Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
5 avril 2013 5 05 /04 /avril /2013 09:46

 

 

Les champions trotteurs de légende en France

 

11 - Les années 1980 (Lutin d'Isigny, Mon Tourbillon)

 

 

Lutin-d-Isigny-0007.jpg

Lutin d’Isigny et Jean-Paul André

 

Lutin-d-Isigny-numerisation0008-copie-1.jpg

Lutin d’Isigny, par Firstly et Dame d’Isigny, champion très populaire, vainqueur du Prix d’Amérique 1985, seul trotteur à avoir réussi le doublé victorieux Championnat du Monde - Challenge Cup, deux fois de suite, et donc invaincu à Roosevelt Raceway, en quatre tentatives.

 

 

 

Lutin-d-Isigny-port.-0005.jpg

Lutin d’Isigny

 

 

Lutin d’Isigny

 

Lutin d’Isigny gagne son premier combat contre le tétanos alors qu’il n’est qu’un foal, un bébé à peine né ; c’est donc très jeune qu’il s’habitue à lutter.

Il va le faire toute sa vie, ce qui lui vaudra une incroyable popularité auprès du public, comme seul Idéal du Gazeau avant lui. Comme il est très populaire, il est aussi un peu surestimé ; et plutôt chanceux, puisqu'il va profiter des malheurs de chevaux qui étaient meilleurs que lui (Jorky, Lurabo, Meadow Road) pour remporter ses plus belles victoires, Prix d'Amérique, Championnat du Monde (Roosevelt International), Challenge Cup, sans pour autant aligner de longues séries victorieuses comme le faisaient les grands champions, Bellino II, Eléazar, Hadol du Vivier, Idéal du Gazeau, Jorky, Lurabo, Ourasi... 

Il est né en Normandie, chez son propriétaire et co-éleveur (avec Mme Jean Auvray) Maurice Cornière, à Grandchamp-Maisy, dans le Calvados. C’est un très bel alezan, très musclé, avec une étoile frontale, et une hauteur de 1,62 m au garrot.

 

Le 15 août 1979, Lutin d’Isigny remporte sa première victoire près de chez lui, à Grandville, dans le Prix du Syndicat d’Initiative, sur 1 250 mètres.

Il gagne à Vincennes, l’été de ses 2 ans, le Prix des Boutons d’Or (1 850 m), le 13 septembre, à l’issue d’un duel formidable avec Ladin d’Anglars. C’est ainsi qu’il se fait connaître, par son courage hors du commun.

 

Dans sa jeunesse, il est plus souvent placé que gagnant. Sa régularité est cependant proverbiale. Lorsqu’il commence à gagner, il a du mal à répéter ses victoires tant il se donne à fond à chaque bataille. Il connaît alors des problèmes de récupération, ce qui ne l’empêche pas d’enlever les Prix Jules Thibault, Gaston de Wazières, de Milan, et Ariste Hémard.

 

Dans le Prix de Sélection 1981, il se classe deuxième de Lançon et est crédité de 1’17’’6, devant Khali de Vrie, 1’16’’1, Joyau du Marais, 1’16’’3, et le favori Jorky, qui s’est montré fautif.

 

Pour son premier déplacement à l’étranger, dans le Prix du Fer d’Or, à Helsinki, trois ans après la victoire d’Idéal du Gazeau, il est second de Lévorino, devant le suédois Ekivoque et le favori finlandais At Risk.

 

Le 17 juin 1982, à Vincennes, Idéal du Gazeau est le favori du Prix René Ballière (Championnat Européen (2 100 m), avec départ à l’autostart.

Cette épreuve a attiré des « 5 ans » prometteurs, comme le talentueux Lançon et le régulier Lutin d’Isigny, jusqu’alors plus souvent placé que gagnant.

Kivien perd toutes ses chances au départ, alors qu’Ianthin, Kimberland, Larabello, Meadow Matt et Katinka situés en première ligne sont les plus rapides derrière l’autostart. En seconde ligne, Lutin d’Isigny est parti plus vite que le grand favori Idéal du Gazeau. En plaine, Ianthin emmène le peloton de tête auquel vient s’ajouter Ino Ludois, auteur d’une accélération spectaculaire. Lutin d’Isigny, Khali de Vrie, Idéal du Gazeau et Kisin suivent dans cet ordre. En bas de la montée, Larabello fautif provoque la chute de Katinka et de son driver Jean-René Gougeon, qui se relève avec plus de peur que de mal. Khali de Vrie et Kisin sont également arrêtés et Idéal du Gazeau fortement gêné.

Ianthin et Ino Ludois toujours en tête progressent dans la montée à très vive allure. Ils sont suivis de Kimberland, Lutin d’Isigny, Meadow Matt, alors qu’Idéal du Gazeau refait déjà beaucoup de terrain pour combler son retard. Ino Ludois cède dans le dernier tournant, au moment où Idéal du Gazeau rejoint Ianthin en tête. A ce moment-là, Idéal du Gazeau est gêné à nouveau sans doute par un écart d’Ino Ludois en difficulté. Lutin d’Isigny, qui a profité du dernier virage pour souffler, revient alors s’imposer en un violent effort victorieux. Kimberland coiffe de peu Idéal du Gazeau et Ianthin pour la deuxième place. Viennent ensuite Lançon devant Irish Glory et Kapulco. La Bourrasque a été disqualifiée.

C’est la première grande victoire de Lutin d’Isigny, qui porte son record à 1’15’’9.

 

Lutin d’Isigny participe au Prix d’Europe d’Enghien 1982, dont il se classe quatrième.

Les quatre victoires consécutives de Lurabo, dont l’une acquise dans le Prix Jockey, font de lui le favori du Critérium des 5 ans (3 000 m), le samedi 25 août 1982, mais Lutin d’Isigny lui oppose une lutte farouche pour finalement s’incliner d’assez peu.

Le samedi suivant, Lurabo remet son prestige en jeu à l’occasion du classique Prix de l’Etoile (2 275 m). Mon Tourbillon, seul 5 ans de la course est parti au galop. Lurabo aussi part sur une faute et concède un terrain appréciable à Lutin d’Isigny, son plus dangereux adversaire, bien décidé à prendre sa revanche.

Lurabo parvient à la hauteur de Lutin d’Isigny et les deux rivaux se livrent bientôt un duel acharné tout le long de la ligne droite. La photo d’arrivée accorde un léger avantage à Lutin d’Isigny. Tous les deux font afficher une réduction de 1’16’’4.

 

Istraeki, qui n’avait encore jamais gagné à l’attelage, remporte en 1’18’’3 le Prix d’Eté 1982, dont Lutin d’Isigny est bon deuxième devant les favoris Ino Ludois et Jiosco, que suivent Ianthin, Kisin, King Black, Katinka, Khali de Vrie…

Le 1er octobre 1982 permet de revoir ensemble Lurabo et Lutin d’Isigny dans le Prix Eunomia (2 150 m), que Lutin d’Isigny remporte à nouveau devant son rival, en 1’17’’8, alors que Lurabo doit résister à l’attaque de La Bourrasque pour sauver la deuxième place.

Lutin d’Isigny confirme cette victoire en terminant second du Prix de Bretagne (2 800 m), la première des quatre courses préparatoires au Prix d’Amérique, derrière Katinka, le 27 novembre 1982.

 

Le jeudi 9 décembre 1982, à Vincennes, se dispute la Clôture du (premier) Grand National du Trot (2 600 m). Lurabo et Lutin d’Isigny sont au départ avec King Black, premier vainqueur de ce Grand National du Trot. Ces trois héros du jour vont d’ailleurs s’octroyer les trois premières places de cette épreuve choisie comme support du quarté.

Lutin d’Isigny est le mieux parti, mais il devra pourtant se contenter de la troisième place derrière Lurabo, qui fait afficher 1’18’’3, alors que King Black et Lutin d’Isigny sont tous deux crédités de 1’18’’4.

 

Lurabo et Lutin d’Isigny sont tous les deux bien armés pour mettre en péril la couronne d’Idéal du Gazeau, le roi quelque peu vieillissant lors du Prix d’Amérique (2 600 m), le 30 janvier 1983. Ils confirmeront en terminant excellents deuxième et troisième, après avoir poussé le favori dans ses derniers retranchements. Une semaine plus tard, le dimanche 6 février 1983, Lutin d’Isigny n’est que huitième du Prix de France (2 100 mètres), que remporte le jeune Mon Tourbillon à 5 ans, par temps de pluie, mais il fait mieux dans le Prix de Paris (3 150 m), le dimanche 13 février, en se classant deuxième de Katinka, devant Lançon et Kaiser Trot.

 

Dans le Prix de Sélection (2 275 m), dernier classique de la saison à Vincennes, il est deuxième battu de peu par Mon Tourbillon, précédant Minou du Donjon, Lançon, alors que Lurabo, très décevant, est disqualifié.

 

Lutin d’Isigny se rendra à Cagnes-sur-Mer pour le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m), dont il se classe troisième derrière l’américain Spice Island, qui a trotté en 1’14’’5, tout près du record d’Hadol du Vivier ; la deuxième place revenant à Ianthin.

