way, elle aussi fantastique, clôture le tiercé de choc, un tiercé vraiment royal, composé des deux meilleurs trotteurs d’Europe et du meilleur trotteur d’Amérique. Istraeki est un remarquable quatrième devant Illera.

En conclusion, Idéal du Gazeau en magnifique vainqueur, a brillamment effacé son échec de janvier 1980. Trottant en 1’17’’4, il vient de réaliser le deuxième meilleur temps du Prix d’Amérique sans autostart, après celui de Grandpré (1’16’’9).

Auparavant, Tidalium Pélo avait réalisé 1’17’’5 en 1971 et 1’17’’1 en 1972, mais les deux fois avec l’aide de l’autostart.

 

Mais on est forcé d’admettre que le petit cheval noir a bénéficié d’une course en or, ses trois principaux adversaires jouant de malchance : Jorky constamment enfermé et gêné à plusieurs reprises ne trouvant le passage qu’à 800 mètres de l’arrivée, Classical Way ratant complètement son départ et Ianthin, plus malheureux encore, étant carrément mis hors de course par un concurrent.

Ces trois chevaux méritent une revanche que le Prix de France (2 100 mètres, départ à l’autostart) disputé le dimanche suivant semble pouvoir leur offrir face à un Idéal du Gazeau, qui remet sportivement son prestige en jeu.

C’est en effet une revanche, mais pour Classical Way, qui réalise un exploit en s’imposant dans le temps record de 1’14’’2, battant à la fois le record de la course et celui de la piste de Vincennes. Idéal du Gazeau perd à la fin la deuxième place au profit d’un étonnant Istraeki, alors que Jorky, encore très malchanceux, a été arrêté suite à un accrochage. Il prendra sa revanche une semaine plus tard dans le Prix de Paris.

 

Ianthin 0003

Ianthin, fils de Vésuve T et de Cadence II, appartenant à M. Marin Tribondeau, drivé et entraîné par Paul Delanoë, remporta le Grand Circuit International 1983, devenant ainsi champion d’Europe ; et fut, avant Ourasi et Insert Gédé, le premier trotteur à triompher dans les quatre courses préparatoires au Prix d’Amérique. Il gagna le Prix d’Eté en 1980, le Grand Prix de Bavière à Munich en 1981, le Prix de l’Atlantique 1982 à Enghien, le Prix René Ballière 1983 en temps record, le Grand Prix du Sud-Ouest à Bordeaux. Il signait sa plus belle victoire en Suède dans l’Elitloppet de Solvalla en 1983. Il fut aussi troisième d’Idéal du Gazeau dans le Championnat du Monde 1983 à New York.

 

 

Ianthin avec Istraeki 0001

 Istraeki et Ianthin

 

 

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Ianthin et Paul Delanoë à Enghien

 

 

Istraeki 0005

Istraeki, fils de Paléo et de Vanikie, bien qu’ayant été le trotteur français le plus rapide de Vincennes dans la spécialité n’avait jamais remporté une seule course à l’attelage, avant le Prix d’Eté 1982, qu’il remporta en 1’18’’3, devant Lutin d’Isigny, Ino Ludois, Jiosco, Ianthin, Kisin, King Black, Katinka, Khali de Vrie… Auparavant, il avait été le plus rapide des trotteurs montés, et était un vainqueur classique dans cette spécialité, remportant notamment le Prix du Président de la République, le Prix des Elites et le Prix de Normandie.

 

 

Ino Ludois 0009

Ino Ludois, le cinquième « larron », par Quioco et Pélagie C, appartenant à Mme Rolande Labbé, succéda à Jorky dans le Grand Prix des Pays-Bas disputé à La Haye en juin 1982. Il avait battu Iris de Vandel en nocturne à Vincennes, donné chaud à Jorky dans le Prix René Ballière 1981, et à Jiosco plusieurs fois à Enghien. Il comptait de nombreuses victoires à Vincennes, à Enghien, et avait gagné à Nantes le Grand Prix des Sulkys ou Prix des Antilles 1980 en temps record. Il était toujours redoutable à la fin du printemps et au début de l’été. Il gagna aussi le Prix de l’Ile-de-France pour ses débuts au monté, ce qui lui valut de partir co-favori avec Kaiser Trot dans le Prix de Cornulier 1983, qu’ils perdirent tous deux.

 

 

Jorky numerisation0022Jorky, fils de Kerjacques et de Vanina B

Jorky, fils de Kerjacques et de Vanina B, aux origines prestigieuses, fut le premier trotteur à avoir remporté les trois grands Critériums (3 ans, 4 ans, 5 ans) et le seul à ce jour à y avoir ajouté le Critérium Continental. Il était le grand favori du Prix d’Amérique 1981, qu’il perdit malgré un retour fantastique sur le vainqueur, Idéal du Gazeau. Il devait gagner sur toutes les pistes du monde, en France, aux USA, en Italie, en Suède, souvent en Allemagne, aux Pays-Bas, au Danemark, et fut encore deuxième de Lurabo dans le Prix d’Amérique 1984.

Les quatre as du Prix d’Amérique 1981, gouache réalisée par l’auteur, Francis Annocque

Les quatre as du Prix d’Amérique 1981, gouache réalisée par l’auteur, Francis Annocque

Idéal du Gazeau remporte le Prix d’Amérique 1981, devant son grand rival, Jorky

Idéal du Gazeau remporte le Prix d’Amérique 1981, devant son grand rival, Jorky

Classical Way à Vincennes !

Classical Way à Vincennes !

Classical Way remporte le Prix de France 1981, devant Istraeki et Idéal du Gazeau et bat le record de la piste de Vincennes.

Classical Way remporte le Prix de France 1981, devant Istraeki et Idéal du Gazeau et bat le record de la piste de Vincennes.

Le 16 mars 1980, Idéal du Gazeau a été vaincu par un fantastique Hadol du Vivier lors du Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m), la deuxième épreuve du Grand Circuit International disputée sur l’hippodrome de Cagnes-sur-Mer. Le brillant champion de Pierre-Jean Morin se doit donc d’effacer cet échec à l’occasion du Grand Critérium de Vitesse 1981, disputé le 15 mars.

Malgré l’absence de Jorky, cette grande course internationale s’annonce passionnante ; on va assister pour la première fois et peut-être aussi la dernière à la confrontation du champion d’Europe Idéal du Gazeau avec le fameux Iris de Vandel, le hongre interdit dans les grands internationaux, qui vient de ridiculiser Ianthin, Jacob du Chignon et Istraeki dans un match à quatre organisé en son honneur au Croisé-Laroche.

Malheureusement, la pluie est aussi de la partie lorsque les neuf candidats défilent devant les tribunes. La petite taille d’Idéal du Gazeau, premier favori, contraste étrangement avec la haute silhouette d’Iris de Vandel, deuxième favori.

Il y a un record à battre, celui d’Hadol du Vivier établi un an plus tôt en 1’14’’1.

Lorsque les ailes de l’autostart se replient, libérant les neuf chevaux, Crown’s Pride, spécialiste de ce genre de départ, veut partir le plus vite ; mais ne trouvant pas le passage entre Grande Source et Iris de Vandel, il se met à la faute et perd beaucoup de terrain. Ceci fait l’affaire d’Iris de Vandel, qui se montre le plus rapide, suivi comme son ombre par Ianthin.

Après les 500 premiers mètres, Iris de Vandel fait illusion, menant à distance respectable d’Ianthin, que rejoint Idéal du Gazeau. Iris de Vandel se détache irrésistiblement, mais son driver, trouvant l’allure trop rapide, reprend son champion en face et c’est sans doute ce qui lui coûte la victoire. Derrière, Idéal du Gazeau se débarrasse d’Ianthin et fond sur Iris de Vandel tel un aigle sur sa proie. Au moment de l’attaque du champion de Pierre-Jean Morin, Iris de Vandel réagit et l’on assiste à un duel splendide tout au long de la ligne droite. Mais Idéal du Gazeau se montre le plus fort dans les derniers mètres et franchit victorieusement le poteau avec une bonne encolure d’avance sur son merveilleux rival.

Le fils d’Alexis III réalise l’excellente réduction de 1’14’’6, donnant chaud au record d’Hadol du Vivier. Iris de Vandel pour sa part est crédité de la même réduction kilométrique, alors que le troisième, Ianthin, n’est qu’en 1’15’’3. Idéal du Gazeau et Iris de Vandel ont donc littéralement humilié leurs adversaires. Crown’s Pride, auteur d’un excellent retour, prend la quatrième place devant Hêtre Vert et Istraeki.

Idéal du Gazeau, comme Iris de Vandel, sort grandi de l’épreuve car si le fameux partenaire de Roland Dersoir n’est vaincu à distance égale que par le champion d’Europe, celui-ci est de la même manière le seul cheval à avoir battu Iris de Vandel dans ces mêmes conditions. Dès lors, Idéal du Gazeau ne craint plus personne et il s’en va régner une fois de plus sur le trot européen.

 

A quelques jours de là, il se rend en Italie pour renouveler sa victoire de l’an dernier dans le Grand Prix de la Côte d’Azur (1 600 m) à Turin. En 1’15’’2, il s’impose avec désinvolture aux dépens de Gibson, Contingent Fee, Enriquillo, Erni, Our Dream of Mite, Club Special, Song and Dance Man, Chorus Master… Le grand absent était Crown’s Pride.

Idéal du Gazeau retrouve Jorky à Enghien dans le Prix de l’Atlantique (2 150 m, 400 000 francs, départ à l’autostart). Une belle épreuve que Jorky a remportée l’an dernier aux dépens d’Hadol du Vivier. Mais le duel « Idéal-Jorky » tant attendu n’aura pas lieu. Le fils de Kerjacques ne se montre pas à la hauteur de sa réputation, tandis qu’Idéal du Gazeau, écrasant de supériorité, effectue un véritable « cavalier seul » pour s’imposer en temps record (1’15’’8), précédant à distance les remarquables Ianthin et Képi Vert, qui privent Jorky (quatrième) des places d’honneur. Idéal du Gazeau a pulvérisé l’ancien record de l’épreuve que détenaient conjointement Buffet II et Bellino II en 1’16’’5.

 

Jorky, qui accuse une sérieuse baisse de forme, est absent à Agen pour le quatrième Grand Prix du Sud-Ouest (2 450 m), quatrième épreuve du grand Circuit International pour laquelle on retrouve Idéal du Gazeau, Ianthin, Istraeki, Jacob du Chignon, qui se classent dans cet ordre. Idéal du Gazeau, en l’occurrence, s’octroie le nouveau record de la piste (1’17’’2).

 

Mais Jorky, complètement retrouvé, va prendre sur son grand rival Idéal du Gazeau une éclatante revanche en Scandinavie. La première a lieu à Stockholm, en Suède, le dimanche 31 mai 1981, à l’occasion du fameux Elitloppet (1 609 m), qui permet à Jorky de s’imposer en finale dans le temps record de 1’13’’2, alors qu’Idéal du Gazeau, qui a remporté son épreuve de qualification, se contente d’une sixième place en 1’14’’3, mais avec des excuses.

La seconde défaite a lieu au Danemark, dans la Coupe de Copenhague (2 011 m), le 8 juin 1981, où Jorky déchaîné se montre intraitable et inapprochable pour Idéal du Gazeau, qui doit cette fois se contenter de la deuxième place.

Et c’est maintenant Idéal du Gazeau qui disparaît de la scène pour céder sa place à Jorky, son grand rival, le premier à se qualifier pour le grand rendez-vous de New York dans le Championnat du Monde.

 

Jorky en profite pour s’imposer à Vincennes (Prix René Ballière), à La Haye (Grand Prix des Pays-Bas), puis à Gelsenkirchen (Elite Rennen), les deux fois aux dépens du jeune Mustard, prouvant, vu sa forme actuelle, qu’il est bien le meilleur d’Europe, le plus apte à représenter la France dans le Championnat du Monde, son prochain objectif pour lequel, contre toute attente, il retrouve juste à temps Idéal du Gazeau. L’entourage du petit cheval noir aux bottines bleues s’étant décidé en dernière minute à tenter la grande aventure new-yorkaise, qui ne leur a pourtant pas réussi un an plus tôt.

 

Classical Way, la tenante du titre, ne le défendra pas cette année, sa carrière de courses étant définitivement terminée, ce qui fait bien les affaires d’Idéal du Gazeau et de Jorky. En effet, contrairement à ce qu’avait souhaité son entraîneur John Simpson Jr en février, Classical Way serait non seulement absente des Prix d’Amérique et de France édition 1982, mais encore elle ne défendrait même pas son titre de championne du monde durant l’été 1981, son propriétaire, Monsieur Clarence Gaines, un homme âgé, ayant décidé qu’elle fonctionnerait désormais comme poulinière. La fille de Speedy Scot disparaît ainsi de la scène après une carrière de courses particulièrement courte mais au combien brillante, avec des victoires dans le Arden Downs Stake, le Grand Circuit à Blue Bonnet (Canada), le Kentucky Futurity, le triptyque de Roosevelt Raceway 1980 (American Trotting Championship, Roosevelt International Trot, Challenge Gold Cup), l’American Trotting Classic d’Hollywood Park (deuxième épreuve et finale), qui lui valut son titre de « Trotteur de l’Année 1980 » aux USA, (le titre de « Harness Horse of the Year » ayant été décerné pour la deuxième fois consécutive au phénomène ambleur Niatross). Enfin sa victoire dans le Prix de France à Vincennes où elle établit le record fantastique de 1’14’’2, et son record sur le « mile » de 1’11’’6.

Classical Way ne laisse cependant pas le vide derrière elle ; en effet, elle a des successeurs en vue, les deux pensionnaires de l’écurie Haughton, Burgomeister et Final Score, assurément les deux meilleurs trotteurs américains du moment.

En valeur absolue, en classe pure, Burgomeister l’emporte, mais Final Score compense son léger écart par une régularité exemplaire, qui lui a permis durant l’année 1980 d’être le plus gros gagnant de 3 ans avec 328 807 $ de gains, devant Burgomeister 292 154 $.

Burgomeister et Final Score, les deux atouts de Billy Haughton, vont être les favoris de l’American Trotting Championship, l’épreuve qui permet de qualifier les deux concurrents américains pour le Championnat du Monde.

La 36e édition de l’American Championship (1 609 m) se dispute en nocturne le samedi 19 juillet sur l’anneau de Roosevelt Raceway à New York et s’annonce passionnante car, outre les deux champions de l’écurie Haughton, s’alignent au départ Able Mission, qui reste sur huit victoires consécutives, Super Marty, le champion de Californie, et enfin le champion new-yorkais Keystone Hallmark, jusqu’alors invaincu à Roosevelt comme à Yonkers.

Le lot est complété par Noble Newstime, la pouliche Kading, qui bénéficie du pilotage de Ron Waples « l’as des drivers canadiens », et Motor Mouth, un hongre de sept ans.

Les préférences du public vont dans l’ordre à Burgomeister devant Final Score et Keystone Hallmark, la gloire locale.

Burgomeister c’est le vainqueur de l’Hambletonian 1980, en gagnant les deux manches. Mais Peter Haughton, le fils de Billy Haughton, n’a pu voir son rêve se réaliser, il a disparu tragiquement dans un accident de voiture en janvier 1980.

Dès lors, Burgomeister va être marqué par le sort ; Billy Haughton cherche en effet à se débarrasser du cheval, qui lui rappelle trop la mort de son fils : la seule vision de Burgomeister lui est devenue insupportable. Une somme dérisoire pour un champion de cette trempe (un million de dollars) est demandée. Personne n’en veut, croyant à une « entourloupe », car à deux millions de dollars, Burgomeister aurait certes trouvé de nombreux preneurs.

Et puis Billy Haughton prend des vacances, oublie les chevaux et Burgomeister. Quand il revient, il est content de constater que le cheval est toujours là. Il le remet à l’entraînement et Burgomeister va remporter l’American National Trot de Chicago, puis il devient invincible à Meadowlands dans le New Jersey, avant son départ pour l’Europe. Là la malchance revient : Burgomeister se blesse à un genou en montant dans l’avion, ce qui ne l’empêche pas de réaliser un exploit pour sa première tentative en Europe ; battant Jorky et Speedy Min, il établit le temps record de 1’13’’ dans le premier éliminatoire de l’Elitloppet à Stockholm. Mais dans la finale, la douloureuse blessure se réveille et Burgomeister finit la course en boitant. Une semaine plus tard, il doit être déclaré forfait à Copenhague car il souffre toujours.

On va voir que la malchance n’a toujours pas abandonné ce malheureux cheval.

Noble Newstime démarre en trombe derrière l’autostart pour imposer aussitôt un train très rapide devant Keystone Hallmark et Motor Mouth, tandis que se rapprochent Kading, Final Score et Burgomeister. C’est alors que la noire malchance va frapper les trois favoris à mi-parcours. Final Score, qui va très vite, entre en collision avec Kestone Hallmark, qui tombe et se tue sur le coup ! Burgomeister n’échappe pas à la règle ; dans le dernier tournant, alors qu’il prononce un superbe effort, il est fauché à son tour par le champion californien Super Marty.

Résultat, un sanglant bilan : Final Score « out », Burgomeister « out », Super Marty « out », et Keystone Hallmark, le champion new-yorkais, mort invaincu.

Il ne reste plus à la petite Kading qu’à conclure victorieusement en 1’14’’7, devant Motor Mouth et Abble Mission, qui souffle la troisième place à Noble Newstime.

Kading succède ainsi à Classical Way au palmarès de l’American Trotting Championship, et est qualifiée avec Motor Mouth pour le Roosevelt International Trot, qui se dispute le samedi suivant.

 

Jorky et Idéal du Gazeau, déjà débarrassés de Classical Way, trouvent une occasion inespérée pour devenir « champion du monde » ; certes, Burgomeister et Final Score auraient été bien plus difficiles à battre sur l’anneau de Roosevelt. Les américains, Kading et Motor Mouth, malgré leur excellente aptitude à la piste de Roosevelt, sont loin de valoir les Classical Way, Burgomeister et Final Score. Aussi pour la plupart des experts, la course doit-elle se limiter à un match entre les deux français, Jorky et Idéal du Gazeau ; et, de toute façon, la Marseillaise retentira à New York le soir de ce samedi 25 juillet 1981, les musiciens sont avertis à l’avance.

Arrivé entouré du prestige que lui valent ses récents exploits, Jorky est le grand favori ; mais, enfermé dans un hangar en présence de belles pouliches, il ne songe plus à la course et se transforme en fougueux étalon prêt à mordre un rival éventuel durant ces quelques heures, qui lui coûteront la victoire.

Le vaste hippodrome plein à craquer sous la marée humaine est plongé dans l’obscurité. Seul un faisceau de lumière accompagne chacun des concurrents. Idéal du Gazeau, lustré comme un sou neuf, est très beau, noir de jais, guetté de bleu. Il a vraiment fière allure dans son rond de lumière. Par contre, Jorky surexcité doit être présenté le dernier, contrairement à l’ordre initial. Il est inondé, tout son influx nerveux ruisselle par tous les pores de sa peau et Léopold Verroken a un mal infini à lui faire tenir sa place. On peut dire qu’il a déjà perdu la course. Durant le canter, Léopold Verroken le sent mou. Jorky a perdu toute son ardeur. Dans ces conditions, il va lui être très difficile de profiter de sa position initiale, qui exige un départ très rapide pour prendre aussitôt la tête et la corde afin de durcir la course et d’émousser la pointe de vitesse redoutable d’Idéal du Gazeau.

A 21 h 44, l’autostart entraîne les huit concurrents dans la ronde infernale pour la plus grande joie du public. Le spectacle commence ou plutôt continue.

Jorky, bien évidemment, ne sait pas profiter de sa deuxième place à la corde et se laisse prendre de vitesse par l’américain Motor Mouth. Le tour est joué ! Motor Mouth a pris tête et corde, tandis qu’Idéal du Gazeau très véloce vient se placer à la hauteur de Jorky, le maintenant ainsi dans la « boîte ». Après 400 mètres de course, Motor Mouth mène la ronde endiablée. L’argentin Arin Baritono (présenté pour la première fois au public new-yorkais), sur une pointe de vitesse impressionnante, vient à l’extérieur se placer à la hauteur du leader, précédant ainsi Idéal du Gazeau. La petite pouliche américaine Kading attend les 1 200 mètres de course pour placer une attaque fulgurante tout à l’extérieur dans la ligne droite des tribunes. Elle cherche à se rabattre, mais Motor Mouth accélère aussitôt pour lui barrer le passage. Idéal du Gazeau réagit à son tour et vient se placer sur la même ligne que les deux américains, se retrouvant ainsi en troisième épaisseur pour aborder le virage.

Jorky pressent le danger et vient aussitôt prendre la roue de son compatriote et rival.

Arin Baritono au centre perd des rangs, n’ayant pu répondre à l’attaque de Kading.

Idéal du Gazeau à son tour s’empare du commandement à mi-ligne droite en face, mais Motor Mouth tient toujours la corde. Kading, légèrement décollée, est en troisième position devant Jorky tout à l’extérieur. Pamir Brodde, le suédois, à son tour tente d’attaquer, mais il lui est impossible de passer en quatrième épaisseur pour doubler Jorky.

La course se joue à cet instant précis : Eugène Lefèvre lance la pointe finale d’Idéal du Gazeau, qui se détache aussitôt de ses rivaux pour se rabattre à la corde dans le dernier virage. La cause paraît entendue. Les deux américains sont battus, mais Jorky lui ne s’avoue pas vaincu car Idéal du Gazeau, qui tourne mal sur cette petite piste, se trouve en difficulté ; un changement de jambes lui fait perdre de précieux mètres. Là Jorky aurait pu le contrer s’il avait été plus près, mais il n’a pas encore vraiment pris le meilleur sur les deux américains en abordant le virage. Dans la dernière ligne droite, Idéal du Gazeau redémarre de plus belle, s’envolant vers la gloire. C’est là seulement qu’on retrouve le grand Jorky. A deux cents mètres du but, il compte près de deux longueurs de retard sur Idéal du Gazeau, mais Léopold Verroken sollicite Jorky, qui réagit aussitôt et place un rush fantastique pour rejoindre son rival au poteau.

Mais Idéal du Gazeau a gagné, ayant pu conserver une tête sur son redoutable adversaire.

Les photographes se ruent autour de lui, les flashs le bombardent de partout ; et, malgré tout, Jorky, le grand favori battu, n’est pas oublié, sa seconde place acquise sur une pointe de vitesse extraordinaire ayant beaucoup impressionné les Américains, qui ne tarissent pas d’éloges et de commentaires admiratifs à son égard.

On a tendance à oublier les autres chevaux de la course : c’est qu’ils furent tout simplement inexistants dans les derniers 1 000 mètres, tant les deux français ont été écrasants de supériorité. Pour eux d’ailleurs (ou plutôt pour « notre Idéal ») la Marseillaise retentit à New York.

Enfin précisons qu’Idéal du Gazeau et Jorky ont tous deux bouclé les 2 011 mètres du parcours en 1’15’’7, le troisième meilleur temps de l’épreuve. Quant à Idéal du Gazeau, il rejoint dans la légende Jamin, Hairos II, Roquépine et Delmonica Hanover, les quatre seuls trotteurs à avoir remporté la même année le Prix d’Amérique et le Championnat du Monde.

 

La revanche disputée une semaine plus tard ne permet pas cette fois de les départager ; ayant franchi tous deux la ligne d’arrivée dans la même battue victorieuse, Jorky et Idéal du Gazeau réalisent un dead-heat historique en étant premier ex aequo !

La Marseillaise a retenti par deux fois à huit jours d’intervalle dans la nuit new-yorkaise et cela grâce à eux, bien sûr.

 

Grâce à Idéal du Gazeau, Saint-Jean-le-Thomas est maintenant célèbre dans le monde entier. Tous les habitants du village, ainsi que de nombreux touristes et autres admirateurs se sont réunis autour de Monsieur le Maire pour réserver un accueil triomphal au nouveau champion du monde. Il est l’invité d’honneur d’une cérémonie au cours de laquelle il reçoit de la part du maire une couronne tricolore. La fête se poursuit avec une procession dans les rues du village, dégustation de gâteaux, champagne et vin d’honneur.

Iris de Vandel et Roland Dersoir

Iris de Vandel et Roland Dersoir

Iris de Vandel, fils d’Ura et de Queifinguse, drivé et entraîné par Roland Dersoir, fut avec Idéal du Gazeau, Jorky et Ianthin, l’un des meilleurs trotteurs de Vincennes, au début des années 1980. Mais étant hongre, les plus grandes épreuves lui furent fermées. Il alla courir au Canada et aux Etats-Unis, devenant ainsi le plus rapide de tous les trotteurs français avec un record de 1’11’’7, gagnant notamment la Titan Cup de Meadowlands en 1982 et 1983. A Vincennes, il gagna le Prix du Calvados 1982, au trot monté, et à Cagnes-sur-Mer, le Grand Prix de la Ville de Nice, battant notamment Hymour. Il avait donné chaud à Idéal du Gazeau à Cagnes dans le Grand Critérium de Vitesse 1981, et à Jorky à Amiens dans le Prix du Président Emile Fossé, la même année. Mais il ridiculisait Ianthin au Croisé-Laroche.

Iris de Vandel et Roland Dersoir

Iris de Vandel et Roland Dersoir

Burgomeister, le champion américain marqué par le mauvais sort

Burgomeister, le champion américain marqué par le mauvais sort

Billy Haughton, grand entraîneur et driver américain, qui mena à la victoire Burgomeister dans l’Hambletonian, à la place de son fils Peter, tué dans un accident de voiture

Billy Haughton, grand entraîneur et driver américain, qui mena à la victoire Burgomeister dans l’Hambletonian, à la place de son fils Peter, tué dans un accident de voiture

Idéal du Gazeau et Jorky, premier et deuxième du Roosevelt International Trot-Championnat du Monde des trotteurs 1981 à New York

Idéal du Gazeau et Jorky, premier et deuxième du Roosevelt International Trot-Championnat du Monde des trotteurs 1981 à New York

Idéal du Gazeau et Jorky réalisent un dead-heat historique à New York, dans la Challenge Cup 1981, la revanche du Championnat du Monde

Idéal du Gazeau et Jorky réalisent un dead-heat historique à New York, dans la Challenge Cup 1981, la revanche du Championnat du Monde

Eugène Lefèvre et Léopold Verroken, honorés ensemble après l’exploit de leurs champions dans la Challenge Cup 1981

Eugène Lefèvre et Léopold Verroken, honorés ensemble après l’exploit de leurs champions dans la Challenge Cup 1981

Idéal du Gazeau et Jorky réalisent un dead-heat historique à New York, dans la Challenge Cup 1981, la revanche du Championnat du Monde

Idéal du Gazeau et Jorky réalisent un dead-heat historique à New York, dans la Challenge Cup 1981, la revanche du Championnat du Monde

Idéal du Gazeau doit affronter un Jiosco complètement transformé

Idéal du Gazeau doit affronter un Jiosco complètement transformé

Keystone Patriot redoutable en Finlande !

Keystone Patriot redoutable en Finlande !

Gator Bowl invincible à Cesena !

Gator Bowl invincible à Cesena !

Idéal du Gazeau, Jorky, Gator Bowl : le trio magique à l’arrivée du Grand Prix des Nations 1981 à Milan !

Idéal du Gazeau, Jorky, Gator Bowl : le trio magique à l’arrivée du Grand Prix des Nations 1981 à Milan !

Igor du Beauvoisin

Igor du Beauvoisin

Chaque génération à son « Kerjacques » de service, chez les « I » d’Idéal du Gazeau, c’est Igor du Beauvoisin, vainqueur du Prix du Luxembourg à Vincennes, du Graf Kalman Hunyady Gedenkrennen à Vienne, du Grand Prix Fernand Talpé à Kuurne, devant Jiosco et Hymour

Igor du Beauvoisin et Michel Roussel

Igor du Beauvoisin et Michel Roussel

Mais Idéal du Gazeau est aussi invité à se faire applaudir par son public parisien à l’occasion du Prix d’Europe d’Enghien (2 800 m), l’épreuve qui clôture en beauté le meeting d’été sur l’hippodrome du plateau de Soisy, avec 25 mètres à rendre à des adversaires de choix : comme Jiosco, en pleine ascension, auteur de quatre succès consécutifs, sur quatre champs courses différents, prouvant sa faculté d’adaptation à toutes les pistes, Ino Ludois, restant lui aussi sur une victoire, comme Iris de Vandel, bien qu’il ne soit pas un cheval d’été, également Gel de Retz, un hongre devenu le meilleur trotteur de Suisse, Igor du Beauvoisin, un fils de Kerjacques, Jacob du Chignon… Idéal a joué les cabotins pendant le défilé, quand la foule l’a acclamé. Et Jiosco a bien failli réussir l’exploit, bien qu’ayant perdu une trentaine de mètres à cause de l’envol d’un journal, qui l’a effrayé. Il a fallu attendre durant un long suspense le résultat de la photo finish pour savoir qu’Idéal du Gazeau l’avait emporté du plus court des nez.

 

Le dimanche 20 septembre 1981 voit le retour de Jorky, qui s’impose en temps record dans le Grand Prix de la Ville de Reims en terre champenoise. Or, le même jour, à des kilomètres de là, Idéal du Gazeau lui remporte, en 1’18’’4, le Grand Prix d’Aby (2 140 m, départ donné à l’autostart) à Göteborg, l’autre grande ville de Suède, malgré un temps exécrable, rafales de vent et pluies, loin devant Mustard, Dartster F et Keystone Patriot, alors qu’Iris de Vandel, qui ne semble pas aimer les longs déplacements, est disqualifié sur une grosse incartade.

 

Volant de succès en succès, Idéal du Gazeau se rend en Finlande, à seulement sept jours d’intervalle, le dimanche 27 septembre 1981, où se dispute sur l’hippodrome de Vermont, à Helsinki, le Grand Prix de Finlande (1 600 m), qui compte maintenant pour le Grand Circuit International, en tête duquel Idéal du Gazeau et Jorky se partagent la première place. Jorky étant absent, Idéal du Gazeau a donc une opportunité à saisir, pour devancer son rival dans la course au titre de champion d’Europe. Ce qu’il va réussir en s’imposant à deux reprises, en éliminatoire et en finale, dans la même journée, malgré l’opposition opiniâtre de Keystone Patriot, la gloire locale, très encouragée par son public venu nombreux pour assister à cette confrontation au sommet ; et qui s’incline de très peu en finale, après avoir triomphé en éliminatoire dans un temps plus rapide que le champion français, mais non sans user de méthodes quelques peu douteuses face à Idéal du Gazeau, sur le plan de la sportivité.

A noter, qu’Idéal du Gazeau triomphait trois ans après son succès dans le Prix du Fer d’Or sur ce même hippodrome. Alors que la veille, les Français, qui avaient effectué ce long déplacement en Finlande étaient déjà en verve, puisqu’ils avaient pu assister à la victoire de Lévorino devant Lutin d’Isigny, second français à remporter ce même Prix du Fer d’Or, après Idéal du Gazeau, dont il est justement question.

 

Jorky ayant préféré renouveler sa victoire de l’an dernier dans le Prix des Meilleurs à Munich, Idéal du Gazeau trouve encore la voie libre dans le Prix des Géants (1 600 m), avant dernière épreuve du Grand Circuit International, qui se dispute à Hilversum, en Hollande, le mardi 13 octobre 1981 en soirée. Une fois de plus, Idéal du Gazeau va triompher en éliminatoire et en finale dans la même journée, avec une réduction de 1’14’’7 dans l’épreuve finale, qui le voit s’imposer devant Ivens, son ancien challenger, Express Gaxe, Lima Power et Keystone Patriot.

 

Idéal du Gazeau est maintenant le confortable leader du Grand Circuit International avec 25 points d’avance, devant Jorky 15 points. Mais il veut terminer l’année en beauté en ajoutant à son palmarès la dernière épreuve de ce grand challenge, à savoir le Grand Prix des Nations (2 100 m), disputé le dimanche 22 novembre 1981, en nocturne à Milan, et dont Jorky, qu’il retrouve justement à cette occasion, est le tenant du titre. C’est leur première rencontre depuis leur dead-heat historique à New York dans la Challenge Cup. Or, c’est aussi la première fois qu’ils vont être confrontés à Gator Bowl, un fils de Super Bowl, devenu le nouveau crack de la Péninsule, et que les Italiens disent encore meilleur que Timothy T et aussi bon que Tornese. « Sans exagération : ( !) Voici la course de l’année avec un triangle classique : Idéal, Jorky, Gator » ont titré les journalistes de la presse hippique italienne. Or, ces trois champions vont se montrer à la hauteur de leur réputation, en prenant les trois premières places à l’issue d’une arrivée très spectaculaire, puisqu’ils finissent pratiquement dans la même battue, séparés chacun d’une courte tête, et font d’ailleurs afficher la même réduction kilométrique de 1’15’’4 !

 

En conclusion, Idéal du Gazeau, qui s’est brillamment succédé à lui-même, est à nouveau champion d’Europe en 1981, devant un magnifique Jorky, qui ne reste d’ailleurs pas longtemps sur une défaire, puisqu’il va remporter peu après le Prix de Bretagne à Vincennes, première épreuve préparatoire au Prix d’Amérique, bien que rendant 25 mètres à tous ses adversaires.

Idéal du Gazeau et Jorky

Idéal du Gazeau et Jorky

La rivalité entre Idéal du Gazeau et Jorky, en 1981, a passionné le monde du turf, ils ont occupé les deux premières places du Prix  d’Amérique, du Championnat du Monde, de la revanche (la Challenge Cup) dans un étonnant dead-heat, du Grand Circuit International Européen.

 

Quant à Idéal du Gazeau, avec un total de 30 points, il devance ainsi Jorky (18 points) et Pamir Brodde (11 points), au classement du Grand Circuit International Européen 1981, ce qui est d’ailleurs le tiercé gagnant dans l’ordre du Championnat du Monde à New York. Par la même occasion, il est après Cancannière, Gélinotte, Icare IV, Newstar, Ozo, Roquépine, Une de Mai et Jorky, auquel il succède, le neuvième trotteur français à inscrire son nom au palmarès du Grand Prix des Nations.

Idéal du Gazeau remporte l'Elitloppet 1980

Idéal du Gazeau remporte le Prix d'Amérique 1981 devant Jorky et Classical Way

Idéal du Gazeau remporte le Roosevelt International Trot 1981 devant Jorky

Idéal du Gazeau et Jorky Challenge Cup 1981

Premio Costa Azzura 1980 Idéal du Gazeau

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14 mars 2013 4 14 /03 /mars /2013 15:31

 

Les champions trotteurs de légende en France

 

06 - Les années 1970 (Eléazar et Hadol du Vivier)

 

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Eléazar, par Kerjacques et Quérida, deux fois lauréat du Grand Circuit International, vainqueur du Prix d’Amérique, de l’Elitloppet, du Prix de France à trois reprises, du Grand Critérium de Vitesse à deux reprises, du Prix de Paris à deux reprises, du Grand Prix de Bavière, de l’Elite Rennen… Un grand champion de classe internationale.

 

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Eléazar et Léopold Verroken

 

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Eléazar au haras

 

Eléazar

 

Avec Bellino II commence le long règne des mâles au plus haut niveau du trot français ; après lui d’autres seigneurs viendront se faire admirer des foules de turfistes et amateurs de trotting : Eléazar, un fils du grand sire Kerjacques, Equiléo et Fakir du Vivier, tous deux appartenant à Alain Delon, Grandpré, Hadol du Vivier, Ianthin, Idéal du Gazeau, Jorky, autre fils de Kerjacques, Kaiser Trot, meilleur au trot monté, Lurabo, Lutin d’Isigny, Mon Tourbillon, Ourasi, enfin, peut-être le plus fameux de tous… sans oublier Iris de Vandel, qui lui avait le malheur d’être hongre.

 

Eléazar était un magnifique trotteur bai, grand et majestueux, né en 1970 de l’union de Kerjacques et de Quérida chez Monsieur Alec Weisweiller.

Son palmarès à lui seul parle pour lui, il est vraiment exceptionnel.

Et pourtant Eléazar connut de nombreux ennuis dans sa carrière à cause de ses jambes fragiles, qui lui valurent de longues périodes de convalescence.

Heureusement, Léopold Verroken, sans doute alors le meilleur entraîneur de trotteurs en France, avait des remèdes secrets pour soigner et consolider son « champion aux pieds d’argile ». Leur mérite à tous deux n’en fut que plus grand encore. Ils brillèrent sur toutes les pistes d’Europe.

Ainsi Eléazar remporta deux fois le Grand Circuit International Européen (1977 et 1978).

A son palmarès figurent un Prix d’Amérique, trois Prix de France, deux Prix de Paris, deux Grands Critériums de Vitesse de la Côte d’Azur, deux Grands Prix du Sud-Ouest, un Prix de l’Atlantique, un Prix de Sélection ; également le Prix de l’Elite Internationale (Elitloppet, éliminatoire et finale) à Stockholm, la Course des Elites (Elite Rennen) à Gelsenkirchen, le Grand Prix de Bavière et le Prix des Meilleurs à Munich, le Grand Prix d’Eté à Sterrebeek (hippodrome de Bruxelles), soient au total 36 victoires pour 6 731 685 francs de gains, ce qui fit de lui le troisième trotteur le plus riche de tous les temps après Bellino II et Une de Mai.