 

A Enghien, dans le Prix de l’Atlantique (2 150 m), Lutin d’Isigny est de nouveau battu par Mon Tourbillon, en 1’19’’1, alors qu’il devance Keystone Patriot, King Black, Katinka, Lançon, Ianthin…

 

Lutin d’Isigny tente sa chance dans le Grand Prix de Bavière (2 100 m) à Munich, pour être à nouveau deuxième, mais cette fois loin du vainqueur Snack Bar, qui a trotté en 1’16’’6, contre 1’17’’ pour son rival français, qui précède Katinka (1’17’’1), Minou du Donjon (1’17’’1), Isenburger, Plumona RS, Spice Island, alors que Mon Ouiton est disqualifié.

 

Lutin d’Isigny tente ensuite de défendre son titre dans le Prix René Ballière (Championnat Européen (2 100 m) à Vincennes, mais il ne peut rien contre un Ianthin des grands jours, qui égale le record fantastique de 1’14’’2 établi par Classical Way dans le Prix de France 1981. Lutin d’Isigny devançait tout de même Idéal du Gazeau, Katinka et Mon Tourbillon !

 

C’est à Gelsenkirchen, en Allemagne, que Lutin d’Isigny gagne en 1’16’’2 sa première victoire de l’année, dans l’Elite Rennen (Course de l’Elite (2 500 m), le dimanche 10 juillet 1983, devant Dartster F, Kombo, Lançon, alors qu’Ianthin joue de malchance.

 

Le 31 juillet 1983, par un temps de canicule, Lutin d’Isigny s’impose aussi à Enghien à l’occasion du Prix d’Europe (2 800 m), clou du meeting d’été sur le plateau de Soisy, qu’il remporte en 1’18’’9, devant Ejnar Vogt venu tout à la fin ravir la deuxième place à Mon Tourbillon, qui précède le rentrant Lurabo.

 

Suite à une blessure contractée en Finlande, Lutin d’Isigny est ensuite mis au repos.

 

Le dimanche 15 janvier 1984, il réalise le meilleur temps, 1’17’’8, dans le Prix de Belgique. Mais encore à court de condition il ne peut faire mieux que cinquième du Prix d’Amérique et du Prix de France, tous les deux brillamment remportés par Lurabo.

 

Il prendra sa revanche dans le Prix de Paris (3 150 m), le dimanche 12 février 1984, qu’il remportera dans le temps record de 1’17’’6, devant Mon Tourbillon, Ejnar Vogt, Kaiser Trot, Lançon, Karengada, Snack Bar, Le Loir et Marybée.

Sa victoire fut toutefois facilitée par un accrochage entre Minou du Donjon et Kémilla. 

 

Lutin d’Isigny retrouve Lurabo et Mon Tourbillon à Cagnes-sur-Mer, le dimanche 11 mars 1984 pour le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m). Sans forcer son talent, Lurabo franchit en vainqueur la ligne d’arrivée en égalant le deuxième meilleur temps de l’épreuve, 1’14’’5, déjà réalisé par Spice Island, l’an dernier, laissant à Hadol du Vivier son fameux record de 1’14’’1. A distance, Lutin d’Isigny s’octroie en 1’14’’7 une bonne deuxième place devant Mon Tourbillon, 1’14’’8, lui aussi bon troisième loin devant Monquier, 1’15’’5, Ejnar Vogt, 1’15’’5, Keystone Patriot, 1’15’’9, Nevele Fever, 1’16’’…

 

Le samedi 31 mars 1984, dans le Prix de l’Atlantique (2 150 m), Lurabo, Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon, nos trois meilleurs trotteurs du moment sont au départ.

Lurabo, parti à la faute, puis arrêté, perdant ainsi près de 50 mètres, doit cette fois puiser dans ses réserves pour finalement l’emporter de haute lutte. Mon Tourbillon est deuxième à une encolure et Lutin d’Isigny, lui-même troisième à une tête du cheval d’Albert Viel. Les temps affichés étant de 1’16’’6 pour Lurabo, 1’16’’7 pour Mon Tourbillon et Lutin d’Isigny, 1’16’’8 pour Solo Hagen, qui se classe quatrième devant Nevele Fever (1’17’’), Hickory Almahurst (1’17’’3), Joli Quito (1’17’’4), Kémilla, Keystone Patriot, Monquier, Lindsey, Lapito et Luga.

 

Le Grand Prix du Sud-Ouest (2 200 m), troisième épreuve du Grand Circuit International, le dimanche 29 avril 1984, réunit à nouveau Lurabo, Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon.

Dans la ligne d’en face, Lurabo, le favori, ayant tapé d’un postérieur sur la roue de son sulky, s’enlève, causant une grosse frayeur à ses nombreux supporters. Il perd ainsi trois bonnes longueurs sur son grand rival, Lutin d’Isigny, qui se montre plus déterminé que jamais. Saisissant ainsi l’occasion de prendre sa revanche, il accélère l’allure afin de s’échapper dans un style éblouissant. Mais Lurabo se lance à la poursuite de Lutin d’Isigny, armé d’un formidable courage. Il le rejoint dans le milieu du dernier virage, pour aborder avec lui la ligne d’arrivée. Et l’on a droit à un superbe duel entre ces deux champions, qu’encouragent les clameurs d’un public passionné. Mon Tourbillon est encore dans leur sillage. Lutin d’Isigny se montre très volontaire, obligeant Lurabo à puiser dans ses réserves et donner son maximum pour faire la différence. Il l’emporte finalement sur le pied de 1’16’’3, égalant presque le record qu’avait établi Idéal du Gazeau en 1’16’’2, l’année de sa victoire sur Jorky en 1980. Lutin d’Isigny (1’16’’5) est deuxième tout près. Mon Tourbillon (1’17’’2) prend la troisième place à distance.

 

Le dimanche 13 mai 1984, Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon tentent leur chance en Allemagne, à Munich, dans le Grand Prix de Bavière (2 100 m), face à Spice Island, le tenant du titre, Ustrina, Happy Freeling, Evita Broline, Micado C et Karoline R. Mon Tourbillon fait illusion pour la victoire, mais ne peut résister à la fin de course d’Evita Broline, déjà deuxième de The Onion à Naples, qui s’impose donc en 1’16’’1, devant Mon Tourbillon 1’16’’2. Micado C est troisième à distance, devant un Lutin d’Isigny plutôt décevant.

 

C’est en Suède, à Solvalla, près de Stockholm, que l’on retrouve Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon, au départ du Prix de l’Elite Internationale (1 609 m), le fameux Elitlopp ou Elitloppet, disputé en deux batteries de qualification, une finale et une épreuve de consolation pour les non-qualifiés, le dimanche 27 mai 1984.

Dans la première batterie, Mon Tourbillon affronte Horns Hooter, Evita Broline, Spice Island, Hickory Almahurst, Victoria S, Marcon Lep et Duenna.

Dans la seconde, Lutin d’Isigny est confronté à Super Play, Rappe Haleryd, The Onion, Atod Mo, Armbro Agile, Keystone Triton et Ejnar Vogt.

Evita Broline semble la candidate à battre pour Mon Tourbillon, tandis que le déjà fameux The Onion, soigneusement mis au point par Stig H. Johansson, sera à coup sûr un sérieux client pour Lutin d’Isigny. C’est d’ailleurs The Onion le favori logique de cette épreuve devant Evita Broline, Marcon Lep, Victoria S, Mon Tourbillon et Spice Island.

Lutin d’Isigny a déjà disputé cette épreuve prestigieuse l’an dernier, se classant sixième de la finale que remportait Ianthin en 1’13’’2, devant Spice Island et Snack Bar, soit aussi vite qu’Idéal du Gazeau lors de son deuxième succès en 1982 et Jorky lors de sa victoire de 1981. Les trotteurs français se montrent à l’honneur lors des épreuves de qualification, Mon Tourbillon étant battu d’un rien par Marcon Lep dans la première batterie, et Lutin d’Isigny échouant de peu contre The Onion dans la seconde. Mon Tourbillon a d’ailleurs trotté aussi vite que le gagnant, portant ainsi son record à 1’12’’3, alors que Lutin d’Isigny fait afficher 1’13’’ (son record) dans la seconde. Mais The Onion se montre impérial dans la finale, s’imposant de loin, dans le temps record de 1’12’’2, devant Evita Broline (1’12’’4), Marcon Lep (1’12’’5), Mon Tourbillon (1’12’’6), Lutin d’Isigny (1’13’’1)…

 

Lutin d’Isigny cependant prend une éclatante revanche le dimanche 3 juin 1984 dans la Coupe de Copenhague (2 011 m), au Danemark, tout en réalisant un temps fabuleux de 1’13’’8 sur la distance, pour s’imposer loin devant Armbro Agile (1’14’’3), Evita Broline (1’14’’3 également), Ejnar Vogt (1’14’’3 aussi), Duenna (1’14’’6)…

 

Il n’a donc pas fini de nous étonner et l’on peut s’attendre à une grande performance de sa part le jeudi 14 juin 1984 dans le Prix René Ballière (Championnat Européen (2 050m), une épreuve qui lui réussit particulièrement, puisqu’il l’a déjà remportée à cinq ans en 1982 aux dépens d’un certain Idéal du Gazeau, avant de se classer deuxième d’Ianthin, mais à nouveau devant Idéal du Gazeau en 1983.