 

On gardera longtemps le souvenir de sa victoire dans le Prix d’Amérique 1980 alors qu’il avait dix ans, qu’on le croyait trop vieux, fini, usé par trop de durs combats.

Ainsi le public n’avait d’yeux que pour les deux jeunes étoiles montantes, Hadol du Vivier et Idéal du Gazeau, qui se livraient un duel à couteaux tirés depuis le départ de la course.

Or, Eléazar attendit sagement qu’ils se soient tous les deux mutuellement asphyxiés pour laisser Grandpré leur porter la première estocade, avant d’attaquer à son tour pour régler tout son monde dans une envolée éblouissante. Or, le dimanche suivant il confirma son succès en gagnant comme à la parade et encore plus facilement son troisième Prix de France, par lequel il choisit de faire ses adieux au public alors qu’il paraissait plus fort que jamais.

Aussi fût remise au goût du jour la question de savoir s’il était juste d’arrêter à dix ans la carrière d’un champion trotteur en pleine possession de ses moyens, polémique déjà évoquée pour Bellino II.

 

Grand (1,64 m au garrot) et majestueux, bai, avec une petite pelote sur le front et un chanfrein convexe, Eléazar est assez facile à reconnaître dans un peloton, d’autant qu’il est associé à la casaque grenat de son propriétaire éleveur, Monsieur Alec Weisweiller, et toujours mené en courses par son entraîneur Léopold Verroken, à la fine moustache, à la fois le rival et l’ami de Jean-René Gougeon.

Son lad attitré est Bernard Oger, à la grosse moustache, qui sera aussi celui du champion Jorky, avant de se distinguer au sulky de la championne Vourasie, la sœur d’Ourasi.

 

A la suite de Toscan et d’Une de Mai, Eléazar va contribuer à bâtir la renommée de son père, le grand sire Kerjacques en tant qu’étalon. Sa mère Quérida étant une fille du grand reproducteur Carioca II, Eléazar est particulièrement bien né.

 

Bien que souvent retardé dans sa carrière par des problèmes de jambes, Eléazar s’illustre au plus haut niveau dès l’âge de 4 ans et débute à La Capelle, dans le Nord, à 3 ans, le 13 mars 1973, par une deuxième place dans une course de débutants. En fin d’année, Eléazar fait déjà partie des meilleurs de sa génération ; il gagne le Prix Pierre Plazen (2 250 m), en 1’20’’3, devant Epigramme et Ebbon, puis participe au classique Critérium des 3 ans, dont il se classe quatrième derrière Ebbon, Espoir de Sée et Ecu de Retz.

 

Il fait mieux à 4 ans en gagnant le Prix Charles Tiercelin (2 250 m), en 1’19’’, devant Emone et Ephèse, le Prix Jules Thibault (2 350 m), en 1’22’’, devant Emone, et le classique Prix de Sélection (2 300 m), devant Catharina et Clissa.

Mais dans le classique Critérium des 4 ans (2 800 m), il est devancé par Espoir de Sée, Esquirol et Equiléo. Le 25 août 1974, il est à nouveau quatrième derrière Espoir de Sée, Ephèse et Equiléo, dans l’important Critérium Continental (2 050 m).

Mais il gagne le Prix Octave Douesnel (2 600 m), en 1'21’’2, le 23 novembre 1974, devant Edomerica, Espoir de Sée, Esquirol, Eleusienne…

 

L’année 1975 n’est pas celle d’Eléazar, mais celle d’Equiléo, qui gagne coup sur coup le Prix Jockey, le Critérium des 5 ans, le Prix de l’Etoile, le Prix d’Eté, et se distingue aussi à l’étranger. Mais Eléazar, qui a connu de sérieux problèmes à cause de ses jambes fragiles, se classe tout de même troisième d’Equiléo et Espoir de Sée dans le classique Critérium des 5 ans, et se retrouve en fin d’année pour gagner le Prix Marcel Laurent (2 300 m), en 1’20’’, prenant sa revanche à la fois sur Equiléo et sur Espoir de Sée, arrivés deuxième et troisième !

 

Durant le meeting d’hiver 1976, il se distingue dans les petits internationaux, gagnant le Prix de la Marne (2 250 m), en 1’19’’4, devant Ecu de Retz et Emone, et le Prix du Plateau de Gravelle (2 600 m), en 1’19’’4, devant Dark, Ejakval, Coppet, Colomba II, avant de se classer troisième derrière Bellino II et Catharina dans le Prix de Paris (3 150 mètres).

 

Dans le Prix René Ballière (2 350 m), disputé le 17 juin, aucun des meilleurs « E » ne peut contester l’écrasante supériorité de Bellino II, mais Eléazar se classe troisième dans la même battue que le deuxième, Espoir de Sée, devant Equiléo.

 

Durant l’été, il se met à l’honneur en remportant le clou du meeting estival d’Enghien, le Prix d’Europe (2 800 m), en 1’17’’6, battant ainsi le record détenu en 1’18’’ par Une de Mai et Tidalium Pélo, pour s’imposer devant Equiléo, Espoir de Sée, Colomba II, Clissa, Carlo d’Orsay, confirmant ainsi qu’il fait bien partie désormais de nos meilleurs trotteurs.

 

A Caen, dans le Prix des Ducs de Normandie (2 300 m), il se fait coiffer sur le poteau par Espoir de Sée, alors que Dei se classe troisième devant Feinte, Emone, Dona, Faro…

 

Deux déplacements à l’étranger lui permettent de s’illustrer hors de nos frontières, d’abord à La Haye, dans le Grand Prix des Pays-Bas (2 600 m), dans lequel, gêné par un adversaire, il est battu de peu par Dinès P, devançant Royal Port, tout en s’offrant le record de l’épreuve, qu’il partage avec la gagnante (1’17’’) ; puis en Allemagne, à Gelsenkirchen, dans l’Elite Rennen (Course de l'Elite) (2 500 m), qu’il remporte en 1’17’’4, devant Dalko II, Hassan Star, Bailly II…

 

Pour son retour à Vincennes, dans le Prix Thiéry de Cabanes (2 350 m), Eléazar s’impose mais de peu, en 1’17’’6, devant Ecu de Retz (même temps), puis Ejakval, Colomba II, Clissa… 

 

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Espoir de Sée domina sa génération à 4 ans, déjà deuxième d’Ebbon dans le Critérium des 3 ans, il enleva celui des 4 ans, ainsi que le Critérium Continental, et s’intercala entre Equiléo et Eléazar dans le Critérium des 5 ans ; il battit Eléazar à Caen, dans le Prix des Ducs de Normandie.

 

Espoir de Sée n0001Espoir de Sée

 

 

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Equiléo est resté célèbre pour avoir battu Bellino II à New York, dans le Championnat du Monde des trotteurs 1976, alors qu’il portait la casaque d’Alain Delon, mais il s’illustra aussi dès l’âge de 4 ans, en enlevant en temps record le Grand Prix d’Europe de Milan, ainsi que l’Elite Rennen de Gelsenkirchen, et en se classant troisième de la finale de l’Elitloppet de Solvalla, derrière Timothy T et Amyot, en 1974, avant d’aligner une série victorieuse prestigieuse à 5 ans : Prix Jockey, Critérium des 5 ans, Prix de l’Etoile, Prix d’Eté, Prix des Meilleurs à Munich. Il s’est aussi classé troisième du Prix d’Amérique 1976, derrière Bellino II et Catharina, et a trotté en 1’13’’4 à Hollywood Park, en Californie, dans l’American Trotting Classic 1976, terminant troisième derrière Keystone Pioneer et Savoir, mais devant Dream of Glory et Kash Minbar, qui l’avaient devancé dans la Challenge Cup.

 

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Equiléo drivé par son entraîneur, Pierre-Désiré Allaire

 

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Le pedigree d’Equiléo

 

 

 

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Dinès P priva Eléazar d’une belle victoire dans le Grand Prix des Pays-Bas à La Haye.

 

 

 

Il débute le meeting d’hiver 1977 par une sixième place avec 25 mètres de handicap dans le Prix du Bourbonnais (2 600 m), que remporte Bellino II, devant Dauga, Fakir du Vivier, Colomba II et Feinte. Puis il est battu à la fin par Dauga dans le Prix de Bourgogne sur 2 250 mètres, alors qu’il précède Fakir du Vivier, Colomba II, Catharina, Ecu de Retz… Enfin il s’impose dans le dernier préparatoire au Prix d’Amérique, le Prix du Béarn disputé sur 2 600 mètres, qu’il remporte en 1’19’’5, devant Dimitria, Feu Viollet, Dauga, et le grand Bellino II, qui avec sa pénalité initiale trotte en 1’19’’3…

 

Le jour du Prix d’Amérique, le dimanche 31 janvier 1977, Eléazar est directement opposé à Bellino II, favori à 23/10, avec une cote de 5/2. Il va magnifiquement confirmer cette position en n’étant battu que d’une courte encolure par son grand rival, alors qu’il devance de très loin Franca Maria, Fakir du Vivier, Colomba II, Dimitria, Eringa, Ecu de Retz… Bellino II et Eléazar sont d’ailleurs chronométrés dans le même temps record sans autostart de 1’17’’9.

 

Mais, dès la semaine suivante, dans le Prix de France (2 250 m), Eléazar prend sa revanche sur son grand rival, en s’imposant en 1’16’’8, devant Dimitria, Catharina et Bellino II, qui ne parvient pas à rendre ses 25 mètres de pénalisation.

 

Cependant, dans le Prix de Paris (3 200 m), Bellino II s’impose à nouveau, mais Eléazar confirme son rôle de dauphin en étant bon deuxième devant Dimitria et Catharina.

 

Avec le jeune Hadol du Vivier, toujours quasi-invaincu, Bellino II, et aussi Fanacques, qui s’est illustré au trot monté, Eléazar est l’un des héros de ce meeting d’hiver 1977.

 

C’est peu après qu’il va devenir un cheval de légende.

 

Le dimanche 13 mars 1977, Eléazar est à Cagnes-sur-Mer pour le premier de ses deux Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m), dans lequel il réussit l’exploit de s’imposer en 1’15’’, battant ainsi le record de la course et celui de la piste, et précédant de loin l’italien Delfo, deuxième devant Dauga, Dalko II, Catharina, Dimitria…

 

Mais à Enghien, pour le Prix de l’Atlantique (2 150 m), le 3 mai 1977, il retrouve son grand rival, Bellino II, et doit se contenter d’une deuxième place devant Equiléo et Feinte.

 

Le 18 mai, Eléazar inaugure à sa façon une nouvelle épreuve du Grand Circuit, disputée en Belgique, à Sterrebeek, le Grand Prix d’Eté (1 600 m), qu’il remporte en 1’15’’8, devant Faro, un ex-français devenu belge sous le nom de Faro II, Dauga, Dinès P, El Moro…

 

Mais à Munich, le 29 mai, dans le Grand Prix de Bavière (2 100 m), Eléazar doit s’incliner devant Dauga, se succédant à lui-même au palmarès de cette épreuve qu’on dirait faite pour lui, puisqu’il l’avait déjà gagnée l’an passé aux dépens de Bellino II.

Cette fois, il a trotté en 1’15’’7, égalant ainsi le record établi par Buffet II, alors qu’Eléazar se classe bon deuxième devant Granit, Bellino II, Forain, Wayne Eden…

 

Le 5 juin, Eléazar est au départ de l’Elitloppet (1 609 m), à Stockholm, sur l’hippodrome de Solvalla, prêt pour l’un de ses plus beaux exploits. D’abord, il s’impose en 1’16’’ dans la première manche devant Dalko II, Madison Avenue, Waymaker… Puis, dans la finale, il se montre irrésistible pour l’emporter en 1’16’’, devant Wiretapper, Dauga, Waymaker…

 

Après cette belle victoire, Eléazar consolide sa position en tête du Grand Circuit International 1977, qu’il conserve jusqu’au bout pour l’emporter avec 24 points devant Bellino II (20 points), auquel il succède brillamment au palmarès de ce challenge européen.

 

Pourtant, dans le Prix René Ballière (2 250 m), disputé le 16 juin à Vincennes, c’est Fakir du Vivier et non Eléazar qui prive Bellino II de la victoire pour la première fois à départ égal depuis qu’il est mené par J. R. Gougeon ! Le cheval d’Alain Delon, piloté par Pierre-Désiré Allaire, signe son succès en 1’17’’, pour s’imposer devant le grand Bellino II, Equiléo, Gars de Fontaine et Eléazar, sans doute fatigué par son périple en Scandinavie.

 

Eléazar devait perdre également à Enghien, le 21 août, dans le Prix d’Europe (2 800 m), que remportait Carlo d’Orsay, en 1’19’’7, devant Forain, Eléazar et Fugit.

 

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Le champion Fakir du Vivier en action

 

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Fakir du Vivier au haras, une étonnante réussite !

 

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Fakir du Vivier bat Bellino II à départ égal, du jamais vu !

 

 

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Fakir du Vivier affronte un roi du sprint, le champion coureur cycliste belge Freddy Maertens

 

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Fakir du Vivier, beaucoup d’allure en vérité mais pas toujours sage, sauf avec « Minou » Gougeon, la main d’or

 

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Fakir du Vivier, fils de Sabi Pas et d’Ua Uka, frère utérin d’Hadol du Vivier, drivé et entraîné par Pierre-Désiré Allaire, a gagné le Grand Prix d’Europe de Milan en temps record. Meilleur trotteur de sa génération, il s’octroya le Critérium des 3 ans, le Critérium des 4 ans et le Critérium Continental. Il gagna le Prix de l’Etoile 1974, devant Espoir de Sée, et deux fois le Prix de Sélection, en 1975, devant Espoir de Sée, et en 1976, devant Eléazar. Il fut aussi deuxième du Prix d’Amérique de Grandpré, en 1978, devant Eléazar et Hadol du Vivier, et troisième du Prix d’Amérique d’High Echelon, en 1979, derrière Idéal du Gazeau. Il est le seul trotteur à avoir battu Bellino II et Jean-René Gougeon à départ égal sur la piste de Vincennes, dans un Prix René Ballière resté mémorable, celui de 1977. Père de Prince Royal, Quarisso, Quouky Williams, Rainbow Runner, Rose du Marquais, Tsar Unique, Ukir de Jemma, Vourasie, Arnaqueur, Dahir de Prélong, et grand-père de Coktail Jet, il est devenu au haras un étalon hors du commun.

 

Fanacques photo APRH Bertrand

Fanacques, fils de Kerjacques et de Nalicante D, élevé et entraîné par Georges Dreux, s’illustra surtout au trot monté, gagnant deux fois le Prix de Cornulier, en 1977, et en 1979, la première fois en battant Bellino II. Mais il fut devancé dans cette épreuve par sa compagne d’écurie, Guéridia, en 1978. Cette année-là, il gagnait pour la deuxième fois le Prix de l’Ile-de-France. Il gagna aussi le Prix des Centaures 1977 et le Prix de l’Ile-de-France 1977. Il se classa deuxième d’Eléazar à l’attelage dans le Prix de Buenos Aires à Enghien en 1979.

 

 

 

Après une longue absence suite à de nouveaux problèmes de jambes, Eléazar fait sa rentrée à Vincennes le 1er janvier 1978 dans le Prix de Bourgogne (2 250 m), avec la tâche impossible de rendre 25 mètres au jeune phénomène Hadol du Vivier, alors invaincu et invincible, qui l’emporte en 1’16’’8, devant son demi-frère Fakir du Vivier et le compagnon d’entraînement de celui-ci, Grandpré, un nouveau venu à ce niveau, qui refera parler de lui.

 

Fakir du Vivier s’impose à son tour dans le Prix du Béarn (2 600 m), en 1’18’’4, devant Ejakval, Grandpré, Gosse de Vrie, Eléazar, qui court en progrès, puis Carlo d’Orsay…

 

Si l’on ajoute Hadol du Vivier, le vainqueur du Prix de Bourgogne, qui a préféré s’imposer dans le Prix de Croix, on a déjà dans le désordre les cinq premiers du prochain Prix d’Amérique.

 

Malgré 25 mètres de handicap et une incartade au départ, le Prix de Croix (2 700 m) est une formalité pour Hadol du Vivier, qui s’impose en 1’20’’, loin devant Hymour.

 

Tous les exploits répétés du jeune prodige Hadol du Vivier lui valent de partir grandissime favori du Prix d’Amérique (2 600 m), le dimanche 29 janvier 1978, à la cote de 5/10. Mais il n’a que 5 ans, et bien que mené par Jean-René Gougeon, qui reste sur son triplé victorieux avec le grand Bellino II, il manque d’expérience à ce niveau.

Les autres chevaux les plus joués sont Fakir du Vivier et Grandpré, désormais tous les deux aux couleurs de leur entraîneur Pierre-Désiré Allaire, et Eléazar, qui se remet peu à peu d’une fracture, mais qu’on ne peut écarter vu sa classe. Hadol du Vivier, Fakir du Vivier, Grandpré et Eléazar : ces quatre champions forment un quatuor de choc !

Ils prendront en effet les quatre premières places mais pas tout à fait dans l’ordre espéré. Grandpré ce jour-là se montre irrésistible et hallucinant, pour s’imposer en temps record, 1’16’’9, à distance de son compagnon d’écurie, Fakir du Vivier, lui-même très détaché d’Eléazar, Hadol du Vivier et Carlo d’Orsay, à la lutte pour la troisième place. Après photographie, elle revient au vaillant Eléazar, devant le jeune champion Hadol du Vivier, courant en dessous de sa valeur à cause de la gourme, la grippe équine.

 

Mais Eléazar enlève coup sur coup son deuxième Prix de France (2 250 m), en 1’16’’1, devant Gars de Fontaine, Fakir du Vivier, Gazon, Grandpré… et son premier Prix de Paris (3 175 m), en 1’19’’4, devant Grandpré, Greyhound, Ejakval, Feinte, prouvant ainsi qu’il n’a manqué que d’une course dans le Prix d’Amérique, et qu’il était bien en réalité le digne successeur de Bellino II et désormais le meilleur cheval de Vincennes.

 

D’ailleurs, Eléazar poursuit brillamment sa série victorieuse à Cagnes-sur-Mer, où il remporte son deuxième Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m), cette fois en 1’15’’4, devant The Last Hurrah, un spécialiste du mile, puis Hurgo, Fabrino, Firstly, Fleur de l’Etrat, Dauga, Candy Lamb…

 

Eléazar s’impose aussi à Enghien, en 1’17’’1, devant Hadol du Vivier, battu de peu il est vrai, Feinte, Ejakval, Fadet, Hurgo, Dauga… dans le Prix de l’Atlantique (2 150 m).

 

Le périple victorieux d’Eléazar passe par Beaumont-de-Lomagne avec le premier Grand Prix du Sud-Ouest (2 400 m), comptant désormais pour le Grand Circuit, qu’il remporte en 1’17’’, toujours devant Hadol du Vivier, que suivent Ejakval et Espoir Mabon.

 

Eléazar et Hadol du Vivier, devenus les éternels rivaux, se retrouvent à Stockholm, en Suède, le 4 juin 1978, à l’occasion de l’Elitloppet (1 609 m), dont Eléazar est le tenant du titre.

Eléazar remporte la première batterie qualificative dans le temps record de 1’13’’5, devant Express Gaxe, Madison Avenue et Charme Asserdal, alors qu’Hadol du Vivier est battu de peu par Pershing, en 1’13’’2, nouveau record dans la seconde.

Mais, dans la finale, Hadol du Vivier se retrouve complètement pour s’imposer enfin en 1’14’’ (encore un record), devant son grand rival Eléazar, bon deuxième, devant Duke Iran, Express Gaxe, alors que Pershing s’est éliminé de lui-même sur une grosse incartade.

 

Eléazar n’a cependant pas dit son dernier mot, puisque les deux champions sont à nouveau face à face à Munich, pour le Grand Prix de Bavière (2 100 m), qui permet à l’aîné de prendre sa revanche sur son cadet, s’imposant en 1’17’’8, devant Hadol du Vivier, Granit et Hurgo.

 

Cependant, Eléazar et Hadol du Vivier sont encore opposés, cette fois pour leur retour à Vincennes, à l’occasion du Prix René Ballière (2 050 m), disputé le 15 juin, sur la petite piste, dans lequel ils retrouvent également Grandpré, leur tombeur du Prix d’Amérique, et son dauphin Fakir du Vivier ; ainsi les quatre héros de l’hiver sont à nouveau réunis.

Mais cette fois, Hadol du Vivier confirme son retour au sommet pour s’imposer en 1’17’’9 et prendre ainsi sa revanche sur Eléazar, excellent deuxième, devant Hurgo et Feinte, alors que Grandpré et Fakir du Vivier déçoivent complètement.

 

L’aventure d’Hadol du Vivier et d’Eléazar, qui doit les conduire aux Etats-Unis pour finalement en découdre dans le Championnat du Monde, passe à nouveau par l’Allemagne, mais cette fois à Gelsenkirchen à l’occasion de l’Elite Rennen (la Course de l’Elite, 2 500 mètres), qu’Eléazar a déjà remportée en 1976. Mais cette fois un mauvais départ derrière l’autostart le prive de la deuxième place au profit de Madison Avenue, alors qu’Hadol du Vivier s’impose en 1’16’’9. Derrière Eléazar, troisième, se classe Pershing, qui était le tenant du titre.

 

Un déplacement infructueux dans le nord de la France, à La Capelle, pour le Prix de la Grande Thiérache, laisse planer un doute sur l’état de forme d’Eléazar, qui semble en baisse. Mais cela ne remet pas en question sa participation au Championnat du Monde des trotteurs, à New York, sur l’hippodrome de Roosevelt Raceway, à l’occasion du Roosevelt International Trot (2 011 m), disputé en nocturne, le 5 août 1978.

 

Bien que remplaçant son camarade d’entraînement Green Speed, un vainqueur de l’Hambletonian, détenteur de 17 records du monde (battus ou égalés) mais malheureusement tombé boiteux, Cold Comfort s’impose en 1’15’’3, devant la jument néo-zélandaise Petite Evander, alors qu’Hadol du Vivier, qui a souffert de la chaleur et manqué de souffle au moment crucial (séquelles de sa gourme), se classe troisième devant Eléazar, dont les jambes fragiles n’ont pas apprécié la piste dure. La championne finlandaise Charme Asserdal arrive ensuite devant Nigel Craig, l’autre cheval de Nouvelle-Zélande, puis le deuxième trotteur américain, Kash Minbar, et la pouliche canadienne Dapper Dillon.

 

La Challenge Cup (2 413 m), disputée la semaine suivante, en l’absence des deux français, revient à Lola’s Express, devant Cold Comfort, Petite Evander, Charme Asserdal…

 

La défaite d’Hadol du Vivier dans le Grand Prix des Nations (2 100 m), à Milan, remporté par Charme Asserdal, en 1’14’’7, devant The Last Hurrah, Wayne Eden et Pershing, l’empêche de rejoindre Eléazar au classement du Grand Circuit International 1978. Malgré son absence, Eléazar l’emporte donc en finale pour la deuxième fois avec 23 points, devant son grand rival Hadol du Vivier, 21 points.

 

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Gamélia, fille de Kerjacques et d’Idumée, appartenant à son éleveur M. le comte de Bellaigue, s’illustra dans les deux spécialités du trot (monté et attelé) ; ainsi elle put remporter le classique Critérium des 3 ans, le Critérium Continental 1976, le Prix d’Eté 1978 à l’attelage, et le Prix de Cornulier 1980 au trot monté, devant Jeune Orange et Fanacques.

 

 

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Grandpré remporte en temps record le Prix d’Amérique 1978

 

 

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Grandpré, fils de Quouick JL et d’Argonne, drivé et entraîné par Pierre-Désiré Allaire, est resté célèbre pour sa victoire fantastique dans le Prix d’Amérique 1978, qu’il gagnait en temps record, loin devant Fakir du Vivier, Eléazar et le grandissime favori, Hadol du Vivier. Mais il fut aussi un courageux deuxième d’Eléazar dans le Prix d’Amérique 1980, bien que finissant la course sur trois jambes, car il s’était gravement blessé. 

 

 

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Cold Comfort, le champion du monde 1978 ; vainqueur du Roosevlt International Trot 1978, Cold Comfort gagnera aussi le Maple Leaf Trot 1978, à Toronto, mené par Peter Haughton, le fils de Billy Haughton, et récidivera dans cette épreuve en 1979.

 

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Pershing le lauréat du Grand Circuit International Européen 1979

 

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Madison Avenue le dauphin de Pershing, comme lui fils de Nevele Pride

 

 

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Expresse Gaxe le champion de Suède né en Suède

 

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Charme Asserdal la championne de Finlande

 

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Charme Asserdal remporte le Grand Prix des Nations 1978 à Milan en temps record (1’14’’7), devant The Last Hurrah et Wayne Eden.

 

 

 

Après une nouvelle période de courte convalescence, Eléazar fait sa rentrée dans le Prix de Bretagne (2 800 m), avec 25 mètres de rendement, handicap qu’il partage avec un autre rentrant Espoir de Sée et aussi Fakir du Vivier, Gazon.

Grandpré en profite pour renouer avec la victoire, en 1’18’’5, devant Feinte, Fadet, Ejakval, Hague, Fakir du Vivier, Gosse de Vrie, High Echelon, alors qu’Eléazar se montre discret et prudent pour sa course de rentrée.

Le Prix du Bourbonnais (2 600 m), disputé le 16 décembre en son absence, revient à Gamélia, en 1’19’’9, devant Gazon, Feinte, Fakir du Vivier, Fadet, Gars de Fontaine…

Le 30 décembre, Fadet s’impose à son tour dans le Prix de Bourgogne (2 250 m), en 1’16’’6, devant Gamélia, Fakir du Vivier, High Echelon, Eléazar, Fanacques…

Le Prix de Belgique (2 600 m), une création de 1979, devient le dernier test avant le Prix d’Amérique, et permet à Fadet de l’inaugurer en 1’18’’8, devant Gazon, Hadol du Vivier, Gars de Fontaine, Feinte, Eléazar, Uno Boy, Ejakval très malchanceux.

Les performances d’Hadol du Vivier et d’Eléazar, qui rendaient tous les deux 25 mètres, sont assez bonnes pour faire d’eux les favoris du prochain Prix d’Amérique (2 600 m), le 28 janvier 1979, mais ce sont des favoris fragiles et l’on n’y croit pas trop.

Du reste, Eléazar va faire un instant illusion, avant de céder complètement et de finir non placé, tandis qu’Hadol du Vivier, prisonnier de la « boîte », ne verra jamais le jour dans ce Prix d’Amérique remporté par High Echelon, en 1’18’’2, devant le jeune Idéal du Gazeau.

Fakir du Vivier se classe troisième devant Fadet, Grandpré, Ejakval, Fleuronné, Hadol du Vivier, le grand malchanceux, qui prend sa revanche dans le Prix de France (2 250 mètres), alors qu’Eléazar gagne le Prix de Paris (3 150 m), pour la deuxième fois, une course qui lui réussit fort bien, puisqu’il en fut 3e en 1976, 2e en 1977, 1er en 1978 et 1er en 1979 !

Quant à High Echelon, il s’est fait connaître durant l’été en suppléant Hadol du Vivier à la tête de la génération, puisqu’il remportait le Prix Jockey, le Critérium des 5 ans, le Prix de l’Etoile devant Idéal du Gazeau et Hague.

Sa victoire dans le Prix d’Amérique est cependant qualifiée de « victoire heureuse », car Eléazar lui a ouvert la corde en s’effaçant, lui permettant ainsi de battre Idéal du Gazeau. Cependant, High Echelon se charge de démontrer que son succès n’est guère usurpé, en réalisant un doublé prestigieux : Prix des Centaures au monté et l’équivalent à l’attelé, le Prix de Sélection, à nouveau devant Idéal du Gazeau, qu’il a donc battu trois fois.

En outre, il gagne aussi le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m), à Cagnes-sur-Mer, en 1’15’’9, devant ses grands rivaux, Eléazar et Hadol du Vivier, puis s’impose dans la première manche du Grand Prix de la Loterie (1 600 m), à Naples, avant de s’incliner de peu dans la finale face au pur miler The Last Hurrah, le tenant du titre.

 

En 1979, Eléazar, qui a 9 ans, accuse un coup de vieux, d’autant qu’il a fort à faire, non seulement avec Hadol du Vivier, mais surtout avec Pershing, l’américain de Suède, et aussi Charme Asserdal, la jument franco-finlandaise, qui vont faire des ravages sur l’Europe.

Déjà battu par High Echelon à Cagnes, Eléazar va l’être par Hadol du Vivier et Grandpré à Enghien, dans le Prix de l’Atlantique (2 150 m), par Gars de Fontaine et Hillion Brillouard dans le Prix René Ballière (2 100 m) à Vincennes, puis par Pershing en Hollande, à La Haye, dans le Grand Prix des Pays-Bas (2 600 m), dans lequel il devance Charme Asserdal, troisième.

Il gagne cependant le deuxième Grand Prix du Sud-Ouest (2 450 m), cette fois à Bordeaux, en 1’18’’4, devant Hadol du Vivier, High Echelon, Hillion Brillouard, Fadet… et le Prix de Buenos-Aires, en 1’20’’, à Enghien, sur la longue distance de 4 000 mètres, devant Fanacques, un autre fils de Kerjacques, plus connu pour ses performances au trot monté, notamment par ses deux victoires dans le Prix de Cornulier, dont l’une aux dépens du grand Bellino II.

 

Eléazar termine sa carrière en beauté, puisque le dimanche 27 janvier 1980, alors qu’on le croit trop vieux, il gagne enfin son Prix d’Amérique (2 600 m), en 1’18’’2, devant Grandpré, Gadamès, Tarok, Speed Expert, Gamélia, Hadol du Vivier, Idéal du Gazeau, et confirme ce brillant succès une semaine plus tard dans le Prix de France (2 100 m), qu’il remporte pour la troisième fois, cette fois en 1’16’’3, devant Gadamès et Hadol du Vivier !

 

Eléazar se retire au haras avec 36 victoires et 6 731 685 francs de gains, ce qui fait de lui le troisième trotteur le plus riche du monde après Bellino II et Une de Mai.

 

Cette génération comptait d’autres champions, comme Elpénor, un fils de Quioco, qui s’illustra au trot monté, notamment en remportant tous les classiques de la spécialité, Espoir de Sée, qui fut le meilleur à 4 ans, et surtout Equiléo, sacré champion du monde à New York en 1976, battant Bellino II, qui gagna à 4 ans le Grand Prix d’Europe de Milan en temps record, se classa troisième de la finale de l’Elitloppet à cet âge, et réalisa à 5 ans une série de victoires prestigieuses : Prix Jockey, Critérium des 5 ans, Prix de l’Etoile, Prix d’Eté.

Il fut aussi troisième du Prix d’Amérique 1976, derrière Bellino II et Catharina, gagna en Allemagne l’Elite Rennen 1974 de Gelsenkirchen à 4 ans, le Prix des Meilleurs 1975 à Munich. Il a aussi trotté en 1’13’’4 en Californie, à Hollywood Park. Il devait rendre célèbres les couleurs de son propriétaire, Alain Delon, et contribuer à la renommée de son entraîneur, Pierre-Désiré Allaire.

Eléazar et Léopold Verroken

Eléazar et Léopold Verroken

Eléazar remporte le Prix d'Amérique 1980, à l'âge de dix ans !

Eléazar remporte le Prix d'Amérique 1980, à l'âge de dix ans !

Eléazar, Alec Weisweller, Léopold Verroken et Geneviève Verroken après leur victoire !

Eléazar, Alec Weisweller, Léopold Verroken et Geneviève Verroken après leur victoire !

Elpénor s’illustra au trot monté, notamment en remportant les Prix de Vincennes, du Président de la République, de Normandie, des Centaures et des Elites, tous les classiques de la spécialité

Elpénor s’illustra au trot monté, notamment en remportant les Prix de Vincennes, du Président de la République, de Normandie, des Centaures et des Elites, tous les classiques de la spécialité

Ejakval s’illustra en fin de carrière, notamment en Allemagne, à 10 ans, remportant le Grand Prix de Gelsenkirchen, le Grand Prix de Noël à Gelsenkirchen, et le Grand Prix de Fin d’Année à Mönchengladbach ; devenu étalon, il se distingua en produisant le bon Pontaubault et les champions Rêve d’Udon et Sébrazac ; il gagna également le Graf Kalman Hunyady Geden Krennen à Vienne, en 1980

Ejakval s’illustra en fin de carrière, notamment en Allemagne, à 10 ans, remportant le Grand Prix de Gelsenkirchen, le Grand Prix de Noël à Gelsenkirchen, et le Grand Prix de Fin d’Année à Mönchengladbach ; devenu étalon, il se distingua en produisant le bon Pontaubault et les champions Rêve d’Udon et Sébrazac ; il gagna également le Graf Kalman Hunyady Geden Krennen à Vienne, en 1980

Hadol du Vivier et Jean-René Gougeon

Hadol du Vivier et Jean-René Gougeon

Hadol du Vivier, par Mitsouko et Ua Uka, un trotteur hors du commun à 3 et 4 ans, auteur d’une série de 20 victoires consécutives, vainqueur de trois Critériums, du Grand Prix d’Europe de Milan en temps record, de la Greyhound Rennen, du Prix de Sélection, du Prix de l’Etoile, de l’Elitloppet, du Prix de France, du Grand Prix d’Aby, du Prix de l’Atlantique, du Grand Critérium de Vitesse en temps record…

Hadol du Vivier, par Mitsouko et Ua Uka, un trotteur hors du commun à 3 et 4 ans, auteur d’une série de 20 victoires consécutives, vainqueur de trois Critériums, du Grand Prix d’Europe de Milan en temps record, de la Greyhound Rennen, du Prix de Sélection, du Prix de l’Etoile, de l’Elitloppet, du Prix de France, du Grand Prix d’Aby, du Prix de l’Atlantique, du Grand Critérium de Vitesse en temps record…

Hadol du Vivier au haras

Hadol du Vivier au haras

Hadol du Vivier

 

Le plus fameux rival d’Eléazar s’appelait Hadol du Vivier. Leurs duels épiques passionnèrent l’Europe entière et les propulsèrent tous deux aux Etats-Unis pour en découdre dans le fameux Championnat du Monde des trotteurs, le Roosevelt International Trot 1978, dans lequel ils furent tous les deux battus. Hadol du Vivier terminant troisième et Eléazar quatrième, laissant la victoire à l’américain Cold Comfort, qui pourtant suppléait son camarade d’écurie, le jeune prodige Green Speed ; la deuxième place revenant à la brave jument néo-zélandaise Petite Evander. Les deux chevaux français, de santé fragile, n’avaient pas apprécié la piste très dure et la chaleur de l’été new-yorkais, à tel point qu’ils déclinèrent la lutte dans la Challenge Cup, la revanche du Championnat du Monde.

Il est vrai qu’à cette époque, Hadol du Vivier n’était déjà plus le même cheval, c’est-à-dire le jeune champion quasi-invincible qu’il avait été à 3 et 4 ans, le jeune prodige que son propriétaire, Henri Levesque, disait encore meilleur que Roquépine.

Car s’il est vrai qu’Hadol du Vivier fut un véritable phénomène, ce fut à 3 et 4 ans, durant les deux années où il se montra intraitable, où il n’aligna que des victoires, si on exceptait une seule défaite due à un incident de départ, qui se transforma en un exploit tant ce jour-là Hadol du Vivier se montra impressionnant pour revenir à la hanche du vainqueur Haut Sauternes alors qu’il avait perdu toute chance au démarrage.

 

Comme Eléazar, son grand rival, Hadol du Vivier doit beaucoup à l’étalon Kerjacques, père de sa mère Ua Uka. Celle-ci était la propriété de Jean-Yves Lécuyer au haras du Vivier. On la surnommait « la poule aux œufs d’or » car elle avait engendré non pas un mais deux cracks d’exception : Fakir du Vivier étant le frère utérin d’Hadol du Vivier.

Henri Levesque avait été séduit par la beauté, l’allure et la vitesse de jambes de son futur champion, si bien qu’il l’acheta pour la somme de 50 000 F.

 

Il débute à Vincennes le 8 janvier 1976 par une victoire époustouflante dans le Prix de Varaville et récidive aussitôt dans les Prix de La Ferté-Macé et de Josselin.

Il affronte les meilleurs de sa génération dans le Prix Kalmia où ayant perdu 60 mètres au départ  on a vu avec quel brio il revint terminer deuxième de Haut Sauternes.