Mais cette année, en raison des travaux d’aménagement du « nouveau Vincennes », le Prix René Ballière (Championnat Européen) est réduit à 2 050 mètres et disputé sur la petite piste, comme en 1978 l’année de la victoire d’Hadol du Vivier devant Eléazar.

A cette occasion, Lutin d’Isigny retrouve Mon Tourbillon, et leur duel annoncé à l’avance prend cette fois une tout autre signification puisqu’il va servir à déterminer lequel des deux accompagnera Lurabo aux Etats-Unis pour le Championnat du Monde.

Le lot des huit partants seulement est complété par le suédois désormais stationné en France Solo Hagen (troisième favori), Joli Quito, Hickory Almahurst, un fils suédois de Nevele Pride, confié à Jean-René Gougeon, Luga, la dauphine de Kaiser Trot dans le « Cornulier », presque néophyte à l’attelage, Major de Brion et Khali de Vrie.

Lutin d’Isigny, égal à lui-même, ne déçoit pas ses nombreux supporters, en s’imposant sur le pied de 1’14’’3, très nettement devant Mon Tourbillon (1’14’’6), Joli Quito (1’14’’7), Major de Brion (1’14’’9), Solo Hagen (1’15’’2), Khali de Vrie (1’15’’4)…

Lutin d’Isigny a trotté presque aussi vite qu’Ianthin (1’14’’2) en 1983 dans la même épreuve, ne laissant ainsi aucune chance à Mon Tourbillon, qui n’ira donc pas à New York cette année.

 

Le dimanche 8 juillet 1984, l’Elite Rennen (2 500 m) de Gelsenkirchen a pris des allures de répétition avant le Championnat du Monde de New York, dont la date a été fixée cette année au 25 août.

Lutin d’Isigny est le mieux parti derrière l’autostart, pour défendre son titre et devancer Kirk, Kombo, Hickory Almahurst, Rex Haleryd et Ustrina.

Lurabo, désavantagé par son numéro 8 derrière l’autostart, a concédé du terrain sur ses rivaux. Mais il se rapproche déjà de façon significative dans la ligne d’en face.

Au passage devant les tribunes, Lutin d’Isigny et Lurabo emmènent derrière eux Pay Me Quick, Kombo, Rex Haleryd… Lutin d’Isigny accélère l’allure dans la ligne opposée, mais Lurabo reste à sa hauteur. A l’entrée de la ligne droite, Lutin d’Isigny semble s’envoler vers la victoire. Mais Lurabo enclenche la vitesse supérieure pour dépasser son rival, qui lui résiste courageusement jusqu’au bout, jusqu’au poteau qu’ils franchissent presque ensemble. Mais il y a une encolure entre eux, Lurabo précédant ainsi son grand rival Lutin d’Isigny. Cependant, ils sont crédités de la même réduction kilométrique de 1’14’’8, ce qui est le nouveau record du monde sur la distance de 2 500 mètres.

A distance, Pay Me Quick, mené par Stig H. Johansson, s’octroie la troisième place.


 

Sur sa lancée, Lutin d’Isigny n’hésite pas à s’aligner au départ du Prix d’Europe (2 600 mètres) à Enghien couru le dimanche 29 juillet 1984. Mais alors qu’il semble tenir la victoire à sa merci, Minou du Donjon, que l’on attendait plus, vient le battre à cinquante mètres du but. Minou du Dinjon (cheval d’été ne l’oublions pas) s’impose donc en 1’18’’3, devant Lutin d’Isigny (1’18’’3 également), Lapito (1’18’’7), Micado C (1’18’’8), Jealon (1’20’’1), Khali de Vrie (1’19’’6), Mirande du Cadran, Katie d’Isigny, Jacobinus, alors que Noiraud des Etangs et Marco Bonheur sont disqualifiés.

 

Le dimanche 5 août 1984, soit juste le lendemain, Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon se produisent en exhibition à Sainte Marie du Mont, à l’occasion de l’inauguration du nouvel hippodrome de La Madeleine, c’est-à-dire à l’endroit même où Lutin d’Isigny a débuté, il y a juste cinq ans. Signe du Destin ?

 

La nuit du 25 août 1984, à New York, sur l’anneau de Roosevelt Raceway, Lutin d’Isigny est sacré champion du monde ! Il a fait preuve d’une étonnante vélocité, cela dès le départ donné à l’autostart, qui l’a vu partir en boulet de canon.

Il a d’ailleurs établi le nouveau record mondial de la distance (2 011 mètres) en trottant sur le pied de 1’14’’6, à l’issue d’une course disputée à une allure vertigineuse.

Parti à 24/1, il n’était pourtant pas le favori. Cet honneur revenait à Lurabo, en raison de ses brillantes performances de l’année, qui suffisaient à faire oublier sa récente déconvenue italienne. Le suédois The Onion, vainqueur du Grand Prix de la Loterie à Naples et de l’Elitloppet de Solvalla, était aussi très en vue, avec Bridger, le meilleur trotteur canadien, un  double vainqueur du fameux Maple Leaf Trot de Toronto, dont la dernière victoire était toute récente. Il y avait aussi Crown Wood, le vainqueur de l’American Trotting Championship une semaine plus tôt. Ces trois trotteurs, étant, comme Lurabo, préférés à Lutin d’Isigny.

 

Lançon lui vient de s’illustrer la veille, en nocturne également, en se classant deuxième de l’unique épreuve réservée aux trotteurs (les autres étant pour les ambleurs) et disputée sur le mile (1 609 m), après avoir déjà établi le record de la piste de Liberty Bell, à Philadelphie.

La carrière américaine de Lançon commence donc plutôt bien.

 

Le heat d’échauffement de Lurabo est dès plus encourageant avant l’épreuve. Il a même négocié le dernier virage, que l’on redoutait pour lui, avec une remarquable aisance. Tout semble donc pour le mieux en ce qui le concerne jusqu’au moment du départ où Lutin d’Isigny et Legolas se montrent les plus rapides derrière l’autostart, le français prenant aussitôt tête et corde pour diriger la suite des opérations.

A l’inverse, Lurabo, désavantagé par son numéro 6, ne parvient pas à se placer dans le groupe de tête.

The Onion est parti très vite lui aussi pour rejoindre Lutin d’Isigny et Legolas en tête. Ils sont suivis par Crown Wood, Babe Kosmos, Lurabo et Spunky Byron.

Lutin d’Isigny s’empare seul du commandement devant Legolas, The Onion, Crown Wood, Lurabo, Spunky Byron et Babe Kosmos.

Etrangement, le canadien Bridger, peut-être victime d’un malaise, à ce moment-là se met à la faute, perturbant ainsi les chevaux regroupés en peloton. Bridger tombe de l’autre côté de la piste, carrément dans le fossé.

On craint le pire, le carambolage mortel, car les chevaux vont revenir passer devant les tribunes. Il n’en sera rien grâce au sang-froid du grand professionnel suédois Stig Johansson, qui saura éviter in extremis la catastrophe.

Les chevaux ont pu passer heureusement sans danger à cet endroit, toujours sous l’impulsion de Lutin d’Isigny, qui mène la course à un train d’enfer, devant le suédois The Onion, l’américain Crown Wood, Legolas, l’autre suédois, Lurabo, contrarié par la faute de Bridger et aussi par le violent écart de Spunky Byron, et peut-être aussi blessé, puis Babe Kosmos.

Lutin d’Isigny entre en tête dans la ligne d’en face, légèrement repris par Jean-Paul André, surveillant d’un œil The Onion, qui fonce sur lui.

Alors, Lutin d’Isigny, commandé par son pilote, repart de plus bel pour prendre une grande avance et arriver tout seul en tête dans la dernière ligne droite. Il ne laisse aucune chance à The Onion de le rejoindre, s’imposant avec une incroyable supériorité, et près de sept longueurs d’avance. Lutin d’Isigny s’octroie en prime le record de la course et le record du monde (1’14’’6) sur la distance de 2 011 mètres (un mile et ¼ de mile).

The Onion se classe deuxième en 1’15’’2, Crown Wood troisième en 1’15’’2 également, devant Spunky Byron (1’15’’2 aussi), Lurabo (1’15’’6), Babe Kosmos (1’15’’6) et Legolas.

 

Lurabo lui a fini la course en boitant. Il souffre apparemment de son antérieur droit, s’étant donné un coup au moment de l’incident. Il n’apprécie guère la dureté de la piste. Il n’est donc pas question pour lui de revanche dans la Challenge Cup (2 413 m) la semaine suivante. Lutin d’Isigny en profite pour s’imposer à nouveau, mais cette fois devant Lançon (son ancien rival et contemporain), TV Yankee, Babe Kosmos, Spunky Byron, dans le temps de 1’16’’7. Lutin d’Isigny, parfaitement à l’aise sur cette piste de Roosevelt, a donc réussi le fameux doublé Championnat du MondeChallenge Cup, ce qui est plutôt rare.

 

Sur sa lancée, Lançon poursuit sa carrière américaine au Canada, où il s’aligne au départ du Trot des Nations (1 609 m), sur la piste de Blue Bonnet, à Montréal.

 

Lutin d’Isigny grandi, honoré, auréolé, avec sa double couronne de champion du monde confirmé par la revanche, la Challenge Cup, pour son retour en Europe, reçoit un accueil triomphal, digne d’un champion du monde, dans son village natal de Grandchamp-Maisy, où il est honoré et fêté comme une gloire locale, un peu à la manière d’Idéal du Gazeau à Saint-Jean-le-Thomas.

 

Mais on dit que la roche Tarpéienne est toute proche du Capitole !

 

Ainsi, en Suède, lors de sa tentative à Göteborg dans le Grand Prix d’Aby (2 140 m), le 16 septembre 1984, Lutin d’Isigny est facilement dominé par The Onion, vainqueur en 1’14’’8, Legolas, deuxième en 1’14’’8 également, qui prennent sur lui une sévère revanche devant leur public. Derrière Shane T Hanover (1’15’’1) et Micado C (1’15’’2), Lutin d’Isigny doit se contenter d’une cinquième place en 1’15’’4.

Lutin d’Isigny a ensuite la mauvaise idée d’aller se faire applaudir en Finlande, à Helsinki, dans le Grand Prix de Finlande (1 600 m), une course qui ne lui a pas porté chance l’an dernier. Or, cette fois encore, après avoir gagné son épreuve de qualification, il se montre fautif dans la finale et est disqualifié de la sixième place !

 

Lutin d'Isigny -02[1]

Lutin d’Isigny

 
 

Lutin-d-Isigny--1-.jpg

Lutin d’Isigny

 

 

Lurabo--1-.png

      Lurabo

 

 

King-Black-numerisation0002.jpg

King Black

 

 

Lancon-copie-1.jpg

      Lançon

 

 

Mon-Tourbillon-02.jpg

      Mon Tourbillon

 

 

Minou-du-Donjon-numerisation0024.jpg

      Minou du Donjon

 

 

The-Onion-numerisation0025.jpg

      The Onion

 

 

The-Onion--1-.jpg 

The Onion

 

 

Legolas--1-.jpg

      Legolas

 

 

Micado-C--1-.jpg

      Micado C

 

 

Bridger 00

Bridger

 

 

 

 

Le jeudi 29 décembre, Lutin d’Isigny fait sa rentrée dans le Prix de Bourgogne (2 300 mètres), avec une tâche impossible puisqu’il doit rendre 25 mètres à Minou du Donjon et Mon Tourbillon. Khali de Vrie, dans un bon jour, en profite et s’impose en 1’16’’3, devant Landoas, Minou du Donjon, Mon Tourbillon, Ludo du Chignon, alors que Lutin d’Isigny, penalisé de 25 mètres, termine non placé.

 

Le dimanche 13 janvier 1985, Kaiser Trot, Lurabo, Lutin d’Isigny, Minou du Donjon et Mon Tourbillon sont tous les cinq au départ du Prix de Belgique (2 650 m), dernière répétition avant le Prix d’Amérique, avec 25 mètres à rendre à neuf autres chevaux, parmi lesquels Major de Brion, Malouin et Micado C semblent les plus dangereux.

Mais pour Lurabo, plus que pour les autres, c’est l’heure de vérité ; sa participation au Prix d’Amérique va dépendre de sa prestation dans cette course.

Ce fut une course extraordinaire, une de celle qui ne s’oublie pas, surtout grâce à Mon Tourbillon, assez heureux il est vrai dans son parcours, et Minou du Donjon, incroyablement courageux et véloce à la fois, qui a dû contourner tout le peloton pour venir partager la première place avec son grand rival. Premiers ex aequo ! Un dead-heat étonnant pour les deux « M », Minou du Donjon et Mon Tourbillon, pourtant tous les deux pénalisés de 25 mètres sur Major de Brion (troisième), une fois de plus à la hauteur de son rôle, Malouin (quatrième), lui aussi excellent, et Lutin d’Isigny (cinquième avec la même pénalité de 25 mètres), tout en étant très malchanceux.

 

Le dimanche 27 janvier 1985, Lutin d’Isigny, malgré ses dernières prestations plutôt modestes, devient le timide favori du Prix d’Amérique, préféré à Lurabo devenu fragile avec ses problèmes de jambes. Minou du Donjon et Mon Tourbillon sont encore parmi les préférés. Major de Brion, Malouin, Landoas et Lapito gagnent aussi quelques suffrages.

Brandy Hanover, un trotteur américain, devenu suédois, et confié à Jean-Lou Peupion, va être le seul étranger du Prix d’Amérique 1985, qui ne compte d’ailleurs que 14 partants au lieu des 18 auxquels on est habitué, le dimanche 27 janvier 1985.

Une fois encore, Jean-Lou Peupion est particulièrement bien armé avec Minou du Donjon et Major de Brion, prêts à compenser une éventuelle défaillance de Lurabo ce dimanche 27 janvier 1985, jour du 65e Prix d’Amérique.

Le provincial Jealon, récent vainqueur du Grand Prix de la Côte d’Azur, entraîné et mené par Jean Treich, complète le lot des 14 partants avec le numéro 1, en tant que cheval le moins riche du lot, assurant le support du pari tiercé dans cette épreuve.

Paris-Turf a choisi Minou du Donjon et Lutin d’Isigny, puis Major de Brion, Mon Tourbillon, avant Lurabo, Malouin, Landoas et Lapito.

Ce Prix d’Amérique 1985 semble assez ouvert, vu la forme incertaine des deux plus titrés, Lurabo et Lutin d’Isigny.

Ainsi Major de Brion a remporté le Prix de Bretagne, le Prix du Bourbonnais et aussi la Clôture du Grand National du Trot. Khali de Vrie a gagné le Prix de Bourgogne devant Landoas. Enfin, Minou du Donjon et Mon Tourbillon, bien que pénalisés de 25 mètres, se sont partagé la première place dans le Prix de Belgique. A chacun de faire son choix.

Ce Prix d’Amérique 1985 nous permet de revoir Eléazar et Hymour en tête du défilé.

Lurabo a pris le train à sa charge pour mener tête et corde comme lors de sa victoire de l’an dernier. Mais, sentant le danger, Lutin d’Isigny est venu rapidement se placer à ses côtés. Jouant les perturbateurs, Lapito à son tour se mêle à la lutte.

Minou du Donjon est derrière eux avec Landoas et Lapito, qui ne vont pas tarder à attaquer, alors que Malouin, parti à la faute, est éliminé dès le départ.

Dès l’entrée de la descente, Lapito se place au niveau de Lurabo et de Lutin d’Isigny. Tous les trois précèdent Major de Brion, Khali de Vrie et Landoas. Ils sont sur le pied de 1’14’’. Dans le haut de la montée, alors qu’il est bien placé, Landoas se met à la faute, bientôt imité de Lapito. Avant d’aborder le dernier virage, Lutin d’Isigny lui a été repris, ce qui surprend Landoas, et le pousse à nouveau à la faute.

Lutin d’Isigny revient assez tôt au côté de Lurabo. Vite remis dans les bonnes allures, au contraire de Landoas, qui est disqualifié, Lapito a lui aussi regagné la tête.

Minou du Donjon, depuis le milieu de la montée, trotte l’encolure de travers, comme s’il refusait d’avancer. Khali de Vrie est à ses côtés, progressant en bonne place. Ils précèdent Major de Brion, Karengada et Mon Tourbillon, qui semble attendre l’instant propice pour placer sa pointe de vitesse. Karengada donne son maximum et ne mollit pas. Jean-Pierre Viel décide de reprendre Mon Tourbillon, puis de contourner le peloton.

Dans le dernier tournant, Lurabo, toujours aussi allant, fait vraiment illusion pour la victoire. On se remet à y croire. Mais il n’est pas à 100 % de ses moyens, contrairement à l’an dernier. Tout va changer au moment où Lutin d’Isigny passe à la vitesse supérieure. Il attaque à deux cents mètres du but, irrésistible, impérial, en vrai champion du monde.

Lurabo reste sans réaction, perdant ainsi la première, la deuxième, la troisième et même la quatrième place au profit de Major de Brion.

Le suspense est causé tout à la fin par l’ultime attaque extraordinaire mais trop tardive de Mon Tourbillon. Par contre, Michel Roussel a toutes les peines du monde avec Minou du Donjon, qui refuse de lutter, et laisse ainsi le cheval d’Albert Viel lui ravir la deuxième place juste sur le fil. Major de Brion se classe bon quatrième devant Lurabo, Lapito, Karengada, Khali de Vrie, Marco Bonheur, Brandy Hanover, Jealon, Lory.