Ce jour-là on sait qu’Henri Levesque a vu juste : Hadol du Vivier est bien un phénomène. Dès lors, après avoir pris sa revanche sur Haut Sauternes, qu’il ridiculise dans le Prix Pierre Plazen, Hadol du Vivier vole de victoire en victoire, alignant vingt succès consécutifs dont certains prestigieux : le Prix de l’Etoile (1976), le Critérium des 3 ans, le Prix Marcel Laurent, dans lequel son demi-frère Fakir du Vivier, qu’il rencontre pour la première fois, ne peut lui rendre 50 mètres, le Grand Prix d’Europe de Milan dans lequel, en 1’15’’5, il bat le record de l’épreuve que détenait Fakir du Vivier, le record de la piste détenu par Timothy T, le record italien sur la distance que se partageaient Bellino II, Duc de Vrie et Wayne Eden, et le record d’Europe des 4 ans qu’avait établi Equiléo en 1’15’’8.

 

De retour à Vincennes, il poursuit sa série victorieuse avec le Prix Phaëton, le Critérium des 4 ans, qu’il gagne devant son homonyme et compagnon d’écurie, Hadol, la Greyhound Rennen (course de Greyhound), qui rend hommage au légendaire trotteur américain à robe grise, et dans lequel il est confronté pour la première fois à un autre phénomène de 4 ans, l’américano-suédois Pershing, fils de ce Nevele Pride, qui fit tomber le record fantastique de Greyhound dont il est justement question. Or, Pershing vient de battre Granit, Equiléo et Bellino II dans l’Elite Rennen à Gelsenkirchen. Pourtant, malgré le rush foudroyant de Pershing, Hadol du Vivier redémarre dans la phase finale pour prendre la mesure de son rival et battre en 1’16’’8 le record de l’épreuve par la même occasion. Or, quelques semaines plus tard, Pershing s’impose dans le Prix des Meilleurs à Munich devant Madison Avenue, Dauga, Bellino II, Granit, Equiléo, Carlo d’Orsay… prouvant qu’il est lui aussi l’un des grands champions du trotting mondial (ayant même gagné aux U.S.A.), et pourtant il compte déjà parmi les victimes d’Hadol du Vivier (écrivait Jacques Pauc).

 

Hadol du Vivier doit battre aussi un autre phénomène de 4 ans, la pouliche finlandaise, d’origine française, Charme Asserdal, qui se recommande d’un record impressionnant de 1’13’’9 et d’une série de dix victoires consécutives dont l’une acquise assez facilement aux dépens de Pershing lui-même. Pourtant, dans le Critérium Continental, elle doit se contenter d’une probante deuxième place pour ses débuts à Vincennes, sans jamais pouvoir inquiéter Hadol du Vivier, qui s’est échappé pour signer en 1’18’’8 sa quatorzième victoire d’affilée.

 

Ayant décliné le défi imaginé par des journalistes en quête de sensationnel, qui l’aurait opposé au champion cycliste belge Freddy Maertens, Hadol du Vivier laisse à sa place son demi-frère Fakir du Vivier remporter cette victoire peu sérieuse.

Il préfère s’aligner dans le Prix de l’Etoile 1977, cette fois à départ égal avec des aînés prestigieux : Gamélia, Gadamès, Grandpré (un nouveau venu à ce niveau), et aussi Girl Blanche, qui vient de battre Gamélia et Gadamès dans le Critérium des 5 ans. Mais elle ne peut rien contre Hadol du Vivier, qui s’impose de loin en 1’16’’8 sur 2 250 mètres, alors que Grandpré se classe troisième.

 

Trois autres succès suivent pour permettre à Hadol du Vivier de conclure en beauté son année de 4 ans. Il achève l’année 1977 invaincu avec 12 victoires en autant de sorties et détient ainsi le record des gains en France pour l’année 1977 avec 1 515 000 francs, devant Bellino II (1 076 300 francs), Guéridia (949 900 francs), Grandpré (947 000 francs), Eléazar (912 000 francs), Fanacques (725 000 francs), Idéal du Gazeau (647 000 francs)… 

Hadol du Vivier et Pershing dans l’Elitloppet 1978

Hadol du Vivier et Pershing dans l’Elitloppet 1978

Hadol du Vivier bat Charme Asserdal dans le Critérium Continental 1977

Hadol du Vivier bat Charme Asserdal dans le Critérium Continental 1977

Hadol du Vivier le jour de son triomphe dans le Critérium Continental

Hadol du Vivier le jour de son triomphe dans le Critérium Continental

Il débute l’année 1978, son année de 5 ans, en fanfare dans le Prix de Bourgogne (2 250 mètres), étape importante sur la route qui mène au Prix d’Amérique, en battant des aînés prestigieux : Fakir du Vivier (pénalisé de 25 mètres), Grandpré (alors en pleine ascension), Dimitria, Carlo d’Orsay, Firstly, Girl Blanche, Gars de Fontaine…, mais aussi Equiléo et Eléazar, également pénalisés de 25 mètres, et, en ce qui concerne Eléazar, effectuant une rentrée après une très longue absence due à une fracture.

 

Hadol du Vivier parachève sa préparation au Prix d’Amérique en remportant sa vingtième victoire consécutive dans l’important Prix de Croix ouvert aux seuls cinq ans, dans lequel, malgré une incartade au départ en raison de la peur qu’il éprouve désormais à l’égard de l’élastique, il double son handicap initial de 25 mètres, et pourtant s’impose de loin devant un certain Hymour. (Il avait reçu l’élastique dans les jambes au départ du Prix Kalmia).

 

Et puis vient le jour J, le jour tant attendu, celui du 54e Prix d’Amérique disputé le dimanche 29 janvier 1978, dans lequel Hadol du Vivier, le fils de Mitsouko et d’Ua Uka, nouvelle idole de l’écurie Levesque, s’aligne pour la première fois, avec les faveurs de la cote en raison de ses vingt victoires consécutives et de tout le prestige qu’il a conquis.

Hadol  du Vivier est donc le grandissime favori (1/1), devant Fakir du Vivier et Grandpré, tous deux à 4/1, Eléazar (8/1), Dimitria (11/1).

Les autres sont complètement délaissés.

Hadol du Vivier cette fois prend un départ impeccable, rassurant ainsi ses innombrables supporters, pour diriger aussitôt les opérations. Mais il est vite rejoint par Grandpré au passage devant les tribunes, et tous deux impriment à la course un train très rapide. En plaine, Grandpré accélère encore l’allure pour prendre l’avantage sur Hadol du Vivier, que suivent The Last Hurrah, Fakir du Vivier, Carlo d’Orsay, détachés d’Eléazar, Dimitria à la faute, Waymaker revenu très vite après un mauvais départ. En face, Hadol du Vivier rejoint Grandpré et tous deux sont maintenant nettement détachés devant Fakir du Vivier, Carlo d’Orsay, Eléazar, The Last Hurrah, Granit, Feinte, alors que Dimitria vient d’être disqualifiée.

L’instant crucial se produit en haut de la montée où, pour la première fois, on voit J. R. Gougeon solliciter Hadol du Vivier. Celui-ci semble vouloir désespérément s’accrocher à Grandpré, qui mène la course à un train d’enfer. Hadol du Vivier tient bon, mais dans le dernier virage, Grandpré trouve assez de ressource pour accélérer l’allure.

Alors, chose incroyable, on voit Hadol du Vivier abdiquer tandis que Grandpré s’envole vers la victoire, c’est le monde à l’envers ! (Ecrira l’un des rédacteurs de la presse hippique).

Or, pour comble de cruauté, Fakir du Vivier à son tour fausse compagnie à Carlo d’Orsay et Eléazar pour venir à la hauteur d’Hadol du Vivier, qui une nouvelle fois tente de s’employer. Mais l’aîné impitoyable prend sur son frère cadet une sévère revanche, le lâchant irrésistiblement. Dès lors, tout est joué, la course s’achève en drame pour les supporters d’Hadol du Vivier. Grandpré franchit en vainqueur la ligne d’arrivée, loin devant Fakir du Vivier, son compagnon d’entraînement, lui-même très détaché d’Eléazar, Hadol du Vivier et Carlo d’Orsay à la lutte pour la troisième place.

Dans son envolée étourdissante, Grandpré, en 1’16’’9, sans l’aide de l’autostart, bat le record de la course que détenait Tidalium Pélo en 1’17’’1 (départ lancé).

On apprend plus tard qu’Hadol du Vivier, souffrant de la gourme, a couru diminué. A l’arrivée, il crache du sang et est mis tout de suite aux antibiotiques. Mais, hélas, il est trop tard, le drame a bien eu lieu : Hadol du Vivier désormais ne sera plus jamais le même cheval ; souffrant de troubles respiratoires, séquelles de sa gourme, il va bien souvent manquer de souffle au moment crucial. Une vraie tragédie pour Henri Levesque, qui en mourra de désillusion, après avoir toutefois eu le temps de découvrir en Jiosco, un fils de Quioco, un nouveau crack, pour lui le dernier qu’il aura fait naître.

 

Après deux mois d’absence, le champion d’Henri Levesque a repris la compétition à Beaumont-de-Lomagne pour terminer deuxième d’Eléazar.

Il est encore deuxième du champion d’Alec Weisweiller dans le Prix de l’Atlantique, puis après son éclatante victoire de l’Elitloppet, second d’Eléazar à Munich dans le Grand Prix de Bavière. On peut alors se demander si Eléazar n’est pas le plus fort. Il le fut sans doute une bonne partie de l’année. Mais, à Stockholm, Hadol du Vivier s’est montré intraitable dans la finale. Eléazar lui a remporté la première batterie de qualification en 1’13’’5 devant le nouveau phénomène Express Gaxe, Madison Avenue, Charme Asserdal, Grande Frances, Petite Evander, The Last Hurrah, Fakir du Vivier.

Dans la seconde batterie, Hadol du Vivier retrouve une vieille connaissance, Pershing. Mais un accrochage au départ avec un concurrent empêche Hadol du Vivier de s’imposer malgré un retour fantastique sur le champion américano-suédois.

Tous deux ont trotté dans le temps record de 1’13’’2, tandis que se classent derrière eux : Duke Iran, Wiretapper, Delfo, Dauga, Tarok, Keystone Sycamore, alors que l’américain Cold Comfort, le futur champion du monde, est disqualifié.

Cependant, la finale permet à Hadol du Vivier de renouer avec la victoire, et quelle victoire ! Trottant sur le pied de 1’14’’, il bat dans cet ordre : Eléazar, Duke Iran, Express Gaxe, Wiretapper, Madison Avenue et Charme Asserdal, alors que Pershing, à la faute, s’élimine de lui-même. Telle est la belle revanche qu’Hadol du Vivier prend sur le sort.

Celle de Pershing a lieu au Danemark où il remporte la Coupe de Copenhague, puis en Allemagne où il s’impose à nouveau à Gelsenkirchen.

 

Eléazar et Hadol du Vivier, quant à eux, reviennent à Vincennes pour y disputer l’important Prix René Ballière (Championnat Européen). C’est l’occasion de revoir ensemble pour la première fois les quatre grands du Prix d’Amérique puisque Fakir du Vivier et Grandpré sont aussi de la partie. Mais ils déçoivent tous deux, alors qu’Hadol du Vivier, impérial, s’impose devant un excellent Eléazar.

Sur leur lancée, les deux champions se rendent à Gelsenkirchen pour y disputer la Course des Elites (Elite Rennen). Mais Eléazar rate son départ derrière l’autostart, ce qui permet à son grand rival de s’imposer à nouveau, en 1’16’’9, devant Madison Avenue, Eléazar bien revenu, Pershing, Keystone Sycamore, Duke Iran, Feinte, Carlo d’Orsay et Express Gaxe.

Hadol du Vivier remporte l’Elite Rennen vingt ans après Icare IV, le premier champion d’Henri Levesque.

 

Hadol du Vivier et Eléazar sont tous les deux sélectionnés pour défendre les couleurs de la France dans le prochain Championnat du Monde des trotteurs disputé à New York.

Une défaillance d’Eléazar à La Capelle, annonçant une baisse de forme de sa part, ne remet pas en cause sa participation au Roosevelt International Trot (Championnat du Monde) ; et il s’embarque pour New York avec Hadol du Vivier, son éternel rival.

Le crack américain de l’époque s’appelle Green Speed. Durant l’année 1977, il a remporté la somme colossale de 584 405 $, plus qu’aucun autre trotteur ne l’a fait en un an. Il a également battu ou égalé dix-sept records du monde et remporté la plupart des épreuves les plus prestigieuses (Hambletonian, Yonkers Trot, Batavia Downs, Colonial Trot, Hanover Colt Stake, Leland Stanford Trot, Currier and Ives Trot, Beacon Course Trot…). Toutes ses performances lui ont permis d’enlever le titre « d’Harness Horse of the Year » 1977.

Mais il tombe boiteux à quelques jours de l’American Trotting Championship, et ne peut se qualifier pour le Championnat du Monde. On le remplace par son compagnon d’écurie Cold Comfort, qui se qualifie à sa place en terminant deuxième de Kash Minbar.

Kash Minbar et Cold Comfort sont donc désignés pour représenter les U.S.A. dans le Championnat du Monde face aux néo-zélandais Nigel Craig et Petite Evander, à la jument canadienne Dapper Dillon, et trois visiteurs venus d’Europe : la championne finlandaise Charme Asserdal, les cracks français Eléazar et Hadol du Vivier.

Dépités de ne pouvoir applaudir Green Speed, les Américains, en raison de ses récentes performances prometteuses, font d’Hadol du Vivier leur favori. Mais, malheureusement, la chaleur de l’été new-yorkais fait renaître les troubles respiratoires dont souffre le champion français depuis sa gourme. Au moment crucial il manque de souffle et laisse Cold Comfort franchir en vainqueur la ligne d’arrivée devant Petite Evander.

Hadol du Vivier et Eléazar sauvent tout de même l’honneur en se classant troisième et quatrième, devant Charme Asserdal, Nigel Craig, Kash Minbar et Dapper Dillon.

Les jambes fragiles d’Eléazar ont souffert de la piste dure, Kash Minbar et Nigel Craig sont également victimes de boiteries, si bien que tous, ainsi qu’Hadol du Vivier, déclarent forfait dans la revanche, la Challenge Cup, disputée la semaine suivante, que remporte la jument Lola’s Express, devant Cold Comfort, Petite Evander et Charme Asserdal.

 

Après une longue période de repos bien mérité, Hadol du Vivier réapparaît en piste à Amiens, dans le Prix du Président Emile Fossé (1 600 m), le 11 novembre, pour s’imposer en 1’13’’1, établissant ainsi son nouveau record et pulvérisant celui d’Europe sur la distance.

 

Fort de cet exploit, Hadol du Vivier se rend à Milan pour y disputer le Grand Prix des Nations (2 100 m),  grâce auquel on pense qu’il soufflera à Eléazar la première place au classement du Grand Circuit International. Il lui suffit pour cela de se classer dans les trois premiers tout en profitant de l’absence de son grand rival. Mais un accrochage au départ avec Pershing fait perdre aux deux champions leurs chances respectives, et Charme Asserdal en profite pour s’imposer en 1’14’’7, devant The Last Hurrah, Wayne Eden, Pershing (bien revenu), Madison Avenue, Hadol du Vivier, qui laisse donc à Eléazar la palme d’or de champion d’Europe, titre qu’il remporte pour la deuxième fois, et qui échappe encore à Hadol du Vivier en 1979, cette fois au profit de Pershing, dont les deux cracks français doivent subir la loi.

 

Après son échec total dans le Prix d’Amérique 1979 dont il était encore favori (avec Eléazar), Hadol du Vivier se réhabilite en gagnant de façon magistrale le Prix de France, finalement plus adapté à ses nouvelles dispositions de roi de la vitesse.

Il gagne aussi le Prix de l’Atlantique à Enghien, devant Grandpré, Eléazar et Hillion Brillouard, le Grand Prix d’Aby à Göteborg, devant Petite Evander et Tarok, le second éliminatoire du Prix des Géants à Hilversum, devant Charme Asserdal et Madison Avenue, la finale du Prix des Géants, devant Charme Asserdal et Pershing, la finale du Grand Prix de Gelsenkirchen, devant Tarok, Speedy Volita, Madison Avenue…

Il s’est également classé troisième du Grand Critérium de Vitesse, derrière High Echelon et Eléazar, et deuxième d’Eléazar dans le Grand Prix du Sud-Ouest.

A Vincennes, il est également deux fois second d’Hillion Brillouard, les deux fois pénalisés de 25 mètres, dans le Prix d’Eté rebaptisé pour la circonstance « Prix du Centenaire de l’Hippodrome de Vincennes », et dans le Prix de Bourgogne.

Son entourage peut donc fonder avec lui de nouveaux espoirs pour 1980.

Malheureusement, Hadol du Vivier échoue pour la troisième fois dans le Prix d’Amérique ; les espoirs sont brisés, d’autant plus qu’il ne peut faire mieux que troisième derrière Eléazar et Gadamès dans le Prix de France.

 

Mais il nous a habitués à des surprises. Dans le Grand Critérium de Vitesse de Cagnes, il nous en réserve une de taille : non seulement il bat Idéal du Gazeau, le nouveau crack de Vincennes, mais il pulvérise en 1’14’’1 l’ancien record établi par Eléazar en 1977 sur le pied de 1’15’’.

 

Pourtant, à sa sortie suivante, Hadol du Vivier est facilement dominé par Jorky dans le Prix de l’Atlantique à Enghien, avant d’échouer complètement dans le Grand Prix du Sud-Ouest, qu’Idéal du Gazeau gagne de peu devant Jorky.

Dès lors, Hadol du Vivier disparaît de la scène pour entrer au haras en 1981 après une timide réapparition dans le Prix de Belgique. Désormais il laisse la place libre aux deux nouvelles étoiles que sont Idéal du Gazeau et Jorky.

 

La dernière fois qu’il fait la une des journaux c’est à l’occasion de son « kidnapping », qui ressemble fort à un coup monté, « un coup de pub ».

 

Son meilleur héritier sera Sabre d’Avril, champion classique, avant de laisser son cœur dans une lutte mémorable avec Sancho Pança à l’issue d’un Critérium des 4 ans inoubliable.

 

La génération d’Hadol du Vivier comptait d’autres éléments de valeur, comme Hague, la fille de Roquépine et de Kerjacques.

High Echelon, vainqueur du Prix Jockey, du Critérium des 5 ans, du Prix de l’Etoile, du Prix d’Amérique 1979, du Prix des Centaures, du Prix de Sélection, du Grand Critérium de Vitesse, second de la finale du Grand Prix de la Loterie à Naples, après avoir gagné en éliminatoire, puis finalement vainqueur du Prix du Bourbonnais.

Hillion Brillouard, vainqueur de la finale du Grand Prix de la Loterie à Naples, du Grand Prix d’Oslo, de la Challenge Cup à New York, du Prix d’Eté, du Prix de Bourgogne

Hurgo, magnifique globetrotteur, qui courait tous les huit jours, et ce dans les deux spécialités du trot, monté et attelé, notamment vainqueur du Grand Prix de la Ville d’Ostende, en Belgique, du Tuoppi Ravit, en Finlande.

Hymour, vainqueur du Prix d’Amérique, du Prix de France et du Grand Critérium de Vitesse, en 1982, à l’issue d’un étonnant « come-back ». C’était un descendant de Jamin, comme lui issu du fameux haras des Rouges Terres.

Hadol du Vivier vainqueur de l’Elitloppet 1978 à Solvalla

Hadol du Vivier vainqueur de l’Elitloppet 1978 à Solvalla

Green Speed « Harness Horse of the Year » 1977 aux USA

Green Speed « Harness Horse of the Year » 1977 aux USA

Kash Minbar vainqueur de l’American Trotting Championship 1978

Kash Minbar vainqueur de l’American Trotting Championship 1978

Pershing remporte la finale de l’Elitloppet 1979, devant Hadol du Vivier, Express Gaxe, Madison Avenue, Charme Asserdal

Pershing remporte la finale de l’Elitloppet 1979, devant Hadol du Vivier, Express Gaxe, Madison Avenue, Charme Asserdal

High Echelon bat  Idéal du Gazeau dans le Prix de l’Etoile 1978

High Echelon bat Idéal du Gazeau dans le Prix de l’Etoile 1978

High Echelon remporte le Prix d’Amérique 1979, devant Idéal du Gazeau, Fakir du Vivier, Fadet, Grandpré

High Echelon remporte le Prix d’Amérique 1979, devant Idéal du Gazeau, Fakir du Vivier, Fadet, Grandpré

High Echelon, vainqueur du Critérium des 5 ans, du Prix de l’Etoile, du Prix d’Amérique, du Prix des Centaures, du Prix de Sélection, du Grand Critérium de Vitesse, second de The Last Hurrah dans le Grand Prix de la Loterie à Naples

High Echelon, vainqueur du Critérium des 5 ans, du Prix de l’Etoile, du Prix d’Amérique, du Prix des Centaures, du Prix de Sélection, du Grand Critérium de Vitesse, second de The Last Hurrah dans le Grand Prix de la Loterie à Naples

Hillion Brillouard, vainqueur du Grand Prix de la Loterie à Naples, de la Challenge Cup à New York, du Grand Prix d’Oslo, du Prix d’Eté à Vincennes, du Prix de Bourgogne à Vincennes…

Hillion Brillouard, vainqueur du Grand Prix de la Loterie à Naples, de la Challenge Cup à New York, du Grand Prix d’Oslo, du Prix d’Eté à Vincennes, du Prix de Bourgogne à Vincennes…

Hymour remporte le Prix d’Amérique 1982 en temps record, devant Jiosco et Idéal du Gazeau

Hymour remporte le Prix d’Amérique 1982 en temps record, devant Jiosco et Idéal du Gazeau

Hymour, vainqueur du Prix d’Amérique, du Prix de France, et du Grand Critérium de Vitesse, en 1982

Hymour, vainqueur du Prix d’Amérique, du Prix de France, et du Grand Critérium de Vitesse, en 1982

Sabre d'Avril, le meilleur fils d'Hadol du Vivier, a été le leader de sa génération avant d'être détrôné par Sancho Pança

Sabre d'Avril, le meilleur fils d'Hadol du Vivier, a été le leader de sa génération avant d'être détrôné par Sancho Pança

Prix d'Amérique 1980, les favoris

Prix d'Amérique 1980, les favoris

Grandpré

Grandpré

Gadamès

Gadamès

Tarok

Tarok

Gamélia

Gamélia

Equiléo et Pierre-Désiré Allaire

Equiléo et Pierre-Désiré Allaire

Equiléo Roosevelt International Trot 1976

Feinte

Feinte

Eléazar Prix d'Amérique 1980

Eléarar Prix de France 1978

Eléazar Prix de France 1977

Equiléo Roosevelt International Trot 1976

Hadol du Vivier Elitloppet 1978

Hadol du Vivier Prix de France 1979

Grandpré Prix d'Amérique 1978

High Echelon Prix d'Amérique 1979

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12 mars 2013 2 12 /03 /mars /2013 07:57

 

Les champions trotteurs de légende en France

 

05 - Les années 1970 (suite, les années Bellino)

 

 

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      Bellino II et Jean-René Gougeon

 

 

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           Bellino II, fils de Boum III et de Belle de Jour III, sans doute le plus grand trotteur de tous les temps en France, trois fois vainqueur du Prix d’Amérique, trois fois vainqueur du Prix de Cornulier, dont deux doublés Prix de Cornulier-Prix d’Amérique la même année, auteur d’une série victorieuse unique en 1976 : Prix de Cornulier, Prix d’Amérique, Prix de France, Prix de Paris, Grand Critérium de Vitesse, Grand Prix de la Côte d’Azur à Turin, Grand prix de la Loterie à Naples (éliminatoire et finale), Prix de l’Atlantique à Enghien.

 

 

 

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      Bellino II aussi bon monté que attelé

 

 

 

 

Bellino II

 

Si Une de Mai ne remporta jamais le Prix d’Amérique, Bellino II lui ne put jamais triompher dans le Championnat du Monde à New York malgré trois tentatives. La piste new-yorkaise de Roosevelt Raceway ne convenait pas au géant savoyard au bonnet rouge, pas plus que la chaleur humide de l’été new-yorkais. Mais le grand Bellino mettait toujours un point d’honneur à terminer deuxième de ces petits trotteurs véloces très à leur aise sur les anneaux d’un demi-mile (804 m), qui forment la plupart des pistes de trot américaines. Ainsi il fut deuxième de l’américain Savoir en 1975, deuxième de son compatriote Equiléo en 1976, et deuxième de l’italien Delfo, qu’il avait pourtant souvent dominé en Europe, en 1977.

 

Par contre, Bellino II sera le premier trotteur mâle à remporter trois fois le Prix d’Amérique, trois fois seulement car il débuta tardivement au trot attelé, au grand regret de Jean-René Gougeon, qui affirma souvent qu’il aurait pu gagner quatre ou cinq fois la grande épreuve s’il avait débuté plus tôt dans la spécialité.

 

Or, à ses débuts Bellino II ne trottait que monté, tant il se montrait difficile, pratiquement intraitable chaque fois que l’on cherchait à l’atteler à un sulky. Il fut donc d’abord un champion sous la selle et remporta pour le compte de son propriétaire M. Maurice Macheret tous les classiques de la spécialité ouverts à sa génération, avant de se classer deuxième du fameux Tidalium Pélo dans l’épreuve reine, le Prix de Cornulier, pour sa première participation en 1972. Il se classera aussi troisième de ses deux meilleurs contemporains à l’attelage, Bill D et Buffet II, dans le classique Critérium des 5 ans.

 

Il faudra attendre qu’il passe sous la férule du grand professionnel Jean-René Gougeon pour qu’il remporte enfin sa première victoire au sulky. C’était à Vincennes, le 20 juin 1974, dans l’important Prix René Ballière (Championnat Européen), dont le favori était l’italo-américain Timothy T, un vainqueur du fameux Hambletonian, qui dut se contenter de la deuxième place devant Casdar.

 

Or, le tandem Bellino II – Jean-René Gougeon allait se révéler invincible à Vincennes, à départ égal. Une seule fois pourtant ils seront vaincus, dans la même épreuve, le René Ballière, le 16 juin 1977. Bellino II avait alors 10 ans, l’âge de la retraite pour un trotteur français, et il dut ce jour-là céder la victoire à un certain Fakir du Vivier, qu’il ne put jamais remonter tout à fait. Auparavant, il avait gagné à Enghien son troisième Prix de l’Atlantique devant les champions Eléazar et Equiléo. Ce devait être sa dernière victoire française.

 

Il alla donc se faire applaudir à l’étranger, aux Pays-Bas notamment où il établit deux nouveaux records, l’un dans le Grand Prix des Pays-Bas à La Haye, l’autre dans le Prix des Géants à Hilversum, où après avoir déjà remporté son épreuve de qualification, il s’imposa dans la finale sur le pied de 1’13’’8, établissant ainsi le nouveau record d’Europe.

 

Mais sa plus belle série victorieuse, Bellino II l’avait déjà réalisée un an plus tôt, en 1976, année où il remporta successivement : le Prix de Cornulier, le Prix d’Amérique, le Prix de France, le Prix de Paris, le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur, le Grand Prix de la Côte d’Azur à Turin, la troisième batterie de qualification et la finale du Grand Prix de la Loterie à Naples, le Prix de l’Atlantique à Enghien, avant d’être battu par Dauga dans le Grand Prix de Bavière à Munich où il souffrit encore de la chaleur humide.

Aucun trotteur n’a fait mieux depuis.

 

On se souviendra aussi longtemps de son troisième Prix d’Amérique, le 30 janvier 1977, alors qu’il avait perdu 30 mètres au départ, qu’on le croyait vaincu, et qu’il revint livrer un duel fantastique au vaillant Eléazar, alors à son apogée, dans la dernière ligne droite. Tout Vincennes devait vibrer et retentir de cette lutte épique entre ces deux champions trotteurs, qui était aussi celle de deux grands professionnels : Jean-René Gougeon, fameux pilote du géant au bonnet rouge, et Léopold Verroken, entraîneur driveur du merveilleux Eléazar ; ce dernier devait d’ailleurs prendre sa revanche dans le Prix de France. Mais Bellino II le battit à nouveau dans le Prix de Paris, qu’il remportait pour la troisième fois.

 

Il entrera au haras avec 9 034 089 F de gains à son compte en banque, dont trois Prix d’Amérique, trois Prix de Cornulier, un Prix de France, trois Prix de Paris, deux Grands Critériums de Vitesse de la Côte d’Azur, trois Prix René Ballière, trois Prix de l’Atlantique, deux Prix de l’Ile-de-France, un Prix des Centaures, un Prix des Elites, le Prix de Normandie, le Prix du Président de la République, le Prix de Vincennes

 

On peut rappeler aussi ses victoires à l’étranger, dont le Grand Prix de la Loterie Nationale à Naples (éliminatoire et finale), la Course des Elites (Elite Rennen) à Gelsenkirchen, le Grand Prix du Lido di Roma à Rome, le Grand Prix des Pays-Bas à La Haye, le Prix des Géants (éliminatoire et finale) à Hilversum avec un record de 1’13’’8. Tant de performances, montées et attelées, qui ont permis de dire que Bellino II était certainement le plus grand trotteur de tous les temps. Il était aussi le plus riche du monde.

 

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Buffet II, mené par Louis Hanse, gagna le Critérium Continental 1971, le Prix René Ballière en 1972 et 1973, le Prix de l’Atlantique 1973, et fut battu de peu par Bill D dans le Critérium des 5 ans. Il fut aussi le lauréat du Grand Circuit International 1973.

 

 

Alors que les trotteurs naissent habituellement en Normandie, dans la Mayenne ou dans la Sarthe, parfois en Vendée, dans des régions de plaine donc, Bellino II lui est né en montagne, plus précisément à Vétraz-Monthouz, près d’Annemasse, en Haute-Savoie, l’année 1967, chez M. Maurice Macheret, son propriétaire éleveur.

Ses parents, Boum III et Belle de Jour III, ont 21 ans tous deux, ce qui est plutôt âgés pour des « jeunes mariés » et sont aussi pratiquement inconnus.

Encore poulain, Bellino II est confié à René Sala, qui se charge de le débourrer.

Grand certes mais plutôt lymphatique, il n’attire guère l’attention durant sa première année. Cependant, les longues promenades dans la montagne, en compagnie de René Sala, ainsi que les séances de travail intensif, ne tardent pas à lui donner cette puissante musculature et cette silhouette de géant athlétique, qui vont impressionner ses adversaires sur la cendrée de Vincennes, autant  que sa force et sa résistance, qui lui vaudront son surnom de « rouleau compresseur ». Il commence à faire parler de lui sur les pistes en 1970, alors qu’il a 3 ans, sous les couleurs : casaque rouge, écharpe blanche, toque grise, de son propriétaire, M. Maurice Macheret, qui deviendront célèbres grâce à lui, puis, plus tard, avec Lurabo.

 

Deuxième à Lyon à l’attelage, premier à Vichy au monté, deuxième à Cagnes, à deux reprises, attelé, puis une série de cinq victoires, une au sulky les autres au trot monté, dont le classique Prix de Vincennes, devant Bamba et Bardane, qu’il remporte dans le temps record de 1’20’’2, lequel va tenir quinze ans ! Telles sont ses performances en 1970.

 

En 1971, il ne gagne qu’au trot monté, mais contre les meilleurs trotteurs de la spécialité, et reste invaincu en huit tentatives. Parmi ces huit victoires, il faut citer : le Prix de Pardieu, sur 2 275 mètres, en 1’20’’8, le Prix Camille de Wazières sur 2 625 mètres, en 1’21’’6, le classique Prix des Centaures sur 2 250 mètres, en 1’20’’2, devant Arbella et Bamba, le classique Prix du Président de la République sur 2 800 mètres, en 1’20’’4, devant Borgia III et Blizzard, le Prix Ceneri Forcinal sur 2 300 mètres, en 1’19’’3, le classique Prix des Elites sur 2 300 mètres, en 1’18’’9, devant Arbella et Ajaccien, le Prix Jacques Olry sur 2 625 mètres, en 1’21’’4, et le Prix Philippe du Rozier sur 2 275 mètres, en 1’19’’8.

 

Il est le meilleur de son année au trot monté, depuis l’âge de 3 ans, mais cela ne suffit pas encore pour le rendre célèbre : il doit encore dominer son année de 5 ans, et maintenant faire ses preuves au sulky.

En 1971, il s’est essayé à deux reprises contre les meilleurs 4 ans attelés, mais sans succès, d’abord dans le Prix Phaëton, sur 2 250 mètres, remporté par Buffet II, dont il se classait sixième en rendant 25 mètres, et dans le Critérium Continental, sur 2 600 mètres, toujours remporté par Buffet II, alors qu’il terminait non placé.

Durant toute sa carrière, Bellino II, ce grand cheval bai, va porter un bonnet rouge, qui le caractérisera comme le « champion au bonnet rouge », et entrera avec lui dans la légende.

Il a fort à faire pour se faire un nom car il trotte dans l’ombre d’Une de Mai, Toscan et Tidalium Pélo, qui sont les vrais champions de Vincennes, alors que lui évolue surtout au monté, spécialité désormais reléguée au second plan.

 

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Bellino II s’est d’abord illustré au trot monté

 

 

 

En 1972, il a 5 ans, et se distingue dès le 1er janvier en remportant, toujours au monté, le Prix Emile Riotteau, en 1’21’’, sur 2 625 mètres, devant Bamba et Borgia III. Il gagne aussi le Prix Camille Blaisot, toujours dans la même spécialité, en 1’20’’, sur 2 375 mètres. Puis il s’attaque pour la première fois aux plus grands champions du monté, dans l’épreuve reine, le Prix de Cornulier, sur 2 600 mètres, le dimanche 23 janvier 1972, mais ne peut soutenir la comparaison avec le fameux Tidalium Pélo, finissant deuxième à distance du vainqueur, mais loin devant Arbella, Uniflore D, Villequier B.

Il a tout de même trotté en 1’20’’3.

Mais, dans le classique Prix des Centaures, Bellino II est à nouveau battu, cette fois par le jeune Carnaval, auquel il ne peut rendre 50 mètres, alors qu’Arbella est encore troisième. Pourtant, Bellino II a trotté sur le pied de 1’19’’9, et le vainqueur en 1’20’’9.

 

C’est durant l’été qu’il s’essaie au sulky dans l’épreuve qui couronne le meilleur trotteur de cet âge à l’attelage, le Critérium des 5 ans, se classant troisième mais très loin derrière Bill D et Buffet II, les deux plus titrés luttant botte à botte pour la victoire.

Cette performance de Bellino II est donc plutôt bonne et encourageante.

Bien sûr, il gagne le classique Prix de Normandie, l’équivalent au monté du Critérium des 5 ans, en 1’23’’, sur 3 000 mètres, mais à la lutte avec Borgia III, qui précède Blizzard. Il gagne aussi le classique Prix des Elites, en 1’19’’7, sur  2 300 mètres, devant Borgia III et Champenoise.

En fin d’année, il s’impose dans le Prix Joseph Lafosse, en 1’20’’, sur 2 325 mètres, devant l’inattendu Bary des Etangs, puis Borgia III, Blizzard et Bamba.

 

Il débute l’année 1973 par une belle victoire dans le Prix de l’Ile-de-France, toujours au monté, sur 2 250 mètres, en 1’19’’5, devant Arbella, qui va être rétrogradée au profit d’Aldéna, arrivée troisième et pourtant loin des deux premiers.

Enfin, le 21 janvier 1973, Bellino II, monté par René Fabre, remporte le premier de ses trois Prix de Cornulier, en 1’21’’1, sur 2 600 mètres, devant Borgia III, Aldéna, Arbella, puis Champenoise, Villequier B, Vytchagda, alors que Tidalium Pélo, ombre de lui-même, est cette fois nettement dominé.

 

Mais, dans le Prix des Centaures, Bellino II, en difficulté à son tour, ne peut conclure que quatrième derrière Borgia III, Dogan et Dinès P.

 

Il tente sa chance une première fois au sulky, face à ses aînés, au mois de juin, dans le Prix René Ballière (Championnat Européen), et se classe troisième derrière Buffet II et Une de Mai, ce qui est très prometteur pour son avenir dans cette spécialité.

 

Bellino II renoue avec la victoire au trot monté le 26 août 1973, dans le Prix Camille Lepecq, qu’il remporte en 1’19’’6, devant Vroum A, Borgia III, Urbino IV, Amour N…

 

Le 24 novembre, Bellino II est encore à l’honneur dans le Prix Reynolds, 2 050 mètres, au monté, qu’il remporte en 1’19’’3, devant Aldéna, Aigle Noir, Vestalat, Vroum A…

Mais dans le Prix Jules Lemonnier, le 17 décembre 1973, il ne peut rendre 25 mètres à Aigle Noir, qui prend ainsi sa revanche et s’impose en 1’19’’9, alors que le grand vaincu fait afficher 1’19’’3. La troisième place revenant à Champenoise.

 

Le 1er janvier 1974, dans le Prix de l’Ile-de-France, Bellino II est à nouveau battu par Aigle Noir, qui confirme son aptitude dans cette spécialité du trot monté, alors que la prometteuse Cette Histoire se classe troisième.

Contre toute attente, Bellino II perd aussi le Prix de Cornulier, le 20 janvier 1974, mais du plus court des nez, cette fois au profit de Cette Histoire, une fille de Kerjacques, montée au millimètre par le jeune Alain Laurent, et qui a trotté 1’20’’8, pour battre de si peu le trotteur de Monsieur Maurice Macheret, chronométré dans la même réduction que la gagnante, alors que Borgia III termine troisième devant Aldéna, Aigle Noir, Cocktail Bellêmois, Arbella, Champenoise, Comte d’Orange, Azelino B…

 

Bellino II à la faute est disqualifié pour sa première participation dans le Prix d’Amérique, le dimanche 27 janvier 1974, alors qu’il est mené par Léopold Verroken.

La championne du monde, d’origine américaine, Delmonica Hanover, exacte au rendez-vous, a fini à toute allure en pleine piste, pour s’imposer d’un souffle aux dépens du malheureux Axius, battu de si peu lui aussi, alors que Casdar termine troisième devant la courageuse Une de Mai, Amyot, Vismie, Angélica III, Borgia III…

Axius se console en remportant le Prix de France, une semaine plus tard, devant Casdar, Catharina, Une de Mai, Belle Doris, le champion belge Fideel, Bel Azur, Amyot…

 

Bellino II se rachète en partie dans le Prix de Paris, quinze jours après sa tentative malheureuse du Prix d’Amérique, se classant troisième après lutte avec Amyot, mais loin derrière le champion italo-américain Timothy T, lui aussi venu battre d’un nez le valeureux Casdar. Derrière Amyot, quatrième, viennent se classer Borgia III, Axius, Coppet, Bel Azur, Amour N, Beau Garçon, alors qu’Une de Mai, dont c’est la dernière course, finit à la dérive parmi les derniers.

Timothy T s’était distingué aux Etats-Unis en remportant le fameux Hambletonian. Il devait gagner aussi deux fois l’Elitloppet de Solvalla, deux fois le Grand Prix des Nations à Milan et réussir une grande carrière en Europe.

 

 

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Delmonica Hanover vient coiffer Axius à l’arrivée du Prix d’Amérique 1974

 

 

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Timothy T vient coiffer Casdar à l’arrivée du Prix de Paris 1974

 

 

Suivant les conseils de Léopold Verroken, Maurice Macheret confie Bellino II à son futur ami Jean-René Gougeon, qui depuis le départ d’Une de Mai n’a plus de champions à mener au plus haut niveau. Cette association va se révéler particulièrement bénéfique : Bellino II, une fois mené par Jean-René Gougeon, deviendra invincible à Vincennes à départ égal.

 

L’histoire commence le 20 juin 1974, alors que tout le public de Vincennes s’attend à voir triompher le fameux Timothy T, qui part grandissime favori de ce Prix René Ballière ex-Championnat Européen sur la distance de 2 350 mètres. Mais Bellino II, se moquant bien du choix des turfistes, va s’imposer en grand seigneur, de façon spectaculaire, sur le pied de 1’16’’9, devant Timothy T, venu finir à toute vitesse et néanmoins trop tard, pour précéder Casdar, Axius, Buffet II, Arménie, Amour N et Amyot. C’est un jour historique car c’est la première fois que Bellino II triomphe à l’attelage à Vincennes !

Le fait que Buffet II, l’ancien chef de file des « B » attelés, considéré il y a peu comme le nouveau crack du trotting français, soit parmi les vaincus est très significatif : on vient bien d’assister à une passation de pouvoir ; à partir de ce jour, Bellino II devient le meilleur trotteur de Vincennes dans les deux spécialités.

Le règne de Buffet II a déjà expiré !

 

Le 23 août, Bellino II s’impose pour la première fois de l’année au trot monté, dans le Prix Camille Lepecq, sur 2 275 mètres, qu’il remporte en 1’18’’3, tout près du record général de la spécialité, devant Cette Histoire, sur laquelle il prend sa revanche, puis Amour N.

 

 

Pour la première fois depuis des années, le meeting d’hiver de Vincennes commence en l’absence de la grande Une de Mai. Ses successeurs potentiels, Amyot et Buffet II, ont aussi disparu, et tout porte à croire que Timothy T va en profiter pour damer le pion aux trotteurs français, à moins que Bellino II…

 

Mais, pour l’instant, celui-ci se fait désirer. En son absence, Capri remporte le Prix de Bretagne devant Axius, Casdar, Catharina et Vernet.

 

Dimitria, une brillante élève de Léopold Verroken, s’est aussi fait un nom, notamment en remportant le Prix Doynel de Saint-Quentin, devant Dark, Damarète, Dulcinée, Domat, et le Prix Marcel Laurent, en décembre, aux dépens de Dei, Emone et Dark.

 

Catharina fait également parler d’elle, en s’imposant avec désinvolture dans le Prix du Bourbonnais, loin devant Capri, Casdar, Véronique R, Arménie, Dame de Carreau, Vent de l’Histoire et… Bellino II, pénalisé de 25 mètres, qui a choisi de faire une rentrée discrète.

 

Le 5 janvier, Bellino II est au départ du Prix de l’Ile-de-France, un international au trot monté, qu’il a déjà remporté en 1973, mais perdu en 1974, au profit d’Aigle Noir.

Cette fois encore, il doit s’incliner d’assez peu face à Cette Histoire, la brillante jument qui l’avait déjà battu dans le Prix de Cornulier 1974, et qui récidive ainsi, alors qu’Aigle Noir finit troisième à distance, devant Beauséjour II et Amour N.

Bellino II, qui rendait 25 mètres, a cependant trotté en 1’19’’1, contre 1’19’’9 pour la gagnante. C’est donc de bon augure pour le prochain Prix de Cornulier.

 

Deux semaines seulement avant le Prix d’Amérique, Casdar et Catharina se livrent un beau duel pour la victoire dans le Prix de Bourgogne, alors qu’Axius conclut au troisième rang, devant Bellino II, toujours pénalisé de 25 mètres, qui semble avoir progressé sur sa course de rentrée à l’attelage, mais pas suffisamment pour être un chaud favori quinze jours plus tard dans la grande épreuve de fin janvier.

 

C’est pour cela que le dimanche 26 janvier 1975, jour du Prix d’Amérique, les habitués de Vincennes, turfistes et tifosi, lui préfèrent Timothy T, le lauréat du Grand Circuit International 1974, qui a succédé à Une de Mai (1969, 1970, 1971), à Dart Hanover (1972) et à Buffet II (1973), en tête du classement de ce grand challenge européen.

 

Il faut dire que Timothy T n’est pas n’importe qui. Bien que souvent considéré comme un trotteur italien, c’est en réalité un pur américain, fils d’Ayres et de Flicka Frost, façonné par John Simpson Sr, qui le menait en course, en alternance avec son fils, John Simpson Junior.

A 2 ans, à Springfield, Timothy T remporte le Greyhound Trot, puis le Hoosier Futurity à Indianapolis, et aussi le Bluegrass Trot, à Lexington, sur la fameuse piste du Red Mile.

 

A 3 ans, il devient célèbre en gagnant la Founders Gold Cup à Vernon, l’Hanover Colt Stake à Laurel, le Review Futurity à Springfield, l’Hambletonian à Du Quoin, le Kentucky Futurity à Lexington, et aussi le Colonial Trot à Rosecroft Raceway, soit deux épreuves de la Triple Couronne. Il ne lui a manqué que le Yonkers Trot pour entrer dans la légende.

 

Vendu en Italie, après deux saisons de monte, il reprend du service en 1973, et remporte le Grand Prix Tor Di Vallé à Rome. Mais c’est en 1974 qu’il devient un trotteur d’une trempe exceptionnelle, cette fois sur le vieux continent.

Déjà, il se fait connaître en France en remportant le Prix de Paris devant Casdar et un certain Bellino II, qui en est encore à ses débuts dans la spécialité.

Il se classe deuxième de Top Hanover dans la finale du Grand Prix de la Loterie Nationale à Naples. Mais il remporte le Grand Prix de la Foire Internationale de Milan, le Grand Prix du Lido di Roma à Rome, la finale de l’Elitloppet de Stockholm, (devant Amyot et le jeune Equiléo), le Grand Prix de la Flèche d’Europe à Naples, le Grand Prix des Nations à Milan, et pour finir en beauté, son deuxième Grand Prix Tor Di Vallé à Rome.

Mais il s’est aussi classé deuxième d’Amyot dans le Grand Prix de Bavière à Munich, et deuxième de Bellino II dans le Prix René Ballière à Vincennes.

 

C’est sans doute ce qui explique sa cote de favori à 2/1, devant Casdar 6/1, Clissa 13/2, Axius 7/1, Bellino II 79/10 et Catharina 10/1.

 

Pourtant, une semaine avant ce Prix d’Amérique, monté pour la première fois dans cette épreuve par le frère de Jean-René Gougeon, Michel-Marcel Gougeon, que les habitués des champs de courses appellent « Minou », Bellino II s’est rappelé à notre bon souvenir en remportant en 1’21’’ son deuxième Prix de Cornulier, cette fois devant Cette Histoire, qui l’avait battu de peu en 1974, puis Aigle Noir, Beauséjour II, Amour N, Vent de l’Histoire…

Minou Gougeon a ainsi brillamment succédé à René Fabre comme jockey de Bellino II.

 

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Bellino II monté par « Minou » Gougeon

 

 

Timothy-T---John-Simpson-Junior.jpgTimothy T, façonné à l’américaine par John Simpson Sr, qui lui fera gagner l’Hambletonian 1970, drivé par John Simpson Jr.

 

 

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Timothy T présenté à la « sauce italienne » par Giancarlo Baldi

 

 

Le dimanche suivant, Bellino II est donc au départ du Prix d’Amérique, avec Jean-René Gougeon à son sulky, et il tente le doublé légendaire : Prix de Cornulier – Prix d’Amérique.

 

Bien qu’il ait déjà 8 ans, Bellino II est encore un débutant au trot attelé, et il affiche des allures de poulain malgré son grand gabarit ; en fait il est tout neuf face à des chevaux moins âgés que lui mais certainement plus usés par de durs combats. C’est ainsi qu’il s’impose avec désinvolture, en 1’17’’8, dans son premier Prix d’Amérique, devant Axius, encore deuxième, 1’17’’9, Catharina 1’18’’8, Timothy T 1’19’’, Casdar 1’19’’, Aigle Noir, 1’19’’4, Dimitria, puis Véronique R, et dix autres trotteurs ; parmi lesquels, le jeune et fantasque Fakir du Vivier, âgé de 4 ans, ne finit pas le parcours. Espoir de Sée et Edomérica ont été disqualifiés.

 

Cette fois le nom de Bellino II est connu de tous. Il est vrai qu’il signe un exploit mémorable et rejoint dans la légende Venutar, Masina et Tidalium Pélo, pour avoir réussi comme eux la même année le fameux doublé Prix de Cornulier – Prix d’Amérique !

 

Quinze jours plus tard, Bellino II, qui a fait l’impasse sur le Prix de France remporté par Axius, devant Clissa et Dimitria, est au départ du Prix de Paris, disputé sur 3 150 mètres. Bellino II a la lourde tâche de rendre 50 mètres. Malgré cela, il renouvelle l’exploit de Jamin, et s’impose en temps record, 1’18’’3, loin devant Cette Histoire, Casdar, Chablis, Aigle Noir, Coppet, Clissa, Ciboulette M…

Le Prix de Paris est une course qui réussit bien aux spécialistes du trot monté, comme le confirment à l’arrivée les deux premiers, Bellino II et Cette Histoire.

Mais une chose est sûre désormais, Bellino II est un très grand trotteur, dans la lignée de Gélinotte, Jamin, Masina, Ozo, Roquépine, Tidalium Pélo et Une de Mai. Vincennes a donc bel et bien retrouvé une nouvelle idole pour assurer ses beaux jours.

 

En plus des « américains d’Italie », Timothy T et Wayne Eden, ce meeting d’hiver 1975 nous présentait pour la première fois le champion trotteur russe Kolchedan, une célébrité dans son pays, détenteur d’un record impressionnant ; mais, parti à la faute dans le Prix de France et rapidement mis hors de course, il n’a pu être jugé.

 

 

Bellino II remporte le Prix d'Amerique 1975 devant Axius

Bellino II remporte le Prix d’Amérique 1975 devant Axius

 

 

 

On retrouve Bellino II à Cagnes-sur-Mer le 16 mars pour le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur, un passage pratiquement obligatoire pour un vainqueur de Prix d’Amérique.

Trois trotteurs régionaux ont osé relever le défi face aux meilleurs chevaux de Vincennes :  Bellino II, Axius, Casdar, Dimitria, Chablis et Duc de Vrie.

Après ses récents exploits à Vincennes, Bellino II est évidemment le favori, et il confirme brillamment cette position en s’imposant en 1’15’’4, à seulement un dixième du record établi par Roquépine en 1968, et cela malgré un mauvais départ. Il n’est pas encore habitué à débouler derrière l’autostart comme le font les purs « milers ».

Dimitria contient de justesse l’assaut d’Axius pour la deuxième place, alors que Casdar se classe quatrième devant Coquelicot Joli, Anitou, Duc de Vrie…

 

Après quelques semaines de repos bien méritées, Bellino II fait sa rentrée à Enghien le 6 mai 1975, dans le Prix de l’Atlantique (2 150 m), qu’il remporte sans coup férir, en 1’17’’8, d’autant que Catharina se montre fautive, perdant ainsi le bénéfice de ses efforts et aussi la deuxième place, qui revient de nouveau à Dimitria, devant Casdar, Axius, Ephèse, Champenoise et Arménie.

 

Dans la deuxième édition du Prix des Ducs de Normandie (2 300 m), disputé le 1er juin à Caen, Bellino II doit rendre 25 mètres à Axius, qui en profite pour s’imposer devant son rival, alors que la troisième place revient à Damarète. Ce sera la seule défaite de Bellino II en France durant l’année 1975 au sulky, bien qu’il ait trotté en 1’17’’6.

 

Quelques jours plus tard, le 19 juin, Bellino II retrouve Vincennes et renoue avec la victoire à l’occasion de son deuxième Prix René Ballière (Championnat Européen), qu’il signe en 1’18’’2, loin devant Axius et Catharina, que suivent Chabichou, Espoir de Sée fautif et éliminé au passage du poteau, Dimitria, Dona, Dame de Carreau…

C’est le premier doublé du champion de M. Maurice Macheret à l’attelage !

 

Le 6 juillet, Bellino II effectue un premier déplacement victorieux à l’étranger, en Allemagne, à Gelsenkirchen, où il remporte l’Elite Rennen (2 500 m), en 1’19’’1, devant un excellent Equiléo, le héros d’une série victorieuse historique à Vincennes, avec le Prix Jockey, le Critérium des 5 ans, le Prix de l’Etoile et le Prix d’Eté, alors que le troisième trotteur français de la course, Esquirol, s’est contenté d’un rôle de figurant.

Equiléo avait d’ailleurs remporté cette épreuve en 1974, alors qu’il n’avait que 4 ans !

 

Sur sa lancée, Bellino II se rend d’abord en Italie, à Rome, le 27 juillet, et là remporte en 1’15’’7, le Grand Prix du Lido di Roma, devant Duc de Vrie, le cheval de Mireille Darc, et Wayne Eden.

 

Fort de ces succès, Bellino II s’envole pour les Etats-Unis, avec Dimitria, qui s’est aussi distinguée en Italie, gagnant à Turin le Grand Prix de la Côte d’Azur, puis à Naples le Grand Prix de la Loterie.

Ils vont ainsi affronter chez eux les meilleurs trotteurs américains, dans le Roosevelt International Trot – Championnat du Monde des Trotteurs, disputé en nocturne sur l’hippodrome new-yorkais de Roosevelt Raceway.

La distance est de 2 011 mètres, mais la piste new-yorkaise de Roosevelt est un tourniquet de 804 mètres, peu favorable aux grands chevaux comme Bellino II. En outre, il fait très chaud à New York, durant l’été, une chaleur moite et suffocante, qui indispose le champion français ; il se contente d’une honorable et courageuse deuxième place derrière le petit mais véloce Savoir, un hongre américain, qui a trotté en 1’15’’6, tout près du record de la course pour s’imposer aux dépens de Bellino II, bon second, et Surge Hanover, arrivée troisième.


 

 

Dimitria

Dimitira

 

Dimitria s'est distinguée en Italie, à Turin, gagnant le Grand Prix de la Côte d'Azur, et à Naples, où elle a gagné le Grand Prix de la Loterie Nationale en 1975. En 1976, elle a remporté l'Elitloppet de Solvalla, sa plus belle victoire. 

Bellino II et Jean-René Gougeon

Bellino II et Jean-René Gougeon

Savoir confirme sa victoire dans la Challenge Cup 1975, à Roosevelt Raceway

Savoir confirme sa victoire dans la Challenge Cup 1975, à Roosevelt Raceway

Dès le début du nouveau meeting d’hiver, celui de 1976, Bellino II annonce la couleur en remportant le Prix de Bretagne, le 15 novembre 1975, bien que partant avec Axius au dernier poteau, celui des 50 mètres, l’obligeant à rendre 25 mètres à Catharina, Cette Histoire, Equiléo et Espoir de Sée, et 50 à Chablis, Amour N, Damarète, Dinès P et quelques autres.

Le champion de Maurice Macheret s’est imposé en 1’18’’4, devant Espoir de Sée, Equiléo, Dinès P, Axius, Catharina…

Une nouvelle épreuve préparatoire au Prix d’Amérique, le Prix du Béarn (2 600 m), semble avoir été créée pour Bellino II, qui la remporte en 1’19’’3, malgré 25 mètres de handicap, le 3 décembre 1975, devant Catharina, Clissa, Equiléo, Dimitria, Axius, Chablis, Espoir de Sée…

Clissa profite de l’absence de Bellino II pour remporter le Prix du Bourbonnais sur 2 600 mètres, le 20 décembre, devant Dimitria, Chablis, Emone, Equiléo, pénalisé de 25 mètres, Edomérica, Espoir de Sée, Eléazar…

Eléazar, qui a connu quelques problèmes de jambes, se retrouve à temps pour gagner le Prix Marcel Laurent (2 300 m), devant Equiléo, Espoir de Sée, Epigramme, Edomérica…

Le 4 janvier 1976, Bellino II signe sa première victoire de l’année, au trot monté, dans le Prix de l’Ile-de-France (2 250 m), son deuxième, qu’il remporte en 1’19’’1, avec une grande supériorité sur Dinès P, Chablis, Cette Histoire, Eringa, Dastérien, Champenoise… et ce malgré 25 mètres de pénalité.

Clissa, en grande forme, profite de ses 25 mètres d’avance sur Bellino II, pour remporter le Prix de Bourgogne, mais de justesse face à Dimitria. En venant prendre la troisième place, Bellino II réalise un exploit, puisqu’il trotte en 1’16’’9, contre 1’17’’4 pour la gagnante. Equiléo, Axius, Dona, Casdar, Dei, Arménie, Bébé du Parnasse se classent ensuite.

 

Le dimanche 18 janvier 1976, Bellino II remporte avec une indéniable supériorité son troisième Prix de Cornulier (2 600 m), en 1’21’’3, loin devant Cette Histoire, Egyptia, Eringa, Dinès P, Champenoise…

Il égale ainsi Souarus et Gardon, les deux seuls trotteurs à avoir inscrit trois fois avant lui l’épreuve reine du trot monté à leur palmarès.

Mais il va tenter un autre exploit, celui de remporter le doublé Prix de Cornulier – Prix d’Amérique, à deux reprises, ce qui ne s’est jamais vu, a fortiori deux années de suite !

Or, le dimanche 25 janvier 1976, Bellino II est le grandissime favori du Prix d’Amérique. C’est bien timidement qu’on lui oppose Equiléo et Fakir du Vivier, les deux champions d’Alain Delon, et le pourtant fameux Timothy T, qui reste sur de belles victoires en 1975.

Il a gagné pour la deuxième fois l’Elitloppet de Stockholm, mais aussi le Grand Prix de Bavière de Munich, dont il s’était classé deuxième d’Amyot en 1974, le Grand Prix de Rome et le Grand Prix des Nations à Milan, pour la deuxième fois également.

Mais Bellino II le devance tout de même au classement du Grand Circuit International 1975, lui succédant ainsi, puisqu’il finissait en tête de ce challenge en 1974.

Les autres concurrents en vue sont des femelles : Catharina, Clissa, Dimitria.

Bellino II mérite bien désormais son surnom de « rouleau compresseur », tant il s’est montré supérieur durant ses victoires dans les Prix de Bretagne, du Béarn, de l’Ile-de-France, dans son récent Cornulier et tout au long de l’année 1975 ; il ne se contente pas de battre ses adversaires, il les ridiculise, ce qui explique le nombre des partants : 13, trop peu nombreux pour que le Prix d’Amérique serve de support au pari tiercé.

De fait, ce Prix d’Amérique 1976 est une formalité pour Bellino II, qui s’impose, en 1’19’’1, sur 2 600 mètres, loin devant Catharina, Equiléo, Espoir de Sée, Timothy T, Clissa, Dark, Dona, Dimitria, Axius, Casdar, Fakir du Vivier, venus se classer dans cet ordre, alors qu’Albatros VI est disqualifié.

Bellino II remporte le Prix d’Amérique 1976, loin devant Catharina et Equiléo

Bellino II remporte le Prix d’Amérique 1976, loin devant Catharina et Equiléo

Bellino II, Jean-René Gougeon et René Sala, après leur victoire dans le Prix d’Amérique 1976

Bellino II, Jean-René Gougeon et René Sala, après leur victoire dans le Prix d’Amérique 1976

Contrairement à Une de Mai, qui devait batailler dur avec Tidalium Pélo, Toscan, Upsalin, ou encore Tony M et Vanina B, pour s’imposer, Bellino II n’a pas d’adversaires à sa mesure.

Alors, il tente un défi incroyable : remporter les quatre grands internationaux de Vincennes la même année ! Il en a déjà gagné deux : Prix de Cornulier et Prix d’Amérique, il lui reste encore le Prix de France et le Prix de Paris à s’offrir pour réussir ce pari osé, qui semble pourtant à sa portée.

Sept jours après sa victoire dans le Prix d’Amérique, Bellino II s’aligne donc pour la première fois au départ du Prix de France (2 250 m), face à huit adversaires, dont un, Dauga, n’a pas pris part au grand international de fin janvier.

La difficulté pour Bellino II, en tant que vainqueur du Prix d’Amérique, est de rendre 25 mètres sur une distance assez courte à ses huit adversaires, suivant le règlement en vigueur à l’époque. Le départ de ce Prix de France 1976 n’étant pas donné à l’aide de l’autostart comme aujourd’hui.

Catharina, Clissa, Dimitria, Dona, quatre femelles, et trois mâles, Equiléo, Espoir de Sée et Fakir du Vivier complètent le lot des neuf partants.

Très bien parti à son échelon, le champion de Maurice Macheret refait très vite son handicap initial pour rejoindre les fuyards, emmenés par Dimitria. Fakir du Vivier se porte à sa hauteur sur une pointe, alors que Catharina et Clissa sont aussi dans le peloton de tête. Mais, Bellino II réussit l’exploit de trotter en 1’15’’9, établissant ainsi le nouveau record de la piste de Vincennes, pour s’imposer devant Clissa, Espoir de Sée, Equiléo, Dona, Dimitria.

Sur les quatre grands internationaux, Bellino II en a déjà remporté trois. Il lui faut maintenant rendre la distance de 75 mètres dans le Prix de Paris 1976, disputé sur 3 150 mètres et il a gagné son pari.

Cette fois Eléazar, qui s’est distingué en remportant les Prix de la Marne et du Plateau de Gravelle, est de la partie et il glane quelques suffrages, comme aussi Catharina, Clissa, Equiléo et Espoir de Sée, alors que Casdar, Feu Violet et Edomerica sont pratiquement ignorés.

Bellino II étant, malgré son très lourd handicap, une fois de plus le grandissime favori.

Eléazar n’est pas encore devenu le champion qu’on a connu, il semble avoir des complexes face à Bellino II, et hésite à durcir la course, ce qui est aussi le cas d’Edomerica. Ainsi, Catharina refait très vite son handicap de 25 mètres, et Bellino II, qui semble avoir porté le sien de 75 à 85 mètres, se rapproche aussi de façon significative, battue après battue.

Malgré la résistance héroïque de Catharina, Bellino II réussit l’exploit de s’imposer en 1’21’’3. Confirmant son retour au sommet, Eléazar se classe troisième derrière Catharina, mais devant Clissa, Equiléo, Espoir de Sée, qui arrivent dans cet ordre.

A la fin de ce meeting d’hiver 1976, qu’il a marqué de son empreinte, le nom de Bellino II est sur toutes les lèvres. Jamais encore il est vrai le « champion au bonnet rouge » ne s’était montré aussi dominateur. Il a donc parfaitement honoré son incroyable défi.

 

Le 14 mars, Bellino II est à Cagnes-sur-Mer, où il va tenter de remporter pour la deuxième fois le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m), départ donné à l’autostart. Une fois de plus il fait l’unanimité. D’ailleurs, Equiléo déclare forfait, laissant le soin à Fakir du Vivier de défendre à lui seul les couleurs d’Alain Delon. La belle Clissa est encore de la partie, avec Dimitria, et aussi Dauga, courant en progrès. Les autres concurrents : Ciki, Coquelicot Joli, Bébé du Parnasse font figure d’extrêmes outsiders.

Clissa et Fakir du Vivier partent à la faute, à cause de l’autostart dont l’aile gauche oblige les chevaux à ralentir dans le virage. Clissa, vite remise dans les bonnes allures, échappe à la sanction, mais pas Fakir du Vivier, toujours difficile à maîtriser.

Egalant en 1’15’’3 le record établi par Roquépine en 1968, qu’il avait d’ailleurs frôlé d’un dixième l’an passé, Bellino II rallie en vainqueur le poteau d’arrivée, assez loin de Dimitria, Clissa et Dauga, qui se classent dans cet ordre. Il signe ainsi sa cinquième victoire d’affilée.

 

De Cagnes-sur-Mer, Bellino II se rend à Turin, pour y remporter le Grand Prix de la Côte d’Azur (1 640 m), en 1’14’’5, devant l’italo-américain Wayne Eden, Dimitria, Speed Expert et le champion natif du pays, Delfo.

De Turin, il descend à Naples et s’impose en 1’15’’4, établissant ainsi le record de la piste, devant Dalko II et Neapolis, dans la troisième batterie qualificative du Grand Prix de la Loterie Nationale sur 1 600 mètres, avant de remporter la finale en 1’15’’2, battant ainsi son propre record, pour s’imposer devant Delfo, Dalko II et Dimitria, la tenante du titre.

La série continue à Enghien, avec le Prix de l’Atlantique (2 150 m), qu’il remporte en 1’16’’6, devant Equiléo et Clissa, puis Dimitria, Dinès P, Espoir de Sée…

 

Il connaît sa première défaite à Munich, dans le Grand Prix de Bavière, où, souffrant de la chaleur humide, il laisse la victoire à Dauga, alors qu’Equiléo se classe troisième.

 

Il renoue avec la victoire à Vincennes, le 17 juin, pour y remporter son troisième Prix René Ballière (2 350 m), en 1’18’’4, en dominant nettement Espoir de Sée, Eléazar et Equiléo.

 

Puis c’est l’aventure américaine avec Equiléo.

Face au canadien Snegem Flight, au suédois Duke Iran, aux italiens Delfo et Patroclo, aux américains Meadow Bright et Savoir (le tenant du titre), Equiléo et Bellino II ont l’honneur de représenter la France dans l’édition 1976 du Roosevelt International Trot – Championnat du Monde des trotteurs. 

Petit cheval, véloce et fuselé, Equiléo s’adapte parfaitement au profil de la piste, au contraire de Bellino II, qui souffre en plus de la chaleur, mais sauve l’honneur en prenant à nouveau la deuxième place, cette fois derrière son compatriote, le cheval d’Alain Delon, alors que la pouliche américaine Meadow Bright termine troisième.

Equiléo a trotté en 1’16’’2 pour devenir ainsi le nouveau champion du monde et faire retentir la Marseillaise dans la nuit new-yorkaise.

La Challenge Cup (2 400 m), disputée une semaine plus tard revient à Dream of Glory, qui bat en 1’17’’2 le record de la distance établi par Star’s Pride, en 1951, et égalé par Ozo en 1964, alors qu’Equiléo se classe troisième derrière Kash Minbar.

Imitant Jamin et Une de Mai, Equiléo s’en va tenter sa chance sur la côte Ouest, à Hollywood Park, en Californie, dans le fameux American Trotting Classic (1 910 m), dont il se classe troisième derrière Keystone Pioneer et Savoir, mais devant Dream of Glory et Kash Minbar. De son périple californien, Equiléo ramène un record de 1’13’’4 !

En remportant le Grand Prix de Bavière 1976 à Munich, Dauga bat Bellino II, mettant fin à sa longue série victorieuse. Dauga remportera un deuxième Grand Prix de Bavière en 1977, devant Eléazar cette fois.

En remportant le Grand Prix de Bavière 1976 à Munich, Dauga bat Bellino II, mettant fin à sa longue série victorieuse. Dauga remportera un deuxième Grand Prix de Bavière en 1977, devant Eléazar cette fois.

Equiléo, le champion trotteur d’Alain Delon, bat Bellino II dans le Roosevelt International Trot tenant lieu de championnat du monde des trotteurs à New York, durant l’été 1976

Equiléo, le champion trotteur d’Alain Delon, bat Bellino II dans le Roosevelt International Trot tenant lieu de championnat du monde des trotteurs à New York, durant l’été 1976

Une victoire de Keystone Pioneer

Une victoire de Keystone Pioneer

Première épreuve préparatoire au Prix d’Amérique, le Prix de Bretagne (2 800 m) revient à Ecu de Retz, qui s’impose devant Dauga, Catharina, Feu Violet, Colomba II, Ejakval…

Bellino II choisit le Prix du Bourbonnais, pour renouer avec la victoire, malgré 25 mètres de handicap, qui ne l’empêchent pas de s’imposer en 1’19’’1, devant Dauga, Fakir du Vivier, Colomba II, Feinte, Eléazar, Franca Maria, Clissa…

 

Dans le Prix Marcel Laurent (2 300 m), Fakir du Vivier ne peut rendre 50 mètres au jeune prodige Hadol du Vivier, son demi-frère, alors quasiment invaincu et invincible, mais il se classe bon deuxième devant Girl Blanche, Feu Violet, Feinte, Franca Maria…

 

Le Prix de Bourgogne (2 250 m), disputé le 2 janvier, revient à Dauga, devant Eléazar, Fakir du Vivier, Colomba II, Catharina, Ecu de Retz, Dimitria, Dinès P…

 

Le 9 janvier, Bellino II, monté par Michel Gougeon, est au départ du Prix de l’Ile-de-France (2 250 m). Mais c’est Fanacques qui s’impose en 1’18’’9, devant Eregoya, Feu Vert, le grand Bellino II, seulement quatrième, devant Florisuge, Champenoise, Ersin…

 

Le Prix du Béarn (2 600 m) devient cette année le dernier test avant le Prix d’Amérique, dans lequel Eléazar annonce déjà ses sérieuses prétentions en l’emportant en 1’19’’5, devant sa compagne d’entraînement Dimitria, Feu Viollet, Dauga et Bellino II, qui, pénalisé de 25 mètres, a tout de même trotté en 1’19’’3, plus vite que le gagnant.

 

Le doute s’intensifie encore quand Bellino II, pour son retour au trot monté, se fait battre par Fanacques et Eringa dans le Prix de Cornulier (2 600 m), le dimanche 23 janvier, à une semaine du Prix d’Amérique.

Résultat : Bellino II (23/10) est encore le favori du Prix d’Amérique, mais cette fois on lui oppose sérieusement le vaillant Eléazar (5/2).

Terminant en tête du Grand Circuit International 1976, Bellino II s’est tout de même succédé à lui-même en tant que champion d’Europe.

 

Pour parfaire le tout, Bellino II rate son départ dans le Prix d’Amérique et perd près d’une trentaine de mètres sur Eléazar, son principal adversaire.

Arrivé en tête dans la dernière ligne droite avec ses allures de grand seigneur, Eléazar fait figure de gagnant. C’est alors que Bellino II revient sur lui à une centaine de mètres de l’arrivée. Les deux champions se livrent bientôt un duel épique, commenté avec passion par Léon Zitrone, qui soulève l’admiration et l’acclamation du public de Vincennes comme des innombrables téléspectateurs. Bellino II parvient à arracher la victoire à son rival d’une courte encolure. Mais la surprise vient de la troisième place prise à distance par l’extrême outsider, Franca Maria (99/1). Dauga au galop perd la quatrième place au profit de Fakir du Vivier. Puis viennent Colomba II, Dimitria, Eringa, Ecu de Retz…

Les deux premiers sont chronométrés en 1’17’’9, ce qui constitue le nouveau record de la course avec le départ aux élastiques.

 

Eléazar prendra sa revanche sur Bellino II dans le Prix de France, le dimanche suivant.

Le champion de Maurice Macheret a 10 ans et n’est plus en mesure de rendre 25 mètres sur la distance de 2 250 mètres à un trotteur de ce niveau. Contraint de faire les extérieurs, il doit cette fois se contenter d’une quatrième place derrière Eléazar, Dimitria et Catharina. C’est un succès total pour l’entraîneur Léopold Verroken, qui place ses deux brillants élèves aux deux premières places.

 

Mais, dans le Prix de Paris, c’est de nouveau Bellino II qui s’impose devant le même Eléazar, quoique beaucoup plus nettement que dans le Prix d’Amérique, alors que Dimitria coiffe Catharina pour la troisième place. Bellino II, qui rendait 25 mètres à Eléazar et 50 mètres aux chevaux du premier poteau, signe sa victoire en 1’20’’2.

 

Ainsi, Bellino II a rejoint Uranie et Roquépine dans la légende en gagnant comme elles un troisième Prix d’Amérique. Il est d’ailleurs le premier trotteur mâle à réussir officiellement cet exploit, mais il fait encore mieux en concluant son dernier meeting d’hiver en beauté avec une troisième victoire dans le Prix de Paris.

 

Bien qu’âgé de 10 ans, l’âge limite pour un trotteur français, Bellino II a donc encore de beaux restes, ce qui va susciter une polémique : ses admirateurs vont demander qu’on recule pour lui l’âge de la retraite, mais ce sera en vain.

Bellino II aura encore deux occasions de se faire applaudir en France : la première le 3 mai, dans le Prix de l’Atlantique (2 150 m), à Enghien, qu’il remporte pour la troisième fois, cette fois en 1’16’’5, devant Eléazar et Equiléo, la deuxième dans le Prix René Ballière sur la distance de 2 250 mètres, le 16 juin à Vincennes, dans lequel il ne parvient pas à remonter complètement Fakir du Vivier, et se classe bon deuxième devant Equiléo, Gars de Fontaine et Eléazar. C’est la seule fois que Bellino II et Jean-René Gougeon sont battus à départ égal sur la piste de Vincennes.

 

Cette année-là, Bellino II brille aussi en Hollande, remportant le Grand Prix des Pays-Bas (2 250 m), en 1’15’’7 devant Wiretapper et Forain, un ex-français devenu hollandais, et le Prix des Géants (1 600 m), d’abord en éliminatoire, puis dans la finale, tout en établissant le nouveau record d’Europe de 1’13’’8, devant deux autres trotteurs français, Dauga et Equiléo, et aussi Pershing, un jeune champion très prometteur. Il a aussi battu le record de la piste. Ce sera la dernière victoire de sa carrière et sa façon à lui de saluer ses admirateurs.

 

Pershing, bien qu’âgé de 4 ans, a d’ailleurs battu Bellino II à deux reprises durant cette année 1977. La première fois dans l’Elite Rennen (2 500 m), à Gelsenkirchen, qu’il remporte en 1’17’’7, devant Granit, Equiléo et Bellino II ; la deuxième, à Munich, le 2 octobre, dans le Prix des Meilleurs (2 600 m), qu’il gagne en 1’17’’8, devant Madison Avenue, Dauga, Bellino II, Equiléo et Granit.

C’est toutefois au vaillant Eléazar, qui a d’ailleurs gagné l’Elitloppet de Solvalla, que revient le Grand Circuit International 1977.

Lors de son dernier périple américain, à New York, dans le Championnat du Monde – Roosevelt international Trot, Bellino II se classe encore deuxième, cette fois derrière Delfo, le champion italien, qui s’impose ainsi, en 1’16’’9, dix-huit ans après la défaite de Tornese battu par Jamin en 1959. C’est la pouliche canadienne Dapper Dillon, qui se classe troisième, devant la jument américaine Keystone Pioneer.

 

Lorsqu’il entre au haras à la fin de sa carrière de courses, Bellino II est le plus riche de tous les trotteurs du monde avec 9 034 089 F de gains et 55 victoires.