Lutin d’Isigny lui s’est envolé pour remporter tout seul, loin des autres, une magnifique victoire, qu’il signe sur le pied de 1’17’’8. Mon Tourbillon, finissant comme une torpille, est donc deuxième en 1’18’’, Minou du Donjon, toujours fâché, perd sur le fil le premier accessit, pour se retrouver troisième en 1’18’’ également.

Major de Brion est un bon quatrième en 1’18’’2, Lurabo, un héroïque cinquième en 1’18’’3, Lapito sixième en 1’18’’4, Karengada septième en 1’18’’5.

 

On attend maintenant avec impatience la revanche dans le Prix de France, le dimanche suivant, avec un nouveau duel Lurabo – Lutin d’Isigny, mais un Lurabo à son apogée.

Ce Prix de France (2 100 m) s’annonce dès plus passionnant, car il a attiré la candidature d’un trotteur danois particulièrement véloce, Game Hogh, le record horse d’Europe en 1’13’’.

C’est alors que Lutin d’Isigny est déclaré forfait sur le champ pour cause de « coup de sang ». Ce qui ne manque pas de surprendre tous ceux qui l’attendaient au tournant.

 

Lutin d’Isigny effectue une rentrée victorieuse dans le Grand Prix du Sud-Ouest (2 475 mètres) à Agen, qu’il remporte en 1’16’’1, devant Solo Hagen, Opprimé, Marquis de Cozes, Norguson, Major de Brion et sept autres chevaux. Mais Khali de Vrie a été disqualifiée alors qu’elle faisait figure de gagnante. Micado C est également éliminé sur une faute.

 

Ellizar Hanover prive Lutin d’Isigny (le favori) de la victoire dans le Grand Prix de Bavière (2 100 m) à Munich, le 12 mai 1985, en battant en 1’13’’9 le record de l’épreuve et le record de la piste que détenaient Idéal du Gazeau et Singing Clöving, pour l’emporter devant le fils de Firstly (1’14’’), Lapito, Pay Me Quick, Micado C, Mickey Viking…

 

Le jeudi 20 juin 1985, Ogorek affronte Lutin d’Isigny dans sa course de prédilection, le Prix René Ballière (Championnat Européen (2 100 m), avec départ à l’autostart.

Pour l’aider dans sa tâche, le brillant 5 ans de Monsieur Jean Pachoud peut compter sur Nodesso et Major de Brion, ses compagnons d’entraînement, tous deux en regain de forme. Néric Barbès, récent tombeur d’Ogorek en nocturne, et Noble Atout, le dernier vainqueur du Critérium des 5 ans, sont aussi parmi les chevaux les plus en vue, avec la fantasque Khali de Vrie, et la partie promet d’être belle.

Avec sa victoire dans le Grand Prix d’Oslo, en Norvège, Ogorek a déjà franchi un cap, mais il ne doit pas en rester là.

Lutin d’Isigny remporta cette épreuve pour la première fois à cinq ans, en 1982, l’année où il battait un certain Idéal du Gazeau, troisième malheureux derrière Kimberland.

L’année suivante, il était deuxième d’Ianthin devant le même Idéal du Gazeau, et, en 1984, il s’imposait à nouveau, en précédant Mon Tourbillon, son grand rival, et Joli Quito. Tout porte à croire qu’il sera encore redoutable cette année malgré des bruits inquiétants à propos d’une blessure survenue pendant un heat d’échauffement à Copenhague, qui l’a obligé à déclarer forfait dans l’épreuve du Danemark, la Coupe de Copenhague (2 011 m), remportée par Minou du Donjon.

Lutin d’Isigny est toutefois le favori avec les trois « Peupion ». Mais en réalité, il n’est pas en état de courir, ce qui vaudra une amende à son entraîneur.

Dans ces conditions, Ogorek en profite pour s’imposer à nouveau, d’autant que sa victoire est facilitée par la faute de Khali de Vrie alors qu’elle était en tête, à cinquante mètres du but, un peu comme dans le Grand Prix du Sud-Ouest.

Le succès des trois « Peupion » est total puisqu’ils prennent les trois premières places, Major de Brion, précédant Nodesso. Néric Barbès se classe quatrième devant Nevers, Mickey Viking, Lutin d’Isigny (seulement septième), Micado C, alors que Noble Atout à la faute a été disqualifié en voulant suivre Khali de Vrie.

Crédité de 1’14’’4, Ogorek réalise le troisième meilleur temps de l’épreuve.

 

En empêchant Meadow Road et Mon Tourbillon de courir le Championnat du Monde, les dirigeants de Roosevelt Raceway font un cadeau en or à Lutin d’Isigny, lui offrant en quelque sorte son deuxième titre de champion du monde sur un plateau.

Le cheval de Maurice Cornière, revenu à son meilleur niveau, sur une piste qu’il apprécie particulièrement ne doit pas laisser passer cette occasion de réitérer son succès de l’an dernier. The Onion ayant montré ses limites cette année, il n’a pratiquement que le meilleur trotteur d’âge américain, Sandy Bowl – qui s’est d’ailleurs qualifié en s’imposant dans l’American Trotting Championship la semaine précédente – à battre, un Sandy Bowl que Meadow Road a ridiculisé à Meadowlands.

Le Roosevelt International (2 011 m) se dispute donc en nocturne le samedi 27 juillet 1985 et a retenu huit candidats, dont le tenant du titre, Lutin d’Isigny (France, numéro 1), Sandy Bowl (USA, numéro 2), la pouliche la plus rapide du monde, Fancy Crown (USA, numéro 3), General D Brook (Canada, numéro 4), Bion di Iesolo (Italie, numéro 5), Ogorek (France, numéro 6), The Onion (Suède, numéro 7), Viroid (Suède, numéro 8).

Mon Tourbillon étant interdit de séjour à Roosevelt, il a donc été remplacé hardiment par le jeune Ogorek (5 ans), qui a déjà fait ses preuves hors de nos frontières, au contraire de son grand rival Ourasi.

Non sans chauvinisme, les Américains ont fait de Sandy Bowl le premier favori à 1/1. Lutin d’Isigny est le second favori à 3/1. Ogorek est à 8/1. Il va remarquablement tenir son rôle. Mais Lutin d’Isigny se montre irrésistible pour l’emporter en 1’15’’1, devant Sandy Bowl, Ogorek, Fancy Crown, Viroid, The Onion, le trotteur canadien General D Brook, et le cheval italien Bion di Iesolo.

Lutin d’Isigny est donc champion du monde pour la deuxième fois consécutive.

 

Il remet courageusement son prestige en jeu dans la revanche, la Challenge Cup (2 011 mètres), disputée dans la nuit du samedi suivant, qu’il remporte en 1’15’’9, à nouveau devant Sandy Bowl, que suivent Sea Chanty, Viroid, Sandy Casey, Bion di Iesolo et Ogorek.

Lutin d’Isigny est ainsi le seul trotteur dans l’histoire à s’octroyer deux fois de suite le doublé Championnat du MondeChallenge Cup !

Lutin d’Isigny au haras des Cruchettes

Lutin d’Isigny au haras des Cruchettes

Lutin d'Isigny remporte le Prix d'Amérique 1985, devant Mon Tourbillon et Minou du Donjon

Lutin d'Isigny remporte le Prix d'Amérique 1985, devant Mon Tourbillon et Minou du Donjon

Sandy Bowl

Sandy Bowl

Fancy Crown et Bill O'Donnell

Fancy Crown et Bill O'Donnell

Lutin d'Isigny à Roosevelt Raceway en 1985

Lutin d'Isigny à Roosevelt Raceway en 1985

Landoas

Landoas

Lapito

Lapito

Major de Brion

Major de Brion

Ogorek

Ogorek

Le Prix de Bourgogne (2 100 m), qui marque la rentrée de Lutin d’Isigny, Mon Tourbillon et Minou du Donjon à Vincennes, le samedi 28 décembre, est remporté par Noble Atout, en 1’16’’, devant Néric Barbès, Major de Brion, Khali de Vrie, Lutin d’Isigny, Mon Tourbillon, Larabello, Kutara, Lurabo, Minou du Donjon, Miss Cléville.

 

Il manque encore 30 000 F à Lurabo pour participer au prochain Prix d’Amérique, le dimanche 27 janvier 1986, et malgré l’état magnifique dans lequel il se présente, sa tâche ne va pas être facile dans le Prix de Belgique (2 650 m) le dimanche 15 janvier, avec 25 mètres de handicap en raison de ses gains élevés, ceux qu’il a gagnés au temps de sa gloire. Et pourtant ce Prix de Belgique est pour lui la dernière chance de se qualifier en vue de participer à l’épreuve reine le dernier dimanche de janvier.

Ils sont dix-huit au départ, les sept plus riches Khali de Vrie, Lapito, Lurabo, Lutin d’Isigny, Mon Tourbillon, Ogorek et Ourasi ayant 25 mètres à rendre à leurs onze adversaires du premier poteau, parmi lesquels Major de Brion, Néric Barbès, Nodesso et l’américain Georgio D semblent les plus dangereux.