Avec Eléazar, son brillant dauphin, et le jeune phénomène Hadol du Vivier, lui aussi mené en courses par Jean-René Gougeon, il nous laisse deux successeurs potentiels.

Le Prix d’Amérique 1977 se résume à un duel fabuleux entre les deux favoris, Bellino II et Eléazar, qui se classeront dans cet ordre, séparés par une courte encolure. A distance, Franca Maria est une surprenante troisième.

Le Prix d’Amérique 1977 se résume à un duel fabuleux entre les deux favoris, Bellino II et Eléazar, qui se classeront dans cet ordre, séparés par une courte encolure. A distance, Franca Maria est une surprenante troisième.

Bellino II, René Sala, Jean-René Gougeon, Maurice Macheret savourent leur victoire dans le Prix d’Amérique 1977. Le grand Bellino II a rejoint Uranie et Roquépine dans la légende en gagnant un troisième Prix d’Amérique.

Bellino II, René Sala, Jean-René Gougeon, Maurice Macheret savourent leur victoire dans le Prix d’Amérique 1977. Le grand Bellino II a rejoint Uranie et Roquépine dans la légende en gagnant un troisième Prix d’Amérique.

Bellino II-Jean-René Gougeon contre Eléazar-Léopold Verroken : le choc des Titans !

Bellino II-Jean-René Gougeon contre Eléazar-Léopold Verroken : le choc des Titans !

Bellino II et Jean-René Gougeon seront battus pour la seule fois à départ égal sur la piste de Vincennes par Fakir du Vivier

Bellino II et Jean-René Gougeon seront battus pour la seule fois à départ égal sur la piste de Vincennes par Fakir du Vivier

Delfo est sacré champion du monde à New York !

Delfo est sacré champion du monde à New York !

Delfo a battu Bellino II à New York dans le Championnat du Monde 1977 !

Delfo a battu Bellino II à New York dans le Championnat du Monde 1977 !

Casdar et Jean-Claude Hallais

Casdar et Jean-Claude Hallais

Catharina à la lutte avec Eléazar et Bellino II !

Catharina à la lutte avec Eléazar et Bellino II !

Catharina

Catharina

Dimitria

Dimitria

Feinte

Feinte

Le champion russe Kolchedan

Le champion russe Kolchedan

Bellino II, le plus grand des trotteurs

Bellino II, Prix d'Amérique 1976

Bellino II, Prix d'Amérique 1977

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10 mars 2013 7 10 /03 /mars /2013 14:45

 

Les champions trotteurs de légende en France

 

04 - Les années 1970 (suite, les années Une de Mai)

 

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      Une de Mai et Jean-Lou Peupion

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      Jean-René Gougeon et Une de Mai

 

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Une de Mai revue par Salvador Dali

 

 

Heureusement, avec un peu de repos, Une de Mai s’est complètement retrouvée, et elle est de nouveau à Cagnes-sur-Mer, son hippodrome préféré, pour son troisième Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur, qu’elle remporte, en 1’17’’3, devant la courageuse Vanina B, 1’17’’4, que suivent à distance Verdict, Un Iris B, Vichnou,  puis plus loin Sibelle J, Urielle.

Tidalium Pélo, à la faute après avoir été effrayé par la toque de Jean Riaud, qui drivait Vanina B, a été disqualifié. La toque s’était envolée et avait heurté le cheval noir à la tête.

Mais la plus malchanceuse est encore Vanina B, qui s’est fait mal en voulant résister à Une de Mai. Une déchirure à la cuisse l’empêchera de devenir la jument de légende qu’elle aurait dû être après ses débuts spectaculaires ; elle était pourtant bien digne de figurer dans la lignée des Uranie, Amazone B, Gélinotte, Masina, Ozo, Roquépine et Une de Mai.

Mais elle se rattrapera au haras en donnant le jour à un certain Jorky, un champion hors du commun, né de son union avec le grand chef de race, Kerjacques.

 

Une de Mai et Tidalium Pélo, désormais les deux meilleurs trotteurs du moment, ont rendez-vous à Enghien pour le Prix de l’Atlantique. A l’issue d’un sprint spectaculaire, la victoire revient, en 1’16’’6, à Une de Mai, devant un irréprochable Tidalium Pélo, 1’16’’7, que suivent à distance Verdict et Tira de Bellouet.

Les deux champions vont maintenant poursuivre leurs exploits à travers l’Europe.

Une de Mai se rend d’abord en Italie, à Turin, pour renouveler sa victoire de l’an dernier dans le Grand Prix de la Côte d’Azur, qu’elle signe cette fois en 1’18’’7, devant Murray Mir, Amazin Willie et Gladio. Puis elle retourne à Naples où elle s’attaque pour la troisième fois au Grand Prix de la Loterie Nationale ; elle remporte la première batterie en 1’17’’3, devant Gun Runner, et s’impose aussi en finale pour la troisième fois consécutive, mais en 1’16’’7, devant Barbablù et Murray Mir.

Sur sa lancée, Une de Mai se retrouve à Milan pour le Grand Prix de la Foire Internationale, dont elle est aussi la tenante du titre. Mais c’est l’inattendu Akobo qui s’impose devant Crodino, Corral et Vismie, alors qu’Une de Mai, dans un mauvais jour, n’est que l’ombre d’elle-même.

 

Le 31 mai 1971, Une de Mai et Tidalium Pélo sont à nouveau réunis mais en Suède, cette fois, à Stockholm, pour en découdre à l’issue du fameux Elitloppet, la plus belle épreuve de Scandinavie, qui manque toujours au palmarès de la fille de Kerjacques.

Mais, dès le premier heat, Dart Hanover s’impose devant Tarper Harrow ; à la surprise générale, Une de Mai n’est que troisième devant Verdict.

Heureusement, dans le deuxième heat, Tidalium Pélo se montre magistral pour s’imposer en 1’14’’8, un temps excellent à l’époque, loin devant Unor, Vismie et Agaunar.

Enfin, dans la finale, Tidalium Pélo, toujours aussi époustouflant, l’emporte dans le temps record de 1’14’’7 ! loin devant Dart Hanover, venu tout à la fin régler Une de Mai pour la deuxième place. Verdict, Vismie, Agaunar viennent ensuite.

 

Une de Mai retrouve Tidalium Pélo en Allemagne à Munich, à l’occasion du Grand Prix de Bavière (2 100 m). Mais, toujours dans une forme éblouissante, Tidalium Pélo, qui a déjà gagné le Prix des Meilleurs sur cet hippodrome, s’impose en 1’15’’2 (tout près du record établi par Toscan en 1’15’’1), devant Une de Mai, bonne finisseuse, Dart Hanover, Un Cœur B, Cirene Bunter, Carolyn Sue, Allo Mannetôt…

 

Une de Mai et Tidalium Pélo reviennent à Vincennes le 17 juin 1971, pour disputer le Championnat Européen (futur Prix René Ballière). Mais cette fois, en s’imposant dans la réduction de 1’19’’, la belle alezane prend sa revanche sur son rival, qui se classe deuxième devant Véronique R, Uno, Urielle, Villequier B…

 

Sur sa lancée, Une de Mai se rend en Hollande, à Duindigt, l’hippodrome de La Haye, afin de gagner très facilement le Grand Prix des Pays-Bas, devant le trotteur belge Busiris.

 

Une de Mai va aussi à Hambourg disputer le Grand Prix d’Allemagne, dans lequel elle retrouve son grand rival, Tidalium Pélo. Mais décidément maître dans ce pays, le diable noir renoue avec la victoire, et s’impose en 1’16’’7, devant Une de Mai, 1’16’’9, que suivent Dart Hanover, Ginster, Carolyn Sue…

 

De là, Une de Mai, cette grande voyageuse, regagne l’Italie, et Rome, la capitale, afin de s’aligner au départ du Grand Prix du Lido di Roma, qu’elle a déjà gagné devant Toscan en 1969. Cette fois elle s’impose, en 1’18’’2, devant Verdict et Dart Hanover.

La convalescente Vanina B a tenté de renouer avec la victoire dans cette course, mais en vain ; après être venue un moment en bonne place, elle a vite abdiqué.

 

De Rome à New York, il n’y a qu’un pas pour Une de Mai, qu’elle franchit allégrement pour remporter son deuxième Championnat du Monde (le Roosevelt International Trot), mais de justesse, devant une vieille connaissance : Fresh Yankee, la championne canadienne bien connue, qui précède Dart Hanover et Tidalium Pélo, un peu moins incisif que quelques jours plus tôt en Allemagne. Les deux premières étaient créditées de la même réduction de 1’17’’.

Une de Mai, Fresh Yankee, Dart Hanover et Crain Hanover, une semaine plus tard, sont au départ du Roquepine Trot (la Challenge Cup), qui sourit pour la première fois à la fille de Kerjacques, dans un temps de 1’16’’4, devant Fresh Yankee.

La championne française a donc réalisé deux doublés, puisqu’elle est deux fois championne du monde, et aussi victorieuse dans la revanche en 1971.

 

Une de Mai gagne le championnat du monde 1971 devant Fresh

Une de Mai remporte le Championnat du Monde (Roosevelt International Trot) 1971, battant de justesse Fresh Yankee, puis Dart Hanover, Tidalium Pélo

 

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La célèbre jument canadienne Fresh Yankee gagna le Championnat du Monde (Roosevelt International Trot) 1970 à New York, devant Tidalium Pélo, Stylish Major et Une de Mai, la tenante du titre, et confirma dans la revanche, la Challenge Cup, une semaine plus tard (épreuve qu’elle avait déjà gagnée en 1969). Elle s’illustra aussi en Europe, gagnant l’Elitloppet 1969 à Solvalla devant Tony M, se classant deuxième d’Eileen Eden dans la même épreuve en 1970.

 

 

 

Une de Mai a aussi gagné à Enghien, durant le meeting d’été, s’octroyant d’abord le Prix de Washington, sur 1 600 mètres, en 1’16’’2, puis le Prix d’Europe, sur 2 800 mètres, en 1’18’’, devant un grand Tidalium Pélo, d’ailleurs crédité du même temps, alors que tous les autres, dont Urielle, Vigneron, Amiral Williams finissent loin.

De retour à Vincennes, Une de Mai triomphe devant son public, à l’occasion du Prix d’Eté, qu’elle remporte en 1’18’’8, devant Vismie et Amyot.

 

Mais Une de Mai ne s’est toujours pas imposée en Allemagne ; c’est ce qu’elle tente de faire à Gelsenkirchen, à l’occasion de l’Elite Rennen. Elle y parvient par une victoire ridicule de facilité, qu’elle signe en 1’19’’6, battant de loin Wallburg, Denar, et d’anciens trotteurs français, dont Un Cœur B et Ballon Rouge.

Alors, forte de ce premier succès en terre germanique, Une de Mai se rend à Munich pour le Prix des Meilleurs, que Tidalium Pélo et Tony M ont déjà gagné avant elle. Une de Mai s’empresse de les rejoindre au palmarès de cette belle épreuve, qu’elle remporte en 1’19’’7, devant Verdict, puis, à distance, Denar, Ventrachoux, Arbella…

C’était sa huitième victoire consécutive !

 

Une de Mai est maintenant appelée à Marseille pour y disputer le Grand Prix de Trot du Sud-Est, sur 2 775 mètres, dans lequel elle doit rendre 50 mètres aux concurrents du premier poteau et 25 à ceux du second. En battant le record de la course, Une de Mai rejoint la première le poteau d’arrivée, en 1’19’’9/20, devant Viacus, un concurrent du premier poteau, que suivent à distance, Arménie, Uno et Tolède.

 

De Marseille, Une de Mai se rend à Kuurne en Belgique, pour renouveler sa victoire de l’an dernier dans le Prix Martini, qu’elle remporte devant Fideel, le champion du pays, et Elsie, la meilleure jument de Belgique, que suivent Sire de Tracy, Clipper et Denar.

Une de Mai signait là sa dixième victoire consécutive.

 

Toujours insatiable, elle repart pour l’Italie, descend jusqu’à Naples et s’aligne au départ du Grand Prix de la Flèche d’Europe ; c’est le 14 novembre 1971, et, contre toute attente, Une de Mai est battue par Keystone Spartan, habilement drivé par Jan Frömming, alors que Tidalium Pélo, longtemps contrarié par Smokey Morn, se classe troisième derrière sa grande rivale, elle-même fortement gênée par Murray Mir, Barbablù terminant cinquième.

Mais Une de Mai a soif de revanche et ne peut demeurer sur une défaite, c’est pourquoi elle se rend à Milan et participe au Grand Prix des Nations, dont elle est d’ailleurs la tenante du titre. Elle s’impose pour la deuxième fois consécutive, dans la réduction de 1’16’’8, devant Barbablù, Bertina, Keystone Spartan, Verdict… Une de Mai rejoint ainsi Tornese et Roquépine dans la légende en gagnant comme eux à deux reprises le Grand Prix des Nations, mais elle est la première à le remporter deux fois de suite.

Cette année encore elle conclut en tête du Grand Circuit International.

 

Le meeting d’hiver commence en beauté pour Tidalium Pélo, qui remporte le Prix de Bretagne, en 1’19’’, devant Véronique R, Vismie, Volnay II, Tony M, Bill D, bien que rendant 50 mètres à ses adversaires du premier poteau et 25 mètres à ceux du deuxième.

Une de Mai a choisi de faire sa rentrée dans le Prix du Bourbonnais, mais c’est Vismie qui s’impose devant Tony M, toujours aussi combatif. Une de Mai finit bien, à la troisième place, précédant Amyot, Arbella, Tivaty Pélo, Tidalium Pélo…

Le jeune Buffet II remporte le Prix Marcel Laurent devant Amyot, qui lui rendait 25 mètres. Viennent ensuite Bouffon, Amiral Williams, Allo Mannetôt…

Une de Mai réussit un exploit sans précédent : elle gagne le Prix de la Côte d’Azur, à Cagnes-sur-Mer, en temps record, et dans la même semaine le Prix de Bourgogne, en 1’16’’4, devant Vismie, Tidalium Pélo, Tony M, Amyot, Volnay II, Verdict…

Dans le Prix de la Côte d’Azur, sur la distance de 2 200 mètres, elle a trotté en 1’17’’ pour battre Véronique R, Villequier B, Urida II, Viacus, Stangaro, Belle Doris, tout en rendant 50 mètres à ses adversaires du premier poteau et 25 mètres à ceux du second.

C’est aussi la troisième fois consécutive qu’elle remporte le Prix de la Côte d’Azur, mais cette fois en temps record. En six tentatives, elle compte aussi six victoires sur cet hippodrome de Cagnes-sur-Mer, où elle est toujours invaincue, évidemment.

Déjà vainqueur du Prix Marcel Laurent, le jeune Buffet II remporte aussi le Prix de Croix, bien que rendant 25 mètres à Beau Rivage et Bill D, qui terminent aux places d’honneur.

Ce jeune champion s’annonce comme un vainqueur potentiel du prochain Prix d’Amérique.

Mais Tidalium Pélo et Une de Mai font peur à tout le monde, même à Buffet II, au départ du Prix d’Amérique, et ils ne sont finalement que neuf à tenter l’aventure dans cette grande épreuve, qui s’annonce comme un duel au sommet entre ces deux Titans, le dimanche 30 janvier 1972.

Keystone Spartan est le seul étranger à oser relever le défi. Parmi les autres candidats français, Tony M, Vismie et Amyot semblent condamnés à se battre pour la troisième place. Villequier B, Volnay II et Arbella, qui complètent le lot des neuf partants, n’ont a priori aucune chance.

Tous les admirateurs d’Une de Mai, de plus en plus nombreux, sont venus voir la reine s’imposer devant son éternel rival. Il n’y a que neuf partants, la course devrait être limpide et rien ne semble en mesure d’empêcher Une de Mai de remporter enfin son premier Prix d’Amérique. Cette fois, pour elle, tous les feux sont au vert. Ses récents exploits dans les Prix de la Côte d’Azur et de Bourgogne sont encore présents dans toutes les mémoires et plaident en sa faveur.

Tidalium Pélo reste cependant sur sa victoire spectaculaire sur le jeune prodige Bellino II dans le Prix de Cornulier, son deuxième. Il vise maintenant le doublé légendaire : Prix de Cornulier – Prix d’Amérique, que seuls Venutar et Masina ont réussi avant lui. Or, il semble lui aussi en mesure d’entrer dans la légende, d’autant qu’il se présente dans une forme éblouissante sous sa robe noire de jais. Il mérite bien son surnom de « diable noir », car il fait vraiment peur à tous ses adversaires, même à Une de Mai, qui n’a jamais eu de chance dans le Prix d’Amérique, il faut bien l’admettre.

On était pourtant loin d’imaginer que la malchance pour elle allait dépasser tout ce qu’il est possible d’imaginer en matière de scénario catastrophe.

Dans le dernier virage, Vismie et Une de Mai, sont en tête, enfin débarrassées de Keystone Spartan, qui cède complètement.

Vismie, qui représente une écurie légendaire, l’écurie Ballière, se sent pousser des ailes. Elle engage un Mano-a-Mano avec Une de Mai. La belle alezane du comte de Montesson a fière allure et se montre à la hauteur de sa réputation, jusqu’au moment où le partenaire de Vismie perd le contrôle de sa jument. Celle-ci commet une faute, et la roue gauche du sulky d’Une de Mai passe à l’intérieur de la roue droite de celui de Vismie. Chose impensable ! L’accrochage est inévitable. Tidalium Pélo en profite pour doubler les deux malchanceuses à un train d’enfer et prendre le large. Dès lors, plus personne ne peut l’empêcher de rallier victorieusement le poteau, tout en battant son propre record ! 1’17’’1 au lieu de 1’17’’5. L’incident dramatique qui prive Une de Mai de la victoire, une fois de plus, a faussé le résultat de la course, pour les places du moins. En effet, ce sont les extrêmes outsiders, Volnay II et Arbella, qui, très loin du vainqueur, terminent deuxième et troisième, devant le brave Tony M, la malheureuse Vismie, que suivent Amyot, Une de Mai, la grande malchanceuse, et Keystone Spartan. Villequier B, quant à lui, ne finit même pas la course.

Résultat : Tidalium Pélo a réussi son doublé légendaire, mais l’entourage d’Une de Mai et ses innombrables admirateurs n’ont plus que leurs yeux pour pleurer.

Il se passe alors un événement quelque peu inattendu, les médias, - Léon Zitrone en tête (c’est un inconditionnel d’Une de Mai), - s’exaltent à relater les malheurs de la célèbre jument, alors que l’exploit réalisé par Tidalium Pélo se retrouve en second plan.

Aujourd’hui encore, lorsque l’on cite : Gélinotte, Jamin, Ozo, Roquépine, Une de Mai, et aussi Bellino II, Idéal du Gazeau, Ourasi… tous les grands champions français, qui ont écrit la légende du trot, Tidalium Pélo lui est régulièrement et injustement oublié, car on ne lui a jamais pardonné d’avoir battu Une de Mai. 

 

Vismie 000-copie-3

Vismie ou le cauchemar d’Une de Mai !

 

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Tidalium Pélo profite des malheurs d’Une de Mai pour remporter son deuxième Prix d’Amérique et battre son propre record

 

 

 

Une de Mai, cette fois débarrassée de Tidalium Pélo, qui l’avait déjà battue deux fois dans cette épreuve, se console en enlevant pour la première fois le Prix de France, mais de peu, face à Tony M, qui réalise le même temps, 1’17’’2, alors que Volnay II se classe troisième devant Keystone Spartan, Villequier B et Vismie. Le record de la course est égalé.

Imitant Toscan, Tony M survole le Prix de Paris, pour s’imposer en 1’20’’2, très loin devant Bill D, Véronique R et Vismie, et termine lui aussi sa carrière en beauté.

En fin de meeting, Amyot réalise un exploit dans le classique Prix de Sélection, en battant le record des mâles sur la distance : 1’16’’3, sur 2 300 mètres.

 

Sur sa lancée, Une de Mai remporte pour la quatrième fois consécutive le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur à Cagnes-sur-Mer, en 1’15’’8, devant les italo-américains Dart Hanover et Keystone Spartan, puis son troisième Prix de l’Atlantique à Enghien, en 1’18’’5, devant Beau Rivage et Volnay II, mais seulement après la disqualification de Buffet II, arrivé premier, puis éliminé après enquête.

Buffet II prend cependant une éclatante revanche sur Une de Mai, qui doit se contenter de la deuxième place très loin du vainqueur, devant Dart Hanover dans le Championnat Européen (Prix René Ballière), à Vincennes.

 

Une de Mai tente ensuite de réitérer son succès de l’an dernier dans le Grand Prix des Pays-Bas à La Haye, sur l’hippodrome de Duindigt. Elle est sur le point de triompher, quand un brusque écart de Big Elma la prive de la victoire au profit du champion belge Fideel, alors qu’Azelino B se classe troisième. Il faut dire que Fideel a fait de gros progrès en 1972, où on le voit s’imposer tour à tour dans les Grands Prix de Mönchengladbach, de Recklinghausen, des Pays-Bas et de Kuurne.

 

Fideel-bat-Une-de-Mai.jpgFideel, le meilleur trotteur de Belgique, bat Une de Mai dans le Grand Prix des Pays-Bas à La Haye ; il gagnera aussi les Grands Prix de Mönchengladbach, de Recklinghausen et de Kuurne en cette même année 1972.

 

 

 

Etrangement, Une de Mai se voit éliminée à son tour du Championnat du Monde (Roosevelt International Trot), disputé à New York sur l’hippodrome de Roosevelt, et remporté par Speedy Crown, un fils de Speedy Scot, qui réalise ainsi le même exploit que son père, vainqueur de cette épreuve en 1964.

Il gagne aussi la revanche dans la Challenge Cup une semaine plus tard, cette fois aux dépens de la championne française, qui devance Fresh Yankee.

Mais Une de Mai se console en remportant pour la première fois le Trot des Nations, à Montréal, au Canada, en 1’14’’6, devant Claybrook Van, Hawaïan Mir et Fresh Yankee, sur le célèbre hippodrome de Blue Bonnet.

Par contre, elle est moins heureuse à Toronto, où elle perd le Maple Leaf Trot, de peu au profit de Flower Child dans la première manche, mais elle devance Speedy Crown ; alors que la finale se joue dans un mouchoir : Speedy Crown, Flower Child et Une de Mai finissant dans la même battue et la même réduction de 1’14’’8, pour se classer dans cet ordre.

Une de Mai tente alors sa chance à Yonkers, l’autre hippodrome new-yorkais, mais en vain, elle n’est que quatrième, puis troisième à deux reprises de Flower Child. Elle retourne à Roosevelt, mais est de nouveau troisième, cette fois derrière Savoir et Aiken.

Une de Mai s’obstine encore et se rend sur la côte Ouest, à Hollywood Park, où se court le Pacific Trot, mais elle est à nouveau battue, cette fois par le fameux Super Bowl, qui a trotté en 1’13’’, et trois autres chevaux. Elle-même a trotté en 1’13’’9 !

Une semaine plus tard, elle tente sa chance dans l’American Trotting Classic, alors la plus belle épreuve de Californie, comme l’avait fait Jamin, mais elle conclut au quatrième rang dans cette course que remporte Dayan en 1’14’’4.

Une de Mai a tout de même porté son total de gains à 7 702 434 F, à la fin de sa campagne américaine.


 

Après quinze mois d’absence, Vanina B fait sa rentrée dans le Prix de Bretagne, qu’elle remporte aux dépens de Véronique R et de Bill D. On peut alors penser qu’elle redeviendra la grande championne qu’elle a été à 5 et 6 ans.

A noter également, le retour de Tony M, qui contrairement à ce qui était prévu, a repris du service sur les pistes.

Tous deux sont au départ du Prix du Bourbonnais dans lequel Une de Mai, Tidalium Pélo et Amyot ont choisi de faire leur rentrée.

Véronique R crée la surprise en s’imposant, alors que la lutte est très vive pour la deuxième place entre Une de Mai, Buffet II, Bill D et Vanina B, qui se classent dans cet ordre. Une de Mai, qui rendait 25 mètres, a trotté en 1’18’’9.

Buffet II gagne de peu le Prix Marcel Laurent, devant Cotentin et Bill D, mais il s’impose avec autorité, en 1’18’’8, au début du mois de janvier 1973, dans le Prix de Bourgogne, malgré le rush de Tony M, venu conclure deuxième devant Une de Mai, Bill D, Vanina B, Amyot et Tidalium Pélo, victime d’un accident, qui finit au petit trot.

Blessé, le diable noir ne participera pas au prochain Prix d’Amérique, le dimanche 28 janvier 1973. Ce n’est donc pas lui qui empêchera Une de Mai de s’imposer cette fois.

Mais il y a au départ de ce Prix d’Amérique, un certain Dart Hanover, un ancien challenger de Nevele Pride, appartenant à une écurie suédoise, mais entraîné en Italie par un Suédois, Bernd Lindstedt, et qui n’est autre que le lauréat du Grand Circuit International 1972, succédant ainsi à Une de Mai.

C’est lui qui va s’imposer à la cote invraisemblable de 37/1, privant ainsi notre brave Tony M, battu d’un nez, d’une victoire qu’il tenait à sa merci.

La troisième place revient à Véronique R, qui confirme ses récents progrès, alors que la populaire Une de Mai cette fois termine quatrième sans excuse, devant Vanina B, Arménie, Blizzard et Amyot. Buffet II, l’un des grands favoris, termine non placé, comme Aigle Noir, Volnay II, Arbella et Lyon, alors que Bill D et Vismie ont été disqualifiés.

Tony M prend une revanche bien méritée dans le Prix de France, battant très nettement Une de Mai, alors que la troisième place est âprement disputée par Bill D, Amiral Williams et Lyon, qui se classent dans cet ordre. Cette fois Tony M a vraiment réussi ses adieux.

Mais Une de Mai à son tour se venge en enlevant pour la deuxième fois le Prix de Paris, en 1’20’’7, devant les inattendues Costa Rica II et Arménie, que suivait le convalescent Tidalium Pélo, dont c’était aussi la dernière course.

Vanina B, quant à elle, se console en enlevant le Prix de la Marne, mais on voit bien qu’elle n’est plus la championne que l’on a connue.

Ce meeting d’hiver 1973 semble marquer la fin d’une époque. 

 

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Dart Hanover gagne le Prix d’Amérique 1973, devant Tony M, battu de peu, puis Véronique R, Une de Mai, Vanina B, Arménie…

 


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Dart Hanover, trotteur américain devenu suédois d’adoption, mais résidant en Italie, lauréat du Grand Circuit International 1972 et du Prix d’Amérique 1973

 

 

Le dimanche 18 mars 1973, à Cagnes-sur-Mer, Une de Mai remporte pour la cinquième fois consécutive le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur, s’imposant en 1’15’’8, malgré Buffet II, Dart Hanover, Top Hanover, Lyon, Véronique R, qui se classent dans cet ordre. La célèbre championne du comte de Montesson a droit à une émouvante ovation sur cet hippodrome où elle n’a jamais connu la défaite en neuf tentatives.

 

Mais, à Enghien, dans le Prix de l’Atlantique, Buffet II prend une spectaculaire revanche sur Une de Mai, qui se classe deuxième à distance, devant Bill D, Cotentin, Arménie, Vismie…

 

Buffet II et Une de Mai se retrouvent à Vincennes, au mois de juin, pour le Prix René Ballière, rebaptisé ainsi en hommage au Président de la Société du Cheval Français récemment décédé. Cette fois encore, Buffet II s’impose avec audace et autorité, loin devant Une de Mai, Bellino II, Vismie, Angélica III, Véronique R, Borgia III…

Buffet II prouve une fois de plus qu’il est bien désormais le meilleur des trotteurs français à l’attelage. Mais on remarque parmi les vaincus, un certain Bellino II, le gagnant du Prix de Cornulier et le meilleur des trotteurs montés, en quête de devenir aussi bon au sulky.

 

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René Ballière, le président de la Société du Cheval Français, qui fit tant de bien pour promouvoir le trot en France et en Europe, est honoré aujourd’hui par la grande course internationale qui porte son nom.

 

 

 

 

Buffet II et Une de Mai sont de nouveau réunis pour disputer le Prix de Washington, à Enghien sur 1 600 mètres. Tout proche du record de Jamin, 1’14’’4, Buffet II fait afficher 1’14’’7, pour s’imposer de loin, mais sans forcer son talent. Boum de Sassy se classe deuxième à distance, devant Vernet, Paris Air, Une de Mai, Calino, Arménie…

Buffet II devait aussi remporter le Prix d’Europe, sommet du meeting estival d’Enghien, alors qu’Une de Mai s’octroyait tout de même le Prix de Buenos-Aires, en 1’19’’8, sur la longue distance de 4 000 mètres.

 

Une de Mai retourne à New York  à la fin du mois d’août pour tenter de reprendre son titre de championne du monde, ce qu’elle n’a pu faire en 1972 pour des raisons demeurées très obscures. Elle a 9 ans et ses forces sont usées, pourtant elle est la seule de nos champions trotteurs à oser défier les meilleurs compétiteurs du trot américain chez eux.

Il y a au départ de cette course : le fameux trotteur russe à robe noire Othello, restant sur 24 victoires consécutives, l’italien Carosio, le suédois Emter W, les néo-zélandais Hocquard et Beau Winter, les canadiens Elesnar et Hawaian Mir, et les deux premiers du récent Championnat Américain, Spartan Hanover et Delmonica Hanover.

Malgré tout son courage, Une de Mai doit se contenter d’une honorable troisième place à une longueur des deux trotteurs américains, eux-mêmes séparés d’un nez.

C’est toutefois Delmonica Hanover, dont on assure qu’elle sera au départ du prochain Prix d’Amérique, qui l’emporte sur son rival Spartan Hanover, prenant ainsi sa revanche dans ce Championnat du Monde : le Roosevelt International Trot 1973.

Mais Une de Mai veut laisser un souvenir impérissable aux Américains, et la semaine suivante, elle s’octroie la Challenge Gold Cup, en 1’16’’6, devant Spartan Hanover, Delmonica Hanover, Kilbuck Mary, Keystone Meg, Savoir et Carosio.

Certes, les Américains ne sont pas près d’oublier Une de Mai, comme on peut le constater en visitant le musée du Trot de Goshen, où elle est immortalisée.

 

Le dimanche 27 janvier 1974, à 10 ans, Une de Mai dispute son dernier Prix d’Amérique, dont elle se classe quatrième derrière Delmonica Hanover, Axius et Casdar.

Quinze jours plus tard, elle dispute sa dernière course dans le Prix de Paris 1974, finissant non placée.

Lorsqu’elle entre au haras des Coudraies, elle est le plus riche de tous les trotteurs du monde, avec 8 918 977 F, 74 victoires et 146 courses disputées !

 

On la « marie » tout d’abord avec le crack qu’elle a humilié, Nevele Pride, afin de produire le « phénomène trotteur du siècle », qui ne verra jamais le jour car la belle a avorté.

Elle est également vide de Beau Ludois L, à deux reprises, en 1976 et 1977.

Elle meurt le 31 mars 1978, après avoir donné naissance, le 4 février 1978, à une pouliche nommée May Flower. Elle laisse inconsolables les deux hommes pour lesquels elle a le plus compté : Jean-René Gougeon, son mentor, et Jean-Lou Peupion, son lad attitré, qui va devenir le grand entraîneur des champions : Lurabo, Major de Brion, Minou du Donjon, Nodesso, Ogorek, Peccadille, Pythagoras, Quarisso, Sébrazac… 

 

 

 

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Delmonica Hanover pendant le défilé du Prix d’Amérique, peu avant son exploit

 

 

Delmonica Hanover Gagne le Prix d'Amerique 1974 devant Axiu

Delmonica Hanover gagne le Prix d’Amérique 1974, devant Axius, Casdar, Une de Mai

Jean-René Gougeon et Une de Mai : un couple légendaire

Jean-René Gougeon et Une de Mai : un couple légendaire

La belle tête d’Upsalin

La belle tête d’Upsalin

Upsalin, un fils d’Ecusson, suppléa Roquépine, sa compagne d’écurie, à l’arrivée du Prix d’Amérique 1969, qu’il gagna en temps record, devant Une de Mai, Toscan, Eileen Eden, Sol Mio B, Tidalium Pélo… Il gagna aussi le Critérium des 4 ans, devant Une de Mai, le Prix du Président de la République, au trot monté, devant Uniflore D et Une de Mai, le Critérium Continental, devant Une de Mai, le Critérium des 5 ans, et se classa deuxième d’Une de Mai dans le Prix de Paris 1970, avant d’être vendu comme étalon en Italie. Il avait perdu toutes ses chances au départ du Prix d’Amérique 1970, suite à un accrochage avec Snow Speed.

Upsalin, un fils d’Ecusson, suppléa Roquépine, sa compagne d’écurie, à l’arrivée du Prix d’Amérique 1969, qu’il gagna en temps record, devant Une de Mai, Toscan, Eileen Eden, Sol Mio B, Tidalium Pélo… Il gagna aussi le Critérium des 4 ans, devant Une de Mai, le Prix du Président de la République, au trot monté, devant Uniflore D et Une de Mai, le Critérium Continental, devant Une de Mai, le Critérium des 5 ans, et se classa deuxième d’Une de Mai dans le Prix de Paris 1970, avant d’être vendu comme étalon en Italie. Il avait perdu toutes ses chances au départ du Prix d’Amérique 1970, suite à un accrochage avec Snow Speed.

Upsalin, un fils d’Ecusson, suppléa Roquépine, sa compagne d’écurie, à l’arrivée du Prix d’Amérique 1969, qu’il gagna en temps record, devant Une de Mai, Toscan, Eileen Eden, Sol Mio B, Tidalium Pélo… Il gagna aussi le Critérium des 4 ans, devant Une de Mai, le Prix du Président de la République, au trot monté, devant Uniflore D et Une de Mai, le Critérium Continental, devant Une de Mai, le Critérium des 5 ans, et se classa deuxième d’Une de Mai dans le Prix de Paris 1970, avant d’être vendu comme étalon en Italie. Il avait perdu toutes ses chances au départ du Prix d’Amérique 1970, suite à un accrochage avec Snow Speed.

Upsalin

 

Upsalin pour sa part a remporté 1 891 300 F, 22 victoires, et fut sept fois deuxième.

Il débute à Graignes, le 22 avril 1967, dans le Prix de Juvigny, dont il se classe deuxième sur 2 175 mètres. Il remporte sa première victoire à Lyon, le 7 octobre de la même année, dans le Prix du Boulonnais, en 1’25’’5, sur 2 000 mètres. Il gagne aussi à Marseille, le 15 octobre 1967, dans le Prix d’Arles, avant de s’imposer à Vincennes, le 22 novembre dans le Prix Ergoline, en 1’23’’7, sur 2 350 mètres. C’est bien sûr à Vincennes qu’il va conquérir ses titres de gloire, par de belles victoires dans les classiques et les internationaux, ainsi que dans les épreuves préparatoires, et ce dans les deux spécialités du trot (monté et attelé). Il s’agit d’un trotteur complet qui s’impose aussi sur toutes les distances.

 

A 3 ans, il gagne quatre épreuves, se classe une fois second. A 4 ans, il gagne le classique Critérium des 4 ans, en 1’21’’2, devant Une de Mai et Uti Rogas II, le classique Prix du Président de la République au monté, en 1’20’’8, devant Uniflore D et Une de Mai, le Prix Ceneri Forcinal au monté, le Critérium Continental, en 1’17’’8, devant Une de Mai et Uti Rogas II, le Prix Legoux-Longpré au monté, le Prix Octave Douesnel, en 1’19’’6, devant Uti Rogas II et Urielle, le Prix Ariste Hémard, en 1’18’’, devant Une de Mai et Uti Rogas II. Il s’est aussi classé troisième du classique Prix des Elites, au monté, derrière Uvien et Tabriz.

 

A 5 ans, il gagne le Prix de Croix, en 1’21’’9, devant Uti Rogas II et Uno. Puis il triomphe dans le Prix d’Amérique 1969, dans le temps record de 1’17’’6, devant Une de Mai, Toscan, Eileen Eden, Sol Mio B, Tidalium Pélo et Roquépine ! C’est le point culminant de sa carrière.

 

Mais il gagne encore le Prix Roederer, en 1’19’’3, devant Uno et Ut Majeur II, avant d’être battu par Une de Mai et Urielle dans le Prix Ovide Moulinet. Il partage avec le populaire Tony M la troisième place du Championnat Européen, que remporte le grand Tidalium Pélo devant le fameux Tabriz.

 

A Enghien, il gagne le Prix de Buenos-Aires, en 1’20’’3, sur la longue distance de 4 075 mètres. Puis c’est l’autre sommet de sa carrière avec le classique Critérium des 5 ans, qu’il remporte en 1’19’’9, devant Uno et Urielle. Il se classe troisième derrière Ulric et Uniflore D, dans le classique Prix de Normandie au monté, et deuxième d’Ulric, toujours au monté, dans le classique Prix des Elites. Il gagne à Marseille le Grand Prix de Trot du Sud - Est.

 

Pour faire concurrence à Une de Mai, sa grande rivale, qui s’est illustrée à Roosevelt Raceway en battant Nevele Pride, il tente aussi sa chance de l’autre côté de l’Atlantique, aux Etats-Unis, mais sur l’hippodrome new-yorkais de Yonkers, d’abord dans le Gotham Trot 1969, que remporte Fresh Yankee, devant Dart Hanover et Earl Laird ; puis, la semaine suivante, dans l’United Nations Trot, que Roquépine, sa compagne d’écurie, a déjà gagné en 1966, dont il se classe troisième derrière Snow Speed et Fresh Yankee.

 

Il revient à Vincennes et s’impose en 1’21’’3 dans le Prix Doynel de Saint-Quentin, devant Ubanita, Urvick, Urielle… Il se classe deuxième de Toscan dans le Prix de Bretagne, mais gagne le Prix du Bourbonnais, en 1’20’’1, devant Toscan et Tabriz, puis le Prix Marcel Laurent, en 1’18’’1, devant le jeune Alexis III, auquel il rend 50 mètres !

 

Il débute l’année 1970, celle de ses 6 ans, par une victoire dans le Prix de Bourgogne, en 1’18’’7, devant Toscan et Tony M, et part favori, à égalité avec Toscan et Une de Mai, dans le Prix d’Amérique, quand il est éliminé au départ à cause d’un accrochage avec Snow Speed. Quinze jours plus tard, il se classe deuxième du Prix de Paris, que remporte Une de Mai.

 

Riche de 1 891 300 F, il abandonne la compétition pour une carrière d’étalon en Italie, son nouveau pays ; Henri Levesque l’ayant vendu aux Italiens, comme il avait fait quelques années auparavant pour Icare IV, au grand regret de Louis Sauvé, son partenaire des jours glorieux ou malheureux.

Upsalin remporte le Prix d'Amérique 1969, devant Une de Mai et Toscan

Upsalin remporte le Prix d'Amérique 1969, devant Une de Mai et Toscan

Vanina B à Vincennes

Vanina B à Vincennes

Vanina B et Jean Riaud

Vanina B et Jean Riaud

Vanina B, comme son fils Jorky et sa mère La Coulonces, défend les couleurs de Bernard Billard

Vanina B, comme son fils Jorky et sa mère La Coulonces, défend les couleurs de Bernard Billard

Vanina B

Vanina B, la mère de Jorky, était une championne digne des reines de Vincennes, avant d’être arrêtée en pleine gloire suite à une blessure.

Comme son fils Jorky, Vanina B porte les couleurs de M. Bernard Billard, qui la fit naître de l’union de Carioca II, grand étalon, et La Coulonces, une championne en son temps.

Elle est très ménagée à ses débuts, mais éclate véritablement en 1970, année de ses 5 ans ; gagnant tout d’abord coup sur coup les Prix Miss Pierce, de Saramon, d’Angoulême, de Rouen, elle s’est fait un nom à la fin de 1969, réalisant une première série victorieuse.

 

Montant de catégorie en début d’année, elle s’attaque pour la première fois à l’élite de sa génération dans le Prix Jean Le Gonidec, se classant troisième derrière Version F et Verdict.

Mais elle renoue avec la victoire dès sa sortie suivante, en remportant le Prix Roederer, devant les meilleurs de son année : Version F, Vigneron, Volnay II…

Vanina B est encore à l’honneur dans le Prix Ovide Moulinet (2 250 m), battant Vichnou, Vouloir, Villequier B, Verdict…

Poursuivant sa série, elle triomphe en nocturne dans le Prix de la Société Sportive d’Encouragement (2 150 m), battant Tivaty Pélo, Tyrannie II, Urvick, Vaisonnais D…

Elle récidive quelques jours plus tard dans le Prix de la Société des Steeple-Chases de France (2 750 m), trottant 1’18’’5, toujours en nocturne, pour battre Tendresse II, Urvick, Uno…

Sa supériorité est éclatante dans l’important Prix Jockey (2 350 m), qu’elle remporte à distance de Vigneron, Version F, Véronique R, Vinci II, abaissant son record à 1’18’’4.

Le Prix Jockey est toujours suivi du fameux Critérium des 5 ans, épreuve qui couronne le meilleur trotteur de cet âge. C’est pour Vanina B une fois de plus l’occasion de prouver sa supériorité sur ses contemporains. Trottant les 3 000 mètres de la grande classique sur le pied de 1’19’’4, elle s’octroie le record de l’épreuve et bat dans l’ordre Vinci II, Vat (l’ancien chef de file de la génération), Vigneron, Véronique R, Vagabond VII, Vismie, Va Belle du Clos, Verdict, Version F, Vouloir, autrement dit tous les meilleurs 5 ans du moment.

Sept jours plus tard, sa domination est écrasante dans le classique Prix de l’Etoile ; abaissant son record à 1’17’’1, Vanina B bat de dix longueurs Véronique R (1’17’’6), que suivent Ballon Rouge (avantagé de 50 mètres), Vouloir, puis Vinci II…

Vanina B signe ainsi sa septième victoire consécutive. Mais elle doit encore accomplir un exploit pour clôturer l’année 1970 en beauté. D’abord elle s’aligne au départ du Prix Doynel de Saint-Quentin (2 700 m). Bien que devant rendre 25 mètres à tous ses rivaux, à l’exception de Vat pénalisé de 50 mètres, elle triomphe avec désinvolture de ses treize adversaires, battant de plusieurs longueurs, en 1’18’’1, Vinci II, Vismie, Vigneron, Véronique R, Version F, alors que Vat, en sérieuse baisse de forme, est arrêté.

 

C’est à sa sortie suivante que Vanina B entre dans l’histoire.

A l’occasion du Prix Marcel Laurent (2 300 m), la championne de Monsieur Bernard Billard a 50 mètres à rendre aux meilleurs 3 ans et 25 à tous ses autres adversaires.

Cela ne suffit pas pour inquiéter la merveilleuse jument, qui plus forte que jamais bat avec désinvolture Vinci II, Bill D, Version F, Vouloir… Dans son envolée, la fille de Carioca II réalise une performance mémorable, abaissant le record de la piste de Vincennes à 1’16’’3.

Or, l’ancien record de 1’16’’9 était l’apanage de la grande Une de Mai.

Vanina B devient donc le trotteur le plus rapide de Vincennes et s’octroie par la même occasion le record général des 5 ans toutes catégories et celui des femelles.

 

Mais la championne de M. Bernard Billard ne va pas en rester là, elle va commencer l’année 1971 aussi bien qu’elle a terminé l’année 1970.

Le Prix de Bourgogne (2 250 m), disputé le 17 janvier 1971, est alors le dernier test avant le Prix d’Amérique dans lequel Vanina B s’annonce déjà comme l’un des chevaux les plus en vue. Bénéficiant d’une avance de 25 mètres, la championne de M. Bernard Billard ne peut laisser échapper cette occasion rêvée pour remporter sa dixième victoire consécutive malgré Une de Mai, Tony M, Tidalium Pélo et Toscan, en un mot toute l’élite de Vincennes, qui doit désormais compter avec une nouvelle vedette.

Vanina B est invaincue depuis le 4 février 1970.

 

Arrive alors le jour de l’apothéose, c’est-à-dire le dimanche 31 janvier 1971, jour du 47e Prix d’Amérique, dans lequel le célèbre Tidalium Pélo se montre irréprochable pour mettre un terme à la fantastique série victorieuse de la nouvelle reine de Vincennes.

Trottant sur le pied de 1’17’’5, Tidalium Pélo bat d’un dixième de seconde l’ancien record établi deux ans plus tôt par Upsalin, tandis que la vaillante Vanina B prend la deuxième place devant Une de Mai, Tony M, Eileen Eden, Toscan, Ura, Arménie, prouvant une fois de plus qu’elle a bien sa place parmi l’élite du trotting européen.

Elle ne va pas rester longtemps sur une défaite, puisque sept jours plus tard elle triomphe en temps record (1’17’’6) dans le Prix de France (2 250 m), prenant ainsi sa revanche sur Tidalium Pélo et battant de nouveau Tony M, Toscan, Eileen Eden et Une de Mai.

Elle conclut le meeting d’hiver sur un nouvel exploit en s’adjugeant le dernier classique de la saison à Vincennes, le Prix de Sélection (2 300 m), bien que rendant 50 mètres à son cadet Bill D. Trottant le kilomètre en 1’18’’6, la fameuse jument de M. Bernard Billard dispose aisément de Bill D, que suivent à distance Villequier B, Amiral Williams et Agrippa.

 

Puis c’est son empoignade mémorable avec Une de Mai dans le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m). Vanina B oppose à sa rivale la plus opiniâtre des résistances et n’est en final battue que d’une courte encolure.

Une de Mai a réalisé un temps de 1’17’’3 et Vanina B 1’17’’4. Il n’y a donc pas grand-chose entre les deux championnes, mais ce que beaucoup ignorent c’est que la course s’achève en drame pour Vanina B : une déchirure ligamentaire à la cuisse l’oblige à se tenir écartée de la piste durant un an.

Ayant subi des soins intensifs, elle revient à la compétition pour gagner le Prix de Bretagne. Mais ce n’est plus la même jument. Après une dernière victoire dans le Prix de la Marne, elle est arrêtée définitivement et entre au haras à l’âge de huit ans. Là elle s’offre une autre gloire en donnant le jour à Jorky, engendré avec le concours de Kerjacques, notre plus grand sire. On ne le présente plus, il suffit de rappeler qu’il est le père de Toscan, Une de Mai, Eléazar et Jorky justement, sans oublier Ua Uka, la mère de Fakir du Vivier et d’Hadol du Vivier. Or, la naissance de Jorky, c’est aussi une victoire, une victoire contre les lois de la nature et de la génétique, car il y avait une incompatibilité sanguine entre Kerjacques et Vanina B ! C’est pourquoi tous les autres poulains issus de cette union sont morts nés : Jorky est un cas unique, pas seulement par le talent… 

Vaccarès II

Vaccarès II

Vat

Vat

Vismie

Vismie

Axius, un fils de Le Postillon, appartenent à M. Henri Desmontil, drivé par Gérard Mascle, fut battu d’un souffle par la jument américaine Delmonica Hanover dans le Prix d’Amérique 1974, et fut encore deuxième du Prix d’Amérique 1975, cette fois derrière Bellino II. Mais il gagna le Prix de France en 1974 et en 1975. Il prit sa revanche sur Bellino II dans le Prix des Ducs de Normandie 1975 à Caen et gagna aussi le Grand Prix d’Hiver de Sterrebeek en Belgique, en 1972.

Axius, un fils de Le Postillon, appartenent à M. Henri Desmontil, drivé par Gérard Mascle, fut battu d’un souffle par la jument américaine Delmonica Hanover dans le Prix d’Amérique 1974, et fut encore deuxième du Prix d’Amérique 1975, cette fois derrière Bellino II. Mais il gagna le Prix de France en 1974 et en 1975. Il prit sa revanche sur Bellino II dans le Prix des Ducs de Normandie 1975 à Caen et gagna aussi le Grand Prix d’Hiver de Sterrebeek en Belgique, en 1972.

Axius

Deux fois deuxième du Prix d’Amérique (battu d’un nez par Delmonica Hanover en 1974, puis par Bellino II en 1975), deux fois vainqueur du Prix de France, Axius se révéla sur le tard comme un authentique champion, notamment à Caen, où il se classa deuxième de Casdar dans la première édition du Prix des Ducs de Normandie, en 1974, avant de remporter l’édition 1975, devant Bellino II. Il gagna aussi les Prix du Bourbonnais 1973, de Bourgogne 1974, qui faisaient de lui le favori logique du Prix d’Amérique 1974. Il s’illustra également en Belgique, en gagnant le Grand Prix d’Hiver de Sterrebeek, en 1972.

Amyot s’est distingué en gagnant le Critérium Continental, le Critérium des 5 ans, le Prix de l’Etoile, le Prix de Sélection, le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur, en France, et aussi à l’étranger par ses victoires dans le Grand Prix Continental de Bologne, le Grand Prix de la Loterie Nationale de Naples, le Grand Prix de Bavière de Munich, et en se classant deuxième de Timothy T dans l’Elitloppet 1974.

Amyot s’est distingué en gagnant le Critérium Continental, le Critérium des 5 ans, le Prix de l’Etoile, le Prix de Sélection, le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur, en France, et aussi à l’étranger par ses victoires dans le Grand Prix Continental de Bologne, le Grand Prix de la Loterie Nationale de Naples, le Grand Prix de Bavière de Munich, et en se classant deuxième de Timothy T dans l’Elitloppet 1974.

Amyot

Avant Axius, c’était plutôt Amyot, que l’on considérait comme le champion de cette génération, celle des « A ». Il avait remporté : le Critérium Continental 1970, devant Stangaro et Armoricain, le Prix Jockey en 1971, le Critérium des 5 ans, en 1971, devant Aramis IX et Arménie, le Prix de l’Etoile 1971, devant Arménie et Bill D, le Prix de Sélection 1972, devant Cotentin et Champenoise, le Grand Critérium de Vitesse 1974, devant Buffet II et Casdar…

Il s’était également illustré à l’étranger, notamment à Bologne, en gagnant le Grand Prix Continental réservé aux 4 ans, devant Amiral Williams et Stangaro, puis à Naples, en remportant la finale du Grand Prix de la Loterie Nationale 1972, devant Keystone Spartan et Barbablù, également à Munich en s’imposant dans le Grand Prix de Bavière 1974, devant Timothy T, et aussi à Stockholm, en se classant deuxième de Timothy T dans la finale de l’Elitloppet 1974. Mais Axius, Amyot, et même Buffet II, Bill D seront tous éclipsés par l’incomparable Bellino II !

Buffet II, avec Bill D et Bellino II, un des trois champions de la génération, lauréat du Grand Circuit International Européen 1973. Buffet II est le père d'Ultra Ducal

Buffet II, avec Bill D et Bellino II, un des trois champions de la génération, lauréat du Grand Circuit International Européen 1973. Buffet II est le père d'Ultra Ducal

Bill D, déjà vainqueur du Critérium des 3 ans, gagna aussi le Critérium des 5 ans devant Buffet II et Bellino II

Bill D, déjà vainqueur du Critérium des 3 ans, gagna aussi le Critérium des 5 ans devant Buffet II et Bellino II

Cette Histoire, une fille de Kerjacques, montée par le jeune Alain Laurent, battit Bellino II dans le Prix de Cornulier 1974

Cette Histoire, une fille de Kerjacques, montée par le jeune Alain Laurent, battit Bellino II dans le Prix de Cornulier 1974

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6 mars 2013 3 06 /03 /mars /2013 19:06

 

 

Les champions trotteurs de légende en France

 

04 - Les années 1970

 

 

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Tabriz et Pierre Giffard

 

 

 

Parce que la génération des « S » fut si pauvre, celle des « T » s’avéra exceptionnelle, avec quatre authentiques champions, quatre cracks ; « les quatre as » : Tabriz, Tidalium Pélo, Tony M et Toscan, sans parler d’un cinquième, Tiki R, qui les valait bien, mais fut malheureusement blessé à quatre ans, et vit sa carrière de courses définitivement interrompue. Une course suffit à les situer, le Prix d’Amérique 1970, dans lequel ils prirent les quatre premières places !

 

 

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Tabriz monté par Pierre Giffard

 

 

 

Tabriz

 

Tabriz est le meilleur cheval qu’ait produit le célèbre haras des Rouges Terres depuis Jamin. Poulain précoce, il s’avéra bon dans les deux spécialités du trot (monté et attelé), mais comme il était barré par Toscan à l’attelage, on l’orienta vers le monté où il y avait une place à prendre. Il devint aussitôt le meilleur de sa génération dans cette spécialité, remportant tous les classiques du genre : Prix de Vincennes, Prix du Président de la République, Prix de Normandie, Prix des Centaures, pour finir en apothéose avec l’épreuve reine, le Prix de Cornulier, qu’il gagna deux fois consécutivement. (Tidalium Pélo et Sole Mio B l’avaient cependant précédé dans le Prix des Elites, en 1967, ainsi qu’Uvien en 1968). Mais il gagna le Prix de l’Ile de France. Il devait terminer sa carrière par une victoire à l’attelage dans le Grand Prix d’Hiver de Sterrebeek, la plus belle course du calendrier belge.

Lorsqu’il rentra au haras avec 2 330 240 F de gains, il était le plus riche des étalons stationnés en France, détrônant ainsi le célèbre Oscar RL.

On peut rappeler qu’il fut aussi troisième et quatrième dans le Prix d’Amérique, qu’il occupa des places d’honneur dans le Prix de Paris (troisième), le Prix de Sélection (troisième), le Critérium des 3 ans (deuxième), le Prix René Ballière (deuxième), le Prix de l’Etoile (troisième), le Prix du Bourbonnais (deux fois troisième)…

 

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Tabriz et Jean Riaud

 

 

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Tiki R en pleine action

 

 

Tiki R

 

Tiki R avait mis fin à l’invincibilité de Toscan en remportant un Critérium Continental demeuré dans les mémoires : c’était en 1967 ; il s’imposait devant Toscan et Tony M, alors les deux meilleurs à l’attelage. (Toscan s’était fait mal en voulant lui résister). Tiki R s’était déjà fait remarquer en prenant une troisième place derrière Tabriz et Tidalium Pélo, au monté, dans le classique Prix du Président de la République.

Il devait aussi gagner le Prix de l’Etoile 1967, devant Unadeux et Toscan. Il était déjà troisième de Toscan dans le Prix Jules Thibault, avant de gagner le Prix Guy Le Gonidec, devant Thétis IV et Thalie IV, mais se classait troisième de Tony M, derrière Thétis IV dans le Prix Octave Douesnel.

Il fut également deuxième de Tony M, devant Seigneur, dans le Prix Marcel Laurent 1967.

Accidenté en pleine gloire, il laissait le souvenir d’un trotteur particulièrement combatif.

 

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Tony M et Léopold Verroken

 

 

 

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Tony M au haras

 

 

 

Tony M

 

Tony M fut le premier chef-d’œuvre « concocté » par Léopold Verroken, ce grand professionnel originaire du nord de la France, mais aussi de Belgique par ses ancêtres, qui tenait un bar P.M.U. à Arras, et fut à la fois le rival et l’ami de Jean-René Gougeon. Avec de grands champions comme Tony M, Eléazar et Jorky, il nous offrit de superbes duels contre les cracks de légende que furent tour à tour Toscan, Une de Mai, Tidalium Pélo, Bellino II, Hadol du Vivier, Idéal du Gazeau, Ianthin, Iris de Vandel… Il fut aussi le brillant entraîneur de Vourasie, la sœur d’Ourasi, que menait en courses Bernard Oger, l’ancien lad d’Eléazar et de Jorky, et le bras droit de Léopold Verroken.

Tony M lui n’eut pas vraiment de chance, puisqu’il était né la même année que Toscan et Tidalium Pélo, un an seulement avant Une de Mai et Upsalin, et deux ans avant Vanina B. A cette époque, on le voit, les champions ne manquaient pas. Comme Oscar RL avant lui, il cumula les places d’honneur, notamment dans le Prix d’Amérique (2e en 1968, 1970 et 1973, 4e en 1971 et 1972). Deuxième du Prix de France en 1971 et 1972, il put cependant le remporter en 1973, année où il battait Une de Mai et Bill D. Deuxième et troisième du Prix de Paris en 1969 et 1971, il le gagna enfin en 1972. La persévérance finit toujours par payer.

Il gagna aussi le Prix René Ballière 1971, devant Some Fire et Eileen Eden, le Prix d’Eté la même année, et le Prix de l’Atlantique 1970, devant Une de Mai, qui l’avait battu à Cagnes, dans le Grand Critérium de Vitesse. Il gagna aussi le Prix des Meilleurs, à Munich, devant Eileen Eden, une course qui réussissait bien à Léopold Verroken, puisqu’il devait la gagner avec Arménie en 1973, Eléazar en 1976, et Jorky en 1980, 1981 et 1982.

Tony M fut aussi deuxième de la championne Fresh Yankee, à Solvalla, dans la finale de l’Elitloppet, troisième d’Une de Mai à Milan, dans le Grand Prix de la Foire 1970, deuxième d’Agaunar, à Rome, dans le Grand Prix du Lido di Roma.

Déjà dans sa jeunesse, il avait été le dauphin de Toscan dans les Prix Phaëton et de Tonnac-Villeneuve, le Critérium des 4 ans, et il se classait troisième derrière Tiki R et Toscan dans ce fameux Critérium Continental déjà évoqué. Il devait aussi gagner le Prix Octave Douesnel 1967, devant Thétis IV et Tiki R, le Prix de Croix 1968, devant la même Thétis IV. Il gagna le Prix Jockey, s’intercala entre Ténébreuse D et Toscan dans le Critérium des 5 ans, avant de remporter le Prix de Bretagne, devant Quérido II, en fin d’année 1968.

 

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Tony M et Richard Krüger

 

 

 

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Tidalium Pélo, par Jidalium et Hase Williams, aussi bon au trot monté qu’au trot attelé, remporta deux fois le Prix de Cornulier et deux fois le Prix d’Amérique, mais il gagna aussi en Suède, en Allemagne, en Italie, et fut battu de peu aux Etats-Unis.

 

 

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Tidalium Pélo et Jean Mary

 

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Tidalium Pélo remporte le Prix d’Amérique 1971, en temps record, devant Vanina B, Une de Mai et Tony M

 

       

 

Tidalium Pélo

 

Tidalium Pélo, surnommé le « diable noir », fut un trotteur hors du commun, d’autant qu’il était sans cesse confronté à d’authentiques champions comme ses camarades de promotion Tabriz, Tony M, Toscan ou ses cadets Une de Mai, Upsalin, Vanina B, sans oublier les étrangers Dart Hanover, Eileen Eden, Fresh Yankee, Simmerl… Ce qui ne l’empêcha pas de remporter 35 victoires, et 4 111 557 F de gains en courses.

Barré dans ses jeunes années par Tabriz au monté, Toscan, Tony M ou Tiki R à l’attelé, il se révéla assez tard au plus haut niveau, pour finalement s’avérer aussi bon dans les deux spécialités comme le prouve son étonnant palmarès : le Prix d’Amérique (2 fois), le Prix de Cornulier (2 fois), le Prix de France (2 fois), le Prix des Centaures (2 fois), l’Elitloppet de Solvalla, le Grand Prix de Bavière et le Prix des Meilleurs à Munich, le Grand Prix d’Allemagne à Hambourg, le Prix de la Côte d’Azur à Turin comptent parmi ses victoires.

Trotteur étonnamment complet, il pouvait briller aussi bien sur piste plate dans des courses de vitesse pure (Elitloppet) que dans des courses de trot monté sur longue distance.

Dans le Championnat du Monde (Roosevelt International Trot), à New York, il ne fut battu que d’un nez par la jument canadienne Fresh Yankee.

Mais Tidalium Pélo était aussi un champion doué d’une résistance à toute épreuve ; ainsi s’il mourut à l’âge très avancé pour un cheval de 30 ans (soit près de 100 ans pour un homme), c’est qu’il fut le seul rescapé d’un tragique incident survenu en Italie.

Le train qui le ramenait de Naples, après un interminable voyage, se trouva bloqué dans les Alpes. Privés de chauffage, d’eau et de nourriture, les chevaux étaient condamnés à mourir, comme ce fut le cas pour Roc Wilkes, compagnon de voyage de Tidalium Pélo. Mais « Tidalium » lui résista au froid, à la fatigue, à la faim et la soif pour se rétablir si bien, qu’il remporta peu après le Championnat Européen (Prix René Ballière), devant Tabriz, Tony M, Upsalin, Une de Mai et Toscan ! Excusez du peu.

 

On pouvait penser que les femelles étaient plus fortes que les mâles, chez les trotteurs du moins, à force d’entendre parler des exploits de Masina, Ozo, Roquépine, quand se révéla enfin, un peu après Toscan, le « géant » Tidalium Pélo (1,73 m au garrot). Comme il était noir et qu’il faisait peur à tous ses adversaires, on l’avait surnommé « le diable noir ».

 

Comme Venutar en 1949 et Masina en 1961, il devait lui aussi réussir le doublé légendaire : Prix de CornulierPrix d’Amérique, en 1972.

Tidalium Pélo serait d’ailleurs resté dans toutes les mémoires comme le plus prestigieux des trotteurs mâles depuis Jamin, si un autre étalon, Bellino II, n’avait fait mieux depuis.

Dès sa naissance, une nuit de printemps 1963, Tidalium Pélo étonna son propriétaire, Monsieur Roger Lemarié, par sa haute silhouette dégingandée, la longueur étonnante de ses jambes, et sa force physique ; il était déjà debout, prêt à courir, un quart d’heure après avoir vu le jour. « S’il ne lui arrive rien, celui-là fera parler de lui », s’était dit, pas tout à fait dans ces termes, l’homme au coup d’œil exercé. Il lui faut un partenaire pour le mener en courses, ce choix se porte sur Jean Mary, qui s’était déjà distingué à maintes reprises comme jockey, notamment avec un certain Gardon, un cheval difficile. Jean Mary et « Tidalium » formeront un tandem légendaire à Vincennes, aussi bien au trot monté qu’à l’attelage.

Mais Tidalium Pélo est un « tardif », Claude Giffard le sait et lui préfère Tabriz dans le Prix du Président de la République. C’est alors qu’on le confie à Jean Mary, en juin 1967. Celui-ci le teste et le trouve encore un peu tendre. Il ne se trompe pas, comme tous les grands chevaux, Tidalium Pélo n’est pas précoce : il manque encore de force et se fait battre par Tabriz, que monte Claude Giffard, mais devance le bon Tiki R. Cette performance est déjà prometteuse. Mais ce diable de cheval a aussi révélé son point faible : ses jambes fragiles, qui l’obligeront à courir avec des bandages blancs. Lui qui est noir, et déjà si grand, il devient facile à repérer dans un peloton. En raison de ses problèmes de jambes, Tidalium Pélo sera ménagé et courra assez peu, mais souvent à bon escient.

En 1967, durant l’été, il s’impose déjà au monté, dans le classique Prix des Elites, devant Sole Mio B et Tabriz, cette fois bien battu.

En 1968, il gagne un autre classique, le Prix des Centaures, devant Unifrance et Tessa II. En 1969, il gagne le Prix de France, en 1’17’’8, devant Une de Mai et Roquépine. Il gagne son deuxième Prix des Centaures, devant Ura et Tabriz.

Une de Mai prend sa revanche à Cagnes-sur-Mer, remportant le premier de ses cinq Grand Critérium de Vitesse, devant Eileen Eden, alors que Tidalium Pélo se classe troisième.

Il effectue un premier voyage victorieux à Turin, où il enlève le Prix de la Côte d’Azur.

Il s’en va à Naples disputer le Grand Prix de la Loterie, dans lequel il se classe deuxième d’Une de Mai, mais devant Eileen Eden, dans la finale.

C’est en revenant de Naples que Tidalium Pélo survit au drame qui coûte la vie à un autre trotteur, Roc Wilkes, son compagnon de voyage. Le train s’est retrouvé bloqué dans les Alpes, sans chauffage, ni eau ni nourriture, et les chevaux luttent contre la mort.

Mais Tidalium Pélo est une force de la nature ; il résiste à toutes ces épreuves et revient à Vincennes pour gagner le Prix René Ballière devant Tabriz, Tony M, Upsalin, Une de Mai et Toscan. Il se rend en Allemagne, à Munich, pour triompher dans le Prix des Meilleurs, devant deux autres trotteurs français, Upsalin et Thétis IV.

En 1970, il remporte son premier Prix de Cornulier, devant Ulric et Tabriz, puis se classe troisième du Prix d’Amérique, derrière Toscan et Tony M, mais devant Tabriz, Urielle, la grande Une de Mai… Il gagne son second Prix de France, en 1’18’’2, devant Une de Mai et Snow Speed, un ancien challenger du fameux Nevele Pride, qui a coûté la victoire à Upsalin au départ du Prix d’Amérique. Il part ensuite pour une saison de monte chez Roger Lemarié, car il faut respecter ses jambes fragiles.

Mais, durant l’été, il doit se rendre aux Etats-Unis avec Une de Mai pour le Championnat du Monde (le Roosevelt Trot International). Une de Mai a un titre à défendre, mais c’est Tidalium Pélo, qui manque de s’imposer. Il est battu d’un nez à la photo par la célèbre jument canadienne Fresh Yankee, qui gagnera aussi la revanche. Une de Mai, la tenante du titre, cette fois n’est que quatrième derrière le champion de Nouvelle-Zélande, Stylish Major. Tidalium Pélo gagnera aussi le Grand Prix d’Allemagne, à Hambourg, devant Eileen Eden et Simmerl.

C’est durant l’année 1971 que Tidalium Pélo se montre le plus brillant.

Après sa défaite due à une blessure, face à Uniflore D, dans le Prix de Cornulier, il remporte son premier Prix d’Amérique dans le temps record de 1’17’’5, devant Vanina B, Une de Mai, Tony M, Eileen Eden, Toscan, Ura, Arménie…

Il accomplit un exploit en se classant deuxième de Toscan, tout en lui rendant 50 mètres dans le Prix de Paris.

Il triomphe alors en Allemagne, à Munich, dans le Grand Prix de Bavière, qu’il gagne aux dépens d’Une de Mai et de Dart Hanover.

Puis en Suède, à Stockholm, il remporte la finale du célèbre Elitloppet, en 1’14’’7, toujours devant Dart Hanover et Une de Mai.

Mais il est battu par Une de Mai dans le Prix de l’Atlantique 1971, à Enghien, dont il est bon deuxième devant Verdict, puis dans le Prix René Ballière de la même année, à Vincennes, où il se classe encore deuxième devant Véronique R.

 

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Tidalium Pélo remporte la finale de l’Elitloppet 1971 à Solvalla

 

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Tidalium Pélo remporte le Prix d’Amérique 1972 et bat son propre record

 

 

C’est en 1972 qu’il réussit le doublé légendaire Prix de CornulierPrix d’Amérique, comme seuls Venutar et Masina avant lui. Il s’est permis de trotter en 1’20’’1 dans le « Cornulier » pour battre un certain Bellino II, alors un jeunot, mais qui fera bientôt parler de lui au plus haut niveau. Dans le Prix d’Amérique, il a battu, en 1’17’’1, son propre record.

Sa victoire a toutefois été facilitée par l’accrochage entre Une de Mai et Vismie, ce qui fera couler beaucoup d’encre et parler beaucoup de mauvaises langues, avides de dénigrer la performance du champion, tout en faisant passer au premier plan les malheurs d’Une de Mai.

Tidalium Pélo, riche de 4 111 557 F lorsqu’il rentre au haras, a cependant laissé dans les mémoires le souvenir d’un grand champion et d’un trotteur étonnamment complet, aussi bon au monté qu’à l’attelage, dans les courses de vitesse pure, comme sur les longues distances.

Son dernier exploit sera sa longévité ; il est mort à plus de 30 ans, l’équivalent d’au moins cent ans pour un homme !

 

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Tidalium Pélo, bientôt centenaire !

 

 

 

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Toscan, par Kerjacques et Toscane B, le premier des « Kerjacques » à faire parler de lui au plus haut niveau, vainqueur de trois Critériums, du Prix d’Amérique et de deux Prix de Paris

 

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Toscan mené ici par Jean-René Gougeon, son entraîneur

 

 

 

 

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Toscan, mené par Michel Gougeon, gagne le Prix d’Amérique 1970 devant Tony M

 

 

Toscan

 

 

L’histoire de Toscan est indissociable de celle d’Une de Mai ; tous les deux ont le même père : Kerjacques ; et, sans le savoir, ils vont commencer à bâtir sa légende.

Ils on été découverts tous deux par Pierre-Désiré Allaire, un grand spécialiste des chevaux et surtout des trotteurs, qui veut s’en rendre acquéreur mais seulement en partie. Pour cela, il incite le comte Pierre de Montesson à venir voir ses deux protégés ; il vente les mérites de leur père Kerjacques, qu’il considère comme un étalon d’avenir. On sait aujourd’hui combien il a vu juste, Kerjacques et sa descendance vont bouleverser le monde du trotting.

Le comte de Montesson est aussi malin que son habile conseiller ; il flaire la bonne affaire, devient propriétaire majoritaire de Toscan et de sa sœur Une de Mai ; et les confie tous deux à Jean-René Gougeon, qui sera leur entraîneur. En courses, Jean-René, l’aîné des frères Gougeon, pilotera la pouliche, tandis que son cadet, Michel Gougeon, dit « Minou », drivera le mâle. C’est un accord tacite.

Toscan se montre précoce et surdoué, ainsi il remporte le premier classique ouvert à sa génération, le Critérium des Jeunes, devant Tyrol II et Thor. Il gagne aussi le Prix Capucine, devant Tyrol II et Tony M. Il se révélera quasiment invincible à 2 et 3 ans, et durant une bonne partie de son année de 4 ans. Son histoire ressemble un peu à celle d’Hadol du Vivier, quelques années plus tard. (Tyrol II est le père du champion de jumping, Jappeloup ou Jappeloup de Luze).

A l’âge de 3 ans, il affronte la grande Roquépine dans le Prix de l’Etoile, avec une avance de 50 mètres, due à son jeune âge, et se classe deuxième devant Tabriz, un autre prodige. Il bat Roquépine en fin d’année dans le Prix Marcel Laurent, grâce à l’avance de 50 mètres réservée aux 3 ans.

 

Pierre-Desire Allaire

Pierre-Désiré Allaire, qui découvrit Toscan et Une de Mai, et entraîna de grands champions comme

Equiléo, Fakir du Vivier, Grandpré, Hillion Brillouard, Larabello, Gobernador, Kiss Melody…

 

 

 

A 4 ans, Toscan gagne le Prix Charles Tiercelin, devant Tahitienne J et Tornado T, le Prix de Tonnac-Villeneuve, devant Tony M et Ted Grez, le Prix Jules Thibault, devant Tante d’Ici et Tiki R, le Prix Ephrem Houël, devant Tante d’Ici et Tony M, le Prix Phaëton, devant Tony M et Tahitienne J, et finalement le Critérium des 4 ans, en 1’20’’6, devant Tony M et la même Tahitienne J. Il fait jeu égal avec ses aînés dans le premier Championnat Européen (le futur Prix René Ballière), dont la première édition est remportée par Dashing Rodney, devant Roquépine et le jeune Toscan.

Il a déjà trois Critériums à son palmarès. Il peut en espérer un quatrième avec le Critérium Continental, mais c’est sans compter sur les progrès de Tiki R, qui se montre intraitable et l’emporte sur son rival, alors que Tony M conclut à la troisième place.

On ne le sait pas encore, mais Toscan ne sort pas sans séquelle de son duel contre Tiki R ; il s’en ressent dans le Prix de l’Etoile, qu’il perd à nouveau, toujours au profit du décidément téméraire Tiki R ; et c’est Unadeux, qui prive Toscan blessé de la deuxième place.

 

C’est à cette époque que Toscan disparaît de la scène pour soigner sa blessure. Il laisse le soin à ses dauphins, Tony M et Tabriz, de représenter à sa place la génération des 5 ans face à leurs aînés durant les joutes de l’hiver. Ils ne s’en sortent pas trop mal du reste, puisqu’ils prennent tous deux les places d’honneur juste derrière Roquépine dans le Prix d’Amérique 1968. Cela laisse imaginer ce qu’aurait fait Toscan s’il avait été là.

Toscan fera sa rentrée dans le Prix Jockey, dont il se classera troisième de Tony M, derrière Ténébreuse D. C’est de bon augure pour le Critérium des 5 ans, qui lui manque encore pour entrer dans la légende en étant ainsi le premier trotteur à inscrire à son palmarès les trois grands Critériums, ce qui serait d’autant plus beau, puisqu’il a déjà gagné le Critérium des Jeunes. Mais, contre toute attente, il est battu par Ténébreuse D, et doit se contenter de la troisième place juste derrière Tony M. Visiblement, il était encore à court de condition, et il lui a manqué un petit quelque chose pour s’imposer dans ce Critérium des 5 ans. C’est pourquoi il renoue avec la victoire et se venge dans l'important Prix Doynel de Saint-Quentin, qu’il remporte devant Thétis IV et la même Ténébreuse D, cette fois bien battue. Il laissera le soin à un autre « Kerjacques », Jorky en l’occurrence, de rempoter à sa place, pour la première fois, les trois grands Critériums.

 

Tenebreuse D 000

Ténébreuse D a battu Toscan dans le Critérium des 5 ans, l’empêchant ainsi d’entrer dans la légende en étant le premier à inscrire à son palmarès les trois grands Critériums (3ans, 4 ans, 5 ans)

 

 

 

Toscan vise maintenant le Prix d’Amérique et pour cela s’attaque aux épreuves préparatoires. Il gagne le Prix du Bourbonnais, devant Ténébreuse D et Train Bloc.

Mais dans le Prix d’Amérique 1969, il doit s’incliner à la troisième place derrière ces nouveaux phénomènes que sont Upsalin et Une de Mai.