Noble Atout, brillant vainqueur du Prix de Bourgogne, et Minou du Donjon, bon troisième de cette épreuve derrière Mon Tourbillon, ont fait l’impasse.

Ourasi, Lutin d’Isigny, Mon Tourbillon, Lurabo, Ogorek et Néric Barbès sont dans cet ordre les préférés de la presse et aussi des turfistes.

Ourasi va confirmer de brillante manière sa suprématie dans cette épreuve, alors que Lutin d’Isigny brûlera ses dernières cartouches en lui donnant une belle réplique.

Miss Cléville est partie très vite avec Keystone Patton et Ludo du Chignon, alors que Lutin d’Isigny et Lurabo démarrent vite aussi au second échelon.

Au début de la montée, Miss Cléville et Georgio D sont rejoints par Lurabo, mais il se trompe dans ses allures et est aussitôt repris.

Dans le dernier tournant, Lutin d’Isigny prend l’avantage pour mener devant Georgio D, Ourasi, Ludo du Chignon, Miss Cléville, Lurabo, bientôt à la faute, puis reculant, gênant ainsi Major de Brion, qui à son tour provoque un accrochage entre deux autres chevaux, Mon Ouiton et Néric Barbès.

La chute est alors inévitable pour ces deux trotteurs comme pour leurs pilotes, Bernard Oger et Jean-Luc Bigeon, qui finalement se relèvent avec plus de peur que de mal.

Le trotteur américain Georgio D aborde en tête la ligne d’arrivée, bientôt dépassé par Lutin d’Isigny, puis par Ourasi, qui va très vite à l’extérieur, se montrant vraiment irrésistible dans les deux cents derniers mètres, et l’emportant avec une nette supériorité sur Lutin d’Isigny, pourtant bon deuxième devant l’inattendu Ludo du Chignon, Ogorek, revenu bien finir, Georgio D, Miss Cléville.

Ourasi signe cette nouvelle victoire, la plus éclatante de toutes, sur le pied de 1’17’’8, Lutin d’Isigny fait afficher 1’17’’9, Ludo du Chignon 1’18’’6, Ogorek 1’18’’1, l'américain Georgio D 1’18’’8, Miss Cléville 1’19’’3.

La course s’achève en drame pour Lurabo, son entourage et ses nombreux supporters, mais en triomphe pour la nouvelle star Ourasi, ses propriétaires comblés, Jean-René Gougeon, Philippe Renouf, et tous les fans ralliés à sa cause. Lurabo est donc éliminé du Prix d’Amérique, dont Ourasi devient le grandissime favori.

Beaucoup de spectateurs (ils étaient nombreux en ce dimanche à Vincennes) sont partagés entre la joie et la tristesse, l’admiration et la résignation. Adieu Lurabo, bonjour Ourasi !

D’autres, et ils sont nombreux, s’empressent d’associer Lutin d’Isigny au triomphe d’Ourasi. Et les turfistes « matelassiers », de se préparer déjà à matraquer sur ce fatal jumelé gagnant : « Ourasi – Lutin d’Isigny » pour le Prix d’Amérique à venir dans quinze jours.

 

En fait, Lutin d’Isigny va décevoir dans le Prix d’Amérique, le Prix de France, tous deux brillamment remportés par Ourasi, et finalement le Prix de Paris.

Du coup, imitant Lurabo, Lutin d’Isigny va lui aussi prendre le chemin du haras au printemps prochain ; peut-être défendra-t-il son titre de « Champion du Monde », mais rien n’est moins sûr, le « champion écolo » (comme Idéal du Gazeau), qui lui aussi aimait regonfler ses batteries dans les bains de mer, semble renoncer à la compétition, du moins provisoirement.

 

Après sa saison de monte, Lutin d’Isigny fait sa rentrée aux Sables-d’Olonne dans le Prix des Sables-d’Olonne (2 775 m), le mercredi 9 juillet. Il semble alors bien parti pour un nouveau « mondial » après sa victoire devant Navigo, et des chevaux régionaux aux noms moins prestigieux. Pourtant ce sera sa dernière victoire.

Il se retire définitivement, riche de 11 116 001 F, mais laisse un souvenir impérissable dans le cœur de ses nombreux admirateurs.

 

Lutin d’Isigny est le père de Vrai Lutin et de Général du Lupin, un hongre alezan qui fera jeu égal avec Général du Pommeau et Insert Gédé chaque fois qu’il en aura l’occasion.

 

Lutin d’Isigny est mort au haras des Cruchettes en septembre 2004.

Lutin d’Isigny au haras des Cruchettes, là où il engendra Vrai Lutin, Général du Lupin, là où il mourut en septembre 2004

Lutin d’Isigny au haras des Cruchettes, là où il engendra Vrai Lutin, Général du Lupin, là où il mourut en septembre 2004

Lutin d'Isigny Roosevelt International Trot 1984

Roosevelt International Trot 1985

Prix d'Amérique 1985

Mon Tourbillon et Jean-Pierre Viel

Mon Tourbillon et Jean-Pierre Viel

Mon Tourbillon, par Amyot et Tornade IV, un roi de la vitesse, deux fois vainqueur du Prix de France, dont une fois à cinq ans, deux fois deuxième du Prix d’Amérique, également vainqueur du Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur, du Prix de l’Atlantique à deux reprises, jugé quasi-invincible sur l’hippodrome d’Enghien.

Mon Tourbillon, par Amyot et Tornade IV, un roi de la vitesse, deux fois vainqueur du Prix de France, dont une fois à cinq ans, deux fois deuxième du Prix d’Amérique, également vainqueur du Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur, du Prix de l’Atlantique à deux reprises, jugé quasi-invincible sur l’hippodrome d’Enghien.

Mon Tourbillon

 

Mon Tourbillon passe pour le champion de sa génération, avec Minou du Donjon. Or, il n’a gagné ni le Critérium des 3 ans (il y fut battu par Moktar), ni le Critérium des 4 ans (il était deuxième de Marco Bonheur), ni le Critérium des 5 ans. (Et Minou du Donjon non plus).

Mon Tourbillon a gagné cependant le Critérium Continental.

Ses compagnons d’écurie, Moktar et Marco Bonheur le précédèrent à l’arrivée de ces deux premiers classiques de la génération, et Mon Ouiton, qu’on attendait plutôt dans le Critérium des 4 ans, s’imposa dans celui des 5 ans.

 

Mon Tourbillon est un magnifique cheval bai, bâti pour le sprint avec une avant-main impressionnante de puissance et un très large poitrail. C’est aussi un cabotin ; il est beau et il le sait. Mais Minou du Donjon pour cela n’a rien à lui envier, étant lui-même un splendide alezan, avec une large liste en tête et un toupet blond platine de « dandy » très caractéristique. En dépit de ses échecs dans les grands Critériums, Mon Tourbillon est sans doute le meilleur cheval qu’ait possédé Albert Viel, le plus apte à gagner le Prix d’Amérique, qui lui échappe pourtant à cinq reprises. Mais il s’y classe deux fois deuxième ; deuxième de Lutin d’Isigny en 1985, deuxième d’Ourasi en 1986. Il se rattrape avec le Prix de France, qu’il gagne à deux reprises, dont la première fois à cinq ans. Il se révèle aussi pratiquement imbattable à Enghien, sauf face à Ourasi, gagnant notamment deux fois le Prix de l’Atlantique. Bien sûr, en tant que roi de la vitesse, il se devait d’inscrire à son palmarès au moins une fois le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur couru à Cagnes-sur-Mer.

 

Le Prix de France (2 100 m), dimanche 7 février 1983, permet au jeune Mon Tourbillon, redoutable sur cette distance, de s’imposer en 1’17’’, devant Lançon, Ianthin, Idéal du Gazeau, Katinka, Snack Bar, Super Male, Lutin d’Isigny, Keystone Patriot…

 

Le classique Prix de Sélection (2 275 m) est une course-poursuite, dans laquelle les « 5 ans », Mon Tourbillon, Minou du Donjon, et les « 6 ans », Lurabo, Lapito, Lutin d’Isigny et Lançon ont 50 mètres à rendre aux « 4 ans » Nursingo et Nuit d’Azeray. Alors que Lurabo, à la faute, est disqualifié, Mon Tourbillon s’impose de justesse, en 1’16’’3, devant Lutin d’Isigny (1’16’’4), Minou du Donjon (1’16’’5), Lançon (1’16’’6)…

 

Le Prix de l’Atlantique (2 150 m) d’Enghien voit triompher Mon Tourbillon en 1’19’’1, devant Lutin d’Isigny, Keystone Patriot, King Black, Katinka, Lançon, Ianthin…

 

Le 24 août à Vincennes, Ejnar Vogt s’impose en 1’17’’5 dans le Prix Jockey (2 250 m), devant nos deux meilleurs « 5 ans », Mon Tourbillon et Minou du Donjon.