Eh oui, Une de Mai, une vieille connaissance pour lui, est là aussi et elle a bien progressé durant son année de 4 ans.

Or, s’il ne s’en doute pas encore, Toscan lui n’est plus le champion quasi-invincible qu’il avait été durant ses jeunes années.

Pour se consoler, il lui reste le Prix de Paris, qu’il remporte en 1’20’’8, devant Tony M et Murray Mir. Mais dans le Prix de l’Atlantique, à Enghien, il doit se contenter de la troisième place derrière Une de Mai et la vieille Roquépine.

 

Pour son premier déplacement à l’étranger, il se rend à Munich et là remporte le Grand Prix de Bavière, loin devant la championne Eileen Eden et Simmerl, le meilleur trotteur du pays. Il a pulvérisé le record de la course et ridiculisé ses adversaires.

Mais à Rome, il est battu à nouveau par Une de Mai dans le Grand Prix du Lido di Roma. Heureusement, sur ce même hippodrome, il lui reste le Grand Prix de Rome, qu’il remporte en temps record, devant Zizi et Agaunar.

 

Ses autres titres de gloire, il va les glaner en France, notamment dans le Prix d’Eté 1969, qu’il gagne enfin devant Une de Mai et Urielle, le Prix de Bretagne, qu’il remporte devant Upsalin et Ténébreuse D. Mais Upsalin prend sa revanche dans le Prix du Bourbonnais, dont Toscan se classe deuxième devant Tabriz, ce qui laisse présager un retour au sommet de sa part, et c’est de bon augure pour le Prix d’Amérique.

Cependant, début janvier 1970, dans le Prix de Bourgogne, il est encore battu par Upsalin, dont il est toujours bon deuxième, cette fois devant Tony M.

Le jour du Prix d’Amérique 1970, Upsalin est donc le favori logique, mais Toscan représente l’opposition directe avec sa sœur Une de Mai. Il suffirait d’une défaillance d’Upsalin pour que Toscan l’emporte, car ses dernières performances, comparées à celles de sa cadette, plaident en sa faveur.

Or, depuis la victoire d’Ozo en 1965, le départ du Prix d’Amérique est donné à l’autostart, et Upsalin a joué de malchance en tirant un numéro en deuxième ligne.

Ce qui rassure Henri Levesque, c’est que devant lui se trouve Snow Speed, un trotteur américain, spécialiste de ce genre de départ. Mais, contre toute attente, il part à la faute, est brutalement repris par son driver et provoque l’accrochage avec Upsalin.

Pour le champion de l’écurie Levesque, tous les espoirs s’envolent en fumée.

Dès lors, Toscan n’a plus qu’à l’emporter en 1’18’’3, devant Tony M, Tidalium Pélo et Tabriz : les quatre « T », les « quatre as » de la génération ont pris les quatre premières places. C’est du jamais vu !

 

Mais, après cette belle victoire ; un peu favorisé par le Destin en ce début d’année 1970, Toscan va se faire quelque peu oublier.

En fin d’année 1970, il renouvelle sa victoire de l’an dernier dans le Prix de Bretagne, qu’il remporte cette fois devant Tony M et Ura.

Il se classe deuxième d’Une de Mai dans le Prix du Bourbonnais, alors que Tony M est troisième.

Il faut dire que les champions de Vincennes doivent compter avec une nouvelle venue aux dents longues : Vanina B, qui reste sur une série impressionnante de victoires. Or, elle s’impose encore, cette fois parmi les meilleurs dans le Prix de Bourgogne, qu’elle remporte en 1’18’’2, devant Une de Mai, Tony M, Tidalium Pélo, Urvick, Toscan, puis Volnay II, Ura…

Toscan, malgré sa petite faute n’a pas démérité, pourtant il n’est que sixième.

Cette cohorte de champions, composée de Vanina B, Tidalium Pélo, Une de Mai, Toscan et Tony M, impressionne les candidats français ou étrangers, qui préfèrent s’abstenir. Si bien qu’on ne compte que 12 partants dans le Prix d’Amérique 1971.

Qu’importe, la qualité prime sur la quantité !

Tidalium Pélo en profite pour remporter en temps record, 1’17’’5, son premier Prix d’Amérique, devant Vanina B, Une de Mai, Tony M, Eileen Eden, Toscan, Ura, Arménie…

Vanina B prend sa revanche dans le Prix de France, qu’elle remporte, en 1’17’’6, battant à nouveau Tony M et Toscan. Ce dernier a décidé de sortir par la grande porte.

Une semaine plus tard, il fait ses adieux dans le Prix de Paris, son deuxième, qu’il gagne en 1’19’’7, devant Tidalium Pélo et le brave Tony M.

Toscan se retire au haras riche de 2 568 000 F.

Tidalium Pélo et Jean Mary

Tidalium Pélo et Jean Mary

Une de Mai et Jean-Lou Peupion après leur victoire à Roosevelt Raceway dans le Roquepine Trot (Challenge Gold Cup), tenant lieu de revanche du Championnat du Monde

Une de Mai et Jean-Lou Peupion après leur victoire à Roosevelt Raceway dans le Roquepine Trot (Challenge Gold Cup), tenant lieu de revanche du Championnat du Monde

Une de Mai, née de Kerjacques et de Luciole III, la reine du trotting, qui succéda à Roquépine, gagna partout où elle se produisit : en France, aux Etats-Unis, en Italie, en Allemagne, en Belgique, en Hollande, au Canada… mais pas en Scandinavie

Une de Mai, née de Kerjacques et de Luciole III, la reine du trotting, qui succéda à Roquépine, gagna partout où elle se produisit : en France, aux Etats-Unis, en Italie, en Allemagne, en Belgique, en Hollande, au Canada… mais pas en Scandinavie

Une de Mai et Jean-René Gougeon : un couple légendaire !

Une de Mai et Jean-René Gougeon : un couple légendaire !

Une de Mai

 

Père de Toscan, Ua Uka, Une de Mai, Bill D, Cette Histoire, Chambon P, Eléazar, Ejakval, Fanacques, Gamélia, Gadamès, Hague, Hajacques de Chenu, Igor du Beauvoisin, Jorky, Katinka, Lévorino, Mon Ouiton, Kerjacques fut incontestablement le plus grand sire étalon chef de race de l’après-guerre.

Or, même si elle n’a jamais gagné le Prix d’Amérique, Une de Mai fut sans doute la plus populaire et la plus fameuse parmi tous ces nombreux champions qu’il engendra.

A 3 ans, elle dominait sa génération dans les deux disciplines, remportant ainsi les épreuves reines (le Critérium des 3 ans à l’attelé et le Prix de Vincennes au monté) ouvertes à sa génération. Pour ses débuts à l’étranger, elle gagnait, à 4 ans, le Grand Prix d’Europe de Milan et le Grand Prix Continental de Bologne.

Mais à 4 ans, elle dut subir la loi d’un certain Upsalin, le champion de l’écurie Levesque, qui la battra dans le Critérium des 4 ans, le Prix du Président de la République (au monté), le Prix Ariste Hémard et finalement le Prix d’Amérique 1969 pour leur première participation. Ils avaient alors 5 ans et Une de Mai se classait deuxième devant Toscan.

Elle n’obtiendra jamais de meilleur classement dans la grande épreuve et cela fait aussi partie de sa légende. Une malédiction, le signe indien (comme on dit), l’empêchait de gagner le Prix d’Amérique, comme le jour de l’édition 1972, où elle s’accrocha avec Vismie, laissant Tidalium Pélo filer vers la victoire et battre son propre record.

Pour se consoler, il y avait pour elle l’hippodrome de Cagnes-sur-Mer ; là Une de Mai se montra absolument invincible, obtenant neuf succès en neuf sorties, dont le fameux Critérium de Vitesse, qu’elle remporta cinq fois consécutives, de 1969 à 1973.

Mais son plus grand succès, elle l’obtint aux Etats-Unis, à New York, en 1969, l’été de ses cinq ans, le 25 août 1969 plus exactement, à l’occasion du Championnat du Monde, c’est-à-dire le Roosevelt International Trot 1969.

Le cheval à battre s’appelait Nevele Pride, il était la nouvelle gloire du trot américain et on le comparait volontiers au légendaire Greyhound, le hongre gris volant, surnommé « The Grey Ghost » (le fantôme gris), le plus rapide trotteur du monde depuis 31 ans.

Nevele Pride avait déjà remporté la Triple Couronne américaine (Yonkers Trot, Hambletonian, Kentucky Futurity), ainsi que deux titres de « Harness Horse of the Year » : meilleur cheval attelé (trot et amble confondus) de l’année pour 1967 et 1968. Il n’allait pas tarder à en remporter un troisième pour 1969 en clôturant sa carrière avec 16 records du monde, 57 victoires et 837 238 $ de gains.

Pourtant Une de Mai ne devait pas se laisser impressionner par ce « jeunot », qui était d’un an son cadet. Elle le laissa d’abord mener pour le dépasser en trombe dans le dernier tournant, le clouer sur place dans la dernière ligne droite et le battre avec près de trois longueurs d’avance, sidérant littéralement le public américain venu applaudir son idole, celui qu’il croyait invincible. Or, le succès d’Une de Mai fut encore renforcé quelques jours plus tard, quand ce diable de Nevele Pride fit tomber en 1’11’’1 le fantastique record de Greyhound (1’11’’6), vieux de trente et un ans.

 

Une de Mai n’en resta pas là, elle se fit applaudir dans tous les pays où elle se produisit car elle gagna partout : Allemagne, Belgique, Canada, Hollande, Italie, USA (où elle remporta un second Championnat du Monde et deux Challenge Cup)… sauf en Scandinavie. Trop froid ? Mais non, elle a gagné au Canada !

Ainsi, elle avait remporté trois fois de suite le Grand Prix de la Loterie de Naples, deux fois de suite le Grand Prix des Nations à Milan, deux fois de suite le Grand Prix de la Foire de Milan, deux fois de suite le Grand Prix de la Flèche d’Europe à Naples, deux fois le Grand Prix du Lido di Roma à Rome, deux fois le Grand Prix de la Côte d’Azur de Turin, ainsi que le Grand Prix d’Hiver de Milan, et terminait à trois reprises en tête du Grand Circuit International Européen, en 1969, 1970, 1971.

Parmi ses autres victoires, on peut citer encore le Trot des Nations à Montréal, l’Elite Rennen à Gelsenkirchen, le Prix des Meilleurs à Munich, le Grand Prix des Pays-Bas à La Haye, le Grand Prix Martini à deux reprises à Kuurne, en Belgique, sans oublier son Prix de France et ses deux Prix de Paris, à Vincennes, ses trois Prix de l’Atlantique à Enghien, ses deux Championnat Européen (Prix René Ballière) et son Prix d’Eté à Vincennes.

 

Une de Mai avait été découverte par Pierre-Désiré Allaire à peu près en même temps que son frère Toscan. Le grand professionnel avait deviné en Kerjacques un étalon d’avenir et il incita le comte Pierre de Montesson à se rendre acquéreur de ses deux protégés dont il garda la moitié des parts pour lui. Or, Toscan remporta le Prix d’Amérique, qui échappa toujours à sa sœur. C’était le 25 janvier 1970 ; et le fils de Kerjacques s’imposait devant ses trois illustres contemporains : Tony M, Tidalium Pélo et Tabriz, que suivaient Urielle et Une de Mai. C’est dire si le comte de Montesson avait fait une bonne affaire, même si Une de Mai par la suite dut subir la loi du diable noir Tidalium Pélo, qui la battait déjà dans la grande épreuve en 1971 ; elle se classait troisième derrière Vanina B, juste devant Tony M.

 

En 1974, Une de Mai, toujours chère dans le cœur du public, partit avec les honneurs de la cote, mais ne put faire mieux que quatrième derrière Delmonica Hanover, Axius et Casdar, place qu’elle avait déjà obtenue en 1973.

 

Riche de 8 918 977 francs, avec 74 victoires en 146 courses disputées, elle fit ses adieux dans le Prix de Paris 1974, avant de partir pour le haras des Coudraies.  

Une de Mai, Jean-René Gougeon et le comte Pierre de Montesson

Une de Mai, Jean-René Gougeon et le comte Pierre de Montesson

Hippolyte Bernereau, un boucher de Bournezeau en Vendée, ne sait pas trop que faire de Luciole II, sa petite jument, qui n’a jamais rien fait de bon en courses.

Il décide de l’accoupler avec un étalon pas trop cher, et son choix se porte sur un certain Kerjacques, un serviteur de l’Etat, encore inconnu, donc très abordable au niveau du prix de la saillie. C’est de cette union que va naître une pouliche alezane, avec une très fine liste blanche et trois balzanes, que l’on baptise Une de Mai.

Hyppolyte est un petit éleveur, il sait qu’il n’a aucune chance de dégoter la perle rare ; il vend Une de Mai et un autre cheval pour la modique somme de treize mille francs à un certain Michel Lemelletier, un Normand, spècialiste du débourrage des poulains.

Michel Lemelletier n’a pas l’intention de garder la pouliche, il se contente de la débourrer, sans prêter trop d’attention aux belles allures qu’elle développe déjà à l’entraînement.

Pourtant, la nouvelle se répand bien vite et finit par attirer un grand spécialiste des trotteurs, Pierre-Désiré Allaire, qui est justement à la recherche de produits de l’étalon Kerjacques, et vient récemment d’acheter un certain Toscan.

Il prend contact avec Michel Lemelletier et lui achète Une de Mai, ainsi que six autres poulains pour la somme de cent vingt mille francs. Persuadé qu’il vient de conclure une bonne affaire, Michel Lemelletier se frotte les mains.

Pourtant, quelques mois plus tard, alors qu’il est assis sur le sulky d’Ula Saint Romain, il affronte par hasard Une de Mai. Après la course, il dira à son épouse : - Je crois que j’ai eu tort de vendre Une de Mai, elle nous a doublés comme un avion…

 

Une de Mai avait débuté à Saint-Malo, le 27 août 1966, par une troisième place dans une petite épreuve pour débutants.

Elle montra très vite de la qualité, et à l’automne 1967, Pierre-Désiré Allaire décida de la vendre pour moitié au comte Pierre de Montesson. Le prix de vente étant fixé à 400 000 F.

Sous les couleurs du comte de Montesson, casaque bleue ciel, toque orange, elle fut confiée à Jean-René Gougeon et commença alors une extraordinaire carrière, bien que l’aîné des Gougeon lui préféra tout d’abord Ulysse Mab, avec lequel il avait gagné le Critérium des Jeunes, premier classique de la jeune génération, mais en faisant dead-heat avec Urcet, alors qu’Unadeux se classait troisième.

Ulysse Mab devait aussi remporter le Prix Capucine, cette fois devant Urcet et Urda.

 

En dépit de ses qualités évidentes, Une de Mai montra aussi qu’elle avait du caractère ; durant les heats d’échauffement, elle se mettait parfois à tirer comme un treuil, disait J. R. Gougeon. C’est lui qui eut l’idée de la confier à plein temps à Jean-Lou Peupion, l’homme de confiance de la maison, à Joinville. Jean-Lou Peupion, à force de patience et aussi de passion, allait permettre à Une de Mai d’exploiter tout son potentiel, en rejetant ses peurs et ses appréhensions ; il est pour beaucoup dans sa réussite sur tous les champs de courses du monde.

 

Bien vite, Une de Mai aligne 10 victoires consécutives, parmi lesquelles le classique Critérium des 3 ans à l’attelage, en 1’20’’7, devant Upsal du Pont et Uros H, et son équivalent au monté, le Prix de Vincennes, en 1’23’’2, devant Udango et Unifrance, avec Michel Gougeon pour cavalier.

De tous les champions qu’il a menés en courses – et Dieu sait s’il en a menés : d’Olten L à Ourasi, en passant par Roquépine, Bellino II, Hadol du Vivier – Une de Mai restera la préférée de Jean-René Gougeon.

Reine incontestée de sa génération dans les deux spécialités, à 3 ans, sa couronne lui est sérieusement contestée à 4 ans.

En effet, bien qu’elle remporte tour à tour : le classique Prix de Sélection, devant Sabi Pas et Seigneur, le Prix Charles Tiercelin, devant Upsal du Pont et Unadeux, le Prix de Tonnac-Villeneuve, devant Uskia et Unimel B, le Prix Jules Thibault, devant Ursule Pirouette et Unimel B, le Prix Ephrem Houël, devant Uno et Upsalin, le Prix Guy Le Gonidec, devant Uti Rogas II et Urielle, le Prix Phaëton, devant Ulius et Uhlan II ; et, pour ses débuts à l’étranger, le Grand Prix d’Europe de Milan, en 1’18’’3, devant Uti Rogas II et Qurago, puis le Grand Prix Continental de Bologne, en 1’18’’6, devant Fosfa et Durante : elle est battue par Upsalin dans le classique Critérium des 4 ans, puis son équivalent au monté, le Prix du Président de la République, dont elle n’est que troisième derrière Uniflore D, l’important Critérium Continental, le Prix Ariste Hémard… Alors qu’elle a aussi perdu le classique Prix de l’Etoile contre le jeune Vat, avantagé de 50 mètres, il est vrai.

Pour parfaire le tout, au début du mois de janvier 1969, alors qu’il entame sa cinquième année, Upsalin remporte aussi le Prix de Croix, devant Uti Rogas II et Uno, et finalement, pour leur première participation : le Prix d’Amérique, en 1’17’’6, devant Une de Mai et Toscan, alors qu’Eileen Eden, Sol Mio B, Tidalium Pélo, Roquépine, Ténébreuse D, Tabriz, Tony M comptent aussi parmi les battus.

Que se passe-t-il ? Upsalin est-il meilleur qu’Une de Mai ? Est-ce lui le nouveau crack de Vincennes ? Tous les inconditionnels d’Une de Mai commencent à douter.

 

La semaine suivante, elle est battue à nouveau dans le Prix de France, mais cette fois par Tidalium Pélo, qui s’impose en 1’17’’8, devant Une de Mai et Roquépine.

Elle fait l’impasse sur le Prix de Paris, que remporte Toscan devant Tony M. Son entraîneur décide de la mettre au repos. Elle prendra finalement sa revanche sur Upsalin en fin de meeting, dans le Prix Ovide Moulinet, qu’elle remporte en 1’18’’9, devant Urielle et Upsalin, qui restait pourtant sur sa victoire du Prix Roederer devant Uno et Ut Majeur II.

 

On retrouve Une de Mai à Cagnes-sur-Mer, son hippodrome de prédilection, pour le premier de ses cinq Grand Critérium de Vitesse, qu’elle remporte en 1’16’’8, devant la rapide Eileen Eden et Tidalium Pélo, sur lequel elle prend sa revanche.

Elle se rend ensuite à Enghien pour le Prix de l’Atlantique, qu’elle remporte en 1’17’’1, devant Roquépine et Toscan.

 

Puis c’est son premier voyage à Naples, où l’attend le Grand Prix de la Loterie Nationale, qu’elle gagne en finale, dans la réduction de 1’16’’4, devant Tidalium Pélo et Eileen Eden, qui devient sa rivale italienne après avoir été celle de Roquépine.

De Naples, Une de Mai se rend à Milan pour le Grand Prix de la Foire Internationale, qu’elle remporte devant Eileen Eden et Agaunar, deux juments de renom.

Elle gagne aussi le Grand Prix de la Flèche d’Europe à Naples, toujours devant Eileen Eden, alors que Nu Hill est troisième.

A Rome, elle s’impose devant Toscan et Nu Hill, dans le Grand Prix du Lido di Roma.

 

Toutes ses victoires et le prestige qui l’entoure appellent Une de Mai de l’autre côté de l’Atlantique, à New York, le 25 août 1969, pour en découdre dans le Championnat du Monde, sur l’hippodrome de Roosevelt, avec le phénomène que tous les Américains jugent imbattable : le fameux Nevele Pride, qui a déjà gagné le Yonkers Trot, l’Hambletonian, le Kentucky Futurity, autrement dit la Triple Couronne, ainsi que l’American Championship, en 1’16’’, devant Snow Speed, Earl Laird, Real Speed…

Stanley Dancer, son entraîneur, a dit partout où l’on voulait bien l’entendre, que son champion était invincible, qu’il faudrait cinq pattes à Une de Mai pour pouvoir le battre.

Nevele Pride est parti comme un boulet de canon ; durant les deux tiers du parcours, il survole littéralement la course, jusqu’au moment où Une de Mai lance son attaque, le rejoint dans le dernier virage, le cloue sur place et franchit la ligne d’arrivée avec près de trois longueurs d’avance devant 40 000 spectateurs fascinés. Temps de réduction de la gagnante 1’16’’2 ! Nevele Pride se classe deuxième à distance devant Fresh Yankee.

On revivra une histoire à peu près semblable avec Ourasi et Mack Lobell, quelques années plus tard dans le March of Dimes Trot, à Garden State Park.

Dans la revanche, la Challenge Cup, Nevele Pride déclare forfait, pourtant c’est la jument canadienne Fresh Yankee qui s’impose  devant Une de Mai.

Mais l’aventure américaine n’est pas tout à fait terminée, quelques mois plus tard, l’insatiable Nevele Pride bat, en 1’11’’1, le record fantastique de 1’11’’6, établi par Greyhound, il y a trente et un ans, et devient ainsi le trotteur le plus rapide de tous les temps. Ce qui ne manque pas de rehausser l’exploit d’Une de Mai.

Roosevelt International Trot – Championnat du Monde 1969, dans le dernier virage, Une de Mai amorce son attaque sur Nevele Pride, le grandissime favori

Roosevelt International Trot – Championnat du Monde 1969, dans le dernier virage, Une de Mai amorce son attaque sur Nevele Pride, le grandissime favori

Une de Mai bat Nevele Pride dans le Roosevelt International Trot – Championnat du Monde 1969

Une de Mai bat Nevele Pride dans le Roosevelt International Trot – Championnat du Monde 1969

Pour son retour à Vincennes, dans le classique Prix de l’Etoile, Une de Mai s’impose en 1’17’’1, loin devant le jeune Alexis III auquel elle rendait pourtant 50 mètres.

Mais dans le Prix d’Eté, sans doute éprouvée par cet exploit, en plus de son périple américain, elle est largement dominée par son compagnon d’écurie et demi-frère, Toscan, qui l’emporte en 1’18’’8. Une de Mai elle se classe cependant deuxième devant Urielle.

 

Elle est déjà largement en tête du Grand Circuit International, pourtant elle retourne en Italie en fin d’année et retrouve Eileen Eden, qui cette fois prend sa revanche sur Une de Mai dans le Grand Prix des Nations à Milan, qu’elle remporte en 1’16’’5, devant Dart Hanover, alors que la championne française n’est que troisième.

Mais, en finale, Une de Mai gagne le Grand Prix d’Hiver de Milan, devant Nu Hill et Murray Mir, et pour commencer l’année 1970 en beauté s’impose aussi à Cagnes-sur-Mer, dans le Prix de la Côte d’Azur, qu’elle gagne en 1’18’’4, devant Sire de Tracy et Urielle.

 

Upsalin, qui a profité de l’absence d’Une de Mai pour remporter le classique Critérium des 5 ans, s’octroie également le Prix Doynel de Saint-Quentin, puis le Prix Marcel Laurent, en fin d’année, devant Alexis III et Uno.

Battu par Toscan dans le Prix de Bretagne, il prend sa revanche sur lui dans le Prix du Bourbonnais, et gagne aussi le Prix de Bourgogne au début de janvier 1970.

Il s’annonce déjà comme le favori du Prix d’Amérique, le dimanche 25 janvier 1970, malgré la coalition que forment Toscan et Une de Mai. Mais il joue de malchance au départ, perdant toutes ses chances à cause d’un stupide accrochage avec Snow Speed.

Toscan en profite pour filer vers la victoire, devant Tony M, Tidalium Pélo, Tabriz, Urielle, Une de Mai, seulement sixième.

 

Une de Mai est encore battue par Tidalium Pélo dans le Prix de France, dont elle se classe deuxième devant Snow Speed. Mais elle renoue avec la victoire dans le Prix de Paris, qu’elle gagne en 1’20’’7, devant Upsalin. Puis elle remporte le Prix de Sélection, en 1’17’’9, devant le jeune Aigle Noir, concluant ainsi en beauté ce festival hivernal de Vincennes.

 

Après une courte période de repos bien mérité, Une de Mai retrouve ses admirateurs à Cagnes-sur-Mer, où l’on commence à se dire qu’elle est vraiment imbattable sur cet hippodrome. Et, de fait, elle remporte pour la deuxième fois le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur ; cette fois en 1’16’’4, devant Tony M, et le champion local Tivaty Pélo, qu’il ne faut pas confondre avec Tidalium Pélo.

Mais Tony M prend sa revanche à Enghien, dans le Prix de l’Atlantique, qu’il remporte en 1’20’’7, à l’issue d’une « course tactique », devant Une de Mai et le même Tivaty Pélo.

 

Une de Mai se rend alors en Italie, à Turin, et là remporte en temps record le Grand Prix de la Côte d’Azur, devant Dazzling Speed et Dart Hanover.

Comme l’Italie lui réussit, elle descend à Naples et renouvelle son succès de l’an dernier dans le Grand Prix de la Loterie Nationale, qu’elle signe en 1’16’’6, en finale, devant sa vieille connaissance Eileen Eden, Snow Speed et Tony M.

Elle remonte sur Milan et s’octroie un deuxième succès dans le Grand Prix de la Foire Internationale, cette fois devant Barbablù et Tony M.

 

Une de Mai tente à présent sa chance en Suède, dans le fameux Elitloppet de Stockholm, qui manque encore à son palmarès.

Elle parvient à se qualifier pour la finale en s’imposant dans la deuxième batterie, en 1’17’’, devant Lindy’s Pride, Tivaty Pélo et Uhlan II. On pense alors qu’elle gagnera la finale pour s’octroyer ainsi l’une des rares grandes épreuves qui lui manque encore, mais elle ne réagit pas au moment crucial, laissant Eileen Eden s’imposer pour la deuxième fois, mais de peu devant Fresh Yankee, alors qu’Uhlan II prive Une de Mai de la troisième place.

 

Lorsqu’Une de Mai retrouve son public de Vincennes, c’est à l’occasion du Championnat Européen (le futur Prix René Ballière), qu’elle remporte en 1’18’’1, devant Tony M (1’18’’2), et plus loin Urielle, Ura, Tendresse III, Villequier B, Urvick, Uno.

 

Puis elle s’envole pour les Etats-Unis, en compagnie de Tidalium Pélo, car elle a un titre à défendre dans le Championnat du Monde, à New York, sur la piste de Roosevelt.

Mais, cette fois, elle est largement dominée par la fameuse jument canadienne Fresh Yankee, Tidalium Pélo, et le meilleur trotteur de Nouvelle-Zélande, Stylish Major.

C’est Tidalium Pélo qui a failli réussir l’exploit, n’étant battu que d’un nez à la photo.

Comme en 1969, Fresh Yankee gagne aussi la revanche, la Challenge Gold Cup, baptisée Roquepine Trot, en hommage à la célèbre championne, une semaine plus tard. Cette fois encore, Tidalium Pélo s’inclinait de peu.

 

Une de Mai elle s’était abstenue dans cette seconde épreuve new-yorkaise, préférant se rendre à Rome pour le Grand Prix du Lido di Roma, disputé en nocturne. Mais elle est particulièrement malheureuse dans cette épreuve que remporte d’extrême justesse la nouvelle championne Agaunar devant Tony M. La troisième place revenait à Eileen Eden, devant Dart Hanover et Une de Mai, la grande malchanceuse.

 

Ayant raté son retour à Roosevelt Raceway, Une de Mai repart pour les Etats-Unis, au mois de septembre, mais cette fois sur l’autre hippodrome new-yorkais, Yonkers Raceway, où se dispute le Gotham Trot (2 011 m), que le jeune Dayan, un 4 ans, remporte en 1’16’’3, devant Fresh Yankee, venue tout à la fin priver Une de Mai de la deuxième place.

La semaine suivante, sur le même hippodrome, Une de Mai tente sa chance dans l’United Nations Trot (2 413 m), mais alors qu’elle semble s’imposer, tandis que Dayan a cédé complètement, Fresh Yankee revient la régler tout à la fin, Noccalula finissant troisième.

 

Avant de retrouver la France, Une de Mai passe par la Belgique et là remporte le Grand Prix Martini, à Kuurne, devant Urbino II, Davioli et Atome.

 

De là, la championne française retourne en Italie, d’abord à Naples, pour le Grand Prix de la Flèche d’Europe, qu’elle remporte de très peu, en 1’16’’1, devant Barbablù et Keystone Spartan. Puis finalement à Milan, pour le Grand Prix des Nations, qui lui avait échappé en 1969, alors qu’elle était dominée par Eileen Eden et Dart Hanover.

Cette fois Une de Mai prend sa revanche sur Eileen Eden pour s’imposer en temps record, 1’15’’5, battant d’une seconde l’ancien record (1’16’’5) établi par Roquépine et égalé par Eileen Eden, alors que Keystone Spartan se classe deuxième devant Agaunar, Murray Mir, Eileen Eden… Sur sa lancée, Une de Mai se rend à Rome et remporte le Prix Tor di Valle, devant Barbablù et Agaunar.

Cette fois encore elle termine en tête du Grand Circuit International.

Une de Mai retrouve Toscan, Tidalium Pélo, Tony M, auxquels s’ajoute une nouvelle venue, Vanina B, à Vincennes pour le nouveau meeting d’hiver, celui de 1971.

Ces cinq trotteurs vont devenir les cinq étoiles de Vincennes. C’est exceptionnel, on n’a jamais vu ensemble une telle brochette de vedettes à Vincennes. En fait si, un an plus tôt, mais Upsalin a été remplacé par Vanina B. Les passionnés du trot se régalent à l’avance.

Une de Mai, Toscan, Tidalium Pélo, Vanina B, Tony M : les cinq étoiles de Vincennes, en 1971

Une de Mai, Toscan, Tidalium Pélo, Vanina B, Tony M : les cinq étoiles de Vincennes, en 1971

Toscan commence par remporter le Prix de Bretagne, qu’il avait déjà gagné un an plus tôt, devant Tony M, Ura, Uno, Urielle, Véronique R, Amiral Williams. Une de Mai coiffe Toscan sur le poteau à l’arrivée du Prix du Bourbonnais, alors que Tony M, qui a fait longtemps illusion pour la victoire, se classe troisième devant Ura, puis Sibelle J, Urielle, Version F…

Vanina B, quant à elle, poursuit sa série victorieuse et s’octroie le Prix Marcel Laurent, en 1’16’’3, devant Vinci II, Bill D, Version F, Vouloir, battant ainsi le record de la piste de Vincennes, que détenait Une de Mai en 1’16’’9 !

Le Prix de Bourgogne était alors la dernière épreuve préparatoire au Prix d’Amérique ; elle revient à Vanina B, qui s’impose en 1’18’’2, cette fois devant Une de Mai, Tony M, Tidalium Pélo, auteur d’une excellente rentrée, Urvick, Toscan, qui a perdu des rangs sur une faute, puis Volnay II et Ura.

Au regard de ces performances, on peut dire que les cinq étoiles conservent chacune leur chance de gagner le Prix d’Amérique : le public de Vincennes est maintenu en haleine.

 

Le 12 janvier, Une de Mai est à Cagnes-sur-Mer pour le Prix de la Côte d’Azur, qu’elle remporte à nouveau devant Sire de Tracy, dans la réduction de 1’18’’7 ; Tout Jeton L se classant troisième devant Tiercé à Cœur, Eileen Eden, Ulfa M et Véronique R.

Jean-René Gougeon assure aux admirateurs d’Une de Mai que la championne est en grande forme ; elle a très bien travaillé, et devrait en principe remporter cette année ce fameux Prix d’Amérique, qui lui manque encore.

 

Mais le dimanche 31 janvier 1971, Tidalium Pélo remporte en temps record, 1’17’’5, le premier de ses deux Prix d’Amérique, devant Vanina B, Une de Mai, seulement troisième et sérieusement menacée par Tony M, le quatrième, que suivent Eileen Eden, Toscan, Ura, Arménie, Agaunar, Barbablù, Murray Mir, alors qu’Urielle a été arrêtée.

 

On pense qu’Une de Mai va prendre sa revanche dans le Prix de France, mais c’est Vanina B, qui s’impose, en 1’17’’6, devant Tony M, Toscan, Eileen Eden, Murray Mir…

Vanina B gagnera aussi le classique Prix de Sélection, en 1’18’’6, devant Bill D.

 

Une de Mai peut encore espérer renouveler sa victoire de l’an dernier dans le Prix de Paris, mais c’est sans compter sur Toscan, qui a décidé de sortir par la grande porte, et réussit fort bien ses adieux, en s’imposant en 1’19’’7, devant Tidalium Pélo, Tony M, Villequier B.

En fait, Une de Mai n’a pas pris part à la course, son entraîneur ayant décidé de la mettre au repos après sa piètre performance du Prix de France. Quant à Toscan, c’était la deuxième fois qu’il remportait le Prix de Paris, après l’avoir déjà gagné en 1969.

Tidalium Pélo et Vanina B : le duo de choc du meeting d’hiver 1971

Tidalium Pélo et Vanina B : le duo de choc du meeting d’hiver 1971

Une de Mai remporte le championnat du monde - Roosevelt International 1971, devant Fresh Yankee, Dart Hanover et Tidalium Pélo

Une de Mai remporte le championnat du monde - Roosevelt International 1971, devant Fresh Yankee, Dart Hanover et Tidalium Pélo

Une de Mai Roosevlt International Trot 1969

Une de Mai Roosevelt International Trot 1971

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4 mars 2013 1 04 /03 /mars /2013 12:13

 

Les champions trotteurs de légende en France

 

03 - Les années 1960

 

 

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      Kracovie et Roger Vercruysse

 

 

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      Roger Vercruysse et Kracovie « championne piste plate », qui gagna la même année, 1961, le Grand Prix de la Loterie à Naples, (devant Tornese et Quick Song), et l’Elitloppet de Solvalla, (devant Adept et Aprilsnar).

 

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      Masina, née de Quinio et de Belgrade III, remporta la même année, en 1961, le Prix de Cornulier et le Prix d’Amérique, réalisant ainsi le doublé légendaire, que seul Venutar avait réussi avant elle.

Elle défendait les couleurs, qui deviendront si fameuses, de l’écurie Levesque.

 

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      Masina après sa victoire dans le Prix de Cornulier 1961

 

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Masina gagne le Prix d’Amérique1961, devant Tornese, le grandissime favori.

 

 

 

 

Masina

 

Avant Roquépine, le célèbre éleveur entraîneur Henri Levesque avait déjà vu briller ses couleurs à Vincennes grâce à une jument nommée Masina (en hommage à Giulietta Masina, héroïne de la Strada). C’était une géante alezane, aussi grande que les plus grands mâles, ce qui explique pourquoi elle s’illustra surtout à Vincennes et non sur les pistes plates de vitesse pure aux tournants très accentués. (Donc en vérité peu de ressemblance avec la minuscule Giulietta Masina, sinon par le talent peut-être). Mais Masina se distingua dans les deux disciplines du trot (monté et attelé), ce qui lui permit de réaliser la même année le prestigieux doublé tant convoité : Prix de CornulierPrix d’Amérique. Dans cette dernière épreuve, elle s’était payé le luxe de battre Tornese, l’idole des tifosi, pourtant parti grandissime favori.

Or, un fâcheux incident de course lui permit aussi d’inscrire son nom au palmarès d’une épreuve qui n’était pas faite pour elle : le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur disputé à Cagnes-sur-Mer. (La favorite de l’épreuve, Kracovie, ayant été mise hors de course par l’italo-américain Brogue Hanover).

Pénalisé de 25 mètres sur sa jeune rivale Newstar, elle échouera de peu dans son deuxième Prix d’Amérique, mais gagnera un second « Cornulier ».

Cette fille de Quinio et de Belgrade III, menée en courses par François Brohier, avait aussi remporté le Critérium des 5 ans et son équivalent au monté, le Prix de Normandie, réalisant ainsi un autre doublé fameux, ainsi que le Prix de France et le Prix de Paris.

 

Victime de son imposant gabarit, Masina ne fut pas précoce. Elle ne courut pas à 2 ans, et apparut en piste, seulement à la fin de sa troisième année, le 8 décembre 1959, dans une course au monté. Elle y fut battue par Menthe. Mais dès sa sortie suivante, elle s’imposa en 1’26’’1 sur 18 adversaires. Son propriétaire éleveur et entraîneur, Monsieur Henri Levesque l’avait confiée à son neveu François Brohier dès le début de sa carrière.

 

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François Brohier connut la gloire grâce à Masina

 

 

Durant l’année 1960, Masina disputa 21 courses. Elle débuta à l’attelage le 27 janvier, par une victoire en 1’25’’6, dans une arrivée très mouvementée ; le cinquième s’appelait Mick d’Angérieux. Après un échec à l’attelage, elle renoua avec la victoire au trot monté, sur 2 500 mètres, dans le Prix de Ranville. Elle s’attaqua alors au niveau classique et fut seconde de Mariette dans le Prix Jules Thibault, puis gagna le Prix Ephrem Houël en 1’24’’3, mais elle échoua au monté dans le Prix Louis Le Bourg.