 

Le Critérium des 5 ans (3 000 mètres) disputé le samedi 3 septembre 1983 à Vincennes s’annonce comme un duel au sommet entre Mon Tourbillon et Minou du Donjon, nos deux meilleurs « M », et l’on se demande si cette longue distance n’avantagera pas le second nommé. Mais c’est Mon Ouiton, que l’on attendait plutôt dans le Critérium des 4 ans, qui s’impose en 1’20’’2, devant Madone, Mon Tourbillon, alors que Minou du Donjon est disqualifié sur une longue incartade, au moment où il luttait pour la victoire à cinquante mètres du but.

 

Minou du Donjon prend cependant une éclatante revanche le samedi suivant dans le Prix de l’Etoile (2 275 mètres), qu’il remporte en 1’16’’8, très loin devant Mon Tourbillon (1’17’’1), Mon Ouiton (1’17’’7), le jeune Orco (avantagé de 50 mètres), comme O Sole Mio (5e), et Orcade de Bellouet (7e).

 

Le Prix Marcel Laurent (2 250 m), servant également de préparation au prochain Prix d’Amérique, a retenu la participation de quelques-uns des meilleurs « 5 ans », dont les favoris Minou du Donjon et Mon Tourbillon. Mieux parti que son grand rival Mon Tourbillon, Minou du Donjon va rapidement prendre le commandement des opérations pour imposer son rythme et l’emporter sûrement en 1’17’’. La surprise vient de la deuxième place prise par Marybée, alors que Mon Tourbillon, après avoir longtemps attendu, a bien fini pour s’octroyer la troisième, devant le bon Major de Brion, Moktar, Madone.

 

Dans le Prix de Bourgogne, troisième épreuve préparatoire au Prix d’Amérique, Mon Tourbillon ne peut contester la supériorité du grandissime favori, Lurabo, et doit se contenter d’une troisième place derrière un Larabello particulièrement tenace et motivé, car il a besoin d’argent pour pouvoir courir le grand international du dernier dimanche de janvier.

 

Dans le Prix d’Amérique (2 650 m), le 29 janvier 1984, que Lurabo remporte en 1’17’’, à seulement un dixième du record, devant un Jorky particulièrement combatif, Mon Tourbillon se fait souffler à la fin la troisième place par l’inattendue Kémilla.

 

Lurabo remporte aussi le Prix de France 1984 dans la réduction incroyable de 1’13’’7 !

Minou du Donjon (deuxième) et Mon Tourbillon (troisième) sont les plus aptes à poursuivre Lurabo dans la ligne d’arrivée, s’octroyant ainsi les places d’honneur, loin derrière le vainqueur inapprochable, mais devant l’audacieux Micado C, que suivent les courageux Lutin d’Isigny et Jorky (accidenté), devant Snack Bar, Casino Hedevang, Diamond Exchange, le suédois Speedy Magnus.

 

Lutin d’Isigny retrouve tous ses grands moyens le dimanche 12 février 1984, pour remporter le Prix de Paris (3 150 m), dans le temps record de 1’17’’6, devant Mon Tourbillon (1’17’’7), Ejnar Vogt (1’17’’7), Kaiser Trot (1’18’’1), Lançon (1’18’’2), Karengada (1’18’’4), Snack Bar (1’18’’4), Le Loir et Marybée. A noter, l’accrochage entre Minou du Donjon et Kémilla.

 

Mon Tourbillon lui aussi renoue avec la victoire en fin de meeting, grâce au classique Prix de Sélection (2 275 m), le lundi 20 février, dans lequel il partage avec Minou du Donjon la redoutable tâche de rendre 50 mètres aux deux meilleurs « 4 ans » du moment, Ourasi et Orco. Ourasi, vainqueur du Critérium des Jeunes devant Orco, et Orco, vainqueur du Critérium des 3 ans devant Ourasi. Mon Tourbillon triomphe tout en battant aussi un record sur la distance en faisant afficher un fantastique 1’15’’. Minou du Donjon est deuxième en 1’15’’3, devant Monquier 1’15’’3, Ourasi 1’17’’2, Orco 1’17’’4, Maritza de Vrie 1’16’’2.

 

Lurabo, Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon sont à Cagnes-sur-Mer, le dimanche 11 mars 1984 pour le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m), que Lurabo remporte en 1’14’’5, devant Lutin d’Isigny 1’14’’7, Mon Tourbillon 1’14’’8…

 

Le samedi 31 mars 1984, le tiercé se dispute à Enghien dans le fameux Prix de l’Atlantique (2 150 m), avec Lurabo, Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon, nos trois meilleurs trotteurs. Lurabo à la faute semble avoir perdu toutes ses chances. « Minou » Gougeon doit l’arrêter et le relancer, alors que le peloton est déjà loin. Mais le favori revient courageusement se mêler à la lutte et attaquer Mon Tourbillon en tête. Mon Tourbillon est finalement deuxième à une encolure de Lurabo, et Lutin d’Isigny troisième à une tête du cheval d’Albert Viel.

 

Le Grand Prix du Sud-Ouest (2 200 m), troisième épreuve du Grand Circuit, se dispute le dimanche 29 avril 1984, avec Lurabo, promu favori, qui l’emporte finalement en 1’16’’3, frôlant ainsi le record. Derrière Lutin d’Isigny, mais à bonne distance, Mon Tourbillon doit se contenter de la troisième place en 1’17’’2.

 

Le dimanche 13 mai 1984, Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon tentent leur chance en Allemagne, à Munich, dans le Grand Prix de Bavière (2 100 mètres), face à Spice Island, le tenant du titre. Mon Tourbillon fait illusion pour la victoire, mais ne peut résister au rush final d’Evita Broline, déjà deuxième de The Onion à Naples, qui s’impose en 1’16’’1, devant Mon Tourbillon 1’16’’2. Micado C est troisième à distance, devant Lutin d’Isigny.

 

En Suède, à Solvalla, près de Stockholm, le dimanche 27 mai 1984, on retrouve Lutin d’Isigny et Mon Tourbillon au départ du Prix de l’Elite Internationale (1 609 m), le fameux Elitloppet disputé en deux batteries de qualification, une finale et une épreuve de consolation.

Mon Tourbillon est battu d’un rien par Marcon Lep dans la première batterie, et Lutin d’Isigny échoue de peu contre The Onion dans la seconde. Mon Tourbillon a pourtant trotté aussi vite que le gagnant, portant ainsi son record à 1’12’’3, alors que Lutin d’Isigny, lui aussi deuxième, établit le sien en 1’13’’ dans la seconde. Mais The Onion se montre impérial dans la finale, s’imposant de loin, dans le temps record de 1’12’’2, devant Evita Broline (1’12’’4), Marcon Lep (1’12’’5), Mon Tourbillon (1’12’’6), Lutin d’Isigny (1’13’’1)…

 

Lutin d’Isigny s’impose à nouveau dans le Prix René Ballière (2 100 mètres), sur le pied de 1’14’’3, très nettement devant Mon Tourbillon (1’14’’6), Joli Quito (1’14’’7), Major de Brion (1’14’’9), Solo Hagen (1’15’’2), Khali de Vrie (1’15’’4), Luga, Hickory Almahurst.

Lutin d’Isigny a trotté presque aussi vite qu’Ianthin (1’14’’2) en 1983.

 

Mais Mon Tourbillon ne peut rester sur une défaite. C’est sans doute pourquoi il s’en va gagner le Grand Prix des Pays-Bas (2 600 m) à La Haye, battant en 1’16’’5 le record établi par Snack Bar en 1’16’’8 un an plus tôt, pour s’imposer devant Solo Hagen, Lapito, Khali de Vrie, Udo Quick, Uno Hazelaar, Joli Quito, dont on attendait mieux.

 

Le dimanche 13 janvier 1985, à l’issue du Prix de Belgique (2 600 m) la photo-finish ne parvient pas à départager Minou du Donjon et Mon Tourbillon, qui malgré leurs 25 mètres de handicap s’imposent tous deux dans un spectaculaire et inoubliable dead-heat ! C’est Major de Brion, qui prend la troisième place devant Malouin et Lutin d’Isigny.

 

Malgré une fin de course époustouflante, Mon Tourbillon, parti bien trop tard, ne parvient pas à rejoindre Lutin d’Isigny à l’arrivée du Prix d’Amérique (2 650 mètres), le dimanche 27 janvier 1985. Mais il souffle la deuxième place à Minou du Donjon juste sur le fil.

 

Mon Tourbillon profite du forfait de Lutin d’Isigny, des disqualifications de Lurabo et de Game Hogh, pour remporter son deuxième Prix de France (2 100 m), en 1’14’’7, devant Major de Brion, Néric Barbès, Ludo du Chignon, Khali de Vrie, Micado C.

 

The Onion, le champion suédois est comme prévu à Cagnes-sur-Mer le dimanche 17 mars 1985 pour le Grand Critérium de Vitesse de la Côte d’Azur (1 609 m), ce qui n’empêche pas Mon Tourbillon de l’emporter en 1’15’’, devant Lutin d’Isigny, Minou du Donjon, Mickey Viking, The Onion seulement cinquième après avoir mené…

 

Sur sa lancée, Mon Tourbillon s’octroie aussi le Prix de l’Atlantique (2 100 m) à Enghien, son deuxième, loin devant un méritoire Ogorek, lui-même détaché de Minou du Donjon, Lapito, Casting. Mon Tourbillon a trotté sur le pied de 1’15’’2.

 

Peu après, le lundi 27 mai 1985, lundi de Pentecôte, Meadow Road s’octroie un triomphe historique dans l’Elitloppet (Grand Prix de l’Elite Internationale (1 609 m) sur l’hippodrome de Solvalla, à Stockholm, qui permet également à Mon Tourbillon et à Minou du Donjon d’accomplir des exploits, qui vont marquer cette journée inoubliable.

La piste de Solvalla a été tout spécialement rénovée et s’annonce plus que jamais propice à la vitesse. C’est pourquoi on s’attend à une chute vertigineuse des records.

Première éliminatoire, premier coup de tonnerre ! Trottant sur le pied de 1’11’’9, pour s’imposer devant Micado C, Viroid, The Onion, Mon Tourbillon bat le record du monde de la distance (1 609 m) sur piste de 1 000 mètres.

Mais son record ne va tenir qu’une demi-heure. Trente minutes plus tard, Minou du Donjon, trottant sur le pied de 1’11’’5, bat le record de Mon Tourbillon, pour s’imposer à son tour, devant Brandy Hanover, Rosalind’s Guy et le favori Meadow Road, l’un des animateurs de la course, qui se qualifie de justesse. Mais, dans la finale, les deux champions français, sans doute fatigués par leurs exploits, s’écroulent tour à tour, et laisse Meadow Road s’imposer impérial dans le temps remarquable de 1’11’’6, nouveau record de l’épreuve, devant Rosalind’s Guy, Brandy Hanover, Mon Tourbillon, Viroid, The Onion.

 

Minou du Donjon va prendre sa revanche dans la Coupe de Copenhague (2 011 mètres), qu’il remporte en 1’14’’, devant Ellizar H, Rosalind’s Guy, Quick Trip, Matiné, Wholly Arnie…

 

Forts de leurs exploits scandinaves, Mon Tourbillon et Minou du Donjon vont tenter leur chance face à Meadow Road, dans la première épreuve du The Statue of Liberty (Mile and Half) Trot (2 413 m) à Meadowlands, aux Etats-Unis. Cette épreuve a retenu douze trotteurs connus pour leur grande vélocité. Mais cette fois, Meadow Road, intraitable, gagne avec désinvolture, dans le temps excellent de 1’13’’6, devant un courageux Mon Tourbillon, le tout bon Toyota Moulin, Sandy Bowl (meilleur trotteur d’âge américain), Rosalind’s Guy, Scotch Notch, Garland Lobell, Minou du Donjon, Ellizar H…

La seconde épreuve du The Statue of Liberty Trot, disputée sur le « mile » (1 609 m), est prévue le lundi suivant. Confirmant sa place parmi les trotteurs de légende, Meadow Road s’impose en 1’11’’, devant Sandy Bowl, Mon Tourbillon, Scotch Notch, Babe Kosmos, Rosalind’s Guy… En digne petit-fils de Nevele Pride, il a établi le nouveau record de la piste de Meadowlands et approché de 6 dixièmes le record du monde sur la distance. Au classement général du The Statue of Liberty Trot, Meadow Road prend bien sûr la première place, devant Mon Tourbillon et Sandy Bowl. Mon Tourbillon a donc bien tenu son rôle.

 

Mon Tourbillon, le roi du sprint, le champion de l’écurie Viel, tout au long de l’année 1986, va rencontrer en Ourasi un adversaire insurmontable, l’obligeant désormais à se contenter des deuxièmes places ; ainsi il sera le brillant dauphin d’Ourasi dans le Prix d’Amérique (2 650 m), le Prix de France (2 100 m), le Grand Critérium de Vitesse de Cagnes (1 609 m), le Prix de l’Atlantique (2 100 m), le Prix René Ballière (2 100 m).

 

Mon Tourbillon a cependant l’honneur de représenter la France à lui seul dans le Championnat du Monde (2 013 m), disputé à New York, la nuit du 23 août 1986.

Les Américains espèrent que la future championne canadienne pour nous, alors américaine pour eux, Grades Singing, gagnante de l’American Trotting Championship, mettra un terme à la domination française sur cette épreuve avec cinq victoires d’affilée (Idéal du Gazeau : 1981, 1982, 1983, et Lutin d’Isigny : 1984 et 1985), mais elle a tiré un mauvais numéro derrière l’autostart (le 8). Les concurrents de ce nouveau Championnat du Monde étant : le norvégien Habib (n° 1), le canadien Robin’s Wonder (n° 2), le suédois Mack the Knife (n° 3), associé à Stig Johansson, l’italien Dorsten (n° 4), le français Mon Tourbillon (n° 5), mené par Jean-Pierre Viel, le danois Junior Lobell (n° 6), le second de l’American Championship Piggvar (n° 7), et Grades Singing (n° 8), confiée au fameux driver canadien Hervé Filion.

Ce Championnat du Monde 1986 est revenu au trotteur norvégien Habib, qui n’a jamais quitté la tête et la corde, pour s’imposer à 8/1, devant Robin’s Wonder, Mack the Knife, Mon Tourbillon, Piggvar, Junior Lobell, Dorsten, alors que la favorite, Grades Singing, très désavantagée par son numéro 8 derrière l’autostart, termine huitième justement.

De toute façon, cette course ne restera pas dans les annales.

 

Sa pointe de vitesse s’étant émoussée avec le temps et à force de courir en vain après Ourasi, Mon Tourbillon devra finalement se contenter d’un rôle de figurant pour sa dernière participation au Prix d’Amérique (2 650 m), le dimanche 25 janvier 1987.

Minou du Donjon

Minou du Donjon

Mon Ouiton

Mon Ouiton

Meadow Road

Meadow Road

Meadow Road remporte l’Elitloppet 1985

Meadow Road remporte l’Elitloppet 1985

Habib

Habib

Vrai Lutin

Vrai Lutin

Général du Lupin, le meilleur fils de Lutin d'Isigny

Général du Lupin, le meilleur fils de Lutin d'Isigny

Tornade IV, la mère de Mon Tourbillon

 

Tornade IV, la mère de Mon Tourbillon, ne fit pas beaucoup parler d'elle sur les pistes, malgré quelques victoires en province et à Vincennes, mais elle se rattrapa au Haras. Cette descendante du grand Passeport, petite-fille de Rosa Bonheur, est en effet la mère de plusieurs champions, dont Feinte, la gagnante du Critérium des 5 ans, La Bourrasque, qui gagna le Prix de Sélection 1982, Mon Tourbillon, (le plus fameux, deux fois deuxième du Prix d'Amérique, deux fois vainqueur du Prix de France, dont une fois à 5 ans, et seul trotteur dans l'histoire à avoir gagné deux Prix de Sélection en rendant 50 mètres), Rafale, qui comme Mon Tourbillon, comme La Bourrasque, a un nom évoquant celui de sa mère. Tornade IV était née en 1963, dans le Calvados, chez Monsieur André Essartial. Sa mère, Katia Bonheur était une fille de Cyrano II et de Rosa Bonheur, et une petite-fille du fameux Passeport, que Paul Viel avait mené à la victoire dans le Prix d'Amérique en 1923. Elle fut souvent saillie par l'étalon Chabrier, que Paul Viel avait élevé, et avec lequel elle engendra Tornade IV. Présentée au fameux Kerjacques, Tornade IV engendra Feinte, qui gagna le Prix Ariste Hémard, le Critérium des 5 ans (déjà cité) et le Prix Doynel de Saint-Quentin. Elle fut aussi troisième du Critérium des 4 ans, derrière Fakir du Vivier et Féroé, et deuxième du Critérium Continental, derrière le même Fakir du Vivier, mais devant Féroé, cette fois. Elle fit beaucoup parler d'elle en gagnant le Critérium des 5 ans, devant Feu Violet et Feu Vert, mais aussi le champion Fakir du Vivier, qui souffrait de déshydratation.

Tornade IV quant à elle s'éteignit en 1984, au Haras de Canteloup, à l'âge de 21 ans.

 

Feinte, la fille de Kerjacques et de Tornade IV, fit beaucoup parler d'elle quand elle gagna le Critérium des 5 ans, devant Feu Violet, Feu Vert, mais aussi le champion Fakir du Vivier !

Feinte, la fille de Kerjacques et de Tornade IV, fit beaucoup parler d'elle quand elle gagna le Critérium des 5 ans, devant Feu Violet, Feu Vert, mais aussi le champion Fakir du Vivier !

Partager cet article
Repost0

commentaires

C
Une nouvelle fois bravo, pour votre travail, gigantesque, et merci de me permettre de revivre grâce à vos très bons textes, une partie de mon enfance, avec mes toutes premières idoles .... Merci <3
Répondre