 

Elle tenta sa chance dans le classique Critérium des 4 ans, dont elle se classa troisième derrière Mick d’Angérieux et Molène II, mais dans une arrivée très disputée.

Le 13 juin 1960, Masina offrait à Henri Levesque son troisième Prix du Président de la République après ceux d’Icare IV et de La Champagne. Elle s’imposait en 1’23’’6, devant Moka et Minarelle H. Dès lors on savait que Masina était une très grande jument, pas seulement par la taille. François Brohier pour sa part la trouvait encore « un peu joueuse », sans démentir ses qualités.

 

Un peu joueuse, c’est peut-être ce qui lui coûta le Prix Ceneri Forcinal et le Critérium Continental, que remporta Mick d’Angérieux.

Elle fut même disqualifiée dans le Prix Guy Le Gonidec.

 

Durant l’automne 1960, Masina se révéla meilleure au monté qu’à l’attelage. Dans le Prix de l’Etoile, elle ne put refaire son handicap de 50 mètres sur ses cadets, Nicias Grandchamp et Nystag. Mais avec le même rendement de distance, elle s’imposa dans le Prix des Elites, l’équivalent au monté du Prix de l’Etoile, qu’elle remporta devant Nestoc et le même Nicias Grandchamp.

 

La fin de l’année 1960 l’opposa à Mars dans trois courses au trot monté ; elle en remporta une, mais perdit les deux autres au profit de ce nouveau rival.

Elle avait obtenu un record de 1’20’’6 en gagnant le Prix Philippe du Rozier.

 

C’est en janvier 1961 que Masina devint à son tour une jument de légende.

Elle battit Marjolaine V en 1’21’’4 dans le Prix de Croix. Puis elle réalisa son prestigieux doublé, Prix de Cornulier  Prix d’Amérique, ce qu’Hortensia VII n’avait pu réaliser à cause de Gardon et de Gélinotte, qui l’avaient privée de la victoire dans ces deux grandes épreuves.

Dans le Prix de Cornulier, Masina s’imposa en 1’22’’1, devant Katinka, LB Anna et Ledollar. Puis, dans le Prix d’Amérique, en 1’20’’8, elle battit Tornese, l’idole des tifosi, qui, cette fois débarrassé de Jamin, semblait en mesure de triompher.

Masina n’était pourtant pas la favorite ; on lui préférait le vaillant Tornese, favori à 11/4, Jocrisse, grande révélation de l’hiver, à 15/4, et même Honoré II à 19/4.

Quand ils virent Tornese en tête dans la ligne droite, les Italiens, sûrs de sa victoire, grimpèrent sur les tables du restaurant. Mais c’était sans compter sur l’envolée finale et étourdissante de Masina, que François Brohier avait lancée depuis le haut de la montée. Malgré tous leurs efforts, Tornese et Jocrisse durent se contenter des places d’honneur.

 

Une erreur de jugement coûta à Masina le Prix de Paris, que remporta le belge Jannot III. Mais c’est en temps record, 1’17’’9, qu’elle s’imposa dans le classique Prix de Sélection.   

Elle survolait le Prix Ovide Moulinet, quand brusquement elle se mit à la faute. Elle échoua ensuite à Cagnes, dans le Grand Critérium de Vitesse, puis aux Etats-Unis, à deux reprises, sur l’hippodrome new-yorkais de Yonkers.

 

Après un repos bien mérité, elle redevint en France la grande Masina ; à Enghien d’abord, sur les 4 075 mètres du Prix de Buenos-Aires, puis dans le Prix de l’Atlantique, dans lequel elle fut bonne deuxième de Le Roi d’Atout D, malgré une faute qui lui coûta la victoire.

Elle remporta à Vincennes d’autres beaux succès durant l’été, dont un nouveau doublé prestigieux : Critérium des 5 ansPrix de Normandie. Dans le Critérium des 5 ans, elle battait Mick d’Angérieux en 1’20’’8 sur 3 000 mètres, et dans le Prix de Normandie, l’équivalent au monté du Critérium des 5 ans, disputé sur la même distance, elle s’imposait en 1’22’’8, devant Miss des Ramiers.

En se classant troisième derrière Ozo et Noble Epine dans le Prix des Elites, au monté, elle réussit l’exploit de trotter en 1’18’’9 sur 2 325 mètres. Puis elle gagna le Prix Pierre Plazen en 1’19’’9. Mais elle fut battue à Munich dans le Prix des Meilleurs, car Masina était surtout la jument de Vincennes, il faut bien l’admettre.

 

Elle remportera un deuxième Prix de Cornulier en janvier 1962, mais ne pourra rendre 25 mètres à sa brillante cadette Newstar dans le Prix d’Amérique de la même année ; elle s’y classera bonne seconde en 1’20’’, contre 1’20’’3 pour la gagnante.

Masina gagna encore le Prix de France, en 1’19’’3, devant Quick Song, puis le Prix de Paris, le Prix de Sélection, en 1’18’’5, devant Ozo, le Grand Critérium de Vitesse, à Cagnes.  

Elle termina sa carrière riche de 1 571 360 NF.

 

Sa victoire dans le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m), à Cagnes-sur-Mer, fut toutefois facilitée par les malheurs de Kracovie, la favorite. A l’inverse de Masina, Kracovie était une spécialiste des pistes plates et des parcours de vitesse. Elle était célèbre pour avoir gagné la même année, en 1961, le Grand Prix de la Loterie à Naples, et l’Elitloppet de Solvalla, autrement dit les deux épreuves internationales les plus richement dotées en Europe après le Prix d’Amérique. Ce jour-là, pourtant, elle n’a pas gagné. Voici ce qu’on peut lire en consultant les archives de la S.E.C.F. :

Après enquête, les Commissaires ont donné un avertissement au jockey V. Guzzinati (Brogue Hanover), pour s’être rabattu brusquement à la corde, après l’avoir ouverte, provoquant ainsi le déséquilibre et le distancement (la disqualification) de Kracovie (R. Vercruysse). En outre, agissant d’office, ils ont interdit au jockey R. Vercruysse de monter sur l’hippodrome de Cagnes-sur-Mer jusqu’au 31 décembre 1962 inclus, pour ne pas s’être retiré de la course après le distancement (la disqualification) de la jument Kracovie, qu’il drivait, et au contraire s’être porté au galop à hauteur de Brogue Hanover, frappant ce cheval et son driver avec sa cravache, et de plus, le serrant dangereusement contre le talus bordant la piste, le mettant ainsi hors de course.  

 

La génération suivante, celle des « N », fut encore dominée par une jument : Newstar, qui s’illustra sous couleurs italiennes, comme aussi son rival Nautilus G.

Cette génération fut aussi celle de Nestoc, Nicias Grandchamp, Nystag, et d’une autre bonne jument, Noble Epine, qui elle se distingua au trot monté.

 

Puis on arrive à Olten L, Oscar RL, et surtout, l’inoubliable Ozo !

 

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Newstar, bien que française de naissance s’illustra sous couleurs italiennes ; elle battit Masina dans le Prix d’Amérique 1962, mais avec 25 mètres d’avance sur sa rivale.       

 

Kracovie Grand Prix de la Loterie 1961 à Naples

Kracovie Elitloppet 1961

Masina Prix d'Amérique 1961

Newstar Prix d'Amérique 1962

Ozo Prix d'Amérique 1963

Ozo Prix d'Amérique 1965

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Henri Levesque et son « chouchou », Oscar RL (« Petit Lapin »)

 

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Oscar RL, un fils de Dubonnet, aux célèbres couleurs d’Henri Levesque, se distingua par son courage et sa régularité. Ainsi, il fut deux fois deuxième et une fois troisième du Prix d’Amérique, deux fois troisième du Prix de France, trois fois deuxième du Prix de Paris, avant de le remporter enfin en 1968. Mais il gagna le Critérium Continental 1962, le Prix d’Eté 1965, et s’illustra aussi à l’étranger, par des victoires et des places d’honneur, notamment en Italie, en Allemagne, en Autriche (victoire dans le Graf Kalman Hunyady 1965) et aux Etats-Unis. Il fut le plus riche des étalons de France, avant d’être détrôné par Tabriz.

 

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Ozo, née de Vermont, entraînée par Roger Massue, fut une championne très populaire, qui s'illustra en France, en Europe et aux Etats-Unis ; elle gagna deux fois le Prix d'Amérique, en 1963 et en 1965, et fut championne d'Europe en 1963.

 

 

 

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Roger Massue et sa championne, la populaire Ozo

 

Ozo-gagne-le-Prix-d-Amerique-1963-devant-Oscar-RL-et-Quick-.jpg

Le dimanche 27 janvier 1963, Ozo remporte le Prix d’Amérique, avec désinvolture et la queue en trompette, en 1’20’’1, devant Oscar RL et Quick Song.

 

 

Ozo 

 

Depuis Gélinotte, aucune jument ne fut aussi populaire et adorée des turfistes que la pourtant fantasque Ozo. Cette belle pouliche noire courait la queue en trompette et ne ressemblait à aucune autre. Elle était également adorée de son Mentor Roger Massue, qu’elle haïssait. On a su pourquoi seulement après sa mort. Cette belle jument souffrait d’une grave maladie, celle-là même qui la rendait si fantasque, comme le jour où elle faillit démolir l’avion qui la transportait aux USA pour y disputer victorieusement le Trans-oceanic Trot.

 

Elle devait aussi remporter deux fois le Prix d’Amérique, en 1963, devant Oscar RL et Quick Song, et en 1965, devant Elaine Rodney et le même Oscar RL.

 

Mais sa victoire la plus inattendue fut celle qu’elle remporta à Cagnes-sur-Mer à l’occasion du Grand Critérium de Vitesse 1965. Six jours avant la course, elle était déclarée mourante, souffrant d’une grave occlusion intestinale, à tel point que la compagnie d’assurance décide de ne pas honorer leur garantie si la jument dispute l’épreuve. Mais Ozo s’insurge, se relève, surmonte sa douleur et… elle gagne ! Le public se livre au délire.

 

Ozo mourra un an plus tard, révélant par là même le secret de son mal : une tumeur maligne, véritable cause de ses excès de mauvaise humeur.

 

La génération d’Ozo, les « O », fut aussi celle du populaire Oscar RL, le « petit lapin » d’Henri Levesque, d’Olten L, le champion du comte de Montesson, que menait en courses Jean-René Gougeon, sans oublier Ol Est B, qui s’illustra au trot monté.

 

Ozo était une fille de Vermont et avait pour mère Qozo. Elle appartenait à M. Alfred Gillain, qui la vendit à son entraîneur Roger Massue, alors qu’elle avait 3 ans.

 

Ozo débuta à Caen le 23 juillet 1960 dans le Prix des Pâquerettes, terminant troisième sur 1 400 mètres et cumula les places d’honneur à cet âge, surtout en province.

A 3 ans, en 1961, elle disputa 17 épreuves pour en remporter 11 et se classer trois fois deuxième. En fin d’année, elle a déjà 110 000 F à son compte en banque.

Parmi ses victoires, il faut citer le Prix des Elites, qu’elle gagne en 1’20’’7 (nouveau record des 3 ans montés), avec un avantage de 50 et 75 mètres, dû à son âge, devant Noble Epine et Masina, et le classique Prix de Vincennes, qu’elle remporte devant Oriflamme V et Olten L.

A cet âge elle est donc meilleure au monté, puisqu’elle ne gagne que trois fois au sulky, se classe quatrième dans le Critérium des Jeunes et le Prix Capucine, est disqualifiée dans le Prix de l’Etoile, que remporte Newstar, en 1’19’’3, puis deuxième du Critérium des 3 ans.

 

Mais elle va progresser rapidement à l’attelage, et on la voit déjà finir deuxième d’Ourfa dans le Prix Charles Tiercelin en début d’année 1962.

Elle sera également deuxième de l’illustre Masina dans le Prix de Sélection, mais se contente d’une cinquième place dans le Prix Ephrem Houël.

Dans le Critérium des 4 ans, que remporte Osembe en 1’21’’ devant Olten L et Ourfa, elle figure parmi les battus. Mais elle gagne le Prix du Président de la République, devant Oraki, Olten L, Osembe, Op ! Ra, Oberon, Ouistiti F, Orloff II…

 

Arrive alors l’aventure américaine : Roger Massue a décidé d’affronter les meilleurs « trotteurs Made in USA » chez eux ! C’était un pari risqué car Ozo détestait l’avion. Pendant le vol, qui l’emmenait de l’autre côté de l’Atlantique, elle fut prise de panique, d’angoisse ; et, dans une crise de fureur, commença à démolir la carlingue de l’aéroplane.

Le commandant de bord menaça de l’abattre si l’on ne parvenait pas à la calmer. Heureusement, le fidèle soigneur d’Ozo, à qui l’on a remis l’arme à feu pour agir en cas d’extrême nécessité, parvient à apaiser cette jument qu’il adore et tout rentre dans l’ordre.

Ozo arrive à bon port, c’est-à-dire à New York, et remporte le Transoceanic Trot, en 1’18’’2, sur la piste de Yonkers, devant le trotteur canadien Tie Silk, qui n’est autre que le futur champion du monde. Ozo est désormais célèbre des deux côtés de l’océan.

 

Tie Silk 00

Le trotteur canadien Tie Silk a d’abord subi la loi d’Ozo dans le Transoceanic Trot à Yonkers, avant d’être sacré champion du monde en remportant le Roosevelt International Trot 1962.

 

 

 

Elle ne dispute pas le Critérium Continental, que remporte Oscar RL, en 1’20’’8, devant Olten L, Okapi II, Odysner, Ourfa, Oriflamme V et Ofanto.

Elle est disqualifiée dans le Prix des Elites, mais remporte le Prix Ariste Hémard, qu’elle signe en 1’19’’6, devant Olten L, Oscar RL et Odysner, autrement dit, les trois meilleurs de son année dans la spécialité.

C’est de nouveau la consécration. Cette consécration va se confirmer durant l’année 1963, la grande année d’Ozo, celle de son premier Prix d’Amérique.

 

Tout le monde l’attend à Vincennes, le dimanche 27 janvier 1963, jour de son premier Prix d’Amérique, qu’elle remporte avec désinvolture et la queue en trompette, en 1’20’’1, devant Oscar RL, Quick Song, Nicias Grandchamp, Narold M, Narvick DJ, Newstar…

C’est un triomphe ! Le nom d’Ozo est sur toutes les lèvres.

 

Sa gloire va se répandre à travers l’Europe, et notamment en Suède, à Stockholm, où elle remporte l’Elitloppet 1963, en 1’16’’5, devant Adept et Julienne, puis à Munich, avec le Grand Prix de Bavière, qu’elle enlève en 1’19’’1, devant Behave et Brogue Hanover.

Cette année-là, elle est élue championne d’Europe pour avoir totalisé le plus de points dans le Grand Circuit International 1963.

 

L’année suivante, encore à Munich, elle gagnera le Prix des Meilleurs, en 1’19’’3, devant Oscar RL et Nisos H, et s’imposera aussi à Hambourg, dans le Prix des Gladiateurs.

 

Elle sera battue dans le Championnat du Monde – International Trot, à Roosevelt Raceway, que remporte le grand champion Speedy Scot, en 1’15’’7, devant Su Mac Lad, le tenant du titre, et l’ex-français Pick Wick, mais gagnera la revanche, la Challenge Gold Cup, en temps record. Puis, pour finir l’année en beauté, elle se rendra en Italie, à Milan, et triomphera dans le Grand Prix des Nations, en 1’18’’1, devant Steno et le brave et populaire Oscar RL.

Arrive le mois de janvier 1965 et ce dimanche 31, jour du Prix d’Amérique, avec pour la première fois la suppression des rendements de distance, qui n’avaient pas porté chance à Ozo en 1964, et le départ donné à l’autostart.

Cette fois encore, toute la France attend Ozo.

 

C’est du jamais vu, Ozo est si populaire que toute la France gagne le tiercé.

On craignait surtout pour Ozo, la belle américaine Elaine Rodney et le petit mais infatigable Oscar RL.

Or, les trois champions se retrouvent à l’arrivée, dans l’ordre espéré, puisque Ozo s’impose en 1’20’’5, devant Elaine Rodney, qui réalise le même temps, puis Oscar RL, 1’20’’9, Petit Amoy F, 1’21’’, et le trotteur russe, d’origine américaine, Apex Hanover, qui gagnera le Prix de Paris

 

Ozo fait l’impasse sur le Prix de France, que gagne Elaine Rodney pour la deuxième fois.

 

Elaine-Rodney--1-.jpg La championne américaine Elaine Rodney sera battue par Ozo dans le Prix d’Amérique 1965, mais elle gagnera deux fois de suite le Prix de France, dont une fois devant Elma, son illustre compatriote.

 

 

Lorsque l’on retrouve Ozo, c’est sur la Côte d’Azur, à Cagnes-sur-Mer, pour le Grand Critérium de Vitesse. Mais là, c’est le drame, six jours avant la course, la championne souffre d’une occlusion intestinale. Elle est couchée dans sa stalle, au bord de l’agonie.

Roger Massue est désespéré. La compagnie d’assurance a prévenu : - Si la jument dispute l’épreuve, ils n’honoreront pas la garantie.

Les vétérinaires vont l’assister pendant 12 heures, avant d’émettre un diagnostic. Mais, au bout de ce temps, la championne se relève, tente de mordre ; elle est sur pieds, prête à courir.

C’est un coup de théâtre ! Roger Massue annonce sa participation ; et le 14 mars 1965 : Ozo remporte le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur, en 1’16’’7, devant Fury Hanover et Behave. Le public, émerveillé, l’acclame à tout rompre.

Quand la Marseillaise retentit, Roger Massue ne peut retenir ses larmes. C’est aussi ça les courses, de belles histoires d’amour et d’émotions.

Ozo va mourir un an plus tard et révéler les origines du mal dont elle souffrait, une tumeur maligne, sans doute la véritable raison de ses excès de mauvaise humeur.

Elle avait gagné en France et à l’étranger 1 992 710 F.

 

Patara

Patara fut le favori malheureux du Prix d’Amérique 1964, qui se termina en catastrophe pour lui.

 

 

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Pluvier III remporta le Championnat du Monde de Roosevelt Raceway pour le compte des Suédois,

avant d’être racheté par Henri Levesque.

 

 

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Quérido II, un trotteur polyvalent, fils de Fandango, entraîné par Roger Baudron, gagna deux fois le Prix de Cornulier, deux fois le Prix de France et deux fois le Prix de Paris. Il fut aussi troisième du Prix d’Amérique 1966, derrière Roquépine et Elma. Mais sa victoire devant Quovaria dans le Prix du Président de la République 1964 fut longtemps contestée.

 

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Quérido II, aussi bon attelé que monté.

 

 

Quioco & Mme la Comtesse de Bellaigue

Quioco est plus connu aujourd’hui comme reproducteur, mais il fut aussi un champion dans les deux spécialités, sous les couleurs de Mme la comtesse de Bellaigue ; il est le père de très bons chevaux, souvent alezans comme lui, meilleurs l’été que l’hiver, parfois fautifs, mais doués dans les deux spécialitiés du trot : Clissa, Elpénor, Idylle du Corta, Ino Ludois, Jiosco, Minou du Donjon, Narisso, Nodesso, Strabo…

 

 

Patara, Petit Amoy F, Pimpante, Pinochle, Pluvier III, Ponant, Prince Vendéen seront les chevaux les plus titrés dans la génération suivante. Puis ce sont Quasipyl, Quérido II, Quioco, Quovaria, qui retiendront l’attention des habitués de Vincennes.

 

Quérido II gagnera deux fois le Prix de Cornulier, deux fois le Prix de France, et aussi deux fois le Prix de Paris. C’était un fils du fameux Fandango et un brillant élève du grand entraîneur-driver Roger Baudron, « Roger-la-Science » pour les turfistes. Mais ces mêmes turfistes reprochaient à Quérido II d’avoir privé Quovaria de la victoire dans un Prix du Président de la République, à l’issue d’une arrivée litigieuse. Quovaria avait aussi remporté le Prix de Cornulier. En finale, ni Quérido II ni Quovaria ne parviendront à atteindre la renommée de Roquépine, qui les éclipsera tous deux.

 

Comme Quovaria, Roquépine portait les couleurs désormais fameuses d’Henri Levesque, celles déjà mises à l’honneur par Icare IV, La Champagne, et surtout Masina et le populaire et inusable Oscar RL. La légende devait continuer avec Pluvier III, Quovaria, Roquépine, Upsalin, Vaccarès II, Cotentin, Hadol du Vivier ; et, après la mort de « Monsieur Henri » : Jiosco, Landoas, Mirande du Cadran, Quellou… Une fameuse écurie de courses, comme chacun rêverait d’en avoir une.

 

Or, la reine de cette écurie ne fut pas Masina, en dépit de son talent, mais bien Roquépine, sans doute la plus fameuse de toutes les reines du trotting, une reine de la dimension d’Uranie et de Gélinotte, ou peut-être meilleure encore ; d’ailleurs, ce n’est sans doute pas un hasard si Roquépine est l’arrière-petite-fille d’Uranie et la « nièce » de Gélinotte.

 

 

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Roquépine, par Atus II et Jalna IV, élevée et entraînée par Henri Levesque, trois fois victorieuse dans le Prix d’Amérique, deux fois championne d’Europe, deux fois championne du monde, sans doute la plus grande jument que le monde du trot ait produite.

 

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Roquépine et Jean-René Gougeon

 

Roquepine remporte le Prix d'Amerique 1967 devant Oscar RL

Roquépine remporte le Prix d’Amérique 1967 devant son compagnon d’écurie, Oscar RL

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Roquépine remporte le Roosevelt International Trot – Championnat du Monde 1967, devant Fresh Yankee et Governor Armbro.

 

 

Roquépine

 

De toutes les reines du trotting, Roquépine fut sans doute la plus sensationnelle, mais pas la plus attachante ni la plus aimée. C’est que Roquépine n’aimait ni les caresses ni les flatteries ni les gourmandises, ni même la compagnie des hommes.

En deux mots : elle était insensible à tout et ne savait que trotter, tant et si bien qu’elle gagna trois fois le Prix d’Amérique (comme seule Uranie avant elle), deux fois le Championnat du monde (International Trot) à New York, deux fois le Grand Circuit International Européen, deux fois l’Elitloppet de Solvalla, deux fois le Grand Critérium de Vitesse de Cagnes, deux fois le Prix de l’Atlantique à Enghien, ainsi que le Grand Prix de la Loterie de Naples et le Grand Prix des Nations à Milan, soient au total 46 victoires et 4 713 760 francs de gains.

Cette fille d’Atus II et de Jalna IV, née le 8 avril 1961, s’est éteinte en 1975.

 

Elle est la mère de deux étalons fameux, Florestan et Granit, l’un par Star’s Pride, l’autre par Ayres, mais aussi de la championne Hague, qu’elle eut de son union avec le grand chef de race Kerjacques.

 

Contrairement à ce que l’on aurait voulu, ce n’est pas Roquépine qui a donné son nom à la rue Roquépine, près de la rue d’Astorg, où se tient le siège de la Société d’Encouragement à l’Elevage du Cheval Français (qui gère les courses au trot en France) mais l’inverse.

Roquépine naquit le 8 avril 1961, dans la Manche, chez son éleveur propriétaire et entraîneur, Monsieur Henri Levesque.

Comme Icare IV, La Champagne, Masina, Oscar RL, Quovaria avant elle, mais encore davantage, elle va donc contribuer à rendre célèbre la casaque jaune à croix de Lorraine, brassards et toque noirs de l’écurie Levesque.

Elle débute à Vincennes, assez tardivement, le 2 mai 1964. Cette année-là, elle tente sa chance au monté, dans le classique Prix de Vincennes, mais elle est battue par Rio.

Lorsqu’elle remporte sa première grande victoire, le classique Critérium des 4 ans, en 1’22’’5, devant Robert P et Rex Grandchamp, elle n’a couru que 12 fois.

Elle ajoute à son palmarès le Critérium Continental, puis le Prix Marcel Laurent.

C’est en 1966 qu’elle va devenir une jument de légende, l’année où elle remporte son premier Prix d’Amérique, en 1’18’’6, devant la championne américaine Elma, Quérido II, que suivent Petit Amoy F (rétrogradé de la 3e place), Dashing Rodney, Pick Wick, Queronville LB…

Mais elle joue de malchance dans le Prix de France et est battue par Quérido II, qui gagne aussi le Prix de Paris.

Roquépine, pour sa part, remporte l’Elitloppet à Stockholm, en 1’15’’3, devant Quioco et Cheer Honey, le Championnat International du Danemark, à Copenhague, devant Pick Wick et Apex Hanover, et sept courses en France, dont le Prix Jockey, le Critérium des 5 ans et le Prix de l’Etoile, devant les meilleurs 3 ans du moment, Toscan et Tabriz.

Roquépine et Henri Levesque

Roquépine et Henri Levesque

Henri Levesque, le célèbre éleveur propriétaire et entraîneur de Roquépine

Henri Levesque, le célèbre éleveur propriétaire et entraîneur de Roquépine

Roquépine remporte l'Elitloppet 1966 à Solvalla

Roquépine remporte l'Elitloppet 1966 à Solvalla

Roquépine Elitloppet 1966

Roquépine Elitloppet 1966

Apex Hanover et Masha Bourdova, qui remportèrent le Prix de Paris 1965, devant Oscar RL et Olten L ; mais Apex Hanover était mené par Pavel Litkine, car Masha Bourdova, à l'époque, en tant que femme n'avait pas été autorisée à le driver en course.

Apex Hanover et Masha Bourdova, qui remportèrent le Prix de Paris 1965, devant Oscar RL et Olten L ; mais Apex Hanover était mené par Pavel Litkine, car Masha Bourdova, à l'époque, en tant que femme n'avait pas été autorisée à le driver en course.

Le fameux champion américain Noble Victory partit grand favori du Roosevelt International – Championnat du Monde des Trotteurs 1966, mais il dut se contenter de la troisième place derrière la jument canadienne Armbro Flight et la championne française Roquépine.

Le fameux champion américain Noble Victory partit grand favori du Roosevelt International – Championnat du Monde des Trotteurs 1966, mais il dut se contenter de la troisième place derrière la jument canadienne Armbro Flight et la championne française Roquépine.

Elle conclut l’année en beauté en enlevant aussi le Grand Prix des Nations à Milan, en 1’18’’4, devant Nimble Boy et Marengo Hanover.

Mais elle a été battue par Raskolnikov Z dans le Prix Ovide Moulinet ; puis par son compagnon d’écurie Oscar RL dans le Grand Prix de Bavière de Munich ; à New York, par la jument canadienne Armbro Flight, dans le Championnat du Monde (Roosevelt International Trot), et par le jeune Toscan, un champion prometteur, auquel elle rendait 50 mètres, dans le Prix Marcel Laurent.

Le 16 janvier 1967, elle remporte le Prix de Bourgogne, en 1’19’’2, devant Rex Grandchamp et Quérido II.

Elle s’annonce imbattable dans le Prix d’Amérique 1967, et Henri Levesque choisit de la driver, tandis qu’il confie le vaillant petit Oscar RL à Jean-René Gougeon.

C’est le triomphe de l’écurie Levesque, qui place ses deux représentants aux deux premières places. Jean-René Gougeon a rejoint Henri Levesque pour lui tendre la main, juste après le passage du poteau, geste qui symbolise une belle réussite.

Roquépine a signé sa victoire en 1’19’’7, sans forcer son talent, pour s’imposer devant son compagnon d’écurie Oscar RL, que suivent City Lights, Petit Amoy F, Quérido II, Fiesse, Pick Wick, Quibus V…

A Cagnes-sur-Mer, Roquépine remporte son premier Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur, en 1’16’’5, devant Petit Amoy F et Quarina. Elle s’impose aussi à Enghien, dans le Prix de l’Atlantique, en 1’17’’5, devant Seigneur et Pick Wick.

 

Puis elle s’en va rayonner à travers l’Europe dans un périple victorieux ; elle gagne ainsi son deuxième Elitloppet, à Solvalla, près de Stockholm, en 1’15’’1, devant Spin Speed et Lansing Hanover, puis s’impose à Naples, dans le Grand Prix de la Loterie Nationale, en 1’16’’4, devant Lansing Hanover et Short Stop. Toujours en Italie, elle gagnera aussi le Grand Prix de la Foire Internationale de Milan, devant Lansing Hanover et Pick Wick, le Grand Prix de la Flèche d’Europe à Naples, devant Pick Wick et Lansing Hanover, le Grand Prix de la Côte d’Azur à Turin, devant les mêmes Lansing Hanover et Pick Wick. Mais elle échoue à Rome, contre Dahing Rodney, dans le Grand Prix du Lido di Roma. (C’est ce même Dashing Rodney, qui s’est fait connaître en France en étant le premier à inscrire son nom au palmarès d’un nouveau tournoi international : le Prix René Ballière – Championnat Européen, devant Roquépine, justement, et le jeune Toscan, en 1967).

 

Roquépine traverse alors l’Atlantique et remporte à New York le premier de ses deux titres de championne du monde dans le Roosevelt International Trot, qui lui a échappé de peu, au profit de la jument canadienne Armbro Flight, en 1966. (Mais elle devançait le favori, que les Américains jugeaient « imbattable » : Noble Victory).

Cette fois, en trottant sur le pied de 1’21’’1, sous la pluie battante, Roquépine a eu raison d’une autre championne canadienne, la fameuse Fresh Yankee, alors qu’un autre trotteur canadien, Governor Armbro se classe troisième.

Après Jamin, elle est le deuxième trotteur français à offrir à la France ce titre « pompeux » de champion du monde, car, bien que français de naissance, Hairos II s’était imposé sous couleurs hollandaises et Pluvier III sous couleurs suédoises. C’est donc la deuxième fois que la Marseillaise retentit à New York à l’occasion du Championnat du Monde des Trotteurs, cette fois grâce à Roquépine.

 

Elle conclut en tête du Grand Circuit International, qui avait été annulé en 1966, s’octroyant ainsi le premier de ses deux titres de championne d’Europe.

 

L’année 1968 sera pour Roquépine la répétition de l’année 1967. Rejoignant dans la légende son arrière-grand-mère Uranie, elle s’octroie un troisième Prix d’Amérique, cette fois en 1’19’’1, devant Tony M, Tabriz, Quérido II, Short Stop, Pluvier III, Oscar RL…

Mais elle a eu la chance de ne pas affronter Toscan, blessé, qui s’annonçait redoutable, comme on peut en juger par la prestation de ses dauphins, Tony M et Tabriz.

Roquépine remporte son troisième Prix d’Amérique, en 1968, devant Tony M, Tabriz, Quérido II, en l’absence de Toscan, blessé.

Roquépine remporte son troisième Prix d’Amérique, en 1968, devant Tony M, Tabriz, Quérido II, en l’absence de Toscan, blessé.

Elle gagna son deuxième Grand Critérium de Vitesse, à Cagnes, en 1’15’’3, devant la championne Eileen Eden et Seigneur, puis son deuxième Prix de l’Atlantique à Enghien, en 1’18’’7, devant la même Eileen Eden et Short Stop.

 

Cependant, à Naples, elle est battue dans la finale du Grand Prix de la Loterie Nationale, par Eileen Eden, sa grande rivale de l’année, qui gagnera aussi l’Elitloppet de Stockholm.

 

Roquépine renoua avec la victoire à Milan, dans le Grand Prix de la Foire Internationale, prenant ainsi sa revanche sur Eileen Eden, et battant à nouveau Lansing Hanover. Elle s’impose à Naples, où elle bat encore Eileen Eden, cette fois dans le Grand Prix de la Flèche d’Europe ; à Rome, toujours devant Eileen Eden, dans le Grand Prix du Lido di Roma ; à Turin, où cette fois les deux championnes durent partager la victoire dans un dead-heat historique ; à Bologne, dans le Grand Prix de la Victoire, devant Be Sweet et Bernadet Hanover ; de nouveau à Rome, dans le Grand Prix de Rome, que Roquépine remportait devant Agaunar et Eileen Eden, troisième cette fois ; puis finalement à Milan, où elle renouvela sa victoire de 1966, dans le Grand Prix des Nations, qu’elle signait en 1’16’’5, devant Eileen Eden et Roitelet SS.

On comprend mieux pourquoi Roquépine avait succédé à Tornese dans le cœur des tifosi.

 

Elle retourna également à New York pour renouveler sa victoire de l’an dernier dans le Championnat du Monde des Trotteurs, le Roosevelt International Trot 1968, qu’elle remporta, en 1’18’’7, devant Kentucky Fibber et Fresh Yankee.

 

Elle devait gagner aussi en Belgique, à Kuurne, le Grand Prix Martini, le 27 octobre 1968, en 1’18’’9, devant Angeline et Petit Amoy F.

Bien sûr, elle fut encore championne d’Europe pour avoir terminé en tête du classement dans le Grand Circuit International 1968.

Roquépine remporte une deuxième victoire dans le Championnat du Monde des Trotteurs – Roosevelt International Trot 1968, à New York, devant Kentucky Fibber, Fresh Yankee et Quioco, que l’on reconnaît à sa liste en tête.

Roquépine remporte une deuxième victoire dans le Championnat du Monde des Trotteurs – Roosevelt International Trot 1968, à New York, devant Kentucky Fibber, Fresh Yankee et Quioco, que l’on reconnaît à sa liste en tête.

Eileen Eden fut la grande rivale de Roquépine, puis d’Une de Mai sur les pistes européennes. Elle gagna deux fois l’Elitloppet de Solvalla, en 1968 et en 1970 (devant Fresh Yankee). Elle gagna aussi le Grand Prix de la Loterie Nationale 1968 à Naples, devant Roquépine, et le Grand Prix des Nations 1969 à Milan, devant Dart Hanover et Une de Mai.

Eileen Eden fut la grande rivale de Roquépine, puis d’Une de Mai sur les pistes européennes. Elle gagna deux fois l’Elitloppet de Solvalla, en 1968 et en 1970 (devant Fresh Yankee). Elle gagna aussi le Grand Prix de la Loterie Nationale 1968 à Naples, devant Roquépine, et le Grand Prix des Nations 1969 à Milan, devant Dart Hanover et Une de Mai.

En 1969, Roquépine, maintenant âgée de 8 ans, accusa un sérieux « coup de vieux » face à la jeune élite des Upsalin, Une de Mai, Toscan, Tidalium Pélo, qui la devancèrent dans le Prix d’Amérique.

Heureusement, Upsalin était son compagnon d’entraînement et aussi son camarade d’écurie : il put ainsi la suppléer, en donnant à Henri Levesque un cinquième Prix d’Amérique.

Roquépine réussit à se classer troisième du Prix de France, qui ne lui avait jamais réussi, derrière Tidalium Pélo et Une de Mai, ce qui fut l’une de ses dernières performances honorables avec sa deuxième place entre Une de Mai et Toscan dans le Prix de l’Atlantique d’Enghien.

 

Elle entra au haras, chez son propriétaire Henri Levesque, qui organisa pour elle « trois mariages historiques » : le premier avec Star’s Pride, l’étalon du siècle aux Etats-Unis, qui lui donna Florestan ; le deuxième avec Ayres, le propre fils de Star’s Pride, dont elle eut Granit ; le troisième avec Kerjacques, l’étalon du siècle en France, avec lequel elle conçut la championne Hague.

Parce qu’ils avaient un père américain, Florestan et Granit furent obligés de courir à l’étranger, sous les couleurs d’Henri Levesque. Ayant été acquis en finale par les Haras Nationaux, ils devinrent eux aussi d’excellents étalons et purent exercer en France.

 

Roquépine mourut en 1975, riche de 4 713 760 F. Mais son souvenir lui n’est pas près de s’éteindre.

Florestan, le fils de Star’s Pride et de Roquépine, est devenu un fameux étalon, à qui l’on doit notamment : Opus Dei, Passionnant, Peccadille, Podosis, Pythagoras, Québir de Chenu, Quito de Talonay…

Florestan, le fils de Star’s Pride et de Roquépine, est devenu un fameux étalon, à qui l’on doit notamment : Opus Dei, Passionnant, Peccadille, Podosis, Pythagoras, Québir de Chenu, Quito de Talonay…

Les 46 victoires de Roquépine

Les 46 victoires de Roquépine

Roquépine Prix d'Amérique 1966

Roquépine Prix d'Amérique 1967

Roquépine Prix d'Amérique 1968

United Nationq Trot 1966 Roquépine et Jean-René Gougeon

Upsalin gagne le Prix d’Amérique 1969, devant Une de Mai et Toscan

Upsalin gagne le Prix d’Amérique 1969, devant Une de Mai et Toscan

Une de Mai bat Nevele Pride dans le Championnat du Monde – Roosevelt International Trot 1969 à New York

Une de Mai bat Nevele Pride dans le Championnat du Monde – Roosevelt International Trot 1969 à New York

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